La
résignation n’est pas une valeur de gauche !
Le 7ème Congrès du Mouvement
des Jeunes Socialistes se tiendra au cours du dernier trimestre 2005. Ce
sera le seul avant les élections présidentielle et législatives de 2007.
Cette échéance représente la dernière chance pour l’ensemble du camp du
progrès de mettre un terme à douze ans de mensonges d’Etat et à cinq
années de casse sociale. Ce sera l’ultime occasion pour la gauche de
changer durablement et profondément le cours de l’Histoire.
Pourquoi ? Parce que de récentes
déclarations nous rappellent que le « 21 avril » n’a pas disparu. Parce
que si la gauche échouait, plus rien ne pourrait faire rempart à la
désintégration de notre République et, au-delà, au délitement ou à
l’explosion de l’ensemble des sociétés dites développées. La France
n’est pas une nation comme une autre. Elle est la patrie des droits de
l’homme, le berceau des Lumières, la mère des révolutions. La gauche est
seule garante de cette identité et seule capable de porter ce message à
travers le monde. Sa défaite, ou pire, sa victoire sans lendemain
nouveau, laisseraient inexorablement le système économique, social et
environnemental, s’emballer et provoquer l’une des plus graves
régressions que l’Humanité a connues.
Il nous faut être à la hauteur de
l’enjeu. Si notre génération ne prend pas en main le destin de la
communauté humaine, nul doute que les vieux démons de la réaction, au
seuil de la sénilité, ne manqueront pas de frapper un grand coup sur nos
espoirs d’inventer un bonheur partagé. Quelque soit son niveau
d’engagement, chaque militant a un devoir d’exigence à l’égard de
lui-même et de l’ensemble de l’organisation des jeunes socialistes,
devoir qui donne à chacun le droit de dire clairement ce qu’il croit
nécessaire de chambouler au sein même de notre famille, pour retrouver
le chemin de cette jeunesse qui, à près de 80%, quitte les rives de la
République sociale pour rejoindre l’île paradisiaque du capitalisme.
De 2005 à 2007, le travail qui nous
attend est immense. Nous devrons bâtir dans les tous prochains mois un
projet dans lequel les valeurs fondamentales du socialisme ne sauraient
être bradées. Nous devrons ensuite mener une campagne très active, aux
moyens renouvelés. Et pour tenir ces deux bouts de la chaîne du succès,
notre 7ème Congrès sera déterminant. Ou bien les jeunes
socialistes se seront réunis autour d’une même envie de militer ensemble
dans un espace démocratique approfondi, et nous serons au cœur de la
bataille ; ou bien ils décideront de maintenir leurs vieilles querelles,
leurs sales habitudes, et nous serons impuissants.
Ces valeurs fondamentales, il nous faut
les rappeler. Cela peut paraître une bien étrange idée dans un texte
écrit par des socialistes pour être lu par des socialistes. Mais le
référendum interne sur la constitution européenne a mis en relief une
constante du socialisme contemporain français : l’existence de deux
approches, et peut-être malheureusement, de deux idéologies. D’un côté,
le camp de la résignation, de l’autre, celui de la transformation.
Les moyens renouvelés des futures
campagnes, il nous faut les penser. 2002 nous a appris que le tout
communication décidé en haut, n’entrait pas en résonance avec les
réalités d’en bas. Nous aurons à réinjecter le réel dans notre stratégie
électorale.
L’union des jeunes socialistes, il nous
faut la construire. Ce serait impossible s’il s’agissait de nier notre
diversité ou de forcer le rassemblement, en allant trop vite, et en le
faisant mal. Un texte unique soumis au vote des militants n’est pas un
horizon indépassable.
La
République sociale et laïque, berceau de l’internationalisme
La démocratie est le fondement de la
République.
Le caractère démocratique des institutions, à renforcer, est la première
de nos exigences. Mais pour redonner de la vigueur à notre République,
il faudra d’abord réinsuffler l’espoir à ceux de nos concitoyens qui
n’ont plus confiance en l’avenir. Quand la résignation perce, c’est
l’ensemble de l’édifice républicain qui est ébranlé. Si nous soutenons
le vote obligatoire - les études de l’abstention nous montrent que la
sélectivité de la non-participation électorale nous ramène tout droit au
suffrage censitaire - nous savons que la crise civique ne sera enrayée
que lorsque les citoyens seront par eux-mêmes convaincus de la valeur du
bulletin qu’ils mettent dans l’urne.
