Proche-Orient
Le sprint final ?
Shlomo Ben Ami, le chef de la diplomatie isralienne, et Yasser Abed Rabbo, le ministre palestinien de l'Information, se rendent Washington pour des entretiens spars avec l'administration Clinton. En ligne de mire : un accord global de paix avant le 20 janvier.
Techniquement, ce n'est pas la première rencontre de haut niveau
entre Israéliens et Palestiniens depuis le 28 septembre et la visite
d'Ariel Sharon sur l'Esplanade des Mosquées, point de départ de
l'Intifada Al Aqsa. Il y a eu les rencontres de Paris et de Charm el Cheikh,
ainsi que plusieurs rencontres plus ou moins discrètes entre dirigeants
palestiniens et israéliens, sur place et à l'étranger.
Jusqu'à présent, cependant, le but principal, sinon unique de
ces rencontres était la «réduction de la violence».
Les Palestiniens insistant en outre pour qu'une commission internationale enquête
sur les causes de ce regain de violence. Cette fois, ce n'est pas du tout ce
dont il s'agit : il est question de reprendre les négociations finales
de paix là où elles ont échoué en juillet à
Camp David, avec une volonté partagée d'aboutir dans les plus
brefs délais. Car le temps est compté : Le 20 janvier, Bill Clinton
qui s'est tant impliqué dans la recherche d'une solution cédera
la place à George W. Bush, dont rien n'indique que le processus de paix
au Proche-Orient sera sa priorité numéro un. Mais surtout, le
6 février prochain, les Israéliens éliront un nouveau Premier
ministre, et les sondages donnent actuellement une avance écrasante à
Benyamin Netanyahou, l'ancien chef du gouvernement battu à plate couture
par Ehoud Barak il y a tout juste un an et demi.
Nouvelle donne
La démission surprise d'Ehoud Barak le 10 décembre dernier a radicalement
changé la donne. L'ancien chef d'état-major de Tsahal, qui depuis
le début de l'Intifada Al Aqsa, avait retrouvé des accents guerriers,
semblait hésiter entre un discours martial et la volonté de paix.
Depuis sa démission, Ehoud Barak a brûlé ses vaisseaux.
Désormais, il n'a plus d'alternative que de parvenir au plus vite à
un accord de paix global avec les Palestiniens, ses adversaires, qu'ils se nomment
Netanyahou ou Sharon, jouant la carte de l'intransigeance. Dès lors,
c'est muni d'un tel projet d'accord que Barak se présenterait devant
les électeurs pour une élection qui serait en fait un référendum
pour ou contre la paix. La menace apparaît à ce point sérieuse
à l'opposition que celle-ci, majoritaire à la Knesset, vient de
passer en première lecture une loi interdisant à un chef du gouvernement
minoritaire de signer un traité. Shlomo Ben Ami, le ministre des affaires
étrangères par intérim qui est l'un des principaux artisans
de ce forcing balaie l'objection : « Tout accord avec les Palestiniens
sera soumis à l'approbation du peuple soit par des élections,
soit par référendum, voire par les deux ».
Yasser Arafat, a qui cette nouvelle donne n'a pas échappé, a donné
son feu vert pour la réouverture de pourparlers, d'autant que les signaux
positifs émanant du gouvernement israélien se multiplient. Shlomo
Ben Ami reconnaît que les propositions israéliennes faites à
Camp David peuvent encore être améliorées, notamment en
ce qui concerne le contrôle des Palestiniens sur Jérusalem-Est
et l'Esplanade des Mosquées.
Mais sur le terrain, la situation ne se calme pas. Les Palestiniens accusent
Israël d'assassiner délibérément les cadres du Fatah
et du Hamas. C'est bien à un sprint final pour la paix que se livrent
les négociateurs. L'alternative est déjà connue : ce qui
s'est produit depuis trois mois n'en est qu'un avant-goût.
OLIVIER DA LAGE
18/12/2000