(extrait du chapitre 15, page 74)
- Ce n'est pas possible d'être aussi naïf, - hurle Naïma, à la limite de l'hystérie - Chérif, tu es complice ou quoi ? Tu vois bien que c'est de la manipulation. Ce sont les fachos qui orchestrent cela. Elections ! tu connais ce mot ? élections ! Salauds ; vous êtes complices, complices ! Tu ne veux pas d'emmerdements pour le centre, alors tu te couches devant les poulets.
- Mais, Naïma
- Pauvre mec ! Tu ne te rends pas compte que sans cet orage, on y passait tous. Sans compter qu'ils reviendront finir leur boulot et que cela ne fait que commencer. J'en ai marre de cette lâcheté... Et arrête de m'éblouir avec ta lampe. -Chérif ne réagit pas-. Chérif ! Arrête de me foutre ta connerie de lampe dans la gueule.
Chérif comprend enfin, éteint, confus, et poursuit dans l'obscurité :
- Naïma... Naïma, de toute façon, il ne faut pas céder à cette provocation. S'il vous plaît, ne tombez pas dans le panneau. Ne rentrez pas dans cette escalade. Dès que ce sera plus modéré à l'extérieur, nous sortirons en évitant tout incident...
Dehors, cent mètres plus loin, à la lisière du parking. Vingt ans. Pour lui, lorage est arrivé trop tard. Il s'était fait coincer sous un abribus. Recroquevillé au sol, il se tient la tête dans les mains. Le long de ses poignets, coule son sang, tiède et vermillon. Il s'échappe de son oreille gauche. Sur le béton, luisent les premières gouttes qui se mêlent aux grêlons. Le jeune homme tremble au rythme de sa conscience qui vacille.