Odoacre

Extraits du roman de Grigori TOMSKI, Les amis d’Attila, Editions du JIPTO, 2005, 360 p.
ISBN : 2–35175–003–9

Août de 476. Le camp des Skires et des Hérules. Odoacre se tient sur une estrade et essaye de calmer les soldats germaniques :
- Je vous appelle à la patience. On ne peut pas nier que l’armée ne reçoit pas un tiers du produit fiscal. Mais c’est provisoire. Avec les mercenaires huns, qui seront bientôt engagés, nous allons vaincre les Wisigoths et convaincre les Burdondes de payer à Rome un tiers du produit des impôts de la Gaule. Oreste nous promet après ces victoires d’augmenter considérablement votre solde …
Les soldats l’interrompent par des cris et des menaces :
- Pas de belles promesses !
- Augmentation immédiate de solde !
- A bas les Huns !
- A bas Oreste !
- Aux armes !
Odoacre lève la main. Les soldats s’arrêtent de crier.
- Je vais transmettre à Oreste vos revendications. Restez calmes. Je pense qu’il cédera.
Un officier monte sur l’estrade :
- La guerre contre les Wisigoths sera très dure. Le roi Eric se montre jusqu’à présent imbattable. Nous risquons tous de mourir avant l’augmentation de notre solde promise par Oreste. Tandis que les cavaliers huns avec leurs arcs puissants évitent les combats corps à corps et ce sont eux qui auront tout car la guerre est une activité qui n’est pas très dangereuse pour eux.
Les cris d’indignations s’élèvent des milliers des bouches :
- A bas Oreste !
- Aux armes !
L’officier continue :
- Laissons Odoacre discuter avec Oreste. Mais pourquoi les empereurs doivent-ils être toujours Romains ? Si Oreste refuse, nous proclamerons Odoacre notre empereur.
L’air tremble des cris d’enthousiasme :
- Vive Odoacre !
- Vive l’empereur germanique !
- Aux armes !
Odoacre rougit et fait un geste de protestation. Quand les cris s’arrêtent, il s’adresse aux soldats :
- En aucun cas je ne serai l’empereur romain. D’ailleurs, l’Empire n’existe plus. Nous ne contrôlons actuellement que l’Italie. Mais vous pouvez me donner plus de poids dans les négociations avec Oreste si vous confirmez mes droits légitimes d’être roi des Skires et des Hérules comme mon père Edecon.
L’officier, qui se tient toujours à ses côté, s’exclame :- Vive Odoacre, le roi des Skires et des Hérules, le roi des nations, le roi d’Italie !
Les soldat poussent les cris :
- Vive le roi !
- Vive Odoacre !
Quatre guerriers montent sur l’estrade et soulèvent Odoacre sur un bouclier.

***

Le camp de Pavie. Oreste interrompt Odoacre :
- Je ne peux pas céder aux revendications de tes soldats. Er-Nak m’a promis d’envoyer rapidement les détachements de la cavalerie. L’accord est déjà signé.
- Dans ce cas la guerre civile est inévitable. Les soldats sont très irrités.
Le patrice regarde tristement son général :
- Comment as-tu pu trahir ma confiance ! Te faire proclamer roi d’Italie !
Odoacre commence à raconter les circonstances de la révolte de ses soldats. Oreste fait un signe et les soldats de sa garde tirent leur épée du fourreau et encerclent Odoacre qui s’écrie :
- Les soldats ont voulu me proclamer empereur. Pour les calmer j’ai demandé de confirmer simplement mon titre légitime de roi des Skires et des Hérules comme successeur de mon père Edecon, votre ami.
« Je m’appelle Oreste comme un noble héros des légendes, je tenais haut mon nom et j’étais toujours fidèle à mes amis » pense le patrice et s’approche d’Odoacre :
- Oui, ton père Edecon était mon grand ami pendant quarante ans. Je ne peux pas tuer son fils. Tu es libre.
Oreste ferme ses yeux et pense avec angoisse : « Vers quelles fins me portera maintenant mon destin ! »

***

Les guerriers enragés d’Odoacre attaquent le camp de Pavie, brisent la résistance des troupes d’Oreste. Le fils d’Edecon, impliqué malgré lui dans la révolte contre le meilleur ami de son père, convainc difficilement ses officiers de le laisser parler avec Oreste avant son exécution. En voyant le patrice blessé et ses vêtements déchirés, son cœur se serre :
- Que Dieu me pardonne, je ne peux pas te libérer. Mais je sauverai ton fils et ta femme.
Oreste s’anime :
- Ma vie était longue et intéressante. Je n’ai pas peur de mourir. Mais les soldats germaniques sont devenues incontrôlables. Comment veux-tu dans ces conditions sauver ma famille ?
- Je reprendrai le pouvoir en main avec l’aide de mon frère Hunulf qui doit bientôt arriver en Italie avec ses guerriers. Les Skires et les Hérules nous obéiront.
- Mais tu dois calmer tes guerriers maintenant.
- Je le sais. Il ne se calmeront qu’après ta mort.
Oreste se tait, Odoacre soutient son regard. On entend la bruit des armes et la rumeur des voix menaçantes. Le patrice dit lentement d’une voix étonnamment calme  :
- Tu es très troublé. Je le vois. Merci pour ta promesse.
Odoacre parle avec les larmes aux yeux :
- Je jure au nom de notre Seigneur et par la mémoire de mon père Edecon, que je suis prêt à sacrifier ma vie pour défendre les vies de ton enfant et de sa mère !

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