La notion de PUISSANCE revient fréquemment dans le programme
de géographie de 3ème
"III° partie du programme :
les puissances économiques majeures : (...) puissance mondiale
des Etats-Unis ; Japon (...) puissance industrielle, maritime, financière
et commerciale ; l'Union européenne (...) puissance économique
et commerciale
IV° partie du programme
La France puissance européenne et mondiale
De nombreux sujets de brevet ont porté en juin 2000 sur ces questions
de "puissance".
Dans ce type de sujet, il convient d'abord de décrire les aspects
de la puissance d'un pays, puis dans un deuxième temps d'en distinguer
les limites.
En voici une grille d'analyse des éléments constitutifs
de la puissance d'un pays ou d'un groupe de pays :
LES FACTEURS DE LA PUISSANCE
Facteurs matériels
-Ressources de base (territoire et population)
ressources minières et énergétiques (autosuffisance?
excédentaire avec exportation ? déficitaire avec importation
?, abondance et qualité des sols (idem)
Importance et qualification de la population
- capacité militaire
(Surarmement des Etats-Unis, mais peur de l'engagement physique des hommes
sur le terrain
Japon, armée dite "d'autodéfense", interdiction
posséder arme nucléaire
Union Européenne, embryon de défense commune, sinon des armées
nationales avec une dépendance vis à vis de l'OTAN)
- capacité économique
basée sur capacités de production agricole et industrielle,
développement des infrastructures
===> importance dans le commerce international
====> capacités financières (investissements, capitalisation
boursière, importance de la monnaie etc..)
- Potentiel scientifique et technologique
Niveau de formation d'une population, équipement universitaire, centre
de recherche, etc.
Facteurs immatériels
- Cohésion nationale (forte ? ou bien des divisions intérieures
?)
- Rayonnement culturel (par l'histoire, les modes (le jeans américain,
la haute couture française ...), par la production artistique, marché
de l'art, audiovisuel cinéma, télévision, jeu électroniques,
par l'idéologie politique (libéralisme, communisme, etc..;)
ou religieuse
- Influence sur les institutions internationales (ONU et organismes
spécialisés; G8; OCDE etc...)
Voici un extrait d'un étude sur les transformations récentes
des conditions de la puissance dans le monde actuel :
"Les transformations de la puissance"
A l'âge des empires, les facteurs de la puissance pouvaient
être grossièrement ramenés à trois : les ressources
naturelles, le volume de la population, et le potentiel industriel, sachant
qu'un tel potentiel conditionnait largement la capacité militaire.
dès lors la puissance se trouvait largement concentrés entre
les mains de quelques vastes Etats multinationaux, au-delà du seuil
des cent millions d 'âmes, et qui avaient su développer
sur une large échelle les techniques de production modernes . Parmi
ces " empires ", la Grande-Bretagne devait vite révéler
des faiblesses et abandonner la scène aux Etats-Unis et à
l'Union soviétique, dont la surpuissance contribua à la forte
polarisation du champ diplomatique.
On peut dire que les évolutions des dernières décennies
ont modifié la donne et affecté la typologie des ressources
qui aujourd'hui commandent la puissance. L'évolution est double selon
le professeur américain (Joseph NYE, Bound to Lead - The Changing
Nature of American Power ). Tout d'abord la puissance s'est diffusée
sous l'effet de cinq grandes tendances :
. le renforcement de l'interdépendance économique,
. l'émergence et l'affirmation d'acteurs transnationaux,
. le développement du nationalisme dans les Etats faibles,
. l'expansion de la technologie,
. la modification des grands enjeux de la politique internationale.
Le développement mondial des techniques de transport et de communication,
le développement des multinationales, l'expansion mondiale du commerce,
l'essor des flux financiers internationaux ont créé les conditions
d'une interdépendance économique globale dont le premier effet
est de réduire considérablement la marge de manoeuvre des
autorités nationales en matière économique et monétaire
et de rendre beaucoup plus aléatoire les initiatives isolées.
La naissance des zones économiques régionales est partiellement
à l'origine de ce phénomène en même temps qu'il
constitue une réponse aux contraintes qu'il crée pour les
Etats nationaux.
La diffusion de la puissance s'explique aussi et se traduit par le renforcement
des Etats faibles. Si quelques grandes puissances ont conservé un
avantage marqué en matière de technologie militaire, nombre
d'Etats du Tiers-Monde peuvent aujourd'hui aligner des capacités
qui ne sont plus négligeables et rendent beaucoup d'interventions
régionales d'une grande puissance beaucoup plus coûteuse ou
plus risquée.
