Au moment le plus
palpitant du film, quand le nom de l’odieux meurtrier allait être
révélé, quand la vérité allait enfin
éclater au grand jour… la télévision s’est
éteinte.
La télévision
Après un bref instant de surprise, je sens la colère me
gagner. Quelques coups sur le poste, légers au début,
ensuite un peu plus violents. Puis le découragement, la
résignation. J’essaie tous les boutons de la
télécommande. Rien. La télévision est en
panne. C’est la catastrophe.
Je vais chercher le tournevis, je retourne le poste, je cherche les vis
à dévisser. Une vis, deux vis, trois vis, quatre vis. Je
tente de retirer le dos. Bloqué. Bien sûr, il y a une vis
invisible à l’emplacement le plus imprévisible, non pour
maintenir quelque chose, mais pour taper sur les nerfs du pauvre
bricoleur du dimanche comme moi. Je trouve la vis vicieuse et je la
retire. J’ai de la chance car habituellement la dernière vis
refuse obstinément d’être dévissée.
J’enlève le dos du poste et je regarde à
l’intérieur.
Je regarde et ce que je vois est surprenant. Ou, plutôt, ce que
je ne vois pas est surprenant. Je m’attendais à y trouver des
résistances, des condensateurs, des transistors, des circuits
intégrés, des diodes, des câbles. Mais il n’y a
rien de tout ça. En fait… il n’y a rien. C’est le vide complet,
total. Seulement un peu de poussière. On m’a vendu et j’ai
acheté une télévision vide.
Mais comment ai-je pu voir des images avec une télévision
vide ? Les images ont-elles été créées
dans ma tête ? Dans mon cerveau malade ?
Effrayé, je décide d’arrêter de penser. Je prends
les débris du poste vide et je les jette par la fenêtre.
Demain, j’achète une autre télévision. Et je ne la
démonterai jamais, pour éviter de découvrir encore
le vide.