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" Mais j'avais désormais envie d'être absolument seul, et je m'arrangeai en conséquence pour m'isoler jusqu'à un certain point des soucis ordinaires. Ce ne fut pas une période malheureuse. Je m'en allai et vis moins de gens. Je m'aperçus que j'étais fatigué pour de bon. Je pouvais rester couché et j'en étais content, je dormais ou somnolait quelquefois vingt heures par jour, j'essayais énergiquement entre-temps de ne pas réfléchir - à la place je faisais des listes et je les déchirais, des centaines de listes : de commandants de cavalerie, de joueurs de football, de villes, d'airs populaires, de joueurs de baseball, d'époques heureuses, de dadas, de maisons que j'avais habitées et de tous mes complets depuis que j'avais quitté l'armée et de toutes mes paires de souliers(je ne comptais pas le complet que j'avais acheté à Sorrente et qui avait rétréci, ni les escarpins et la chemise d'habit, avec le col, que j'avais trimballés pendant des années sans jamais les porter, parce que les escarpins avaient pris l'humidité et s'étaient dévernis et que la chemise et le col avaient jauni et s'étaient pourris d'amidon). Et la liste des femmes qui m'avaient plu, et de toutes les fois où je m'étais laissé snober par des gens qui n'avaient ni plus de personnalité ni plus de valeur que moi. Et tout d'un coup, sans m'y attendre, j'allai mieux. Et je me fêlai comme un veille assiette dès que je l'appris. "

Francis Scott FITZGERALD, extrait de La fêlure (titre original The crack up), 1936.

Remerciements à la Générale, sans qui rien de tout ceci n'eût été possible.
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