La République unit dans la
diversité. Notre pays s’est
construit à travers des vagues d’immigration successives. La diversité
est une chance, mais nous refusons d’ériger la différence comme un
droit : nous ne connaissons que trop la récupération de cette notion par
les discours racisants qui, sous couvert de respecter les dissemblances,
prônent la ségrégation des individus. « Chacun chez soi », voilà un
discours que la République ne peut tolérer. Le communautarisme n’est
qu’un facteur de désagrégation sociale, de fraternité au rabais et
d’enfermement des individus. En cela, il s’oppose fondamentalement au
socialisme, mouvement d’émancipation de l’homme des carcans
traditionnels. Notre République ne sera respectée que si elle donne
concrètement une place à tous. Sans égalité en actes, pas de respect
mutuel possible. « La République, ce n’est pas de reconnaître des
égaux, c’est d’en faire », disait Gambetta. En 2005, la formule n’a
rien perdu de son actualité. « Plus la société est libérale au sens
économique du terme, c'est-à-dire tolérante à la montée des inégalités
sous l'effet des forces du marché, moins elle peut être libérale au sens
politique et social. Tout simplement parce que la croissance des
inégalités se traduit aussi par l'augmentation de la violence sociale,
qui appelle la répression, le renforcement de ce qu'on appelait
autrefois l'Etat policier. Les progrès de l'inégalité tendent à
entraîner un recul des libertés ». Pleinement en accord avec le
constat de Laurent Fabius, nous savons qu’une République qui oublie
certains de ses enfants sur le bord de la route s’expose à un destin
funeste. Contre une conception de la liberté-concurrence et de la
fraternité-charité, nous défendons un Etat qui fait de la solidarité une
mission régalienne.
La laïcité, une
liberté émancipatrice. Dans la crise sociale que traverse les pays
dits développés, la droite française voit une crise morale. Dans leurs
discours, cette crise morale traverserait d’abord et surtout la
jeunesse, et plus précisément encore les fameux jeunes issus de
l’immigration. La politique de la droite peut se résumer de façon très
simple : « civilisons par la religion ces mécréants délinquants ».
L’exemple le plus affligeant est certainement celui de ces imams que le
trio Chirac-Raffarin-Sarkozy entendrait former pour porter la douce
parole d’un islam « tolérant » ou « intégrateur » auprès de la jeunesse
française, sans s’interroger sur les causes profondes, et évidemment
sociales, du besoin de radicalité. Les imams « gendre idéal » seraient
les nouveaux hussards de nos banlieues. Cette approche obscurantiste et
communautariste de phénomènes avant tout sociaux, produits d’un système
économique et géopolitique inégalitaire et injuste, est contraire à la
valeur fondamentale de laïcité ; elle sera de surcroît inefficace. De
même, le conseil français du culte musulman ne devrait avoir qu’une
seule mission dans une République laïque, celle d’organiser le culte sur
le territoire. Or, la droite lui fait jouer un tout autre rôle. Elle le
met en situation de représenter des français dont les origines en terre
à dominante musulmane semblent les condamner à être croyants, à n’avoir
que cette seule identité d’une part, et à ne pas bénéficier d’une pleine
citoyenneté en délégant leurs voix à une représentation non laïque.
C’est inacceptable. La seule représentation légitime c’est la
représentation nationale élue démocratiquement par tous les citoyens de
la République.
L’internationalisme,
une filiation républicaine. L’ambition d’une République sociale
porte en elle l’universalité. Elle ne se résout pas aux frontières
issues de nos guerres ou de la tectonique des plaques. Elle comprend
l’Humanité dans son tout. Plus que jamais, le destin de chaque homme est
lié à celui de tous les autres. La communauté de destin est désormais
mondiale. L’Humanité est à construire disait Jaurès, nous sommes à
l’aube d’y parvenir ou d’échouer définitivement. Une démocratie
planétaire est à instaurer, l’Europe sociale est un outil ou une étape
pour y parvenir. Une Europe sociale et démocratique, ouverte sur les
pays du Sud, est indispensable à l’émergence d’une autre mondialisation.
Le projet de constitution européenne interdirait à cette Europe de voir
le jour, c’est pourquoi nous continuerons de nous y opposer dans les
semaines et les mois à venir. Nous rejetons l’européisme et considérons
que le Bureau national du MJS a commis une erreur historique en
renonçant, en décembre dernier, à son autonomie et, à en croire les
déclarations télévisuelles du président de notre organisation, en cédant
aux pressions exercées par l’entourage du Premier secrétaire du Parti
socialiste. Le Bureau national a en effet adopté une résolution
engageant le MJS dans la campagne du oui, au mépris le plus total du
vote sans appel que notre Conseil national avait émis en octobre. Cet
acte grave que nous condamnons laissera des traces.
