New York, ville en crise
"A côté de sa puissance financière, du prestige
de ses institutions artistiques et culturelles, New York accumule aussi
les problèmes de la société américaine : 1%
de sa population est sans logis; cela fait un total de 90.000 personnes
qui cherchent un coin de chaleur chaque nuit. Un New Yorkais sur 300 est
séropositif.
Jusqu'à une date récente, les attraits de New York compensaient
les difficultés de la vie dans cette métropole bouillonnante
d'activité. Mais avec 1095 meurtres en 1989, deux fois le chiffre
de Los Angeles, les résidents prennent peur, d'autant que la folie
meurtrière ne se limite pas à des règlements de compte
entre gangs: en une semaine de juillet, quatre enfants ont été
tués par des balles perdues, dont un qui dormait dans son berceau.
Dans le métro de Manhattan, un touriste de l'Utah a été
poignardé pour avoir secouru sa mère agressée par des
voyous. Une secrétaire qui faisait du jogging dans central Park a
été sauvagement violée par un groupe de jeunes. L'hostilité
entre Coréens et Haïtiens, Juifs et Jamaïcains dégénère
en agressions racistes. La population de la ville, choquée par cette
flambée de violence, se plaint de la passivité du premier
maire noir de la ville, M. David Dinkins.
Mais ce dernier hérite d'une ville au bord de la faillitte. Depuis
1980, les réductions budgétaires décidées à
Washington ont fait diminuer de 16 milliards de dollars par an les aides
au logement. Il a fallu diminuer de 14% les effectifs de la police pour
stabiliser le budget de la cité. Le nombre de balayeurs est passé
en trois ans de 1400 à 300 : les rues sont de plus en plus sales.
Les épidémies de SIDA, tuberculose et syphillis grèvent
lourdement le budget d'assistance médicale de la ville. Les conduites
d'eau et de gaz en piteux état forcent l'évacuation fréquente
d'immeubles entiers. Quand les résidents sont autorisés à
revenir, leurs logements ont été pillés. Le demi-milliard
de dollars nécessaire pour l'entretien des écoles ne peut
être trouvé, alors que la population ne cesse de croître
: 1/3 des élèves abandonnent leurs études venant grossir
le flot des chômeurs.
Certes le capital privé construit toujours des immeubles somptueux,
mais la spéculation immobilière écarte de la ville
les classes moyennes, celles qui paient les impôts permettant de faire
fonctionner la ville. Le maire doit dès lors augmenter les impôts
et réduire encore plus les dépenses de la ville, entretenant
ainsi une spirale du déclin."
Le New Jersey, banlieue de New York
"D'un côté de l'autoroute, des motels où l'on paye
à l'heure, de l'autre des immeubles résidentiels de luxe et
des pavillons dans la verdure. Au milieu des mérécages, le
complexe sportif des meadowlands, avec un hippodrome et un stade de football.
Plus au Sud, on traverse les vieilles cités industrielles en crise
de Newark, Elizabeth, Bayonne, villes multiethniques, multiraciales, où
les clochers des églises de toutes confessions dominent des maisons
où les gamins ravagés par le crack et molestés quotidiennement
chez eux n'ont comme horizon que les piliers soutenant l'autoroute la plus
chargée du pays (190 millions de véhicules par an). Large
de 20 voies à cet endroit, le New Jersey Turnpike se glisse entre
l'éaéroport international de Newark, le plus moderne des trois
aéroports new-yorkais, et Port Elizabeth, le plus grand terminal
à conteneurs des Etats-Unis. Juste à côté, Bayway,
la plus grande raffinerie de la côte Est, qui parfume les environs
de ses vapeurs suffocantes. Vient ensuite le vaste magasin Ikea, le seul
de l'aire metropolitaine. Soudain, c'est la campagne et l'on se souvient
que le New Jersey est aussi appelé l'Etat-jardin.