Proche-Orient

Sharon aux portes du pouvoir

 

Les élections pour le poste de Premier ministre n'auront lieu que le 6 février mais d'ores et déjà, le chef du Likoud Ariel Sharon se comporte comme si le scrutin n'était qu'une formalité.

A dire vrai, ceux qui pronostiqueraient le contraire témoigneraient d'une étonnante hardiesse : tous les sondages donnent Ariel Sharon vainqueur face au chef du gouvernement sortant Ehoud Barak par une marge supérieure à 20 points. Seul, Shimon Peres aurait une chance de le battre, mais l'intéressé, qui n'a pas été soutenu par les partis de gauche à l'annonce de la démission de Barak, dément l'intention de se présenter à la dernière minute. On n'est pas obligé de le croire sur parole, mais ce qui est sûr, c'est que Ehoud Barak n'a aucune intention de lui céder la place.

Ariel Sharon pouvait encore redouter un accord de paix de dernière minute, conclu entre Arafat et Barak avant la fin du mandat de Clinton le 20 janvier prochain. Le premier ministre sortant comptait sur l'effet mobilisateur d'un tel accord pour retourner l'électorat et transformer l'élection en référendum pour la paix ou la guerre. Même ténues, les perspectives d'un tel accord n'étaient pas nulles voici encore quelques jours.

Désormais, plus personne ne se hasarde à l'envisager. Les négociateurs palestiniens, soutenus par la Ligue arabe, ont sévèrement critiqué le plan Clinton ; Ehoud Barak lui-même, tout en disant le soutenir, en conteste un élement-clé : la souveraineté palestinienne sur l'Esplanade des mosquées. Et surtout, toutes les enquêtes d'opinion effectuées en Israël l'attestent : l'électorat israélien a été profondément marqué par quatre mois d'Intifada et n'a plus confiance dans le processus de paix.

«Nous n'allons pas reconquérir Naplouse et Jéricho»

Du coup, Ariel Sharon est sorti de la bonhomie ambiguë qu'il avait adoptée depuis le début de la campagne électorale. L'homme qui a précipité Israël dans la désastreuse guerre du Liban en 1982, n'avait pas à prouver sa fermeté. Il devait au contraire de cette image de va-t-en guerre. Il est donc resté dans le vague sur ses projets, tout en adressant ses v£ux à Yasser Arafat à l'occasion de l'Aïd el Fitr, la fête qui marque la fin du ramadan.

Mais coup sur coup, le chef du Likoud a livré à plusieurs journaux sa vision de la paix après la victoire. Sans surprise, il déclare que les accords d'Oslo sont morts. Sur ce point, même ses artisans sont d'accord avec le constat. A la presse américaine, il indique que le processus de paix doit être remplacé par un état de non-belligérence sans date-butoir. Dans une déclaration à un journal israélien ultra-orthodoxe, Sharon précise que lorsqu'il évoquait les « douloureuses concessions » que les Israéliens seraient amenés à faire, il voulait dire par là qu'Israël ne pourrait pas reconquérir Naplouse et Jéricho.

Du coup, c'est à nouveau l'image guerrière qui refait sur face. Les conseillers en communication d'Ariel Sharon sont catastrophés, le parti travailliste se reprend à espérer.

Quant aux Palestiniens, qui voient en Sharon l'homme qui a permis le massacre de Sabra et Chatila et dont la venue sur l'Esplanade des mosquées le 28 septembre dernier a déclenché cette nouvelle Intifada, ils ne sont pas particulièrement surpris.


OLIVIER DA LAGE
10/01/2001



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