Dans l'émission du vendredi 12 janvier 2007 soir, Freestyle avec Marjane Satrapi sur Radio France Culture dans l'émission Minuit/Dix. Elle raconte au micro de Laurent Goumarre son adolescence à Vienne, en Autriche, l'écriture et le succès de Poulet aux Prunes, sa visite à l'armée américaine de Westpoint parle de la littérature qui n'a pas de sexe, du rapport des femmes au sport, de sa fascination du Crazy Horse. Elle nous parle aussi de son rapport au cinéma... Lisez la retranscription ci-dessous. Voir la page de Radio Franceici (real audio)!
IntroductionIl est minuit dix, le rendez vous des pratiques urbaines et presque contemporaines. Il y a encore une heure, Marjane Satrapi dessinatrice reconnue entre autres pour sa série autobiographiques de 4 albums Persepolis, présentait une carte blanche, une sélection personnelle de films et de courts métrages dans le cadre du festival Paris tout court, une programmation qui se poursuit jusqu'au 16 janvier au cinéma l'Arlequin, Paris 6è arrondissement. Alors qu'elle est sur le point de terminer son premier long métrage, qui devrait être prêt pour la sélection cannoise et entre autres pour cette raison, elle est l'invitée de Chakib Lahssaini et Laurent Valière. Une voix italienne, pour un extrait du Voleur de Bicyclette puisque c'est un des choix de Marjane Satrapi pour sa carte blanche. On y reviendra plus tard. Marjane Satrapi est tout simplement le premier auteur de BD en Iran, vous êtes entrée dans l'histoire avec un grand H de ce pays avec Persepolis, BD en quatre volumes qui retrace votre vie personnelle et grace à cette vie, on retrace la vie contemporaine de l'Iran moderne. En 2004, vous obtenez le prix du meilleur album au Festival de la BD d'Angoulême pour Poulet aux Prunes et Persepolis sera bien au cinéma puisqu'il est en adaptation.
Est-ce que ça a été dur d'écrire Persepolis? Puisque d'un point de vue personnel on découvre des moments qui sont plutôt difficiles.M.Satrapi : "Bien sûr que c'est dur d'écrire cette chose, parce qu'on a la mémoire sélective et puis c'est notre façon également de survivre d'oublier ce qui n'est pas bon, donc il a fallu refaire tout un travail de mémoire pour se rappeler de tout et une fois qu'on se rappelle de tout, on ne peut pas tout mettre non plus. Evidemment tout ceux qui pensent que toute ma vie est là, ils pensent tout connaitre sur moi ils ont bien tort. Evidemment, si 16 ans de vie ça tenait dans 350 pages de bande dessinée, j'aurais eu une très misérable vie. Il faut faire des choix." Qu'est-ce que vous n'avez pas mis que vous regrettez de ne pas avoir mis?Je ne regrette rien de ce que je n'ai pas mis, c'était vraiment des choix très très conscients, j'ai pris vraiment des moments anecdotiques parce que je pense à l'importance de l'anecdote dans un récit, donc j'ai mis ce que j'avais envie de mettre, ce qui ne me dérangeait pas qu'on connaisse de moi. Qu'est-ce qui a commencé le fait de dessiner et d'écrire Persepolis?M.Satrapi : "Dessiner et écrire je l'ai toujours fait. En revanche faire une bande dessinée avec ça c'était pas du tout évident, parce que moi de toutes façons je ne viens pas du tout d'une culture de la bande dessinée, contrairement à beaucoup de gens qui font de la bande dessinée et qui avaient toujours rêvé de devenir des dessinateurs de bande dessinée, c'était pas du tout mon parcours, il s'est trouvé que je me suis retrouvée à l'Atelier des Vosges avec de très bons dessinateurs et auteurs de bande dessinées et que j'ai voulu certainement faire un peu comme mes copains et une fois que j'ai commencé à le faire ça m'a plu et j'étais contente et voilà." Qu'est-ce qui vous a décidé à l'écrire en français?M.Satrapi : "Cette histoire je l'ai écrite pour les autres. Si cette histoire je l'avais écrite pour les iraniens, je ne l'aurais pas écrite comme ça et je donne beaucoup d'explications, qu'est ce qui est ceci, la chambre nuptiale et qu'est ce qu'on fait, je ne l'aurais pas fait ainsi. C'était vraiment l'histoire que j'allais raconter pour les autres. Or, il se trouve que le langage c'est pas seulement une aliénation de mots qu'on connait, le langage c'est aussi une façon de penser. Donc pour pouvoir penser comme l'autre il fallait que je pense dans la langue de l'autre et donc le français est devenu un choix évident." Est-ce qu'il y a eu un travail d'adaptation, parce que vous arrivez d'Iran au moment où vous écrivez, où vous dessinez, et vous arrivez d'une culture iranienne où on ne connait pas les représentations humaines car c'est un pays islamique.M.Satrapi : C'est pas vrai, parce qu'en Iran il y a les représentations humaines que ce soit des sculptures ou autres, même tous les immams, les shiites, il y a des représentations humaines