Pour la peine de mort
Paris, le 4 juillet 2005, God bless America
Voici vingt-cinq ans que l'on a rangé dans les poussiéreux placards de l'histoire la grande dame, la
terrible vengeresse de la République, la guillottine. Vingt-cinq ans, eh oui, que la dernière tête de
criminel a roulé dans la poussière des cours de prison françaises, apaisant par le sang la juste vindicte
populaire. Par la grâce de Mitterrand, pas mal d'ordures ont eu la vie sauve depuis cette date, et il
faut bien le dire aussi, pas mal d'innocents ont échappé à un châtiment qui ne leur était pas destiné.
Ne vous méprenez pas, je ne suis pas un de ces nostalgiques des tragédies d'assises, un amateur de sang
ou un admirateur d'Anatole Deibler. Non, le folklore macabre de la peine capitale ne m'attire pas. Je
n'adhère pas une seconde à la fable comme quoi le châtiment suprême aurait valeur d'exemplarité aux yeux
des criminels en puissance. Au contraire, l'ombre du couperet aurait plutôt tendance à conférer au métier
crapuleux une noblesse et une solennité qu'il n'a pas lieu d'avoir. Vous ne me trouverez pas chez ceux
qui vocifèreront parmi la masse bêlante des turfistes avinés et des mères de familles hystériques la
prochaine fois qu'un gamin du Nord Pas-de-Calais se fera égorger par un semi-débile libidineux. Je suis
bien conscient que dans une société qui pratique la peine de mort, la justice étant imparfaite, elle en
viendra naturellement à être appliquée à des gens qui ne la méritent pas. J'en mesure le prix, croyez-le.
Toutefois, j'estime qu'il est urgent, dans ce pays, de rétablir la peine de mort. C'est un impératif de
survie pour notre société, rongée qu'elle est par des actes d'incivisme inqualifiables qui sapent jour
après jour la confiance qu'ont les honnêtes gens en la justice. Et dans le but de limiter les abus et
erreurs judiciaires, je propose d'en réserver l'usage à quelques variétés bien précises de malfaiteurs, à
savoir :
- Les troublés obsessionnels compulsifs qui se lavent les dents dans les toilettes du bureau entre midi
et deux. Les WC ne sont pas des vomitori pour dégueulis fluorés, dont la vision révulsante vous ôte
durablement toute envie de miction.
- Les haltérophiles à roulettes qui se trimballent des valoches de deux-cent kilos dans les transports en
commun le lundi matin aux heures de pointe. Quand on n'est pas foutu de voyager léger, on rentre de chez
papy-mamy le dimanche soir, comme les chrétiens, bordel !
- Les monstrueux pédophores qui sortent leurs enfants le dimanche matin aux Buttes Chaumont. Mais rangez donc vos poussettes au gabarit des chars soviétiques et vos lardons golios pleins de morve, vous voyez pas qu'il y
a des gens qui essaient de courir ?
- Les ouvreurs de toilettes, ces abominables pervers scato-sexuels qui tiennent absolument à vous
surprendre sur le trône avec le pantalon sur les chevilles si vous avez le malheur d'oublier de tirer le
verrou (ou si, comme cela arrive, le verrou est cassé).
- Les boulimiques du RER, qui vous agitent leur part de 4 fromages-champignons-anchois sous le nez alors
même que comme tout travailleur, après une longue et honnête journée de travail, vous avez encore une heure de transports à vous taper avant de rentrer chez vous et ENFIN manger un morceau.
- Les maniacodépressifs qui portent leur cravate comme ça ou comme ça. Je crois que de telles images se passent de commentaire.
Blêmis donc de honte, fielleux Badinter, héraut de l'abandon national ! Blêmis et tremble devant l'ire des citoyens probes et droits de notre belle France, et puissent bientôt se dresser à nouveau aux quatre coins de l'hexagone les sévères sentinelles de bois à la mâchoire d'acier que tes manigances nous avaient prises. Gloire et honneur au docteur Guillottin !