Mare Nostrum Corsica 
- Préfiguration des nouveautés 2019 sur les lignes de Corse -

Saison 2019 : une programmation estivale en retrait sur les lignes de Corse...

Après le Big Bang de 2016, suite à la disparition de la SNCM au profit de Corsica Linea, et la réorientation des lignes de la Corsica Ferries et de la Moby Lines intervenues depuis, aucune nouveauté majeure n'est à ce stade annoncée sur les lignes de Corse pour 2019, tout du moins tant que le nouveau service public maritime au départ de Marseille n'est pas attribué...
De gauche à droite, les Corsica Marina Seconda et Pascal Paoli (Bastia, août 2017 ; photo : Romain Roussel).



Des trafics maritimes en stagnation depuis 2014 et désormais dépassés par l'aérien sur les lignes de Corse

Jusqu'à l'été 2010, les trafics maritimes de la Corse ont connu une hausse quasi-continue, interrompue net depuis, en contrecoup du plafonnement de l'aide sociale, puis de sa suppression en 2014, année également marquée par la fin des subventions des ferries en saison sur Marseille. Les trafics maritimes corses stagnent depuis 2014, malgré les efforts des armateurs en termes de capacités de transport
 


Comme c'est maintenant le cas depuis plusieurs années, avec 4,16 millions de voyageurs sur une année mobile flottante à fin août 2018 (c'est-à-dire sur la période de douze mois qui va de septembre 2017 à août 2018 inclus) selon l'Observatoire régional des transports de la Corse (ORTC), les trafics passagers maritimes de l'île demeurent loin de leurs records historiques établis en 2010 (4,66 millions de passagers). Les trafics passagers maritimes corses ressortent donc à un niveau très proche de celui déjà constaté par l'ORTC ces cinq dernières années alors que l'on pouvait espérer un rebond. En effet, l'avant-saison avait été plus favorable que celle de 2017 en raison du positionnement des jours fériés, mais - effet coupe du monde de football ? - les mois de juin et juillet n'ont pas généré le trafic passagers attendu, tout du moins sur les lignes maritimes. Les principaux gains de trafic passagers estivaux de Corsica Linea sont venus en été des traversées supplémentaires programmées avec le Danielle Casanova, au détriment de la ligne Marseille-Tunis mais au global, l'effet n'est pas massif à l'échelle des transports annuels de la Corse ! Aucun incident majeur n'est intervenu lors de l'été 2018, même si la Moby a dû à plusieurs reprises faire appel au Moby Niki, normalement affecté à la desserte de l'île d'Elbe, pour venir suppléer certains de ces navires affectés par des difficultés du fait de soucis moteurs. Cela n'a pas empêché la compagnie à la baleine bleue de connaître une progression notable, même si celle-ci s'est concentrée sur la ligne Genova-Bastia. Sa navette low cost de jour sur Nice-Bastia n'a en revanche pas connu le succès escompté, peut-être en partie du fait des retards importants qu'ont connu les navires la desservant, et la Moby se retire de cette liaison en 2019... Dans ce contexte plutôt morose, la Corsica Ferries, qui a fêté ses 50 ans en mai 2018, n'a pas battu de record sur la Corse. La compagnie aux bateaux jaunes s'est surtout consacrée en 2018 à la diversification de ses lignes, en inaugurant notamment une nouvelle liaison entre Toulon et le port d'Alcúdia, à Majorque.