même pour le dessin. Dans tous les immams, ils présentent les prophètes, ils présentent tout le monde. L'Iran a un Islam très particulier parce qu'il y avait un Iran avant l'Islam qui avait ce grand empire perse qui existait. Même le shiisme, c'est l'islam mélangé au zoroastrianisme et toutes ces histoires des douze immams, la succession ne se fait pas de père en fils dans l'islam Qu'est ce que vous avez gardé de ces dessins là?M.Satrapi : Par exemple le manque de perspective, la miniature persane, ce sont des choses qui sont omniprésentes. Il faut dire que moi j'ai toujours été dans des lycées français, que mon adolescence je l'ai passée à Vienne, que j'étais d'une famille à tendance très occidentalisée et que c'était pas une culture qui m'était inconnue non plus. D'ailleurs on voit très bien dans les premiers volumes l'attitude très progressiste de vos parents. Comment ont-ils accueillis l'arrivée de ces livres là ? Pour la première partie, ils connaissaient tous les moments de votre vie, pour les avoir vécus avec vous. La deuxième partie de Persepolis où vous êtes en Europe et notamment à Vienne, il y a des moments qui sont très durs et qu'ils ne connaissaient pas de vous et que vous leur cachiez à ce moment là ?M.Satrapi : Oui, et je leur ai caché jusqu'au moment même où ils ont vu les livres, parce que moi j'ai fait énormément de bêtises dans ma vie, beaucoup beaucoup, mais j'ai toujours assumé mes bêtises toute seule. Je fais quelque chose je ne demande pas de dette à autrui, je fais des choses je les assume, en plus, retourner en Iran pour leur dire quoi? Vous avez envoyé une fille dans l'espoir qu'elle deviendrait présidente du monde et voilà cette loser qui revient et qui est toute droguée. Qu'est ce que ça aurait fait? Ca les aurait achevé. Et même 14 années après quand ils l'ont lu, ça les a presque achevé. Ca les a beaucoup marqué et ils n'en revenaient pas : "alors ma fille, mon dieu, dieu du ciel, qu'est ce qu'il s'est passé?", et je leur ai dit "oui oui ce sont des choses qui sont passées". Pour les auditeurs qui n'ont pas forcément lu les derniers numéros de Persepolis, il y a un moment, vous m'excuserez le terme, mais vous êtes presque clochardisée.M.Satrapi : Mais bien sur, même pas presque : j'étais clocharde à Vienne... en Autriche (pas Vienne en France, ça existe aussi). Oui, bien sur, j'ai fait un choix de vie, étant marginale dès le départ, j'étais très attirée par les marginauxdonc je suis devenue amie avec tous les punks et le reste des hippies qui restaient à Vienne.
Vous vous êtes même retrouvée en danger physiquement, puisque vous étiez sur le point de succomberM.Satrapi : Bien sur, j'ai même fait des tentatives de suicide, oui oui j'ai fait beaucoup de choses, j'étais très rock n' roll à l'époque avant. Plus maintenant ?M.Satrapi : Oui maintenant aussi, mais maintenant par exemple j'ai un physique très respectable, parce que très vite j'ai compris qu'il ne faut pas avoir la tête de ce qu'on est réellement, ça m'ouvre les portes. Ce qui veut dire que vous êtes toujours un peu hippie et que vous essayez de le cacher au maximum?M.Satrapi : Ah non non, hippie je ne le suis certainement pas, je ne suis pas peace and love pour un sous, mais bon je ne suis pas non plus la dame bourgeoise non plus. Comment les autorités iraniennes ont-elles accueilli ce livre ? Vous vous êtes retrouvée un peu ambassadrice de l'Iran sans vous en rendre compte.M.Satrapi : Dans un premier temps ils ont dit "ah, cet auteur iranienne qui a écrit des livres", parce que vous savez, dans une dictature, le dictateur c'est le père de la nation, donc tout ce qui vient de cette nation c'est bien. Et à moment donné ils ont fait un tout petit peu fis de moi, parce que je pense que c'était pas nécessaire, moi je ne suis pas là en état de jugement, je récite quelque chose, je dis ce qui s'est passé sans porter de jugement, je dis "voilà ce que j'ai vu", maintenant les autorités iraniennes franchement ne m'ont jamais posé de problème. Je ne suis pas retournée en Iran non plus. Mais vous avez un ton assez subversif, donc on peut un peu comprendre que les autorités iraniennes fassent un peu fis de vous comme vous ditesM.Satrapi : Absolument mais je ne suis pas retournée en Iran, justement pas parce qu'on m'a envoyé des lettres en disant on fera ceci et celà, c'est parce que l'Iran c'est pas un état de loi et que je ne sais pas ce qui va arriver et c'est dans ce non savoir que je préfère ne pas entrer. Et puis vous savez il y avait un chanson de Brassens qui a réellement révolutionné ma vie parce que moi je viens d'une culture qui a le culte du martyre, ça n'a rien à voir avec l'islam, c'est très très iranien ce grand culte de martyr et je voulais mourir et tout