Proche-Orient
Vers un nouveau Camp David
Arafat parcourt le monde pour obtenir un soutien à la position palestinienne. Parallèlement, des émissaires israéliens en font autant pour défendre le point de vue de l'Etat hébreu. Pendant ce temps, discrètement, des négociations prometteuses se sont engagées en vue d'un nouveau sommet israélo-palestino-américain qui déboucherait en septembre sur un accord de paix.
L'un après l'autre, les signes d'une prochaine reprise des négociations
de paix israélo-palestiniennes se font plus apparents. En dépit
des molles dénégations des responsables américains qui
affirment que rien n'est arrêté, tout indique qu'Israéliens,
Palestiniens et Américains se préparent à un nouveau sommet
destiné à parachever ce que celui de Camp David n'a pu réaliser.
Un sommet « plus court » que le précédent, souligne-t-on
à Washington où l'on insiste sur le fait qu'il ne se réunira
que s'il doit aboutir.
Quelles sont les raisons laissant à penser que l'accord, impossible en
juillet, deviendrait possible en septembre? Elles ne manquent pas. D'une certaine
manière, les deux leaders, Yasser Arafat et Ehoud Barak, ont brûlé
leurs vaisseaux et sont condamnés à aboutir.
S'agissant du Premier ministre israélien, le lâchage de ses partenaires
au sein de la coalition gouvernementale l'a libéré de nombreuses
contraintes. Abandonné par les ultra-orthodoxes du Shass, par les Russes
d'Israël Be Alya et par son ministre des Affaires étrangères
David Levy, sous le coup d'une dissolution de la Knesset votée en première
lecture par les députés, Ehoud Barak n'a plus grand chose à
perdre. Du coup, il se réconcilie avec le parti de gauche laïque
Meretz et nomme une colombe à la tête du ministère des Affaires
étrangères, Shlomo Ben Ami, très apprécié
des Palestiniens.
Report de la proclamation de l'Etat palestinien
Côté Palestinien, Yasser Arafat a engagé une vaste tournée
internationale qui, en trois semaines, l'a amené dans une vingtaine de
pays dans le monde arabe, en Afrique en Europe et en Asie. Il a rencontré
une vive sympathie auprès de la plupart de ses interlocuteurs, qui l'ont
cependant dissuadé de proclamer unilatéralement un Etat palestinien
le 13 septembre, comme il en avait l'intention initialement. Du coup, le Comité
exécutif de l'OLP, qui doit se réunir début septembre,
pourrait reporter à novembre une telle proclamation.
Le but de cette tournée d'Arafat était d'obtenir un soutien à
la position adoptée à Camp David où le président
palestinien a refusé tout compromis sur Jérusalem-est. Mais les
conseils de modération reçus, notamment en Europe occidentale
et à Moscou, ainsi que le manque d'engagement concret des leaders arabes
peuvent être retournés par Arafat à son avantage. Le président
de l'Autorité palestinienne a testé les limites du soutien international
dont il disposerait s'il persistait à se montrer intransigeant. Dans
le même temps, le président Clinton a tenu à corriger l'impression
qu'il avait donnée, au lendemain de l'échec des pourparlers, en
rejetant le blâme sur le seul Arafat. La diplomatie américaine
s'est recentrée et Bill Clinton parle désormais d'inaugurer non
plus seulement une ambassade américaine à Jérusalem ouest
(demande ancienne des Israéliens) mais une autre dans la « capitale
de l'Etat palestinien » avant la fin de son mandat.
Le temps est compté. Comme l'avait imprudemment déclaré
publiquement Arafat, un nouveau sommet devient possible au lendemain de la convention
démocrate qui s'achève le 17 août. Il devient cependant
de plus en plus improbable à mesure qu'on se rapproche de l'échéance
des élections américaines du 7 novembre, marquées par une
surenchère pro-israélienne de l'ensemble des candidats.
Au fond, le meilleur indice que les liens ne sont pas rompus, c'est que l'explosion
de violence tant redoutée au lendemain de l'échec de Camp David
ne s'est pas produite. L'Autorité palestinienne et le gouvernement israélien
y ont veillé conjointement, tandis que des contacts officiels étaient
renoués en Israël et dans les Territoires palestiniens. Et que d'autres,
plus discrets et sans doute plus approfondis, se poursuivent quelque part en
Europe.
OLIVIER DA LAGE
15/08/2000