Globalement, la relative stagnation des trafics maritimes de la Corse en 2018 (+1,5 % d'évolution sur 12 mois à fin août selon l'ORTC) se traduit de nouveau par une érosion au profit de l'aérien (qui progresse de 7,8 % sur la même période), prolongeant ainsi le mouvement amorcé depuis plusieurs années déjà (voir un précédent article thématique de Mare Nostrum Corsica sur ce sujet), en dépit des inconvénients de ce dernier mode de transport en termes de durées de séjours et de bilan environnemental. De ce fait, le mode de transport aérien dépasse désormais le mode maritime en termes de nombre de passagers transportés sur les lignes de Corse, et ce, pour la première fois de son histoire. Cette orientation morose des trafics maritimes corses inciterait les compagnies maritimes à développer leurs lignes sur d'autres marchés, à l'image des politiques de diversification récentes opérées par la Corsica Ferries (au départ de Toulon, sur la Sardaigne depuis 2016, sur Majorque depuis 2018 et sur la Sicile  à partir de 2019, en attendant Minorque, aussi en projet...) ou encore la Corsica Linea (sur l'Algérie et la Tunisie, depuis Marseille, suite à la mise en service du Vizzavona en juin 2018). Avec un baril de pétrole qui atteint à nouveau des niveaux élevés et le durcissement imminent (dès le 1er janvier 2020) des normes anti-pollution qui va conduire à investir dans des dispositifs innovants coûteux, la situation est d'autant plus tendue pour les compagnies maritimes. En atteste par exemple la dégradation de la note de la Moby par Standard & Poors à la mi-octobre 2018 (de B à CCC+), la célèbre agence de notation ajoutait même que sans vente de navire d'ici la fin d'année 2018, la Moby aurait pu ne pas faire face à tous ses engagements financiers (source : article de Ship2shore  ;de fait des navires mixtes de la Tirrenia - de type Puglia - ont été cédés depuis)...  




En attendant la commande de ses futurs navires écologiques, la Corsica Ferries ouvre en 2019 des liaisons inédites vers la Sicile et effectuera quelques traversées vers Minorque, en complément de celles sur Majorque !
Bastia, août 2018 ; photo : Romain Roussel
À la Corsica Ferries, la grande nouveauté surprise de 2019 est la nouvelle ligne vers Trapani, en Sicile, au départ de Toulon et de Nice.
Ici, le Mega Express Four de la Corsica Ferries, arriv
ant à Bastia en août 2018 (photo : Romain Roussel), qui effectue la plupart de ces nouvelles traversées.

La Corsica Ferries a ouvert à la vente ses traversées pour la période allant jusqu'à début septembre 2019 dès le 5 octobre 2018, soit de manière anticipée par rapport aux années précédentes (l'ouverture des réservations s'effectue généralement vers la mi-octobre). Une nouvelle fois, la compagnie innove en ouvrant à compter du 21 avril 2019 une nouvelle liaison inattendue entre Toulon (ou quelquefois Nice) et le port sicilien de Trapani, situé sur la côte ouest de l'île, à 1h30 en voiture de la capitale régionale Palerme, afin de minimiser le temps de trajet. Cette liaison, la plus longue de la compagnie, sera assurée essentiellement de nuit en Mega Express, en 18h15 de traversée depuis Nice et en 19h30 depuis Toulon, à raison de deux rotations par semaine en saison. Si la plupart de ces traversées sont des liaisons directes vers la Sicile dans le programme préliminaire, quleques-unes s'effectueront à la fin de l'été avec une escale en Corse (à Porto Vecchio) ou en Sardaigne (à Golfo Aranci). Cela permettra également aux insulaires d'être périodiquement reliés - pour le coup directement et avec un temps de traversée bien moindre - à la Sicile. 

L'ouverture de cette nouvelle ligne s'inscrit dans une stratégie de diversification des liaisons de la compagnie aux bateaux jaunes menée depuis 2016. Elle intervient un an jour pour jour après l'inauguration d'une ligne inédite entre Toulon et Alcúdia, situé au nord est de l'île de Majorque (ce port est plus accessible depuis Toulon que celui de la ville principale de l'île, Palma), activée au printemps 2018 pour célébrer les 50 ans de la compagnie. Avec plus de 60 000 passagers transportés lors de la première saison d'exploitation, cette ligne vers les Baléares et confirmée pour 2019. La desserte des Baléares est même renforcée. Les premières liaisons sur Majorque ont débuté à raison de deux allers-retours par semaine en Mega Express, les traversées Toulon-Alcúdia s'effectuant soit de nuit, soit de jour (en 10h30 de traversée environ). Pour la saison 2019, jusqu'à trois rotations par semaine sont assurées, dont quelques unes sont effectuées avec escale dans l'île voisine de Minorque (cette desserte triangulaire des îles Baléares au départ de Toulon ne faisant l'objet à ce stade que d'un petit nombre de traversées, un partenariat a été noué avec la compagnie espagnole Trasmediterranea qui dessert les Baléares). Si le port d'escale minorquaise n'est pas précisé à ce stade, au vu de la durée de trajet prévue (3h15) entre cette île et le port Alcúdia, situé à Majorque, ce pourrait finalement être Mahon, le port principal de Minorque, situé sur la côte est de l'île et non celui de Ciutadella, sur la côte ouest de l'île, initialement envisagé mais qui poserait des problèmes d'accostage pour des navires de cette dimension. Cela reste toutefois à confirmer par la compagnies aux bateaux jaunes dans les prochaines semaines. 