ça. En fait cette chanson de Brassens où il dit "avec tout le sang que les gens ont déversé pour leurs idées, si quelque chose aurait du changer, on aurait du vivre au paradis". Comme lui, j'aimerais bien mourir, mais d'une mort très lente pour mes idées. Je voudrais revenir sur l'épisode en Autriche, puisque dans la bande dessinée c'est très elliptique, à un moment vous vous clochardisez, vous êtes à l'hopital et vous survivez, et c'est de ce moment là que vient le sursaut et tout d'un coup on a l'impression que tout va aller bien dans votre vie. C'est comme dans la bande dessinée dans la réalité ?M.Satrapi : Grosso modo oui mais ça a pris un peu des années avant que tout devienne bien. A 20 ans, comme beaucoup de gens, je n'avais pas de cerveau, tout était commandé par mes hormones et mes instincts, ce qui n'était pas vraiment une très bonne chose. Il a fallu l'âge pour savoir ce que je voulais, mais vraiment vous me donnerez 10 millons d'euros pour me dire vous aurez 20 ans de nouveau : jamais de ma vie, jamais, je sais beaucoup mieux ce que je veux maintenant, mais c'est vrai que cet épisode ça m'a marquée. Persepolis est un succès en France, vous nous avez dit hors antenne que c'était un plus gros succès encore aux Etats Unis. Quelle est la différence de réception entre la France et les Etats Unis, notamment j'ai appris que c'était inscrit au programme scolaireM.Satrapi : Oui scolaire, même universitaire, dans 150 universités. La grande différence c'est que, en France j'ai été très bien reçu, il ne faut pas dire le contraire, les gens ont vraiment embrassé ce livre, ils m'ont vraiment pris dans leurs bras, mais il n'y a pas cette nécessité comme aux Etats Unis qui se sont mis en guerre contre cette région là où les gens ils ont peur de nous, donc il y a vraiment une nécessité de savoir qui est cette personne qu'on appelle l'axe du mal. Donc dans les premières années, quand j'allais faire le book tour, il y avait une partie de curieux qui venaient voir l'image de l'axe du mal, la personne qui représentait l'axe du mal et puis maintenant après des années, on me parle beaucoup de l'art, de la culture, des choses qui m'intéressent un peu plus. Vous avez été invitée aux Etats Unis, je crois que vous avez eu des moments assez accrochés dans des débats à la télévision, à CNN?M.Satrapi : Oui, enfin, pour les américains, c'est accroché car je dis ce que je pense, mais ce qui est quand même incroyable c'est qu'on m'a invitée à l'académie militaire de Westpoint pour que je parle devant 700 officiers, chose que j'ai faite, où j'ai dit que j'étais contre cette guerre, et le général qui était là disait qu'il était également contre la guerre, que lui c'était un militaire qui croyait en fait à l'armée pour défendre un pays, pas pour attaquer d'autres pays. Donc je l'ai fait et ça s'est très très bien passé. Ca s'est tellement bien passé qu'on m'invite maintenant à l'académie navale aussi pour faire la même chose. Vous allez faire la tournée de toutes les armées aux Etats Unis. Vous dites que l'image qu'on avait de vous c'était l'image de l'axe du mal aux Etats Unis, mais est ce que vous aussi vous aviez une image aussi préconçue des Etats Unis ?M.Satrapi : Moi je suis allée aux Etats Unis et évidemment autant eux ils pensent de nous ce qu'ils pensent, moi j'ai grandi dans un Iran où mes parents étaient anti impérialistes de gauche et pour moi le mal du monde venait des américains, donc je suis allée la première fois pour détester ces gens là, pour trouver de bonnes raisons pour les détester et je me suis vraiment pris une baffe et c'était très marrant parce qu'il y a un moment où j'ai beaucoup voyagé aux Etats Unis et où au moment même où ils nous appelaient l'axe du mal, c'était moi qui défendait les américains en France, ce qui était le comble de l'ironie, comme vous pouvez bien l'imaginer. En 2004, "Poulet aux Prunes" est élu meilleur album au festival d'Angoulême, est-ce que c'est un peu destabilisant, un peu décevant que ce ne soit pas Persepolis qui n'ait été célèbré plus que Poulet aux Prunes parce que c'était plus proche de votre univers, beaucoup plus symptomatique de votre état d'esprit ?M. Satrapi : J'étais surtout très contente, vraiment, au contraire. Non, Persepolis c'était vraiment un cri que j'avais à pousser, c'était l'histoire que j'avais racontée depuis l'âge de 14 ans, la première fois que j'avais quitté mon pays et que j'avais répété et répété et répété et que j'étais très contente d'écrire une fois pour toutes, comme le dit très bien Umberto Ecco qui dit que pour lui écrire c'est la seule façon de s'exprimer sans être interrompu. C'était également mon cas. Je ne suis pas quelqu'un qui est forcément très intéressée par la politique, c'est