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En cette fin d'après-midi du 26 août 1944, j'avais demandé asile à mon oncle et à ma tante, chez qui se trouvait déjà ma mère, au numéro 4 de la rue Mornay. Après le dîner nous avons prolongé la soirée qui était chaude dans la salle à manger dont la fenêtre donnait sur la rue de l'Arsenal, alors que les ouvertures sur cour laissaient voir les murs et les toits du Quartier de cavalerie de la Garde Républicaine dans la caserne des Célestins. Un bruit confus montait jusqu'à nous par la croisée largement ouverte, ce qui nous reposait des éclatements de grenade et du crépitement des mitrailleuses des jours précédents.

C'est alors que de façon tout à fait imprévue le cri strident de la sirène d'alerte retentit dans l'atmosphère ouatée de ce soir d'été ....

(Témoignage de Robert Genty conservé par le Musée de la Garde Républicaine)

 

Hier, 25 août, les Allemands ont capitulé dans Paris... cet après-midi le général de Gaulle a descendu triomphalement les Champs Elysées pour se rendre à la Cathédrale Notre Dame ...

Les "tireurs des toits", soldats allemands ou collaborateurs désespérés, ont bien troublé la liesse générale mais les bivouacs de la 2ème Division blindée au Parc Montsouris, dans le jardin des Tuileries rassurent les Parisiens ... On danse, on chante, on boit ... Sous l'oeil courroucé de leurs officiers, les "Leclerc" accueillent les jolies parisiennes sous leurs toiles de tente ... La guerre est finie !

 

 

Vers 23h00 retentissent les sirènes ... Des avions allemands approchent ... Des rayons de lumière illuminent le ciel ... Les D.C.A de la 2ème DB et de la 4ème DI américaine ou des Allemands qui guident leurs aviateurs ? Soixante ans plus tard on ne sait toujours pas.

Soudain le fracas des bombes ... L'hôpital Bichat est touché, ainsi que la Halle aux vins (actuellement faculté de Jussieu), et encore le quartier du Marais, les Buttes Chaumont, la Porte de Montreuil, la Porte de Vitry, la Place d'Italie, la Porte d'Ivry, le quartier Moufffetard, la Bastille ... en banlieue Bagnolet, Pantin, Montreuil, Sceaux, Bourg la Reine, Charenton le Pont, Saint Maur, Vitry sur Seine reçoivent à leur tour des bombes ...

Il n'y a là aucun objectif stratégique. S'agit-il d'un raid vengeur de la Luftwaffe ?

 

 

sur la plaque commémorative on relève les victimes suivantes :

Isabelle Bouquie, 48 ans, infirmière

Marguerite Chanut, 34 ans, infirmière

Thomas de Martin Monego, employé

Marie de Martin Monego son épouse, 40 ans, infirmière

Guy Dewolf, 12 ans, fils d'un employé

Marie Jordan, 46 ans, infirmière

Emile Macquet, 40 ans, employé

Odette Macquet, sa fille, 14 ans

Pauline Macquet, son épouse, 37 ans, infirmière

Adèle Mong, 49 ans, infirmière

 

 

46-48 rue des Francs Bourgeois

liste des victimes ci-contre

Fernand Aubrie, 48 ans

Jacqueline Confland, 24 ans

Renée Martinet, 21 ans

Lucien Barré, 54 ans

Blanche Bardou, 40 ans

Félicie Bisson, 69 ans

Albert Bourdet, 27 ans

Odette Cannet, 20 ans

Cladie Cannet, 43 ans

Blanche Chapus, 41 ans

Gaston Delplanque, 57 ans

Firmin Dubord, 38 ans

Philomène Duclos, 67 ans

Christian Guignard

Emilie Guignard, 22 ans

Marie Hurez, 67 ans

Antonin Joly, 32 ans

Marguerite Joly, 36 ans

Marcelle Juillot, 38 ans

Alexandre Lissaner, 42 ans, FTP d'origine hongroise

Raymond Listard, 33 ans

 

 

les réserves de vin de la capitale sont parties en fumée

 

 

20, rue de la Réunion dans le 20ème arrondissement, l'immeuble s'effondre sur :

Hughette, François, Guy et Germaine Bodenes

Jean, Jacqueline et Madeleine Charvet

Maurice, Jeannine et Marcelle Legraverant

Etienne et Ghislaine Tarlier

 

 

 

 

 

 

Janine, Jacqueline et Armande Boursier périssent 34, rue du Dessous des Berges dans le 13ème arrondissement.

