Un autre monde est possible avec une Eglise sans discrimination de genre

15ème assemblée annuelle du Réseau européen Eglises et liberté

Kirche im Aufbruch   Iglesia por la Libertad   Church on the Move

Madrid, 5-8 mai 2005

Un contexte espagnol, européen, ecclésial chargé

Entre le gouvernement et l'épiscopat espagnols, un bras de fer venant après un autre sur l'enseignement religieux dans les écoles publiques, au sujet de la loi sur le mariage de personnes de même sexe. Au nom de l'objection de conscience, les évêques appelaient les sénateurs à s'opposer et les fonctionnaires qui devront l'appliquer, à la désobéissance civile. Le RE a déclaré sa solidarité avec la communauté gaie et lesbienne en lutte pour ses droits humains dont le droit au mariage. La presse quotidienne y a fait écho. Le 7 mai, expirait le délai accordé aux immigrés illégaux pour demander leur régularisation. Objectif : 700 000 régularisations. Résultat annoncé : 600 000.

Un nouveau pape encore européen venait d'être élu. Le communiqué publié à l'issue de l'assemblée le note sans commentaire et affirme notre responsabilité d'être une voix qui fait entendre les valeurs de l'évangile : justice sociale, égalité, liberté comme bases de la paix.

C'est dans le contexte du processus de ratification du traité constitutionnel européen, où la COMECE s'est exprimée dans des termes qui appellent implicitement à voter OUI, que nous avons réaffirmé notre engagement citoyen pour une Europe fondée sur la dignité humaine, la solidarité et le respect de la diversité religieuse et culturelle à travers une intensification et une meilleure visibilité du débat au sein de l'Eglise catholique et à travers le dialogue interreligieux.

Une journée d'étude et de célébration 

Une préparation collective a fait venir à cette journée qui fut on ne peut plus conviviale plus de 200 personnes d'un âge moyen heureusement inférieur à la soixantaine.

Trois tables rondes consacrées à la situation économique et sociale du pays et à celle de l'Eglise espagnole et aux perspectives qui a donné lieu à une déclaration finale.

Une célébration monolingue certes mais avec traductions en anglais et en français. Les chants - un "Santo ! Santo ! " (il ne s'agissait pas de feu Jean-Paul II) - soufflant l'esprit de Pentecôte, jaillissant de réalité et d'utopie, des mots ordinaires disant et attisant une foi d'aujourd'hui, une foi adulte, proposable aux enfants. Il faut que nous en importions dans nos communautés.

Une journée de découverte mutuelle. Nous avons découvert, à travers la rencontre des communautés de l'Eglise de base de Madrid (IBM) un courant de chrétiens de base qui manifeste sa vitalité dans tout le pays  et pour ces communautés, l'Europe des chrétiens des parvis a désormais un visage. Le représentant des Comunidades populares a annoncé que ce réseau national désirait rejoindre le RE, ce qui fera des groupes espagnols (avec l'IBM, le Courant Somos Iglesia et le Collectif catalan Dones en l'Esglesia) la composante la plus importante en même temps qu'elle sera un pont avec l'Amérique latine. On peut espérer un élan nouveau dans les relations avec les communautés de base d'Europe.  

Des chantiers ont été ouverts et des engagements pris

. La décision la plus lourde d'engagement immédiat est celle de demander l'accréditation comme ONG internationale auprès du Conseil de l'Europe (Strasbourg). Le Conseil de l'Europe a fait des ONG un de ses 4 piliers institutionnels et pratique une démocratie authentiquement participative. Il en est le pionnier dans l'Europe des 47 (comme il est celui des droits humains et un bâtisseur d'une Europe sociale). Les groupes du RE sont placés devant le défi de l'investissement nécessaire pour participer aux réunions d'ONG, des OIC (Organisations internationales catholiques) et à celles du CE, répondre aux demandes de contribution à ses programmes. Domaines de travail envisagés : droits humains, égalité femmes-hommes, solidarité nord-sud, impact des religions sur la société, relations entre les religions.