Un modèle de développement humaniste
Héritiers des Lumières, les socialistes mettent la connaissance, seul
outil capable de faire progresser la tolérance, le refus des
déterminismes, de l’obscurantisme et du repli identitaire, au faîte de
leur échelle de valeur. Si le MJS doit faire de sa mission
d’éducation populaire une priorité, il ne fait que suppléer l’école
de la République dont le rôle est de former les futurs citoyens et de
favoriser la mobilité sociale.
En matière scolaire,
la massification ne suffit pas : à quoi bon brandir le chiffre de
80% d’une classe d’âge au bac si les portes vers une éducation
supérieure de qualité restent fermées au plus grand nombre ? Le souci de
l’égalité des chances doit mener notre politique, afin de donner à tous
les conditions de faire valoir ses talents. La gratuité est une
condition nécessaire mais pas suffisante. Car l’inégalité à l’intérieur
de l’école est le fruit d’inégalités sociales et culturelles. C’est
pourquoi une politique éducative ne peut faire l’économie de mesures
encourageant la mixité sociale, et offrant à chacun un cadre de vie
décent.
Nous savons qu’éducation et culture ne
sont pas un coût mais un investissement pour la nation toute entière.
Nous devons choisir une société de la connaissance et de l'innovation.
Mais notre réflexion ne doit pas se limiter à une vision utilitariste
d’une éducation qui ne servirait qu’à entrer sur le marché du travail.
L’épanouissement personnel ne doit plus être un luxe : la
culture est un droit ; en faire profiter tout un chacun doit être
notre horizon.
L’insécurité sociale est
la première des insécurités. L’emploi reste à ce jour la meilleure
garantie contre l’exclusion, mais pour combien de temps ? Réduire le
chômage apparaît comme la condition nécessaire mais de moins en moins
suffisante du progrès social. A quoi bon redonner de l’emploi s’il ne
s’agit que de transformer des chômeurs en travailleurs pauvres ou soumis
à de nouvelles pénibilités intolérables? Comme l’écrit J.K.Galbraith, «le
mot travail s'applique simultanément à ceux pour lesquels il est
épuisant, fastidieux, désagréable, et à ceux qui y prennent
manifestement plaisir et n'y voient aucune contrainte (...).User du même
mot pour les deux situations est déjà un signe évident d'escroquerie.».
Cette inégalité se creuse puisque la pénibilité s’accroît pour les plus
précaires. Horaires irréguliers, stress, harcèlement moral : la
compression du marché du travail a remis en cause la possibilité de
faire valoir leur droit à des conditions de travail décentes.
Nous n’opposons jamais efficacité et
protection des salariés.
Notre conviction est que la croissance ne se fera pas contre l’homme,
mais avec lui, car il est le seul vrai facteur de croissance. De la
précarité naît la crainte de l’avenir. La croissance économique, qui
dépend en grande partie de la consommation des ménages, ne peut qu’en
pâtir. En outre, les salariés les plus productifs ne sont pas les plus
fatigués, mais les plus motivés. La redoutable épée de Damoclès qu’est
le chômage a amené dans son sillon des formes de précarité - temps
partiels et CDD subis - que les Trente Glorieuses avaient provisoirement
écartées. Contre la constitution d'un " précariat ", il nous faut
créer une " sécurité sociale du travail ", dans laquelle la
formation continue doit jouer un rôle clef, pour que les garanties
collectives attachées au statut de salarié ne soient pas remises en
cause par une rupture professionnelle. Les modes de représentation
syndicale (en prenant en compte le cas des salariés des entreprises
sous-traitantes ainsi que celui des PME, parfois artificiellement
maintenues en dessous du seuil d’obligation syndicale par de purs
artifices comptables) sont aussi à repenser.
Santé et environnement : des enjeux croisés
La santé est la première des inégalités : à 60 ans, un cadre peut encore
espérer vivre 5 ans et demi de plus en moyenne qu’un ouvrier ;
entre la région Midi Pyrénées et le Nord Pas de Calais, l’écart
d’espérance de vie est de 4,6 ans pour les hommes. L’exigence de santé
publique doit sous-tendre l’ensemble de nos politiques. Notre système
est miné par d’intolérables inégalités devant la qualité et l’accès aux
soins. Favorables à une couverture maladie pour tous et à une
présence équilibrée du service public de la santé sur le territoire,
nous réaffirmons que les soins doivent être accessible à tous quels que
soient ses moyens et son lieu de vie. La réforme Douste-Blazy est de
ce point de vue catastrophique. Elle contraindra les plus pauvres à
suivre un parcours de santé contraignant, moins rémunérateur pour les
professionnels que la liberté laissée aux plus aisés de consulter les
meilleurs spécialistes. C’est donc un système à deux vitesses, prélude
certainement à la privatisation de l’ensemble de notre système de santé
et de protection sociale dont la nouvelle gouvernance de l’assurance
maladie prépare l’arrivée.
