2020-2021 Le maritime subit une chute catastrophique du fait de la crise du coronavirus
Sitôt incorporé à la flotte de Corsica Linea, le A Nepita
a été placé à l'été 2020 sur
les lignes de Corse, celles d'Algérie auxquelles il était
destiné ayant étant fermées jusqu'en novembre 2021 pour cause de
pandémie (photo prise à Marseille par Jean-Pierre Fabre en août 2020)
Les années 2020 et 2021 resteront
tristement dans les mémoires comme celles de la COVID.
Dès mars 2020, plus rien ne s'est passé comme prévu, ce qui a contraint les
compagnies maritimes à revoir totalement leur programmation
à plusieurs reprises pour s'adapter aux révisions
successives des consignes sanitaires et aux fortes fluctuations de la
demande qui en ont résulté. Les contraintes
imposées ont conduit à une diminution sans
précédent du nombre de rotations et, au plus fort de la
crise de mars à mai 2020, à des restrictions de
capacités des navires à 100 passagers seulement par
rotation, à comparer aux maxima habituels parfois proches de 2
000... Au-delà de ses conséquences sanitaires et de la
grave récession économique mondiale qu'elle a
engendré, cette crise a entraîné sur les lignes
maritimes méditerranéennes des fermetures de ports (de
plusieurs mois à Nice au printemps 2020, celui-ci ne rouvrant que pour la
seule saison estivale), des suspensions de lignes temporaires
(Nice-Corse, Savona-Bastia, Piombino-Bastia à la Corsica Ferries, Genova-Bastia et Livorno-Bastia à la Moby Lines, Marseille-Ile Rousse, Propriano et Porto Vecchio et Marseille-Tunis chez Corsica Linea et La Méridionale...) ou pour l'ensemble de la saison estivale 2020 (Piombino-Bastia, Toulon-Trapani à la Corsica Ferries, Marseille-Alger à la Corsica Linea...)
et des allègements de programmations sur quasiment l'ensemble
des lignes de Corse par rapport aux programmations initialement
prévues. De ce fait, les trafics maritimes - et aériens -
de la Corse ont connu des diminutions historiques, si bien que la Corse
a perdu plus de la moitié de ses trafics passagers habituels en 2020.
Avec des chutes de l'ordre de 30% au global par rapport à 2019,
les mois de juillet-août 2020 ont toutefois été
moins catastrophiques que l'avant-saison, qui a été
totalement annihilée du fait du confinement. Si l'année
2021 a été un peu moins catastophique que 2020, les
trafics passagers maritimes se redressant de près de 25% sur l'année, ils restent toutefois très
fortement inférieurs aux niveaux habituellement
enregistrés jusqu'en 2019. Ce constat est avéré en Corse, mais aussi en Sardaigne.
Pour les compagnies maritimes, cette crise est d'autant plus grave
que plusieurs d'entre elles étaient déjà
affaiblies par des difficulté de plusieurs ordres. Tout d'abord,
toutes ont eu à encaisser au 1er janvier 2020 le choc de
l'entrée en vigueur des nouvelles normes environnementales, qui
les ont contraintes à utiliser des carburants plus coûteux
à plus faible teneur en soufre ou à investir dans
des dispositifs d'épuration des fumées de divers types
selon les navires. Par ailleurs, plusieurs d'entre elles ont eu
à faire face à des difficultés spécifiques.
