Surmortalité carcérale :
Mais d’où peut bien venir le problème ?
Communiqué d' Alternative libertaire – Alsace
19-10-2008
Après le décès, mardi 14 octobre, de l’adolescent qui avait tenté de se suicider jeudi 9 octobre, à la maison d’arrêt de l’Elsau, à Strasbourg, il est temps de s’interroger sur les raisons de cette vague de tentatives de suicide en prison. Un homme de 31 ans et une femme de 29 ans ont tenté de se suicider à la maison d’arrêt de Mulhouse, lundi 13 octobre. Le 6 octobre, c’était à la maison d’arrêt de Metz-Queuleu qu’un autre adolescent de 16 ans avait mis fin à ses jours. Et, le dans la nuit du 16 au 17 octobre, c’est encore un détenu de l’Elsau, à Strasbourg qui s’est suicidé ! Puis le vendredi 17 octobre, c’est un homme de 45 ans qui s’est suicidé à la maison centrale d’Ensisheim. Cela s’arrêtera-t-il ?
Malheureusement, l’administration pénitentiaire et certains syndicats de surveillants se contentent de mettre en cause un « chantage au suicide », sans se demander pourquoi le fait de jouer avec sa vie devient le seul mode d’expression « efficace » en détention…
- Comment ne pas reconnaître la détresse réelle d’hommes et de femmes, parfois très jeunes, incarcéréEs dans des prisons françaises maintes fois reconnues « irrespectueuses de la dignité humaine »(1) ?
- Comment ne pas mettre en rapport cette vague de tentative de suicide avec la surpopulation carcérale qui a battu tous les records cette année (64 250 détenus en juillet dernier pour 50 800 places) ?
- Comment ne pas comprendre que ces gestes correspondent à la perte d’espoirs de détenus qui voient de moins en moins de perspectives de réinsertion à mesure que la justice allonge les peines et que l’on constate que toutes les peines alternatives (bracelets électroniques, semi-libertés, etc.) ne permettent pas d’éviter l’emprisonnement, mais plutôt de punir davantage de personnes encore, en plus de celles incarcérées ?
C’est bien ce « modèle » pénal qu’il faut remettre en cause, avec sa logique qui ne vise qu’à écarter de la société des personnes jugées dangereuses, sans rechercher les causes de la criminalité, sans offrir de perspectives de réinsertion, de but, à des gens qui sont le plus souvent déjà en difficultés dans la société. La nouvelle mesure de « rétention de sûreté » de Sarkozy-Dati accentue encore cette situation, en se permettant de réincarcérer des gens ayant déjà purgé leurs peines. Le retour en prison de Jean Marc Rouillan démontre aussi que la France considère les ex-détenus comme des sous-citoyens, privés de leurs droits, notamment d’expression. Comment dans ces conditions, envisager de se reconstruire, de préparer une nouvelle vie après la prison ?
(1) (1) Récemment encore, voir la décision du tribunal administratif de Rouen en mars 2008 (http://www.prison.eu.org/article.php3?id_article=10691 )