Les Goths placèrent,
d'une voix unanime, le brave Ataulphe sur le trône de son
beau-frère Alaric. Le nouveau roi des Goths abandonne
le projet de fonder un Etat en Afrique. Il discute souvent avec
la princesse Galla Placidia. Pendant leur première discussion
Ataulphe se montre très ambitieux :
- La valeur de mes soldats et nos victoires m'inspirent une grande
confiance dans nos possibilités. Pourquoi alors quitter
l'Italie ?
Il continue en regardant attentivement la princesse:
- Je préfère changer la face de l'univers, d'en
effacer le nom des Romains, d'élever le royaume des Goths
sur leurs ruines, et d'acquérir, comme Auguste, la gloire
immortelle de fondateur d'un nouvel empire.
Placidia admire involontairement le jeune roi barbare habillé
en romain et bien rasé. Ataulphe a la peau blanche comme
le lait, mais, en regardant plus attentivement, la princesse
voit avec satisfaction répandre sur son visage le rouge,
couleur que provoque une émotion qui correspond mal à
ses propos menaçants. Elle remarque que son nez est très
joliment arqué, que ses lèvres sont minces, que
ses dents sont bien rangées et éveillent la comparaison
avec la blancheur de la neige. Rassurée, Placidia sourit
:
- Mais pourquoi effacer le nom des Romains ? On peut, peut être,
trouver des accords mutuellement avantageux ? Vous êtes
chrétien comme nous et vous assistez chaque matin aux
cérémonies tenues par les prêtres et témoignez
au culte d'un grand empressement même si ces marques extérieures
de dévotion peuvent être plus affaire d'habitude
que de conviction. Je pense que vous n'êtes pas un arien
fanatique qui déteste les catholiques car je vous vois
chaque jour donner par vos actions les preuves d'une grande tolérance.
Enfin, vous parlez bien latin et appréciez la civilisation
romaine.
- Alaric, lui aussi, parlait bien latin et appréciait
beaucoup la civilisation romaine. Vous savez qu'il a proposé
plusieurs projets d'accords, très avantageux pour les
Romains. Tous ces projets, bien réfléchis et discutés
par nous, ont été rejeté par Honorius avec
mépris. Je ne tolérerai jamais cet orgueil qui
ne correspond pas au rapport des forces.
- Il faut des lois pour maintenir la construction d'un Etat puissant
et, à mon avis, le caractère encore indocile et
féroce des Goths n'est point susceptible de se soumettre
à la contrainte salutaire d'un gouvernement civil.
Ataulphe s'étonne de cette remarque, malheureusement juste,
de la belle princesse romaine. Il sent que Placidia commence,
à estimer les Goths cependant si méprisés
avant par elle.
***
Atilius, retenu dans le camp
des Goths par la mort d'Alaric et ses funérailles, vient
voir Galla Placidia avant de repartir pour Rome et Ravenne. Il
la trouve de très bonne humeur en compagnie du jeune et
beau roi des Goths. Elle lui demande :
- Je vais écrire une lettre pour mon frère, l'empereur
Honorius, qui contiendra mes recommandations d'accepter les propositions
du nouveau roi des Goths. L'empereur et ses ministres et généraux
sont aujourd'hui dégagés de leur serment solennel
par la mort d'Alaric
Placidia jette un coup d'il sur Ataulphe et sourit :
- Car je suis maintenant convaincue que ces propositions sont
sincères et leur réalisation sauvera l'Empire.
Le roi confirme cette déclaration :
- En fait, j'ai voulu effacer le nom des Romains, les remplacer
par des Goths et fonder un nouvel empire. Mais maintenant je
me suis fait un autre plan de gloire et d'ambition. Mon plus
sincère désir est aujourd'hui de faire en sorte
que la postérité reconnaissante loue le mérite
d'un étranger qui employa la valeur des Goths non pas
à renverser, mais à défendre l'Empire romain
et à maintenir sa prospérité.
Puis il sourit :
- Transmets à l'empereur que cette décision est
prise sous l'influence de son auguste sur. Mais si Honorius
rejette ma proposition je serais extrêmement déçu
et changerai mon opinion. D'ailleurs je suis mécontent
qu'il ait essayé de diriger contre moi l'usurpateur Constantin
en lui faisant je ne sais quelles promesses.
En sortant de chez la princesse, Atilius voit Lucia, souriante
et visiblement heureuse, entourée par les jeunes officiers
goths. A-t-elle oublié sa peur que le roi des Goths puisse
obliger Galla Placidia à l'épouser et revendiquer
après le titre d'Auguste pour diriger avec Honorius l'Empire
? Comme les femmes changent facilement leur opinion ! Mais Atilius
remarque que cette idée ne le trouble pas si fort qu'avant.
***
D'après ses vues pacifiques,
le nouveau roi des Goths suspend les opérations de guerre,
et négocie sérieusement un traité d'alliance
avec la cour impériale. Les ministres d'Honorius ne peuvent
plus continuer à nier l'importance des services que les
Goths pourraient rendre à l'Empire. Ataulphe consent avec
joie à aller avec son armée en Gaule et en Espagne
et lutter contre les usurpateurs et les Barbares. Devenu général
des Romains, il se dirige vers les provinces méridionales
de la Gaule. Les troupes impériales sont obligées
de respecter l'accord avec les Barbares pour ne pas mettre en
danger la vie de Galla Placidia. L'empereur demande à
plusieurs reprises le renvoi de Placidia comme une condition
indispensable du traité de paix mais Ataulphe refuse de
se priver d'une otage si précieuse. Les Goths ne tentent
pas d'attaquer Ravenne afin d'éviter la complication des
relations avec les Huns car Attila continue des études
dans la capitale impériale.
***
Atilius remet la lettre de
Galla Placidia à l'empereur. Honorius s'intéresse
vivement des circonstances de la capture de sa sur par
les Barbares et ses conditions de vie. En sortant de l'empereur
il rencontre Onégèse avec Edecon qui explique à
Atilius stupéfié :
- Je suis engagé dans l'armée impériale
avec une partie des anciens mercenaires huns d'Ataulphe. Le générale
Constance se prépare à une intervention en Gaule
contre l'usurpateur Constantin.
Onégèse ajoute :
- Attila va aussi participer à cette campagne avec un
détachement de jeunes cavaliers sélectionnés
parmi les Huns engagés par Gennerid. Puis il doit rentrer
dans son pays. C'est pourquoi il veut maintenant visiter Rome
avant de partir en Gaule.
Atilius s'exclame :
- Je veux rentrer à Lyon car mon père est tombé
malade après avoir appris ma captivité chez les
Goths. Mais avant je dois aller, moi aussi, à Rome pour
revoir les relations de notre maison d'édition avec les
partenaires dont la situation a changé. |