La famille Brayer (Robert, Paulette, Marie, Georges, Armand, Adrien et Pauline) est anéantie sous les décombres au 1, rue Dupuy de Lome, également dans le 13ème arrondissement.

 

Une bombe au phosphore atteint l'immeuble situé à l'angle des rues Anatole France et Jules Jaslin à Pantin. On retirera les corps d'Auguste Gournier, de Julia son épouse, d'Olga sa belle-fille et de Monique sa petite-fille.  

 

 

 

Chauffeur du TTM5 "Filochard" du 3ème Régiment d'artillerie coloniale de la 2ème DB, Pierre Durand est tué au parc Montsouris alors qu'il y bivouaque avec son unité.

 

A Ivry sur Seine on dénombre neuf victimes, huit à Charenton le Pont dont l'aumônier du Bon Chapitre, quatorze à Saint Maur, quatre dans le quartier Blagis à Sceaux, douze à Vitry sur Seine dont la famille Tuck : Sidney, Nicole, Monique Liliane et Jean.  

 

John Fischer, originaire du Kentucky, soldat de la 4ème Division d'Infanterie américaine est tué dans Paris.

Ainsi que Alfred Mangeot, 43 ans, prévôt de la salle de boxe Anastasie.

Les frères jumeaux Jeantroux, 18 ans, sont blessés au métro Nation; Jean, employé du métro décèdera le lendemain au poste de secours de la rue Daumesnil.

 

 

Les obsèques des 13 gardes républicains auront lieu le mercredi 30 août 1944 à 10h00 au cimetière militaire de Bagneux. Seront inhumés en même temps René Laboudance tué le 22 août lors de la défense de l'Hôtel de Ville et Joseph Tibozzi mortellement blessé par un milicien français le 26 août en procédant au nettoyage du quartier de la rue Castiglione.

Des décombres de la caserne de la garde républicaine on a retiré les corps de :

Yves Barre, 43 ans, maître-bottier

Yolande Barre, 16 ans, sa fille

Pierre Carlier, 31 ans, garde

Jean Davy, 44 ans, garde

Jean Dedieu, 40 ans, maréchal des logis

Fernand Devis, 42 ans, garde

Georges Douvry, 38 ans, garde

 

Reprenons le témoignage de Robert Genty

 

... à peine avions nous gagné notre gîte souterrain que l'immeuble tout entier fut secoué comme par un tremblement de terre sans que toutefois il y eut aucun bris de vitres ... quittant notre refuge par la porte de la rue Mornay afin de me rendre compte de ce qui se passait je me trouve plongé dans le noir ... grâce à ma lampe de poche je me dirige sur le trottoir de la rue Schomberg d'où s'élèvent des cris de douleur et le bruit des pans de mur qui continuent de s'écrouler ... une bombe avait atteint un bâtiment où logeaient les gardes républicains avec femmes et enfants ... aidé par un homme que je devine à peine par le blanc de sa chemise, je commence à déblayer les pierres qui encombrent la chaussée afin d'atteindre les victimes qui gémissent dans les gravats ...

un coup de feu claque, mon voisin s'affale sur le pavé sans un cri, je me penche sur lui, une balle lui a traversé le crâne ...

Les secours arrivent, volontaires, infirmières ... J'apprendrai plus tard le nombre de victimes.

 

 

 

 

 

 

Pierre Duny, 21 ans, garde

Maurice Gardies, 44 ans, garde

Marcel Guenego, 31 ans, garde

Jean Larreche, 36 ans, maréchal des logis chef

Gaston Lecompte, 43 ans, maréchal des logis chef

Jean Pisson Lahonda, 33 ans, garde

Maurice Violeau, 32 ans, garde-trompette

 

 

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