Ainsi, sur décision de l'Assemblée de Corse, La Méridionale
a été totalement absente des ports principaux de Corse de
Bastia et d'Ajaccio pour la première fois en saison depuis sa
création il y a près d'un siècle. Par ailleurs, en
grave difficulté sur les lignes italiennes de Sardaigne et de
Sicile où la concurrence de Grimaldi Lines s'est nettement renforcée ces dernières années, le groupe Onorato (Moby-Tirrenia)
a dû se placer sous la protection du tribunal de commerce de
Milan en vue de renégocier sa dette avec ses créanciers
en vue d'échapper à une mise en faillite. Dans ce
contexte, la progression des trafics affichée à
contre-courant du mouvement général par Corsica Linea est en trompe l'oeil : elle résulte à la fois de l'éviction de La Méridionale
des principales lignes entre Marseille et la Corse et du rapatriement
impromptu de son nouveau navire affrété, le A Nepita,
sur la Corse (du fait de la fermeture des échanges avec
l'Algérie, que le navire devait initialement desservir) en sus
des lignes de service public. Pour ne pas sombrer, La Méridionale
a amorcé une diversification de ses activités à
partir de fin 2020 en ouvrant une ligne tri-hebdomadaire avec le Maroc
(Marseille-Tanger) assurée par le Girolata, affrété hors de Corse à GNV pendant l'essentiel de l'année 2020, et par son nouveau navire, le Pelagos, jusqu'ici inemployé. Enfin, la Corsica Ferries a créé la surprise en remplaçant à compter de juillet 2021 le Sardinia Regina, vendu à une compagnie libyenne, par un navire de plus grande capacité, le Mega Regina, ex-Mariella de la compagnie finlandaise Viking Line.
2022-2023 En restructuration, le maritime tente de remonter la pente
Transformé début 2022, le Mega Regina est le premier navire de la Corsica Ferries doté d'un branchement à quai pour réduire son empreinte carbone.
L'année 2022 a
connu une normalisation du trafic des
compagnies maritimes. Quoique leur programmation soit
désormais plus resserrée, pour faire face à la
nouvelle flambée des cours des carburants consécutive
à la guerre en Ukraine, leur bilan est globalement nettement
plus positif qu'en 2020-21. Dès
l'été 2022, les niveaux de trafics passagers reviennent
à des niveaux proches de ceux constatés avant la
pandémie, même si la saison 2023 est finalement
décevante et marque un certain tassement, en particulier sur les
lignes françaises, tandis que les lignes italiennes continuent
de remonter la pente. La
situation de compagnies jusqu'ici en difficulté se normalise
également. Ainsi, dès l'été 2023, le groupe
CMA-CGM devient propriétaire à 100% de La Méridionale et la Moby
voit sa situation financière confortée par
l'entrée à son capital d'un autre géant mondial du
conteneur, le groupe MSC (notamment propriétaire des ferries GNV) à hauteur de 49%,
qui éloigne définitivement le spectre de la faillite et
ouvre la perspective de nouvelles consolidations entre amateurs
italiens (avec Tirrenia, voire avec GNV).
À noter aussi que fin 2022, la Corsica Linea et La Méridionale ont été reconduites par l'Assemblée de Corse
pour les lignes de service public au départ de Marseille pour la
période 2023-2029 et ont interverti leur lignes de Porto Vecchio
et de Propriano.
Enfin, plusieurs projets de nouveaux navires se
concrétisent : outre les constructions neuves de la Moby (les Moby Fantasy, mis en service à l'été 2023, et son jumeau Moby Legacy, retardé à début 2024) réservées aux seules lignes sardes, le nouveau A Galeotta de Corsica Linea, prévu initialement pour l'été 2022, est finalement mis en service début 2023. Quant à la Corsica Ferries,
elle poursuit le renouvellement et l'agrandissement de sa flotte,
notamment avec l'arrivée en Méditerranée d'un
nouveau navire finlandais, le Mega Victoria (ex- Amorella de la Viking Line)
dont elle a fait l'acquisition début août 2022 et qui est
entré en service en mai 2023 en remplacement du Corsica Victoria.
Ces nouveaux navires traduisent aussi la volonté des compagnies
maritimes de réduire leur impact environnemental, pour faire
face au grand défi mondial de la décarbonation du shipping. La saison 2023 a été difficile aussi car marquée par plusieurs retards de mise en service (du Moby Orli, finalement pas prêt pour la saison au cours de laquelle il a été remplacé par le Moby Corse) ou incidents d'exploitation à la suite de soucis de moteurs (du Moby Vincent, mais surtout du Monte d'Oro de la Corsica Linea -
indisponible à la suite d'un incendie en salle des machines
intervenu début juin et remplacé tout l'été
par le Kalliste, affrété à La Méridionale pour Marseille-Ile Rousse - du Sardinia Vera et du Mega Express Five) qui ont entraîné plusieurs annulations de rotations et le retour en ligne du Corsica Marina Seconda courant
août.