la politique qui s'intéresse à moi et aux autres. Là vous êtes dans la formule, parce que vous êtes très intéressée par la politique...M. Satrapi : Oui, mais c'est malgré moi, si j'étais née à Neuilly, ou je ne sais où, dans une autre famille, je n'aurais pas eu toute la merde que j'ai eue, je n'y serai pas intéressée. La vie a fait que par un changement politique, toute ma vie a complétement basculé, donc je ne peux pas ne pas m'y intéresser, puisque ça me touche directement, moi. En revanche, sur la forme de la narration, j'adore les histoires d'amour. Poulet aux Prunes était beaucoup mieux, surtout que ça arrêtait toutes ces mauvaises langues qui me traitaient de phénomène éthnique, que sais-je encore, sujet à la mode, voilà la bougnoule qui arrive, elle nous parle de son pays, voilà elle est encensée. Pourquoi, vous l'avez lu ça, vous l'avez entendu ?M. Satrapi : Oui! Bien sur, phénomène ethnique, ils ont écrit. Je ne sais plus où, c'est encore un connard qui a écrit. Justement avec Poulet aux Prunes on a l'impression que vous essayez de vous détachez de cet univers un peu politique et que vous arrivez complètement dans la poésie, je trouve même qu'on est dans la poésie perse.M. Satrapi : Oui perse, non seulement dans la structure, mais je cite aussi beaucoup de Hayam, je cite du Molana, oui, il y a un côté 1001 nuits, mais à la fois il y a toujours un fond politique : vous comprenez par exemple dans ce livre que dans les années 1950 il y a eu un coup d'état américain, vous savez que le voile a été interdit en Iran en 1935. Il y a toujours ce fond politique qui est là, parce que c'est un pays qui a changé complètement de visage à partir du moment où il y a quelques gens qui ont décidé quelque chose, la vie des gens a complètement basculé. Vous étiez plus dans la performance avec Poulet aux Prunes? On a l'impression que dans Persepolis c'était assez fluide, que c'était très facile parce que c'était votre propre histoire alors que Poulet aux Prunes c'est vraiment une oeuvre artistique, poètique, réfléchie, avec presque une morale à la fin.M. Satrapi : Oui, mais c'est ce que j'aimais... enfin, la morale, moi j'aime pas trop le mot moral, et puis je n'aime pas du tout la moralité et surtout je n'en ai aucune. J'ai une grande éthique, mais la moralité, nenni, que nenni, rien du tout. Persepolis c'était l'histoire de votre vie, mais Poulet aux Prunes ça consistait en quoi, puisque c'est l'histoire d'un homme en fait.M. Satrapi : Oui, et je ne me suis jamais sentie aussi libre que quand j'ai écrit l'histoire d'un homme, parce que toutes ces conneries qu'on nous raconte sur la littérature féminine, la littérature masculine, parce qu'il y a un retour de machisme malheureusement encensé par les femmes avec tous ces festivals de femmes au cinéma, de femmes par ci, de femmes par là, de femmes dans la bande dessinée, que j'ai refusé à chaque fois catégoriquement, je n'ai jamais participé à ce genre de choses, parce qu'aux jeux olympiques on fait deux catégories parce qu'on a pas les mêmes muscles, en ce qui concerne le cerveau on ne peut pas faire deux catégories et moi je suis beaucoup plus de l'avis de Nathalie Sarraute qui dit que la littérature n'a pas de sexe, je pense que la littérature n'a pas de sexe, la plus grande preuve c'est Flaubert qui n'a jamais connu de femme ou presque, qui a écrit Madame Bovary, qui vraiment dans son côté pathétique me fait penser vraiment plus à moi même que quand Anaïs Nin elle écrit ses exploits amoureux dans lesquels elle ne pue jamais, elle ne pète jamais, chaque homme qui la voit il a une érection d'enfer, ça se passe super bien, elle le raconte à son mari qui a l'ai super ravi. Cette femme c'est pas moi, moi, des fois je pue et ça ne se passe pas super bien, c'est comme ça. Les hommes se sont toujours permis d'écrire sur les femmes, or on se met jamais à la place des hommes. Une fois que j'étais cet homme, je me suis sentie complètement libre, j'étais vraiment moi même et à l'image de cet artiste, mais il est horrible, il est égoïste, il est égocentrique, il détruit tout et à la fois il est très charmant et attachant. Et c'est comme ça que je m'estime aussi, c'est à dire que je suis hyper pénible, mais je suis charmante aussi. Marjane Satrapi vous n'êtes pas particulièrement fan de boxe féminine ou masculine ?M. Satrapi : Non mais je comprends ce que dit Violette, car moi je regarde quand même pas mal le sport, par exemple dans le tennis, le tennis masculin avec les raquettes et tout ça, si vous devez donner un coup de service qui va à 300 km/heure et que l'autre ne peut pas répondre, ce n'est pas intéressant, les femmes n'ayant pas la même force, ça fait que le jeu est beaucoup plus intéressant quand ce