L'ouverture de ces nouvelles liaisons a été permise par l'accroissement de l'offre de transport consécutive à la mise en service depuis 2017 du nouveau navire amiral de la compagnie, de grande capacité, le Pascal Lota. Venu s'ajouter à la flotte déjà existante de la Corsica Ferries, ce ferry rapide construit en 2008 est doté d'une très bonne vitesse de pointe (près de 28 noeuds), d'une grosse capacité en garage (près de 700 voitures) mais aussi en passagers (2 200). Il s'agit du quatrième navire d'une série initiée en 2001. 

En outre, la compagnie serait en train de finaliser le projet de construction de deux ferries rapides neufs de grande capacité et plus écologiques, aptes à satisfaire les nouvelles normes environnementales plus exigeantes qui prévaudront en Méditerranée à partir de 2020. Confiés au bureau d'étude Naos design, basé à Trieste (dans la région de Venise), ces nouveaux navires - encore au stade de prototype - pourraient être dotés d'épurateurs de fumée (scrubbers) ou être propulsés au gaz naturel liquéfié afin de limiter drastiquement les émissions de particules fines, nocives pour l'environnement et la santé. Ils seraient très profilés et pourraient même - sous réserve de confirmation, le design de la coque n'étant pas encore définitif - être dotés d'une étrave de forme inversée. Cela permettrait, selon ses concepteurs, de minimiser la consommation de carburant - donc les émissions polluantes et, par voie de conséquence, le coût des billets - et d'atteindre un niveau optimal de tenue à la mer par tous temps. L'objectif de la compagnie est de finaliser la commande le plus tôt possible en 2019 afin que le premier de ces navires puisse être mis en service sur les lignes de Corse si possible dès la saison 2021...Sans attendre cela, elle devrait adapter ses navires au courant quai, un partenariat en ce sens ayant déjà été noué avec les autorités portuaires toulonnaises pour éviter les émissions de fumées lors des escales.

Pour le reste, la programmation estivale des navires de la Corsica Ferries est à ce stade partielle, le Sardinia Vera n'étant pas encore véritablement affecté à une desserte en dehors de quelques traversées épisodiques déjà programmées. Priorité est donnée aux lignes de et vers Toulon vers Ajaccio (la plus fréquentée des lignes de Corse) et Bastia, mais aussi, à titre secondaire vers Ile Rousse et Porto Vecchio, la programmation varoise de ce port du sud Corse apparaissant renforcée. En revanche, les programmations des lignes de Nice vers le sud de la Corse et la Balagne et celles au départ de Livorno et Piombino vers Bastia semblent à ce stade en net retrait (avec toutefois au global jusqu'à 3 allers-retours quotidiens les jours de pointe sur ces lignes pour la compagnie aux bateaux jaunes). Pour autant, la Corsica Ferries a déjà programmé les traversées de son NGV Corsica Express Three Piombino-Portoferraïo (Ile d'Elbe) se prolongeant vers Bastia. Depuis la saison dernière, ces traversées du Corsica Express Three suivent la programmation suivante dans le sens Italie-Corse : départs généralement les mercredis et jeudis en saison de Piombino à 17h35, escale à Portoferraïo sur l'île d'Elbe à 18h15 et arrivée à Bastia à 20h ; retour de Bastia pour Piombino à 7h le plus souvent les jeudis et vendredis, escale à l'île d'Elbe à 8h30 et arrivée sur le continent à 9h25.

Sur les lignes françaises, en sus des rotations sur Toulon, les traversées de et vers Nice se concentrent désormais assez largement sur le port de Bastia, même si les autres ports de Corse (Ile Rousse, Ajaccio et Porto Vecchio) restent aussi desservis, mais de manière plus sporadique. Depuis quelques années, la compagnie préfère faire naviguer ses navires sur plusieurs lignes au cours de l'année plutôt que de les spécialiser dans une seule : nombre de ses clients, principalement des lignes de Corse, devraient donc pouvoir emprunter l'un ou l'autre de ses ferries la saison prochaine sur leur parcours habituel à une date ou à une autre... 

