J'aime
lire. J'aime passionnément la lecture. Et bien évidemment,
j'aime aussi les livres. Non tous les livres. Seulement ceux qui agrandissent
la vie, poussent à creuser davantage, aident à respirer à pleins
poumons.
Aimant lire, il va de soi que j'ai passé de longs moments dans les
librairies, ces lieux où je pénètre en état
d'avidité, sachant que je vais trouver là par centaines ces
objets de papier et de mots qui tiennent une telle place dans mon existence.
Sans les livres et la lecture, ma vie aurait été désertique.
Grâce à eux, ma terre a été richement fertilisée
par les eaux d'une source, qui n'a jamais tari. D'où d'inoubliables
heures de découvertes, d'errances, de trouble, de doutes, de remises
en cause, parfois d'effondrement, ou à l'inverse, d'allégresse,
de plénitude, d'élévation. Heures où la vie
me déchire et me comble, me flagelle de ses rafales, me jette en
un éclair du profond de la douleur d'être au plus effervescent
de l'exultation.
J'éprouve un bonheur toujours neuf à me rendre dans une librairie, à fureter, à happer
quelques lignes d'un roman, survoler la page d'un essai, savourer un poème...
Tant de rencontres se proposent, tant de voyages seraient possibles...
Après que j'ai acquis l'ouvrage sur lequel s'était porté mon
choix, l'autre bon moment est celui où je rentre chez moi, serrant
dans ma main la précieuse substance verbale qui va me dilater, me
pousser hors du temps, faire haleter dans mes veines une vie plus ardente.
Charles Juliet