sont les femmes qui jouent. Quand vous avez un Mike Tyson qui donne un coup et que l'autre il est mort, qu'est ce qu'il y a à voir après, ben il est mort quoi. Allez, une autre forme de spectacle, j'ai vu qu'il y avait une autre forme de spectacle qui vous fascinait, c'est le Crazy Horse SaloonM. Satrapi : Ouais, moi j'adore le cabaret, le Crazy Horse précisemment parce que les filles au Lido elles me paraissent un peu trop maigres, elles ont toutes les côtes qui sortent. Au Crazy Horse, il y a un truc incroyable, il y a ces femmes qui sont quand même incroyablement faites et puis il y a une rencontre avec la nature puisqu'elles ont ces fesses, c'est incroyable, mais elles tombent jamais. Au Lido, il y a ce côté : on dine et on parle, alors qu'au Crazy Horse on est vraiment comme un voyeur, on est assis, on vous ramène votre petit verre et tout ça, et c'est beau, c'est très très joli, moi j'aime beaucoup. Je n'y vais pas souvent mais j'aime bien les dîners spectacles, j'aime bien le cabaret.
Et le cinéma. On vous a donné carte blanche ce soir au Festival Paris Tout Court, on vous a demandé de choisir 4 films. D'ailleurs c'est un festival de courts métrages, mais vous avez choisi deux longs métrages, vous nous expliquerez pourquoi. Mais d'abord, vous ne le cachez pas, vous avez dit que vous étiez une bourgeoise iranienne, que vous aviez grandi dans un milieu plutôt favorisé, je me demandais si vous alliez souvent au cinéma dans les années 70, on pouvait voir tous les films ?M. Satrapi : Absolument, on pouvait voir tous les films, à part les films politiques, évidemment, il y a des films comme Z ou des choses comme ça, qui sont sortis après la révolution. On a eu un moment de liberté où on pouvait voir des tas de choses différentes. Bataille à Alger, je suis allée le voir au cinéma avec mes parents, enfin tout ce qui était contre la guerre du Vietnam, ce sont des choses que j'ai vues après. Mais en revanche, j'ai vu des Bergman, à 7 ans, parce que mes parents étaient obsédés pour que je devienne une intellectuelle. Mais en même temps j'ai vu tous les films de Bruce Lee aussi, ce qui m'a donné envie de faire du karaté plus tard et j'en ai fait. J'ai vu beaucoup de films de Bollywood aussi, c'était avec les bonnes qui adorait ces films... Les bonnes : nous on avait une bonne, mais on habitait dans un immeuble où ma tante avait une bonne aussi, etc, donc ça faisait plusieurs bonnes qui nous sortaient et qui nous ramenaient. Dun côté Bruce Lee, Bollywood, et de l'autre côté Ingmar Bergam, Le Septième Saut, et en veux-tu en voilà. Actuellement, en France, vous allez voir régulièrement des films ? C'est quelque chose important qui vous nourrit dans votre travail de dessinatrice ?M. Satrapi : Oui, certainement, et moi j'aime beaucoup avoir ce laps de temps où je suis ailleurs et dès fois ça m'énerve. J'ai vu King Kong, et... ah mais ça ne m'a pas plus du tout! King Kong il ne vient jamais, et quand il vient il est tout pourri. Et cette histoire où il est sur la glace, parce qu'en même temps qu'ils montraient le film je disais : King Kong pour être sur cette glace il faut que la glace ait tant de profondeur, c'est à dire qu'il faut qu'il fasse au moins -30°, et vous avez Naomi Watts qui est en nuisette et elle n'a même pas froid... non. Le dernier film que j'ai vu au cinéma, c'est Borat, je l'ai vu 4 fois. Jai adoré parce que j'aimais beaucoup cette critique de société américaine, parce que ça n'a rien à voir avec le Kazakhstan bien sur, et moi j'aime bien cet espèce d'humour burlesque, ils font caca et tout, j'aime bien moi Je suppose que vous avez vu le film "Hors Jeu" de Jafar Pinahi? Qu'en avez vous pensé ? Est-ce que ça vous a paru réaliste ou délibéremment optimiste ?
Sur les femmes, je posais moins la question sur les femmes dans le film que sur l'attitude des soldats.M. Satrapi : Les soldats ont toujours été comme ça, réellement. Moi, je me suis fait arrêtée par des gardiens de la révolution et ils ne sont pas tous des barbus convaincus qui veulent vous tuer. Dès fois, il y a un pauvre type qui vient d'un petit village et on lui dit qu'il faut arrêter la fille qui n'a pas bien mis son voile. Le mec voulait m'arrêter, je lui ait dit "non, non, je ne veux pas monter dans la voiture" et à la fin il me disait "et alors, tu peux me donner ton numéro de téléphone"?. C'est ces mêmes types, ce n'est pas cette vision catégorique où ils sont tous pourris, non. On va reparler des 4 films que vous avez choisi ce soir : 3 films en noir et blanc : deux longs métrages, dont un typique de l'expressionisme allemand, c'est le "Cabinet du docteur Caligari" (1919) et un de 1948 typique du néoréalisme italien, c'est le "Voleur de bicyclette". Pourquoi ces deux