Sur les lignes Italie-Sardaigne, la capacité de transport semble là aussi se concentrer de plus en plus sur Livorno-Golfo Aranci, avec quelques évolutions quant aux navires affectés. Jusqu'ici, en sus du Mega Express Three, pilier de la ligne sarde Livorno-Golfo Aranci, c'est essentiellement le Corsica Victoria et son jumeau, le Sardinia Regina, qui venaient en renfort, ainsi que les Mega Express et Mega Express Two. Ce sera aussi occasionnellement le cas du Corsica Marina Seconda, en sus de ses rotations habituelles de jour sur Livorno-Bastia. La programmation au départ de Piombino, généralement renforcée dans un second temps, n'est à ce stade que peu étoffée et pourrait être complétée d'ici le printemps. 

Quant à la paire mythique de ferries en provenance de la mer Baltique, composée des Mega Andrea et Mega Smeralda, celle-ci a été lors de la saison 2018 plus que jamais centrée sur les lignes phare Toulon-Ajaccio (qui a gagné encore quelques escales au détriment de la ligne Nice-Ajaccio) et Toulon-Bastia. Ce sera encore le cas en 2019, où les week-ends de pointe, ces navires sont de nouveau été placés prioritairement de nuit sur ces lignes. Ceux-ci effectueront aussi certains jours des traversées sur la ligne Toulon-Porto Torres, dont la programmation est de plus en plus fournie (certaines de ces traversées se poursuivant ensuite sur Porto Vecchio), ainsi que les samedis de jour sur Livorno-Bastia, comme c'est le cas depuis quelques années. Quant à la ligne Savona-Bastia, celle-ci continue de bénéficier les jours de plus forte affluence d'une programmation plus étoffée, avec des traversées en Mega Express en sus de celles des Sardinia Regina et Corsica Victoria. La Corsica Ferries assurera en effet plus souvent 3 allers-retours quotidiens entre Savona et Bastia pendant l'été 2019 qu'en 2018, vraisemblablement en réponse au succès de la ligne Genova-Bastia de la Moby.

Au final, le rôle central du port de Toulon ressort de manière évidente si l'on comptabilise aussi les nouvelles dessertes en cours d'intensification ou d'expérimentation vers la Sardaigne (Porto Torres), les Baléares (Alcúdia et bientôt Ciutadella ?) et la Sicile (Trapani). Toutes lignes confondues, les samedis de pointe d'août 2019, la Corsica Ferries devrait ainsi assurer au moins une douzaine de rotations dans chaque sens entre la Corse et le continent, ce qui reste de loin le réseau le plus dense sur la Corse même si ce niveau est sensiblement inférieur au record absolu atteint en 2018 (jusqu'à 17), compte tenu notamment de l'ouverture de ses nouvelles lignes hors de Corse et du repositionnement des navires sur des lignes en moyenne plus longues.  



Corsica Linea et La Méridionale navigueront-elles toujours de concert sur Marseille-Corse après septembre 2019 ?

La période suivant la saison 2019 pourrait être celle de tous les dangers pour La Méridionale, confrontée d'après Le Marin à des velléités d'expansion de Corsica Linea à son détriment sur les lignes de service public entre Marseille et la Corse et les deux compagnies ayant répondu séparément à l'appel d'offres. Ici, photo du Piana prise au départ de Bastia en avril 2018 par Romain Roussel. 

La Corsica Linea a succédé depuis avril 2016 à l'ex-opérateur historique de la Corse, la SNCM, disparue début 2016 après de nombreux rebondissements. Désormais présidée par Pascal Trojani, qui a pris le relai du repreneur désigné Patrick Rocca en avril 2016, et dirigée par Pierre-Antoine Villanova, la compagnie installe progressivement ses nouvelles couleurs dans le paysage maritime insulaire. À l'exception du Méditerranée, qui serait pourtant confirmé pour la saison 2019 [1], ses navires sont passés un à un aux couleurs rouges du consortium : les premiers ont été les Jean Nicoli, Pascal Paoli et Danielle Casanova de mars à juin 2016, puis le Paglia Orba après la saison 2016 et, enfin, le Monte d'Oro en décembre 2017 et le dernier navire affrété, le Vizzavona en juin 2018. La compagnie aux bateaux rouges donc n'a à ce stade commercialisé que ses horaires d'été des navires mixtes, et non ceux des ferries Méditerranée et Danielle Casanova. Elle a néanmoins annoncé début février 2019 dans une interview de Pierre-Antoine Villanova, son dirigeant, au journal Le Marin qu'il n'y aurait pas d'escale de ferry sur la Corse pendant la saison 2019 ! Seules sont programmées quelques allers-retours supplémentaires entre Marseille et Ajaccio, parfois en traversées de jour, avec le navire mixte Jean Nicoli, dont la capacité est moindre pour le trafic touristique.

