Note à Monsieur Hervé Kempf

du 27 septembre 2000

de la part de Bernard Sarrabezolles

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Votre article ' Vivre en ville avec ces très chères voitures' du 23 septembre dans le Monde m'a un peu surpris , d'autant plus que vous faites référence à des documents publiés du CGPC que je ne possède pas.

C'est à titre personnel que je vous adresse cette note, elle contient quelques réflexions sur votre article. Le CGPC et l'Union routière de France apporteront eux-mêmes les rectifications s'ils les jugent utiles.

Prix d'usage des transports (DAEI)

En 1998, la consommation des ménages en transport est 692 milliards (achat de véhicule 183, utilisation du véhicule 403 et transport en commun 103) soit un total de 586 pour la voiture particulière. Comme ils ont effectué 708 milliards de voyageurs x kilomètres, ils ont dépensé 0,83 franc par kilomètre et par personne.

Avec les transports en commun ils ont effectué 132 milliards de voy x km soit 0,78 franc par kilomètre. C'est un chiffre du même ordre de grandeur que celui d'une voiture particulière.

Mais il existe une différence fondamentale, lorsqu'on prend le métro on ne paie que le tiers du prix de revient alors que lorsqu'on prend sa voiture, le coût d'utilisation comprend une surcharge de 267 milliards de francs (1998 source CCFA sans compter la TVA à 19.6 % alors que la SNCF bénéficie du taux de 5.5 %). Le prix d'usage en est doublé.

En fait le prix de revient de la personne transportée en voiture est ressenti par l'usager comme étant du même ordre de grandeur que celui d'un transport en commun, il est en fait six fois moins cher pour la collectivité qui effectue tout un ensemble de transferts, moyennant des taxes ou des subventions.

Travaux de construction et entretien

En 1999, je note dans le budget le chiffre de 8.5 milliards (entretien 43 % infrastructure 57%) (source Direction des Routes)

Les Sociétés des autoroutes ont consommé 19.6 et les collectivités 4.2. Soit un total de 32.3 milliards. On est très loin des 100 milliards annoncés.

Accidents de la route

En 1999, il y eut 8444 tués sur la route, alors que le gouvernement s'était fixé comme objectif une réduction de moitié des accidents. Et cela coûte cher à la France comme vous l'écrivez.

Or cet objectif est accessible, par la réalisation d'un réseau autoroutier adapté. Aujourd'hui 17 % de la circulation seulement, se fait sur autoroute qui, nous le rappelons , est 5 fois moins dangereuse que le réseau ordinaire.

On devrait considérer comme normal que le réseau autoroutier supporte la moitié du trafic. Dans cette hypothèse, à nombre de déplacements identiques, il y aurait 2319 tués en moins. Si, au lieu de favoriser les 2 roues, on les excluait du domaine public, on réduirait encore un nombre de tués de 1770, sans diminuer sensiblement le nombre de personnes déplacées.

En restant uniquement sur le plan des chiffres et en reprenant votre évaluation de 49.1 milliards, une politique volontariste aurait pu faire économiser la moitié des tués et 24 milliards de francs par an.

La pollution

C'est un problème et il faut la réduire. Des recherches prometteuses se font dans ce domaine et on peut penser que d'ici une dizaine d'année, les véhicules se déplaceront sans bruit et sans pollution.

D'ici là, attribuer les seuls méfaits actuels aux automobilistes, est fortement discutable. En Région parisienne, où il y a une réputation de grande pollution, on vit plus vieux qu'en Bretagne qui bénéficie de l'air du large.

En 1998, il a été consommé 209 millions équivalent pétrole en France (77.7 en pétrole) Les transports participent pour 24.8 % (49.7 en pétrole) dont les voitures particulières pour 15 %. C'est peut être moins médiatique mais les résidences avec leur chauffage, se placent nettement à la première place avec 45.8 %

Le coût du temps perdu

Il est du aux embouteillages qui sont le résultat d'une politique non prévoyante . Un des premiers objectifs, de l'action gouvernementale devrait être d'assurer la fluidité de la circulation. L'estimation du coût du temps perdu, est faite par rapport à une fluidité normale. Dans la situation actuelle, c'est une charge mais pour être objectif, il faudrait mettre en produit le gain de temps par rapport à un substitut qui ne peut être que le transport en commun.

Depuis plusieurs années , on estime ce gain à 15 minutes par déplacement.

Si on retient qu'il y a 125 millions de déplacements mécanisés par jour de moins de 80 kilomètres, que 85 % se font en voiture particulière et qu'il y a 1.6 personnes par véhicule, on peut déduire 125 x 365 x 0,85 /1.6 = 24.3 milliards de déplacements de véhicules par an. Or si l'usager utilise sa voiture plutôt que le transport quotidien, c'est qu'il gagne en moyenne un quart d'heure. Au prix de 74 francs l'heure, on aboutit à une économie de 24.3 x 0.25 x 74 = 449 milliards de francs. Le produit est 10 fois supérieures au coût du temps perdu.

Le bruit

C'est une grande nuisance, et probablement nos ingénieurs ne s'en sont pas suffisamment préoccupé alors qu'il existe de nombreux moyens pour en réduire les effets.. Mettez sur une voie ferrée le nombre de trains voyageurs et marchandises nécessaires pour avoir le même débit qu'une autoroute et vous serez effrayé par le tintamarre que cela génèrera. Aussi le bruit doit être considéré comme lié à la fonction déplacement et il faut tout faire pour le réduire.

Conclusion

Ma conclusion est celle d'un référendum quotidien qui, en 1999, a donné les résultats suivant :

90 % des personnes utilisent la route pour se déplacer. Fer + RATP 8.8 % Air 1.8 %.

On ne peut ignorer ce choix des français, il faut donc réfléchir à une solution apportant des améliorations au système existant.

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J'ajouterais à cette note quelques commentaires qui pourraient servir de base à une politique de transports.

C'est ainsi qu'il est nécessaire d'augmenter le réseau autoroutier en rase campagne et surtout au voisinage des grandes agglomérations de façon à sécuriser normalement au moins la moitié du trafic . On disposerait ainsi d'un système de déplacement fluide , fonctionnant 24 heures sur 24 et ne faisant jamais la grève.

Les itinéraires à forte densité comme l'axe nord-sud de la France doivent être doublés par un réseau qui serait affecté particulièrement aux poids lourds, le ferroutage ne pouvant se justifier économiquement. La vallée du Rhône est sillonnée par trois lignes de chemin de fer et une autoroute. Cette dernière dépasse largement la moitié du trafic total, c'est elle qu'il faut renforcer.

On peut réduire de près de 15000 kilomètres le réseau SNCF, en remplaçant les services correspondant par des services routiers. Le contribuable n'aurait plus ainsi, à verser la dotation au service public.

L'action pour une réduction de la pollution doit se faire sur un changement dans la motorisation (électricité ou hydrogène + oxygène …) mais non pas sur le moyen de déplacement, qui doit rester un libre choix pour l'utilisateur.

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