films?M. Satrapi : Le "Voleur de bicyclette" c'est un film d'après guerre. C'est après la seconde guerre mondiale, il y a tout ce mouvement néoréaliste italien, justement vous voyez vous avez des acteurs pas connus, comme ils n'ont pas les moyens, ils tournent dans la rue, avec toutes les ruines de la guerre, mais ce sont des films qui viennent dans une période post-guerre. L'expressionisme allemand est également un cinéma post-guerre. C'est un cinéma qui commence en 1919 et justement les allemands, contrairement aux italiens, parce qu'ils n'avaient pas les moyens de tourner, ils ont tout tourné en studio. Mais ces deux cinémas là ont ce point là en commun c'est qu'ils sont post-guerre. Il y a ce côté de désespoir, de contraste et de cet espoir du fait que la guerre est finie. Cet espoir n'est pas vraiment, surtout que l'allemagne après la première guerre mondiale était en dépression réelle, mais moi, je suis quelqu'un de post-guerre aussi. Donc ces deux cinémas là ça me fait écho à chaque fois que vois l'un ou l'autre, ça me parle beaucoup. Vous parlez d'écho en vous, ce sont des films qui vous ont aidé à faire Persepolis parce que l'histoire est très réaliste.M. Satrapi : Bien sur, oui, et c'est aussi l'importance de l'anecdote aussi. Vraiment, ce film de Dessica, ça a été à partir d'une anecdote que ce monsieur obtient enfin un métier pour coller des affiches, il a besoin d'une bicyclette. Il achète cette bicyclette et on lui pique sa bicyclette le premier jour de son travail et sa vie est foutue. En fait, à travers cette petite anecdote, on comprend tout le drame de l'Italie après guerre. C'est ce que j'ai essayé de faire dans mon travail : à chaque fois, les chapitres de Persepolis sont des anecdotes, mais chaque anecdote exprime aussi beaucoup plus de choses qui se passent autour. L'expressionisme allemand, pour parler de l'autre film, c'est aussi toute cette façon de voir l'image, c'est sur l'esthétique de l'image. Parce qu'à la fois vous avez des courbes, des lignes toutes droites, vous avez le noir et vous avez le blanc. Vous avez ces personnages qui surjouent, c'est très très théâtral. Ces ambiances très lugubres. Esthétiquement évidemment, ça m'a beaucoup influencé. Est-il vrai que quand vous dessinez vous faites très attention aux expressions et tout le reste vous zappez ?M. Satrapi : Dans une bande dessinée, le dessin fait partie de la narration. On écrit en dessinant, c'est pas du tout de l'illustration de ce qu'on a déjà écrit. Donc à partir du moment où vous imaginez que le dessin ça fait partie de cette narration, puisque moi j'ai des bandes dessinées qui sont très bavardes dans lesquelles il y a beaucoup de textes, de rajouter des décors, des arrières plans, des arrières arrières plans : ça ne fait qu'alourdir, et il y a un temps où on pose son regard sur une case. S'il y a beaucoup de texte, il faut alléger la case. Le dessin il fallait qu'il soit cohérent avec ce que j'allais dire, je pensais que le mariage comme ça se passait beaucoup mieux. Alors il y avait 2 longs métrages et 2 courts métrages. On regarde un extrait de "Raging Blues", de Vincent Parronaud. Pour résumer, c'est l'histoire d'une mère de famille pauvre, délogée par de méchants promoteurs en chapeaux haut de forme, au point qu'elle est prête à faire des choses. Pourquoi ce choix?M. Satrapi : C'est ce qui m'a donné envie, après avoir vu ce court métrage, de travailler avec Vincent Paronnaud qui est co-scénariste et co-réalisateur du prochain film de Persepolis, nous travaillons ensemble. Stéphane Roche aussi qui est au compositing et au montage, parce que c'était gens d'une petite boite d'animation qui s'appelle "Je suis bien content". Esthétiquement c'est très très beau, ce que ça raconte ça me plait également beaucoup. J'ai lu dans des interviews que vous disiez que vous ne pouviez pas travaillé en groupe, que vous aviez travaillé chez Haagen Daas un jour et que vous aviez laissé tout tomber. Pour un dessin animé, il y a toute une équipe, comment faites vous ?M. Satrapi : Il y a 100 personnes. Ecoutez, dans les six premiers mois, je voulais tuer tout le monde. Tous les jours quand je les voyais j'étais "ah, bonjour" en leur faisant un sourire et dès qu'il partait j'étais là "j'espère qu'il va crever"! Ca, c'était les six premiers mois. Et puis petit à petit, ces gens là ont tellement mis d'eux même, de leur enthousiasme, de talent, de l'art. C'était tellement incroyable ce qu'ils ont fait, que j'ai commencé à apprécier. Parce que le travail de groupe ça a aussi l'avantage qu'il y a beaucoup plus de cerveaux, beaucoup plus de talents qui sont là et puis maintenant que je les aime beaucoup, ils partent les uns après les autres. C'est comme ça la vie... Je ne suis pas