On retrouve donc une programmation de base classique, les dessertes et fréquences assurées par les navires mixtes restant sensiblement identiques sur les lignes de Corse à celles déjà observées en 2018 (la programmation des ferries classiques de la flotte n'est pas encore connue). Les quatre cargos mixtes de l'ex-SNCM (Pascal Paoli, Jean NicoliMonte d'Oro et Paglia Orba) poursuivent donc en 2019 leurs dessertes respectives au départ de Marseille vers Bastia, Ajaccio, Porto Vecchio et l'Ile Rousse, selon le schéma de traversées nocturnes établi par le cahier des charges de la délégation de service public (DSP) maritime

En revanche, la compagnie a confirmé son projet de commander dès 2019 un navire neuf, propulsé au gaz naturel liquéfié, dans le cadre du renouvellement de sa flotte, pour une mise en service à une date encore à préciser... La course de vitesse est donc ouverte avec la Corsica Ferries qui a elle aussi pour projet de commander deux nouveaux navires plus écologiques dans les prochains mois... Sans attendre cette mise en service, la Corsica Linea a engagé l'adaptation de sa flotte à l'aide d'épurateurs de fumée, installés à Bizerte en Tunisie sur le Paglia Orba début 2019, plusieurs autres de ses navires devant suivre d'ici un an.

À noter que l'Assemblée de Corse a finalement renoncé en juillet 2018 à reprendre à son compte les deux navires mixtes les plus anciens (Monte d'Oro et Paglia Orba) de Corsica Linea pour constituer le noyau de sa future compagnie maritime régionale. À compter de l'été 2019, ces deux navires devaient en théorie être cédés pour 10 millions d'euros à cette compagnie, mais sa création a finalement été repoussée à au moins 2021 et ses contours demeurent encore à préciser (trois entités sont envisagées, l'une possédant les navires et les deux autres - associant dans des proportions variables partenaires publics et privés - pour la desserte des ports principaux et secondaires de l'île, voir l'article thématique dédié). Le calendrier de création des futures entités régionales reste donc encore très incertain...

D'ici cette date, la Corsica Linea s'est portée candidate à la délégation de service public "courte", qui prévaudra de début octobre 2019 à fin décembre 2020 (soit 15 mois seulement), dont le principe et les caractéristiques ont été votés par l'Assemblée de Corse en juillet 2018. Celle-ci renforce les capacités fret exigées sur la plupart des ports de Corse dans le cadre de la délégation de service public au départ de Marseille (son effet en matière de transports de passagers semble en revanche plus ambigu, comme expliqué dans l'article thématique de Mare Nostrum Corsica cité ci-dessus). Elle pourrait conduire la compagnie aux bateaux rouges à mettre en service des navires à plus grosse capacité fret, notamment sur Bastia où l'accroissement des capacités de transport de marchandises exigé atteint un tiers par rapport à la précédente DSP. Elle devrait aussi conduire à une redéfinition du partenariat avec La Méridionale sur les lignes de Corse. En effet, selon le journal Le Marin, faute d'avoir pu absorber La Méridionale comme elle le lui avait proposé début 2018 (suite au refus de l'actionnaire majoritaire de cette dernière - le groupe frigorifique STEF - de céder ses parts de la compagnie aux bateaux bleus...), la Corsica Linea a répondu séparément à l'appel d'offres de la DSP et chercherait à renforcer son offre sur Marseille-Corse au détriment de sa partenaire. Plus précisément, Le Marin suggère que Corsica Linea pourrait se concentrer principalement sur les lignes principales les plus rentables - Marseille-Bastia et Marseille-Ajaccio - où les deux compagnies opèrent historiquement en alternance un jour sur deux, et tenter de reléguer sa partenaire sur les lignes secondaires (au départ de Propriano et d'Ile Rousse). Dans ce schéma évoqué par l'hebdomadaire maritime, comme la Corsica Linea devrait a priori chercher à maintenir son offre sur Porto Vecchio, elle opérerait alors avec 5 navires (au lieu de 4, le Vizzavona pouvant être réaffecté eux lignes de Corse) et La Méridionale n'en compterait plus que 2 (au lieu de 3 jusqu'ici) ! Cela ne serait pas acceptable du point de vue de La Méridionale et reste à ce stade un scénario possible de desserte parmi d'autres. L'Assemblée de Corse devra trancher entre ces deux opérateurs concurrents dans les prochaines semaines (l'offre de la Corsica Ferries ayant été rejetée pour des raisons de forme, mais la compagnie a porté l'affaire en justice devant le Conseil d'Etat qui devrait rendre son verdict d'ici avril 2019...). Déjà, le 12 février 2019, elle a engagé des négociations avec La Méridionale et la Corsica Linea mais cette dernière serait en psoition de force, comme précisé dans ce nouvel article thématique

