Proche-Orient

Les sanglantes représailles du Hamas

 


Deux attentats suicides ont fait une quinzaine de morts mardi soir. Le Hamas veut venger la mort des siens. Ariel Sharon interrompt sa visite en Inde et rentre pour mettre au point la riposte d’Israël.


Samedi, après avoir réchappé à la tentative d’assassinat dont il a été victime, cheikh Yassine avait promis d’en faire chèrement payer le prix à Israël. Nul n’a jamais douté que le mouvement islamiste tiendrait parole. Aussitôt, le gouvernement israélien instituait l’état d’alerte au niveau 3, celui qui précède le niveau d’alerte de temps de guerre. La seule inconnue portait donc sur le moment et le lieu de la riposte du Hamas.


La réponse n’a pas tardé. En dépit des extrêmes précautions prises par l’armée israélienne et du bouclage hermétique des territoires palestiniens, deux attentats suicides ont été commis mardi soir à quelques heures d’intervalle, l’un à Rishon Letzion, près de Tel Aviv, l’autre dans un quartier de Jérusalem. Outre les deux kamikazes palestiniens, ces deux attentats ont fait au moins quinze morts. Si Ariel Sharon n’a pas jugé utile d’interrompre son voyage en Inde à la nouvelle du premier attentat, il a changé d’avis en apprenant le second. Le fait que le Premier ministre ait finalement décidé d’écourter une visite à laquelle il tenait beaucoup pour des raisons politiques et stratégiques, et qu’il avait décidé de maintenir en dépit de la situation tendue en dit long sur le sérieux de la situation et sur l’ampleur des représailles à venir.


D’ores et déjà, les porte-parole du gouvernement israélien ont fait savoir que toutes les options étaient sur la table: bien entendu, la poursuite des assassinats, plus ou moins ciblés, de responsables du Hamas. Mais les responsables de l’État hébreu ont été prompts à faire porter la responsabilité politique de ces attentats à l’Autorité palestinienne, à commencer par Yasser Arafat. Une majorité de ministres s’est récemment prononcée pour l’expulsion du président palestinien, à commencer par le ministre de la Défense, Shaoul Mofaz, qui préconise cette solution depuis plus de deux ans et qui vient de réaffirmer que le problème serait résolu d’ici la fin de cette année.

Le problème Arafat


Voici quelques jours, le principal conseiller diplomatique d’Ariel Sharon, Dov Weisglass, se trouvait à Washington où il a une fois de plus plaidé pour que les Américains laissent Israël régler une fois pour toute le «problème Arafat». Il n’en a pas reçu la permission et dès dimanche, Colin Powell, le secrétaire d’État et Condoleezza Rice, la conseillère pour la sécurité de George Bush sont intervenus sur différentes chaînes de télévision pour mettre en garde en termes diplomatiques Israël sur les conséquences d’une telle action.


Il est revenu à Tel Aviv sans avoir le feu vert de Washington, mais la presse israélienne, bénéficiant de fuites organisées, indiquaient que le gouvernement israélien estimait qu’il n’avait pas non plus reçu de feu rouge. Dans l’intervalle, le gouvernement palestinien d’Ahmed Qoreï n’est toujours pas constitué, les conditions posées par ce dernier qui exigeait pour accepter des garanties israéliennes et américaines n’ayant toujours pas été remplies.


Si les diplomates, c’est leur rôle, intensifient leur activité afin de trouver la recette qui permettrait de sortir du blocage politique, nul ne se fait d’illusion. Pour l’heure, et pour une durée imprévisible, la parole est aux armes. Dès son arrivée, le chef du gouvernement israélien réunira son cabinet de sécurité pour mettre au point la panoplie des mesures de riposte. Tout indique qu’elle sera d’une ampleur considérable, probablement à la mesure de l’opération Remparts (mars-avril 2002) consécutive à l’attentat de Netanya qui s’était traduite, entre autre, par l’assiègement de Yasser Arafat. Cette fois-ci, les dirigeants israéliens brûlent du désir de «finir le travail». Seules, sans doute, des pressions vigoureuses de Washington pourraient les en dissuader.

Devant l’échec de sa politique irakienne et de la feuille de route, George Bush choisira-t-il de calmer le jeu en conseillant la modération à Israël ? Ariel Sharon, qui le connaît bien, espère que les attentats de mardi feront pencher George Bush de son côté et que son instinct, un temps contrarié par la grande politique moyen-orientale qu’il ambitionne aujourd’hui, lui commandera au contraire, comme par le passé, de s’en remettre à ce que décidera le Premier ministre israélien.

OLIVIER DA LAGE

10/09/2003

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