Et à la tête du CSA, que fit Baudis ? Exactement la même chose que ses prédecesseurs à ce poste, brider chaque année un peu plus la liberté d'expression en faisant la chasse au porno (au sens le plus large du terme), à la publicité clandestine (à tel point que ça en devient risible) et en veillant scrupuleusement à ce que les entreprises française de media restent entre les mains d'amis du pouvoir, qui pour cette tâche le stipendient
.
Car il n'y a en France aucune liberté d'expression. Si elle est garantie dans la constitution, elle est réprimée dans la loi sous toutes sortes de prétextes, atteinte aux bonnes moeurs, atteinte à la vie privée, publicité pour des secteurs interdits d'antenne, diffamation, injure publique, incitation à la haine raciale ou au suicide, atteinte à l'honneur de la police, de l'armée, de tel ou tel élu, de telle ou telle entreprise, protection de l'enfance, révisionnisme, droit à l'image... Dans la pratique, le seul moyen d'être correctement informé dans ce pays est de lire la presse étrangère. Et le CSA est le bras de cette censure dans le domaine de la radio et de la télévision (et il s'en fallut de peu qu'Hervé Bourges n'étende ses tentacules jusqu'au contrôle d'internet, comme on fait en Chine ou en Arabie Saoudite).
Ce qui induit du reste un fort compréhensible "effet Pravda". De quoi s'agit-il ? Du temps de l'URSS, les Soviétiques avaient l'habitude de lire la Pravda, mais de n'en point croire un mot, car la propagande que celle-ci contenait ne trompait plus personne depuis longtemps. Le seul media auquel les Russes faisaient relativement confiance était le téléphone arabe, le bouche-à-oreille, en d'autres termes, la rumeur.
Donc, les récentes affaires ayant montré aux Français qui l'ignoraient encore que la presse nationale est aux ordres du pouvoir et indigne de confiance, ils font comme les braves popov du temps jadis : ils ne lui accordent plus aucun crédit (et du reste, ils ne la lisent plus, le vénérable Monde est quasiment en faillite). Qui donc va croire en la bonne foi de Baudis quand il va clamer son innocence dans des chaînes de télévision qui ont toutes les raisons de mettre genou en terre devant lui ? Qui va croire les articles indignés défendant son honneur paraissant dans les journaux de ses amis et obligés ? Qui va croire qu'un seul journaliste en France prendrait le risque le critiquer, quoiqu'il puisse avoir fait ? Qu'il soit coupable ou innocent, les Français savent bien que la presse titrerait exactement la même chose et le défendrait quoiqu'il advienne.
Il y a une perverse justice à voir périr par la rumeur l'homme qui a tant fait pour lui donner du crédit.
stipendier v.t. : payer qqn, généralement pour accomplir une sale besogne
"- Je suis mi-triste, mi-gai, car mon bankster stipendié m'ayant vendu des pouilleries, je ne risque pas d'être fisc-idiot cette année." (Nicolas de la Tour-Penchay)