L'amour, nouvelle cause de justification pénale : c'est
le rêve auquel pourrait faire songer une première
lecture du jugement ci-dessus rapporté, rendu par le Tribunal
de grande instance de Toulouse le 30 Octobre 1995.
Le tribunal était saisi d'une poursuite pour aide à
l'immigration clandestine fondée sur l'article 21 de l'
ordonnance du 2 novembre 1945 étendue par la loi du 31
décembre 1991. La modification du texte opérée
par la loi du 27 décembre 1994 est sans influence en l'espèce.
Cet article dispose dans son premier alinéa &laqno; toute
personne qui, alors qu'elle se trouvait en
France, aura, par aide directe ou indirecte,
facilité ou tenté de faciliter
l'entrée, la circulation ou le séjour
irrégulier d'un étranger en France
sera puni d'un emprisonnement de 5 ans et
d'une amende de 200 000 francs ».
Le tribunal a décidé que ce texte &laqno; ne
peut viser ni les comportements humanitaires
ni les attitudes inspirées uniquement
par l'amour et l'affection des intéressés
». C'est pourquoi il a relaxé la prévenue
à laquelle il était reproché d'avoir fourni
un logement et les moyens nécessaires à son entretien
à son concubin (devenu &laqno; pendant le cours
du délibéré son mari...
») dont elle connaissait la situation irrégulière.
Au delà d'une telle appréciation aussi généreuse
qu'irréaliste, le jugement résout une question méthodologique
essentielle : celle de l'attitude à adopter par les tribunaux
face à une incrimination large, comme celle de l'article
21 de l'ordonnance de 1945 (modifiée par les lois de 1991
et1994). Le tribunal a énoncé que &laqno; face
à une imprécision de la loi
pénale, il convient de l'interpréter
à la lueur des principes généraux
du droit et des débats parlementaires
». Cet attendu est particulièrement intéressant
en ce qu'il vise les principes généraux du droit;
car le tribunal préconise ainsi une méthode d'interprétation
fondée sur la recherche d'une combinaison entre le texte
d'incrimination et les principes supra-légaux ; (1°)
or une telle méthode d'interprétation a une portée
quasi-révolutionnaire (2°).
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© Dalloz 1996