Objet :
Situation
générale.
Cher"e"
Camarade,
La campagne des
élections régionales va commencer dans quelques jours.
Tu trouveras
accompagné de cette missive, une invitation de la part de mon
homologue de la section de Thonon pour le lancement des
régionales dans notre département.
Tu n'es pas sans
savoir l'importance de cet enjeu aussi bien au niveau national
que pour les rhônalpins que nous sommes.
En effet, cette
élection est le rendez-vous majeur de ce quinquennat.
Comme tu peux le
constater, je ne réunis plus la section tous les mois, comme
précédemment.
Depuis la
rentrée politique de septembre, j'ai convoqué ses membres
seulement deux fois, la première en septembre, pour la reprise
des cartes et la seconde en décembre, pour le vote sur la liste
fédérale des régionales.
Je ne te cache
pas, tout comme toi peut-être (?), que je suis pessimiste non
seulement pour l'avenir de notre pays, de part l'orientation
politique engagée par la droite actuellement au pouvoir et ceci
dans tous les domaines, aussi bien sur le plan économique que
social en passant par l'emploi.
Mais une
question demeure : les français sont-ils réellement conscients
des dégâts engendrés par le gouvernement en place ?
A titre
personnel, je me permets d'être profondément négatif et pour
cause, les classes populaires - premières victimes des périodes
économiques laborieuses - sont "appelées" pour
l'aventure politique.
En effet, je ne
t'apprendrai rien en écrivant que la précarité ainsi que le
chômage engendre progressivement les privations, la gêne, le
dénuement et la misère.
La diminution
des revenus des ménages entraîne automatiquement une diminution
de la consommation.
Le chômage
prolongé porte atteinte à la dignité de l'homme qui devient
disponible pour l'aventure politique et pas pour n'importe quelle
aventure, celles des extrêmes dont les discours et la
compréhension sont simples pour le commun des mortels.
Il suffit de
nous rappeler les conditions de l'avènement du nazisme en
Allemagne et du fascisme en Italie.
Nous pouvons
constater, de ce fait, une augmentation de l'extrême-droite en
France, incarnée par le Front national et son possible
renforcement avenir, puisque ces dernières années le nombre de
français vivant en dessous du seuil de pauvreté (4,5 millions
de personnes aujourd'hui) a augmenté tout comme les ménages
sûrendettés (plus d'1 million maintenant).
De profondes
inégalités existent encore dans notre pays au XXIè siècle.
Ensuite, les
jeunes ne votent plus et ceux de mon âge, la génération
Mitterrand dont nous avons tout eu et manqué de rien, n'ont
aucune culture politique et syndicale, mais votent (s'ils votent
?) à droite et/ou à l'extrême-droite.
Enfin, bien que
nos élus font un formidable travail, force est de constater que
les gens ne sont pas citoyens : le taux de syndicalisation en
France et le nombre de personnes qui milite dans un parti
politique sont dérisoires, voir même les plus faibles d'Europe.
A savoir quand
même, que le FN ne cesse d'augmenter ses effectifs depuis le 21
avril et que les deux principaux partis républicains, que sont
le PS et l'UMP, sont en recrudescence après la flopée de
promesses d'adhésions suite à la culpabilité de ceux qui ont
mal voté à ce premier tour des présidentielles.
Crise
institutionnelle et de la démocratie ? Dégoût et déception de
la politique ?
Est-ce les
véritables causes de la défection de nos concitoyens de la
chose publique ?
Je crois que
nous nous sommes tous posés ces questions et que nous nous
sommes tous fait plus ou moins les mêmes réponses.
Au final, je
pense que les français sont difficiles à gouverner, ils ne sont
jamais contents et satisfaits.
Pour résumer ma
pensée : je crois que les français sont schizophrènes.
Pour finir cette
réflexion, que je partage avec toi, bien que notre parti a
choisi le tout démocratique à tous ses échelons, ce n'est donc
pas pour autant que nous arrivons à obtenir une majorité stable
et la garder.
Nous savons tous
que la gestion du pays n'est pas la même en fonction de la
droite et de la gauche qui gouverne ; il s'agit de même au
niveau des collectivités locales, mais les électeurs en sont-ils
réellement conscients ?
Pour prendre
notre région comme référence, comme notre département, il
faut croire que les administrés sont satisfaits de la politique
en place et de ses conséquences, alors que nous, militants de
gauche, nous nous agitons pour convaincre en présentant à la
population les arguments inverses.