contente maintenant quand ils partent, ils me manquent maintenant. Ca veut dire que vous allez enchaîner là : un dessin animé, un second... Ce dessin animé là est dessiné à la main, artisannalement, pas du tout par ordinateur?M. Satrapi : Attendez là, on va voir si je suis encore vivante. Pourquoi artisanalement et pas par ordinateur, parce que moi j'ai toujours fait l'éloge de l'imperfection, que l'être humain est imparfait. Le dessin qui sort de la main d'un être humain a son imperfection qui le sublime. Depuis Rembrandt, il y a personne qui a fait des dessins réalistes mieux que Rembrandt, ça n'existe pas. Alors que quand vous avez quelque chose qui est fait sur ordinateur, deux années, trois années, plus tard c'est déjà daté. Je n'aime pas et vous voyez c'est l'imperfection de l'être humain, d'ailleurs vous voyez dans l'histoire humaine, il y a juste un moment où l'humain est très intelligent, c'est dans la Grèce antique où ils sont très intelligents, parce que tous leurs dieux sont imparfaits, ils font tout comme les humains. La seule chose qui les rend divins, c'est qu'ils ne meurent jamais. Mais d'accepter qu'on est imparfait, ça décomplexe et ça nous sublime. Alors que toutes les autres cultures où on a dit que l'être humain devait être parfait, ça les frustrait et finalement ça donne des nazis. Donc pour l'éloge de l'imperfection et l'imperfection de la main, voilà nous avons fait un dessin animé parfaitement fait à la main. En 2004, vous aviez décidé d'arrêter avec Persepolis, c'était le 4ème tome, et hop vous commencez un dessin animé qui reprend la même histoire.M. Satrapi : Oui, il reprend la même histoire... Ne me demandez pas pourquoi je l'ai fait, je ne sais pas pourquoi je l'ai fait. Le fait est que la narration n'est pas la même, et surtout si c'était pour me flatter moi, je vous dirais toujours que mon livre sera toujoutsmeilleur. Le fait est qu'il me semble que le film est mieux que le livre, parce que le film est co-réalisé par Vincent qui a un talent incroyable et la complémentarité qu'on a eue et le mélange de ce qu'on savait faire, ça a donné un mélange qui m'impressionne. Dans le dessin animé, on est un peu comme le seigneur ou le bon dieu : vous savez, le seigneur créé et dit "lève toi et marche". Moi, j'ai fait un dessin, il se lève, il marche et il parle, il fait tout. Je n'ai pas vu beaucoup de dessins animés autobiographiques. Ca ne change pas la façon de faire ? Quand vous regardez la Marjane Satrapi dessinée à l'écran, il faut qu'elle bouge comme vous bougez sur terre ?M. Satrapi : Exactement, c'est à dire qu'on fait un dessin animé très très réaliste, ce n'est pas du tout du cartoon. Il y a eu une raison très précise pour faire un dessin animé et pas un film, c'est que dès que vous situez l'action dans un endroit réel, ça devient vraiment de nouveau le problème ethnique de ces gens là qui sont ailleurs, qui sont presque fous, qui ne sont pas comme nous, etc. Or, le dessin a une abstraction où l'histoire devient universelle, parce que cette histoire est universelle, parce que n'importe quelle dictature fonctionne de cette même façon. D'autre part, il y a aussi des scènes honiriques, il y a des scènes de rêve, que si on veut faire en images réelles on va passer en science fiction et ce n'est pas du tout mon souhait non plus. Donc on peut garder la même façon de traiter, en changeant de registre de nouveau grâce au dessin, mais effectivement, oui c'est un dessin animé très réaliste, c'est pour adulte, c'est en noir et blanc, il y a beaucoup de nouveautés là dedans. Pour le casting des voix, qui est assez important aujourd'hui pour même vendre les dessins animés, vous avez choisi 3 stars : pour la mère Catherine Deneuve, pour la grand mère Danielle Darrieux, pour la fille Chiara Mastroianni. Donc vous avez choisi la famille Deneuve, parce qu'il y a un acte de cinéphile dans le fait de choisir Danielle Darrieux, qui a été dans plusieurs films la mère de Catherine Deneuve. Tout cela est parfaitement identifiable dans votre façon de penser ?M. Satrapi : Oui, mais c'est surtout trois très grandes et très bonnes actrices, il ne faut pas l'oublier. C'était vraiment mon choix le plus cher, c'est ce que je rêvais d'avoir. On leur a envoyé le scénario, elles ont accepté de jouer dans le film donc mes rêves sont devenus réalité. Elles ont été vraiment incroyables. Je savais que Danielle Darrieux avait été la mère de Catherine Deneuve au cinéma, mais si je ne l'avais pas aimée dans ses autres films, je ne l'aurais pas choisie. Danielle Darrieux, c'est avant tout une actrice hors pair, avec une voix magnifique, coquine comme c'est pas possible. C'était une prise et c'était la bonne prise et elle a été magnifique. Et aux Etats