Histoire du cinéma japonais en France (1951-2001)

Etude

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- Le début des années 1980

Lorsque Goldorak arrive en 1978, il est l'un des premiers dessins animés japonais à avoir été diffusé en France. Antenne 2 a d'acheté ce programme peu onéreux venu du Japon et compte le diffuser pendant les vacances dans Récréa 2 , son émission réservée à la jeunesse. Goldorak devient le sujet principal des cours de récréations, à tel point que la chaîne réalise 100 de parts de marché ! Certes, à cette époque, il n'y a pas beaucoup de concurrence, TF1 étant la seule chaîne rivale au moment où passe Goldorak, mais tout de même, cela signifie que tous les téléspectateurs devant leur poste de télévision regardaient ce dessin animé. Ce formidable succès est accentué par la naissance de tout un merchandising (revues, BD, jouets, …).

Profitant de ce succès, d'autres séries ne tardent pas à arriver. Il s'agit dans premier temps d'autres productions de la société japonaise Tôei Animation : on choisit Candy pour les filles, puis Albator (toujours dans Récréa 2 ), Capitaine Flam (pour TF1 ) ou des séries plus douces comme Rémi , Tom Sawyer , Bouba le petit ourson , etc.…Toutes ces séries viennent en France via la société créée par Bruno-René Huchez , I.D.D.H . Pendant 10 ans, ce sont près de 50 séries et films qui viendront du Japon jusqu'en France par ce distributeur. Pourquoi ce choix ? Les coûts d'achats sont dérisoires (quelques centaines de francs par minutes, contre plusieurs dizaines de milliers de francs pour une production française). La production est de toutes façons insuffisante pour satisfaire la demande de programme, et le succès est là, même s'il provoque de vives réactions chez certains parents. En effet, certains téléspectateurs ont du mal à comprendre l'attrait pour ces dessins animés nippons, eux qui étaient jusque là habitués aux quelques productions américaines Hanna Barbera ou à quelques programmes français très anciens et destinés aux tout petits.

 

Malgré une certaine opposition, les dessins animés continuent d'arriver. En 1982, Antenne 2 rediffuse entièrement Goldorak , après avoir enregistré de nouveaux génériques. Cette nouvelle diffusion relance la série qui connaît presque le même engouement qu'à ses débuts, et permet à une nouvelle génération de découvrir cette série. Puis d'autres futurs classiques arrivent comme Cobra, Signé Cat's eyes ou Lady Oscar .

 

D'autres séries ont vu le jour grâce à des coproductions France Japon: Il était une fois l'homme d'Albert Barillé, Ulysse 31 ou les Merveilleuses Cités d'Or de Jean Chalopin ont également marqué la génération Goldorak . Jusqu'en 1987, I.D.D.H reste le principal fournisseur de dessins animés en France. Mais la télévision va subir de grands changements en 1987 au moment de l'arrivée des chaînes privées.

 

- L'explosion : Le Club Dorothée contre la Cinq .

En 1995, près de 2/3 des 500 heures d'animation diffusée sur l'ensemble des 6 chaînes françaises sont consacrées aux dessins animés japonais, et la plupart sont rediffusées au moins une fois. En 1987, plusieurs évènements vont complètement révolutionner le paysage audiovisuel français.

La chaîne TF1 est privatisée. Dorothée, animatrice jeunesse, quitte Antenne 2 pour TF1 : C'est ainsi que naît le Club Dorothée , entièrement produit par AB Productions , dirigé par Jean Luc Azoulay. Celui-ci part au Japon où il achète un grand nombre de dessins animés.

 

Viennent ensuite les nouvelles chaînes privées : La Cinq , qui existait depuis deux ans, change d'actionnaires et commence à retravailler ses programmes, à se faire connaître, et surtout à diffuser des dessins animés.

Pendant 5 ans, c'est un véritable raz de marée de séries nippones qui arrivent en France avec une pointe en 1988 où rien qu'en septembre, 30 séries nous sont proposées entre TF1 et La Cinq . Chacune a trouvé ses marques : Tandis que La Cinq s'adresse plutôt aux filles en privilégiant les histoires tirées de romans (Sous le signe des Mousquetaires librement inspiré des Trois Mousquetaires d'Alexandre Dumas, Les Quatre filles du Docteur March ….), de sport ou de magical girls, TF1 lance des séries plus percutantes comme Dragon Ball , Les chevaliers du Zodiaque dès avril 1988, puis Ken le Survivant, Nicky Larson, Ranma 1/2 ….

 

En septembre 1991, La Cinq propose sa dernière rentrée et connaît quelques réussites avec Pinocchio, Samouraï Pizza Cats (qui proviennent de chez Saban), Nadia et Théo (fond de stock provenant du catalogue Berlusconi), et quelques séries du Club Dorothée (Smash, Paul …). Le dépôt de bilan de la chaîne est cependant annoncé. C'est le début des diffusions en boucle des séries animées afin que le Club Dorothée ne les récupère.

Le 12 avril 1992, La Cinq disparaît pour laisser la place à un écran noir. Le Club Dorothée en profite pour accentuer sa programmation sur les sitcoms dont c'est l'apogée. Les dessins animés japonais se font de plus en plus rares. L'année 1993 est la confirmation que l'animation, (surtout japonaise) déserte les grilles de programme et subit une politique de diffusion chaotique : Le dessin animé japonais est relégué aux plages de programme pour enfants.

Cependant, France 2 crée la surprise en 1994 avec une nouvelle émission ciblant plutôt un public adolescent : Télévisator 2, qui rediffuse Albator . En face, TF1 propose des séries qui ont connu énormément de succès au Japon : Nicky Larson et Ranma ½, ainsi que la très controversée Dragon Ball Z ainsi que Fly , qui ne connaîtra pas le succès escompté.

 

1995 sera cependant l'apogée de l'animation américaine, les nouveautés en matière d'animation japonaise se faisant particulièrement rares. Même si France 3 s'ouvre d'avantage à l'animation japonaise, elle préfère choisir chez AB des productions anciennes et passent partout qui ont fait leur preuve et qui parfois rentrent dans les quotas : Ulysse 31 (en tant que coproduction franco-japonaise) ; Princesse Sarah, Rémi sans Famille …Il est vrai qu'en choisissant des inédits à priori inoffensifs, la chaîne s'autocensure .

1996 marque le déclin du Club Dorothée , qui a perdu son dynamisme : L'audience est en baisse, et n'arrive pas à changer son image vieillissante. Le 29 août 1997, TF1 en finit une fois pour toute avec son émission phare : Le Club Dorothée disparaît brusquement avec toutes les séries qu'il diffusait. La vague manga a besoin de temps pour redorer son image.

Mais c'est surtout sur le câble et le satellite que l'animation connaît un nouveau départ. Ainsi, il apparaît que la France a connu près de vingt ans de diffusion continue de dessins animés japonais dans les créneaux réservés à la jeunesse. Aux vues du succès rencontré, il n'apparaît pas surprenant que l'attrait pour la source de ces animes, le manga, soit croissant. 20 ans de diffusion quotidienne d'animation japonaise destinée aux japonais n'ont pas pu laisser intacte les jeunes français, qui se sont sensibilisés par ce biais à la culture et surtout à la subculture japonaise. C'est en partie cette jeune génération que l'on retrouve à présent dans les salles de cinéma proposant des films japonais.