La barrière Franklin

Dans son Histoire du XVIe arrondissement de Paris, Auguste Doniol écrit que l'on "a donné le nom de rue Franklin à une rue du voisinage, qui s'appelait "rue Neuve-des-Minimes" et occupait l'emplacement d'un ancien chemin ... reliant le carrefour de la Montagne (carrefour de Passy) [aujourd'hui place de Costa Rica] à la barrière Sainte-Marie, nommée plus tard barrière Franklin (place du Trocadéro)" Dans un article intitulé "Nos anciennes barrières" de Léopold Mar, repris en annexe du livre de Doniol, on cite : "Au début, Passy eut cinq barrières."
Barrière de la Conférence, nommée aussi barrière de Versailles ou barrière des Bonshommes, puis barrière de Passy.
Barrière Sainte-Marie, en haut de la rampe ouest du Trocadéro.
Barrière de Longchamp, à 500 mètres en suivant l'alignement de l'avenue Kléber.
À 700 mètres plus haut : barrière des Bassins ou des Réservoirs, dite aussi barrière de la pompe à feu, et en 1848 barrière du Banquet.
Enfin la barrière de l'Etoile, ou des Champs-Elysées ou de Neuilly selon les époques.
"Dans la suite, aux cinq barrières que nous venons d'énumérer, on en ajouta trois autres : d'abord la petite barrière Franklin, qui fut ouverte sous le premier Empire et se trouvait à l'angle des rues Le Nôtre et Chardin ; puis la barrière d'Iéna, placée derrière le palais actuel du Trocadéro, entre les deux tours, et, enfin, la barrière des Batailles, qui ne fut ouverte qu'après la percée du boulevard Delessert, vers 1850. Par contre, nous voyons que la barrière des Bassins et la barrière Sainte-Marie, devenues inutiles, furent fermées".

En dehors du fait que les noms de ces barrières ont souvent changé, on trouve, dans le même ouvrage, des contradictions entre le texte et les annexes. Cela est simplement dû au fait que l'Histoire n'est pas figée mais se précise en fonction des documents retrouvés.

Les délibérations du conseil municipal de Passy, reconstituées par les Archives de Paris, apportent des informations précises sur cette barrière Franklin.

Dans une délibération prise le 5 décembre 1831, le conseil municipal de Passy demande au préfet de la Seine "l'ouverture pour les visiteurs de la barrière Franklin et le pavage d'une chaussée dans la rue Neuve des Bonshommes et joignant cette rue à la chaussée du quai de Billy en face du pont d'Iéna, le tout comme annexe de la route départementale N°2". Le 5 mai 1833, le conseil "considérant que cela établit une communication agréable et facile pour le château de Saint-Cloud, considérant que la montagne de Passy présente des dangers pour la sécurité publique" insiste sur l'ouverture de la barrière Franklin et le pavage de cette chaussée.

Par arrêté du 7 juin 1833, le préfet de la Seine "considérant que l'établissement d'une route nouvelle aboutissant à la rue des Bons-Hommes et formant l'entrée de Passy par la barrière Franklin se lie à un projet qui a pour objet l'achèvement du mur d'enceinte de Paris, entre la barrière de Longchamp et celle de la Conférence, qu'il importe de ne pas isoler ces deux projets et d'attendre la décision qui interviendra sur le plan d'enceinte avant d'arrêter définitivement l'établissement de la route nouvelle qui est proposée, mais qu'il importe aussi de réserver les fonds qui seront destinés à cette création de route, si elle est adoptée par le conseil, que la dépense évaluée à 30.000 francs devra être supportée par la commune de Passy, ajourne à la session prochaine la délibération".

Le 18 juin 1833, le conseil municipal de Passy propose de payer 7.500 francs, n'ayant pas de ressources suffisantes. Le conseil général de la Seine propose alors de payer 15.000 francs pour l'ouverture de la barrière Franklin, si Passy accepte de payer 15.000 francs, ce que vote le conseil de Passy du 27 août 1833.

La barrière Franklin est donc ouverte pour les visiteurs dans les temps qui suivent. Dans sa délibération du 30 juin 1844 sur l'amélioration du chemin menant à cette barrière, le conseil de Passy précise : "considérant que la barrière Franklin est d'une utilité incontestable et qu'il résulte d'une note, remise il y a plusieurs années au conseil général de la Seine, que dans une seule année le passage des voitures s'est élevé à 170.000 ; que depuis cette époque la circulation a augmenté et qu'elle subira encore un très notable accroissement si l'on exclut l'amélioration projetée ; qu'ainsi tout concourt à démontrer qu'il faudra dans un but d'intérêt public y établir un bureau de petit comptant, et à défaut laisser la grille ouverte pendant la nuit, principalement pour le passage des voitures..." . Cette délibération montre bien l'importance prise par la "petite" barrière Franklin.

Mais l'ouverture, en 1847, de ce qui deviendra le boulevard Delessert, entraîne la fermeture de la barrière Franklin. Le conseil municipal du 23 novembre 1848 demande le maintien de cette barrière. Celui du 12 avril 1849 renouvelle la demande, mais la fermeture est irrévocable, au profit de la nouvelle barrière des Batailles.

La découverte de nouveaux documents sur ce sujet permettra d'avoir une histoire plus précise de cette barrière, dont l'intérêt historique tient plus au nom glorieux de Franklin qu'à sa réelle utilité économique. Mais, en attendant, cet article est une petite contribution supplémentaire à la grande histoire du XVIe arrondissement.

© Hubert DEMORY

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