. L'implication dans le dialogue civil avec les institutions de l'Union européenne sera poursuivie. Le travail fait dans l'orbite du CE trouvera aussi sa valorisation dans l'Union Européenne, qui est le lieu où se prennent l'essentiel des décisions concernant notre vie et notre avenir. Ici le dialogue n'est que consultatif. L'accent sera mis sur la collaboration déjà amorcée, aux côtés de CFFC-Europe qui en assure le secrétariat, ainsi que d'autres ONG (Fédération humaniste européenne, Forum européen des jeunes, Lobby européen des femmes, IPPF), avec le Groupe informel multipartis "Séparation de la religion et de la politique" créé récemment au Parlement Européen. Ce groupe mène une action ciblée (financement des JMJ de Cologne 2005, traité entre le St Siège et la Slovaquie sur l'objection de conscience). Il surveille la mise en oeuvre des art I-47 et I-52 de la Constitution européenne ainsi que l'action de la COMECE qui sont les axes de préoccupation du RE. . Le RE a adopté une résolution l'engageant à maintenir son soutien moral aux organisations de victimes d'abus sexuels de la part de membres du clergé catholique ainsi qu'une autre appelant le Vatican à réviser sa position sur l'usage du préservatif comme moyen de lutte contre le SIDA au nom de la défense de la vie et en se fondant sur la légitimation possible en droit canonique (théorie du "double effet"..). Il demandera une entrevue à ce sujet avec le Comité exécutif de la COMECE.

. Le RE participera parmi les ONG à la 3ème rencontre oecuménique des Eglises (à Sibiu, Roumanie). Des liens avec des associations roumaines ainsi qu'avec le réseau Kairos, oeuvrant dans plusieurs pays européens pour la justice sociale, seront activés ou noués.

. La perspective interreligieuse : c'est dans les Forums sociaux (Florence 2002, Paris 2003, Londres 2004) que le RE a commencé à s'impliquer avec d'autres ONG catholiques dans le dialogue interreligieux. Il continuera sur cette lancée au prochain FSE (Athènes, 2006). Il s'efforcera de contribuer aux travaux du CE sur les relations entre les religions et leur impact dans la société (paix, violence). Avec l'appui théologique de Juan José Tamayo, il a entrepris de se préparer à inscrire ses activités ecclésiale et civile dans la perspective inter-religieuse, ceci en intégrant la dimension de genre qui est trop étrangère encore aux grandes religions, notamment à l'islam qui devient la 2ème religion dans une grande partie de l'Europe. L'interreligieux sera le thème de la prochaine assemblée annuelle.

. La dimension de genre: c'est en atelier mais aussi en séance plénière que l'Assemblée a longuement débattu, à partir d'un questionnaire préparé et diffusé par FHE du thème "Un autre monde est possible avec une Eglise sans discrimination de genre". Le RE intégrera de façon permanente dans ses travaux, mais aussi dans son fonctionnement, la dimension de genre. Si le consensus, celui des hommes comme celui des femmes, était acquis d'avance, un engagement explicite a été ressenti comme nécessaire. Cet engagement a été affirmé comme une exigence fondamentale de justice envers les femmes et le partenariat paritaire femme-homme comme une des bases essentielles de la vie communautaire, chrétienne ou autre. L'Eglise catholique sera différente quand elle utilisera également les ressources féminines et masculines.

. Nouveaux membres : l'adhésion de l'Association néerlandaise "Mariënburg" a été acceptée pour succéder, en attendant l'aboutissement des efforts en cours pour créer un nouveau réseau national, au Mouvement du 8 mai dissous récemment. La réorganisation de la Fédération internationale des prêtres catholiques mariés (FIPCM) en confédération s'est accompagnée de la création de Fédérations régionales dont une Fédération européenne dont la demande d'association est en vue.

Le Réseau européen a révisé sa Charte établie en 1996. La nécessité se faisait sentir à la fois de se donner un profil d'ONG éligible au dialogue civil avec les institutions européennes et de refléter son évolution. Le RE s'identifie désormais comme composé de groupes et réseaux de chrétiens en majorité catholiques. Il déclare, conformément à la mission de l'Eglise au service de l'humanité, oeuvrer pour la justice, la paix, les droits humains, la démocratie, y compris dans l'Eglise catholique. Il se présente comme une organisation jouissant et exerçant au sein de l'Eglise de la liberté d'association reconnue par le Canon 215. Ne demandant pas la personnalité morale de droit ecclésial, il évite de déclarer un siège social et de se placer sous le contrôle d'un évêque diocésain. La discussion de ces modifications a donné aux groupes ayant adhéré récemment l'occasion de s'approprier la Charte.

Maturité

L'articulation des responsabilités et des initiatives prises par chacun et chacune a permis à l'assemblée d'atteindre ses objectifs. Un délégué qui n'avait pas participé aux Assemblées depuis plusieurs années a souligné la maturation du RE qui aura 18 ans en 2009. Un succès largement dû à un accueil chaleureux et à une organisation efficace dont nous remercions nos amis espagnols à qui nous adressons un vigoureux abrazo (accolade).

Prochaines assemblées : 2006 à Wiesbaden, Allemagne, 2007 Portugal, 2008 probablement Pays-bas.  HT