La dissémination de la haute technologie militaire, le développement
des industries militaires nationales, la prolifération des armes
de destruction massive participent à ce phénomène.
De la sorte, les possibilités offertes à la diplomatie de
la canonnière se réduisent de manière spectaculaire.
Enfin apparaissent sur l'agenda international nombre de questions nouvelles
comme la dette du Tiers-Monde, le chômage massif dans un certain nombre
de pays développés, l'effet de serre ou les pluies acides
en matière d'environnement. Ces questions transnationales ne peuvent
recevoir une réponse qu'à travers une action collective concertée
pour laquelle la capacité d'influence et de manipulation dans les
grandes enceintes internationales compte plus que la puissance militaire
ou le volume des ressources en matières premières. Ainsi,
pour un pays comme les Etats-Unis, la question cruciale " n'est
pas de savoir s'ils vont s'engager dans le 21ème siècle comme
une superpuissance dotée des ressources les plus larges, mais dans
quelle mesure ils seront capables de contrôler l'environnement international
pour amener les autres nations à agir selon leurs vues. Maintenir
un rang de superpuissance va se révéler dans les décennies
à venir beaucoup plus compliqué et impliquer un ensemble plus
large de questions et une vaste pluralité d'acteurs "
La puissance se diffuse, son exercice se transforme : elle devient potentiellement
moins transférable, moins coercitive*, moins physique. Moins transférable,
c'est-à-dire que les différents facteurs de puissance sont
moins susceptibles de peser dans les domaines qui ne leur sont pas spécifiques.
Si la capacité militaire et le potentiel économique déterminent
toujours en gros le rang de puissance; l'usage de la force pour répondre
à des menaces autres que militaires devient de moins en moins envisageable.
Ainsi le développement intérieur, la capacité d'attraction
des investissements étrangers sont des moyens beaucoup plus rentables
et efficaces pour renforcer la puissance économique que de s'emparer
d'une riche province ou de territoires bien dotés en ressources naturelles.
Inversement, la conversion du potentiel économique en capacité
militaire s'avère beaucoup plus coûteux : le Japon a parfaitement
les moyens de se doter de forces nucléaires et d'une forte flotte
aéronavale, mais la faible marge de manoeuvre intérieure et
internationale, les répercussions probables sur la performance économique
globale constituent de puissants obstacles à un tel développement.
Par ailleurs, la coercition devient un mode beaucoup plus délicat
d'exercice de la puissance. C'est vrai de la coercition militaire, où
les réticences de l'opinion publique, la pression internationale,
le renforcement de petits Etats rendent, comme on l'a dit, beaucoup plus
difficile la 'gunboat diplomacy "** : si en 1953, les Etats-Unis
purent restaurer la royauté du Shah d'Iran moyennant une opération
discrète et limitée, que faudrait-il aujourd'hui pour amener
les ayatollahs à résipiscence? Si la France peut encore aujourd'hui
assurer l'ordre interne et régional avec quelques centaines d'hommes
dans ses anciennes colonies d'Afrique noire, on ne l'imagine guère
rééditer l'expédition de Suez*** contre l'Egypte actuelle.
De même l'interdépendance économique réduit considérablement
les possibilités de contrainte : les Etats-Unis pourraient bien vouloir
forcer le japon à ouvrir son marché intérieur, mais
la détention par les investisseurs japonais d'une masse énorme
de bons du trésor américains rend l'Archipel assez peu maniable;
symétriquement, si l'Empire du soleil levant voulait forcer l'Amérique
à réduire son déficit budgétaire en la menaçant
de refuser l'achat de bons, il courrait le risque de jeter sur les marchés
financiers une panique qui pourrait se révéler beaucoup plus
coûteuse que le gain escompté. "
* Coercition : pouvoir, action de contraindre
** diplomatie de la canonnière, c'est-à-dire imposer sa volonté
et ses intérêts par une démonstration de force militaire
***1956 expédition militaire franco-anglaise combinée avec
une attaque israélienne contre l'Egypte de Nasser venant de nationaliser
le canal de Suez. Cette expédition, réussie militairement,
échoua politiquement à cause des menaces d'intervention soviétiques
contre les agresseurs et de l'absence de soutien américain.