Une politique de santé ne peut être
menée de manière isolée. Nul besoin de préciser que les intentions –
fussent-elles excellentes – de la rue de Ségur ne suffisent pas à
arrêter les nuisances engendrées par les excès productivistes du
capitalisme. Certaines pathologies sont créées ou aggravées par
l’environnement. On peut bien sûr améliorer l’information et les
dispositifs d’alerte, mais pour être efficace, c’est à la source qu’il
faut agir, en prenant en charge les régulations autrefois naturelles que
l’activité humaine a déréglées. Enjeu de santé public, la dégradation de
l’environnement est surtout un terrible gâchis. « Il ne sert de rien
à l’homme de gagner la Lune s’il vient à perdre la Terre » : la mise
en garde de Mauriac est malheureusement en passe de se réaliser. A nous
de réagir vite.
Les peuples, citoyens du monde et acteurs de leur
devenir
Toutes ces valeurs,
tous ces principes, fondent notre socialisme. Mais ils seraient sans
effet si nous n’arrivions pas à les faire partager par une majorité de
nos concitoyens. Ils doivent donc être débattus, affinés, avec le
peuple. Dans les deux ans à venir, cette confrontation doit avoir lieu.
Les jeunes socialistes pourraient prendre l’initiative de « Forums
citoyens 2007 » à travers tout le pays. De ces rencontres
émergeraient des propositions destinées à alimenter le projet des
socialistes. Toutes les énergies devraient être tournées vers la
création d’un lien plus réel, plus concret, avec les jeunes de notre
pays. Ces forums trouveraient leur prolongement naturel dans les
campagnes que nous auront à mener en 2007. Les participants à ces
rencontres, si nous savons faciliter l’adhésion au MJS, seraient
d’excellents promoteurs de la gauche et une formidable source d’énergie
supplémentaire pour battre enfin la droite pour longtemps. N’ayons plus
une confiance aveugle dans les publicitaires ou autres communicants dont
l’expertise éclaire certes mais ne guide pas. Soyons les architectes
et les maîtres d’œuvre d’une nouvelle relation entre les citoyens et les
appareils politiques.
Un grand MJS, une nécessité
Définir des valeurs,
mener des campagnes, faire vivre vraiment le débat, est impossible sans
une organisation politique forte, mobilisée, dynamique. Ce grand MJS que
nous demandons depuis des années doit enfin voir le jour. Le prochain
Congrès ne doit pas être un nouveau rendez-vous manqué. A Lamoura, nous
nous fixions l’objectif de dépasser les 10000 adhérents. C’est un échec.
Depuis 6 ans, le nombre de jeunes socialistes stagne. Les raisons sont
multiples. Nous aurons l’occasion d’en débattre au cours des mois
prochains. Pour n’en citer qu’une, nous affirmons qu’un congrès
réussi est un congrès d’union dans le plaisir, dans le désir, pas dans
la contrainte ou la résignation. Créer une union artificielle, sur
papier, avant même que les militants décident par leur vote de leurs
représentants au congrès, est une escroquerie. Le rassemblement légitime
est celui qui s’opère au cours des trois jours d’un congrès réussi, avec
les délégués des fédérations qui seuls ont le pouvoir d’en décider. Si
nous n’avions qu’un souhait à formuler pour 2005, ce serait celui-là :
donner pour une fois l’occasion aux délégués au congrès,
démocratiquement élus, de décider directement la synthèse et de vivre
réellement, sincèrement, dans l’instant, l’union des jeunes socialistes.
Contact :
contact@egalitejeunes.org
Site :
www.egalitejeunes.org
Premiers signataires membres du CN :
Jocelyn ASSOR (BN – 95), Nicolas BAYS (SBN – 62), Jérémie BERIOU (BN –
77), Medhi BOUKACEM (AF – 76), Mickaël CAMUS (AF – 27), Bastien CORITON
(DR – Haute-Normandie), Franck FIANDINO (AF – 48), David FONTAINE (BN –
76), Lysiane KOWALSKY (DR – Nord-Pas-de-Calais), Bertrand LASBLEIS (CNA
– 72), Guy-Eric LEMOULAND (AF – 72), Grégory MECHE (SBN – 94), Julie
MERY (SBN – 93), Nelly MORISOT (SBN – 75), Hocine NORDINE (AF – 38),
Guillaume QUERCY (Président de la CNA – 77), Bruce RITTER (AF – 62),
Philippe SERRE (DR – Languedoc-Roussillon), Matthieu STIEVET (CNA – 60)
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