Au lendemain du
29 mai, changer de cap !
(Résolution
déposée au Bureau national du MJS du 3 juin 2005)
Le Bureau national du Mouvement des Jeunes
Socialistes s'est réuni le 3 juin dernier. Il a examiné deux
résolutions contradictoires concernant l'après-référendum. Celle que vous pourrez lire ci-dessous était celle que nous
proposions, avec Nouveau Monde et Pour la République Sociale, et qui
a malheureusement été rejetée.
Les
citoyens français, très mobilisés, se sont majoritairement
prononcés contre la ratification de la Constitution européenne,
puisque 55% d’entre eux ont voté « non » le 29 mai. Le résultat
est sans appel. Il l’est encore moins parmi les sympathisants de
gauche (64% de « non »), parmi les sympathisants socialistes
(59% de « non ») et dans la jeunesse (60% de « non »). C’est
donc bien à gauche que le « non » a puisé sa force.
Le
résultat de dimanche dernier confirme la fracture sociale et
territoriale qui existe dans notre pays. En effet, les centres
ont plutôt voté « oui », les périphéries « non »; les classes
les plus aisées se sont majoritairement prononcées pour la
Constitution, à l’inverse des classes populaires; les jeunes les
plus diplômés se sont montrés favorables au texte alors que la
jeunesse dans son ensemble y est majoritairement hostile. Voilà
bien le vote de deux France.
Les
citoyens ne se sont pas trompés de scrutin. Seuls 24 % des
votants ont rejeté la constitution pour s’opposer à la droite.
Ils ne se sont pas non plus prononcés contre l’Europe, puisque
72 % des votants se déclarent « favorables à la poursuite de la
construction européenne ». Le « non » de gauche a permis de
recentrer le débat sur son enjeu véritable : la
constitutionnalisation ou non du libéralisme économique au
niveau européen. Il a permis aux citoyens de s’informer et de
débattre sans complexes. Cette formidable campagne d’éducation
politique a marginalisé le rejet souverainiste et nationaliste
de l’Europe. Dimanche, c’est contre l’Europe libérale telle
qu’elle se construit et pour une autre Europe plus sociale et
plus démocratique que les Français ont voté.
La
victoire du non le 29 mai 2005 ouvre une nouvelle page pour
l’histoire de l’Europe et pour l’histoire de la gauche. Ce
référendum a montré une nouvelle fois le décalage entre
l’orientation de la sociale démocratie européenne et les
aspirations du peuple de gauche. Nous avons vu les directions
des appareils socialistes ou sociaux démocrates en décalage
complet avec leur électorat. Alors que le Parti Socialiste avait
lors de son référendum interne voté à 58 % pour le oui, c’est
l’inverse qui s’est passé dans son électorat. Ce décalage
flagrant montre à quel point il est urgent de changer
radicalement de cap si nous voulons pouvoir unir la gauche et
gagner en 2007. Or, il semblerait que la direction du PS ne
prenne pas la mesure de ce qui s’est passé le 29 mai et en donne
une lecture manifestement biaisée.
Face au
rouleau compresseur des médias très majoritairement favorables
au « oui », la présence sur le terrain, aux côtés du reste de la
gauche, d’un « non » socialiste crédible a contribué à mobiliser
nos concitoyens, et en particulier les classes populaires (79%
des ouvriers et 67% des employés), dont l’abstention était une
condition sine qua non de la victoire du « oui ». Sans le
courage d’une partie des militants socialistes français qui ont
assumé leur non, les jeunes socialistes pleureraient aujourd’hui
la victoire du oui et du libéralisme. La leçon a tirer du 29 mai
2005, est que si des socialistes n’avaient pas pris leurs
responsabilités en faisant campagne pour le NON, les électeurs
se seraient de nouveau retrouvés face à un choix cornélien entre
un OUI de résignation porté par Chirac et un NON de repli porté
par Le Pen comme ce fut le cas suite au 21 avril 2002.
La leçon
vaut pour le Mouvement des Jeunes Socialistes. Le décalage entre
le MJS et la jeunesse est flagrant. Le MJS qui avait pourtant
pris position de manière très claire contre la constitution
(plus de 80% pour le non) a brillé par son absence dans cette
campagne. Les militants avaient compris ce qui se jouait dans le
pays. Le Mouvement des Jeunes Socialistes aurait dû être le
cadre d’expression des milliers de jeunes, dont beaucoup de
socialistes, qui ont fait campagne contre ce texte. Le résultat
de dimanche aurait été une victoire historique pour notre
organisation si elle avait été autonome et si sa direction avait
porté la voix de ses militants.
Désormais, l’heure est au rassemblement des socialistes et de la
gauche avec leur électorat. Pour cela, le Parti socialiste doit
comprendre le message des Français et tirer les leçons du
référendum. Le Mouvement des Jeunes Socialistes doit faire de
même. Il convient aujourd’hui de renouer avec cette jeunesse qui
a refusé l’Europe libérale qu’on lui proposait et qui attend une
suite à cette campagne. Il nous faut à la fois prendre la tête
d’une campagne européenne pour la renégociation du traité et
proposer aux jeunes un débouché en France qui pourrait prendre
la forme d’Etats Généraux de la Jeunesse regroupant les
différentes organisations politiques, syndicales et associatives
de jeunesse de la gauche progressiste.
Ceux qui
ne prendront pas la mesure de l’enjeu, devront assumer la
responsabilité de la perte de confiance de plus en plus
manifeste du peuple de gauche et de la jeunesse envers les
socialistes dont le rôle est de les représenter.
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