Les Bonshommes de Nigeon

 

François de Paule, ermite de Calabre, fonda l'ordre des Minimes en 1472. Le 15 mars 1493, Louis de Beaumont, évêque de Paris, autorisa l'établissement d'un couvent sur la colline de Chaillot.

Le couvent fut constitué de plusieurs donations : la première fut faite par Jean de Morhier, chambellan de Charles VIII, qui donna la tour de Nigeon entouré d'un enclos de 2 hectares en stipulant qu'une église devait y être construite dans les 2 ans. En 1496, l'église n'étant pas achevée, il reprit son don et le vendit à Pierre de Cerisy, contrôleur général d'Anne de Bretagne, mais celle-ci racheta le terrain ainsi que le terrain avoisinant et donna le tout, soit 4 hectares, à la communauté, devenant ainsi la fondatrice de ce couvent. On peut penser que ce dénouement heureux est dû à l'influence de Saint François de Paule qui, se rendant en Champagne en 1496, s'arrêta à Nigeon pour bénir les bâtiments en construction. En mai 1499 Louis XII confirmera la donation.

Les travaux avancèrent très lentement par manque d'argent : le choeur et la nef de l'église, consacrée à Notre-Dame de Toutes Grâces, fut bénie par François de Rohan, archevêque de Lyon, le 7 mars 1506 mais il faut attendre le 13 juillet 1578 pour que l'église soit totalement achevée. Elle fut consacrée, en présence de Catherine de Médicis, sous le nom de " L'Annonciation de Notre-Dame de toute grâce ".

En 1583, Catherine de Médicis agrandit une petite maison située à l'est de l'enclos des Bonshommes, appelée l'Ermitage ou Beauregard, qui deviendra le château de Chaillot. En 1613, ce château fut acheté par Pierre Jeannin, premier président du Parlement de Paris, qui en reçut la seigneurie de Chaillot et le droit de haute justice. En 1630 le marquis de Bassompierre l'acheta et en 1651 ses héritiers le vendirent à Henriette de France, veuve de Charles I d'Angleterre, qui le donna aux soeurs de la Visitation, installées dans le Marais, pour y ouvrir le couvent de la " Visitation de Sainte-Marie " ( d'où le nom de la barrière Sainte-Marie sur l'enceinte des fermiers généraux ). Les deux couvents ne sont séparés que par un simple mur, mais avec le château les visitandines deviennent seigneurs de Chaillot avec droit de haute justice, d'où leur surnom de Dames de Chaillot.

A la Révolution, les moines durent abandonner Nigeon. De 1790 à 1794, le domaine fut vendu par petits lots à l'exception des bâtiments qui restèrent groupés. En 1796, l'industriel flamand Bauwens racheta ces bâtiments pour y installer d'abord une tannerie, puis, par la suite, une manufacture de coton ; celle-ci fut reprise par Danel puis par le baron Delessert qui possédait déjà une autre filature à Passy.

Il transforma à nouveau les bâtiments pour y installer une raffinerie de sucre, selon un procédé qu'il avait mis au point pour extraire le sucre de betterave. En 1811, Napoléon décida d'établir, sur la colline de Chaillot, le palais du roi de Rome. Avec les premiers terrassements les bâtiments des deux couvents commencèrent à être détruits, et il n'en resta plus trace pour l'exposition universelle de 1867, sinon la cave de l'actuel Musée du vin et quelques rochers dans la partie ouest des jardins du Trocadéro.

© Hubert DEMORY

 

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