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Porte Notre Dame de la Préfecture de Police, le clairon sonne la trêve

 

Qui a demandé un cessez le feu ? Le général Von Choltitz, commandant du Grand Paris, selon les insurgés; les FFI selon l'état-major allemand.

Chaban-Delmas, le délégué militaire national, voit dans cette trêve un moyen de contrôler l'insurrection. Le colonel Rol-Tanguy, commandant la région Ile de France, y est farouchement opposé.

Le consul général de Suède, Raoul Nordling, négocie ...

Que les Allemands cessent les attaques contre les bâtiments publics occupés, que les prisonniers français soient traités suivant les lois de la guerre, que les pompiers puissent effectuer leur service sans être gênés .... réclame le Conseil National de la Résistance.

Que les agressions contre les Allemands cessent ... exige le général Von Choltitz.

Le colonel Lizé, commandant le département de la Seine communique qu'aucune trêve n'a été conclue entre le commandement français et le commandement ennemi .... que toute tractation avec l'ennemi est considérée comme un acte de haute trahison et, comme tel, puni de mort.

D'un simple accord de cessez le feu de trois quarts d'heure le samedi 19 août en fin d'après midi, on est passé à une trêve qui durera jusqu'au lundi 21 août à 19h00. Trêve mal respectée de part et d'autre mais qui permettra aux insurgés de conforter leurs positions dans les bâtiments occupés et de s'emparer de l'Hôtel de Ville.

 

Le dimanche 20 août, vers 15h30, des voitures allemandes accompagnées de voiturettes de la Préfecture de Police s'égayent dans les rues de Paris. Sur le toit du véhicule de la Préfecture un haut-parleur, sur les ailes des FFI armés; dans les autos allemandes des officiers surveillent les opérations. Il s'agit d'annoncer la trêve aux combattants.

"En raison des promesses faites par le commandement allemand de ne pas attaquer les édifices publics occupés par les troupes françaises et de traiter tous les Français prisonniers conformément aux lois de la guerre, le Gouvernement provisoire de la République française et le Conseil national de la Résistance vous demandent de suspendre le feu contre l'occupant jusqu'à l'évacuation totale de Paris. Le plus grand calme est recommandé à la population. On est prié de ne pas stationner dans les rues"

 

Michel Guillois, 45 ans, marié et père de cinq enfants, est sous-brigadier au commissariat du 14ème arrondissement. Il est chargé, avec trois autres policiers, de diffuser cet appel dans le quartier de l'Opéra.

 

 

 

Sur cette photo de l'Agence France Presse on distingue sur la droite une voiture de la Préfecture de police équipée de son haut-parleur et sur la gauche un véhicule allemand immatriculé WH (pour Wehrmacht); un policier français se tient sur l'aile droite.

Nous sommes avenue de l'Opéra comme en témoignent les enseignes du Monoprix au numéro 25 et de la Banco de Bilbao et des Etablissements Leleu au numéro 29. Le cycliste est à l'arrêt, des passants stationnent sur la chaussée devant les voitures. Nous sommes à coup sûr le 20 août dans l'après midi, le haut-parleur diffuse l'appel.

Il y a de fortes chances que ce soit le groupe du sous-brigadier Michel Guillois ?

 

 

 

 

Micheline, l'une de ses filles alors âgée de 21 ans, raconte :

A l'époque je demeurais place Sainte Opportune chez mon oncle et ma tante. Avertie par un coup de téléphone qu'il s'était passé quelque chose, je cours à la Préfecture pour apprendre que mon père se trouve au poste de secours de la rue Saint Roch. On ne me donne pas plus d'explications. Je me rends au poste; là on me conduit dans un sous-sol si peu éclairé que je ne distingue même pas la personne qui me parle : "Votre père est mort, il est à l'église Saint Roch."

Je ressors, c'est à deux pas ... je découvre mon père allongé sur un brancard à même le sol, il y a deux autres morts près de lui.

Le lendemain, en compagnie de mon oncle, je suis allée annoncer la triste nouvelle à ma famille ...

 

 

 

Quelques pas plus loin, à l'angle de la rue Louis le Grand, on peut découvrir cette plaque commémorative. Louis Dumas, âgé de 19 ans, habitait 6, rue de Saussure dans le 17ème arrondissement. Est-il mort au cours du même mitraillage ?

 

Monique, deuxième fille de Michel Guillois, précise :

Il m'a été dit que mon père, assis à l'arrière de la voiture, avait été atteint de deux balles, l'une dans la poitrine et l'autre dans le genou; un officier allemand avait donné l'ordre à une sentinelle qui se tenait sur le balcon de la Kommandantur, d'ouvrir le feu sur le véhicule.

 

Nommé brigadier, cité à l'ordre de la Nation et fait chevalier de la Légion d'honneur à titre posthume, Michel Guillois sera enterré au cimetière de Bourg la Reine le 13 septembre 1944.

Un monsieur Hérault, de la Chambre syndicale des marchands de volailles et de gibiers, a assisté Michel Guillois dans ses derniers moments entre la place de l'Opéra et le poste de secours de Saint Roch. Par courrier du 3 septembre 1944 il propose à madame Guillois de lui rendre visite afin de tenir la promesse faite au moribond de rapporter ses dernières et brèves paroles, à elle et à ses enfants destinées.

Merci à Sandrine d'avoir recueilli auprès de sa mère et de sa tante ce très intéressant témoignage.                                                  retour