Unis ? Puisque le film va sortir aux Etats Unis, les voix seront ?M. Satrapi : Pour la grand mère, on a Gena Rowlands, que j'ai rencontrée. Il y a Catherine Deneuve qui va refaire la voix de la mère pour la version anglaise également... Et la fille c'est Paris Hilton ? (rires)M. Satrapi : Non, ça va être Britney Spears! On ne sait pas encore, donc je ne m'avance pas tant que je ne suis pas sure. Je voulais vous faire réagir aux dernières élections municipales iraniennes où les femmes sont arrivées en tête du scrutin, quel est votre sentiment par rapport à cette actualité plutôt positive ?M. Satrapi : Bien sur, c'est la preuve que cette société change, qu'elle évolue, sauf que l'évolution ça prend du temps. Vous savez les femmes encore en 1963 elles ne pouvaient pas ouvrir encore un compte en banque, elles n'avaient pas le droit de vote jusque dans les années 1940. C'est la situation économique, c'est l'éducation des femmes, c'est ce qu'elles font qui leur donne leurs droits, et nous on est sur ce même chemin, c'est le début de la démocratie. Peu importe qui sera président en Iran et peu importe ce qu'ils feront, la révolution a déjà eu lieu. Une fois qu'une femme est sortie et qu'elle a travaillé, on ne pourra pas lui dire "non, non, maintenant tu retournes chez toi". Donc cette avancée est là et ça vient juste de reconfirmer l'espoir que j'ai pour mon pays. Vous y retournez en Iran ? Ca fait combien de temps que vous n'y êtes pas allée ?M. Satrapi : Non, ça fait 7 ans, bien sur que ça me manque, évidemment. Ce qui me retient de ne pas y aller c'est que l'Iran n'étant pas un état de loi, je ne sais pas ce qui m'attend. En Iran, malheureusement il y a encore beaucoup de gens qui pour avoir écrit les articles qu'ils écrivent, ou pour avoir les opinions qu'ils ont, ils vont en prison. Donc voilà, ça ne me fait pas plus envie que ça. N'oubliez pas qu'il y a deux années de ça, il y a cette photographe irano-canadienne qui est allée prendre des photos en Iran, qu'on a arrêtée et qu'on a tuée. Le procès n'a toujours rien donné. On est encore dans cet état là. Mais en revanche, oui mon pays me manque, mais je suis une personne qui a la chance de vivre où elle veut, de faire le métier qu'elle veut, et en plus avoir du succès avec ce qu'elle fait, je trouverai ça complètement incongru de ma part de me plaindre et dire que ça me manque, parce que si moi je dis ça, qu'est ce qu'ils diront les gens qui sont en Iran. Est ce que vous pourriez écrire sur cet Iran de Mahmoud Amadinejab ?M. Satrapi : Non, parce qu'il faut que j'y sois. Parce moi ce que j'entends et aussi ce que je vois, c'est toujours de seconde main et tant que je n'y suis pas, je ne me permettrai pas. Vous restez en lien avec l'Iran ? Vous lisez la presse iranienne ?M. Satrapi : Bien sur, mes parents vivent toujours à Téhéran et c'est eux aujourd'hui qui font le déplacement vers moi. Je les vois très régulièrement. Les nouvelles qu'ils me rapportent sont des bonnes nouvelles, par exemple que ma famille va bien, que Amadinejab n'a pas pu remettre le tchador sur la tête des filles, que les vêtements des filles sont de plus en plus courts, qu'elles sortent tout le temps. Il y a une information insolite : en Iran les femmes se font refaire le nez... à l'occidentale.M. Satrapi : Bien sur, toutes. Mais ça c'est depuis les années 1950 qu'elles le font refaire. Elles sont toutes blondes... vous savez moi j'ai un mari suédois, à chaque fois je lui dis "tu crois que la blonde scandinave ça vient de chez toi? Mais va chez moi tu vas voir elles sont toutes blondes". Comment avez vous vécu la pendaison de Saddam Hussein ? On a vu des scènes de liesses en Iran car Saddam Hussein avait quand même déclenché le conflit avec l'Iran quand il était à la tête de l'Irak.M. Satrapi : Moi, j'ai considéré comme toute personne sensée, musulman ou pas, qu'on fasse une revanche personnelle c'est une chose mais qu'une société décide de sang froid de tuer quelqu'un, ça ne se fait pas. Surtout que Saddam Hussein n'avait rien dit encore. Je pense qu'il avait tellement d'affaires avec la France, les Etats Unis et l'Angleterre, qu'il fallait le faire taire, parce que tout le monde serait dans la merde jusqu'au cou. Surtout, quand on donne des leçons de moralité sur la barbarie, on ne pend pas un type, mais que ces gens là doivent être en prison à vie et qu'on obtienne le maximum d'informations. C'était une indignation, ils ont fait de Saddam un martyr. J'ai été complètement indignée, que ce soit par la mort de Saddam Hussein ou n'importe qui d'autre Une société ne peut pas condamner quelqu'un à mort. Je suis contre la peine de mort pour n'importe qui, même pour Saddam Hussein.
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