Le fait de vivre
dans une collectivité régionale et départementale riche et
économiquement prospère ne facilite pas l'arrivée aux affaires
de ceux qui réclament plus de justice sociale et de partage des
richesses, pour nos concitoyens le plus défavorisés.
Ce sont bien les
conséquences de notre société de plus en plus individualiste,
mais c'est ainsi et l'individu est fait de telle façon que nous
ne changerons pas les mentalités aussi rapidement ; il faut bien
des années voir même des siècles pour inverser les pensées.
Une ultime
question se pose : quelle est la finalité, au sein même de la
section et comme militants de base, de notre engagement politique
et de notre militantisme au quotidien ?
Depuis
maintenant six ans qu'existe notre section, nous avons beaucoup
réfléchi ensemble sur les propositions et les projets de
société que nous envisageons pour les habitants se situant dans
son aire géographique.
Nous ne pouvons
pas nous battre contre des moulins à vent ainsi qu'enfoncer des
portes déjà grandes ouvertes et pour que notre militance ait un
sens à chacun d'entre-nous, il est plus nécessaire, dans la
période que nous traversons, de nous préserver un peu du monde
extérieur afin de réfléchir sur nous même.
C'est pourquoi j'envisage
de nous réunir périodiquement, mais pas autant qu'auparavant et
comme je l'ai déjà dit à certains d'entre-vous, il est
important de maintenir une section afin de garder les liens que
nous avons construit jusqu'à présent.
Cependant, cela
ne nous empêche pas de continuer à réfléchir ensemble, de se
retrouver en cas de coup dur aussi bien collectivement que pour
une situation d'entraide personnelle.
C'est pour cela
que je t'invite à méditer sur la réflexion personnelle
suivante issue du débat militant.
"Le militantisme des années
1990 - 2000 et par extension celui du XXIè siècle est
différent de celui des années 1970 - 1980 et par extension
celui du XIXè et XXè siècle.
Alors qu'aujourd'hui toutes les
grandes lois sociales sont acquises et leurs applications
engagent la solidarité de la communauté parce qu'elles se
veulent pour la collectivité, nous sommes dans une période ou
beaucoup de nos concitoyens sont plus consommateurs qu'acteurs de
la société dans la cité.
Les actions politiques et
syndicales sont limitées en fonction de la volonté des
personnes.
La limite de l'action commence là où s'arrête la bonne volonté des personnes.
Tout dépend des individus, s'ils
souhaitent s'engager ou non.
Nous ne pouvons pas faire le
bonheur d'autrui sans leur consentement.
A un problème philosophique, il faut trouver une réponse pragmatique, c'est-à-dire fondé sur une pratique cautionnée par la réussite.
Dans la période actuelle, le
militant politique et syndical doit agir au-delà des actions
traditionnelles de démarchage [présence individuelle (tractage,
porte-à-porte,
) & présence collective (manifestations,
réunions publiques,
)].
Il ne doit pas s'attarder
uniquement sur ces seuls aspects de communication, bien que ces
dernières restent nécessaires, elles sont toujours d'actualités
et bien loin d'être obsolètes surtout lors du lancement d'un
groupe local ou pour la constitution d'une subdivision (section)
attachée à une structure afin de promouvoir son édification
dans ses débuts.
De nos jours, un militant de
gauche doit s'investir personnellement dans des mandats
sociaux (représentation des citoyens au sein d'organismes
d'Etat et dans des organisations syndicales) afin d'assurer le
rayonnement des idées progressistes et réformistes qu'il
défend, également pour construire la société de demain qui
doit être encore plus juste et plus humaine.
Celui qui lutte activement doit
gravir les échelons afin d'apporter sa pierre à l'édifice et
travailler à la construction du temple, ce qui signifie
participer au perfectionnement de lhumanité qui sera
toujours imparfaite comme le temple inachevé.
Le but de lêtre humain, cest d'évoluer en ce qui le concerne dans les structures choisies pour que lindividu sépanouisse lui-même et aussi quil augmente ses connaissances, ainsi que son savoir afin de se développer pleinement dans notre société contemporaine".
Dans l'attente
du plaisir de te retrouver,
Je te prie de
croire, Cher"e" Camarade, à l'assurance de mes
sentiments les meilleurs.
Amitiés socialistes,
Stéphane RIZZO