2024 Les grandes manoeuvres sur les lignes italiennes
L'été 2024 a été très mouvementé à la Moby, avec des pannes et incidents en cascade qui ont conduit la compagnie à jongler avec les horaires et les navires ; les Moby Ale Due (à gauche sur la photo) et Moby Tommy ont de ce fait effectué leurs premières escales à Bastia en juillet-août en remplacement des Moby Wonder et Moby Aki.
L'année 2024 a
commencé et s'est achevée par de nombreuses sorties de
flottes, avec en particulier, le départ quasi-simultané
en avril des jumeaux Moby Vincent et Sardinia Vera
vers la Turquie, pour déconstruction. A l'issue de la saison
2024, plusieurs autres navires vétérans de la Moby Lines ont été cédés par l'armateur italien : le Moby Corse, qui avait navigué en juillet et fin août en remplacement du Moby Orli, mais aussi le Bastia et le Moby Ale,
premier du nom, destiné également pour ce dernier
à la démolition. Pendant la haute saison 2024, la
compagnie à la baleine bleue a dû faire face à de
nombreux incidents de navires qui l'ont contrainte à revoir
en profondeur ses rotations Italie-Corse, qui s'annonçaient
pourtant initialement plus nombreuses avec la réouverture de la
ligne Piombino-Bastia (qui n'a finalement pas pu être
assurée par le Moby Kiss, mais successivement par les Moby Corse et Moby Niki) et l'inauguration d'une escale Ajaccienne sur la ligne
sarde Genova-Porto Torres, marquée par l'immobilisation à
quai à Ajaccio du Moby Wonder
(en raison de défaillances de sécurité
repérées lors d'une inspection du navire) pendant une
semaine environ en juin puis, pendant un mois, en juillet, du Moby Ale Due (le
navire ayant été mis sous séquestre à la
suite d'un différend financier avec le groupe norvégien SIEM,
qui a finalement récupéré en contrepartie deux
fréteurs purs affrétés jusqu'ici par la Moby). Les rotations sardes de la Moby ont
également été très affectées et
notamment la ligne corso-sarde Bonifacio-Santa Teresa, sur laquelle la
compagnie a dû totalement interrompre ses rotations pendant plus
d'un mois en plein été.
La saison a été plus calme pour les autres compagnies
présentes sur la Corse, malgré une remise en service
tardive du Mega Express Five de la Corsica Ferries,
intervenue seulement fin juin, et la compagnie aux bateaux jaunes a
retrouvé en 2024 un bon niveau de ponctualité.
L'année 2024 a aussi vu La Méridionale s'aventurer sur une nouvelle liaison Toulon-Ile Rousse, en concurrence avec la Corsica Ferries,
avec un prolongement estival inédit sur Livorno. Toutefois, tant
l'ouverture de cette liaison au printemps 2024, que l'annonce de sa
fermeture, début octobre, ont créé des remous
sociaux importants à La Méridionale,
marqués par des mouvements de grève, sur fond
également de fermeture de ses bureaux portuaires à
Marseille. Pour autant, la stratégie d'expansion de sa flotte se
poursuit, avec la construction en Chine
de deux cargos mixtes très innovants qui seront livrés en
2027 pour ses lignes de Corse. La première tôle du nouveau
navire de la série E-Flexer destiné à être affrété par la Corsica Linea
à compter de 2026 a quant à elle été
découpée, en Chine également, en septembre 2024,
alors qu'était révélé son futur nom, Capu Rossu, en vue d'une mise en service sur la Corse pour la saison 2026.