Quoi qu'il en soit, d'ici septembre 2019, La Méridionale continue d'effectuer le service public maritime entre Marseille et la Corse avec la Corsica Linea dans le cadre de la délégation de service public dite "de raccordement"Sa programmation pour 2019 s'inscrit donc pour l'heure dans la continuité de celle des années précédentes, avec le Piana principalement affecté à Marseille-Bastia - ligne phare pour le fret - le Kalliste sur Marseille-Propriano et le Girolata sur la liaison Marseille-Ajaccio. En sus des rotations prévues par la DSP, quelques traversées de jour sur Marseille-Propriano avec le Kalliste pourraient aussi être commercialisées lors des périodes de pointe de l'été 2019 d'ici quelques mois, comme lors des étés précédents depuis 2016 (départs de Marseille certains dimanches à 10h, arrivée Propriano à 20h ; retours en traversée de nuit). Pour la saison 2019, La Méridionale entend aussi développer son propre système de réservation sur internet (la Tunisia Ferries, devrait l'imiter), jusqu'ici géré par la Corsica Linea pour le compte des deux compagnies.

À ce stade, La Méridionale n'a pas annoncé de nouvelle entrée en flotte, même si cela pourrait intervenir à moyen terme si la compagnie était reconduite sur son périmètre actuel et non sur un champ réduit. Pour mémoire, dans le cadre d'une précédente DSP annulée en justice, il était prévu que le prochain remplacement, celui du Kalliste, intervienne en 2023La principale nouveauté de La Méridionale de ces deux dernières années a été le renouvellement de son image : depuis 2017, les navires de la compagnie ont arboré progressivement une nouvelle livrée, mêlant deux tons de bleus (au lieu d'un seul auparavant). Le logo de la compagnie a été également retouché et une tête de maure est désormais peinte sur le flanc avec l'inscription "Of Corse !" (voir détails en page La Méridionale et sur celles des photos de 2016-2017). Soucieuse de l'environnement, la compagnie méridionale a été la première à bénéficier de la connexion du courant à quai à Marseille (dès 2017, lors des escales longues de ses navires qui passent la journée à quai), dont devrait également disposer Corsica Linea d'ici 2019, et expérimente à l'automne 2018 un système de raccordement permettant aussi de limiter les émissions polluantes sur le port d'Ajaccio. En outre, en vue du durcissement des normes d'émissions de polluants dans l'air en 2020, elle va expérimenter pendant six mois à compter du printemps 2019 sur un des moteurs du Piana un nouveau système de filtre à particules. Ce système, à base de bicarbonate de soude, conçu par Andritz et Solvay, devrait permettre d'épurer les fumées émises par ce moteur du navire et pourrait constituer une alternatifve aux scrubbers. D'après Benoît Dehaye, le directeur général de La Méridionale, ce dispositif pourrait permettre d'aller au-delà des nouvelles normes environnentales et d'éliminer "en plus des oxydes de soufre, 99 % des particules fines". Si les résultats en termes de filtrage sont concluants, ce système sera généralisé à l'ensemble de sa flotte d'ici 2020. 

Quant à la liaison corso-sarde Propriano-Porto Torres, assurée jusqu'ici jusqu'à 2 à 3 fois par semaine par le Kalliste de La Méridionale en traversée de jour, dans le prolongement de sa traversée de nuit Marseille-Propriano, et qui avait déjà failli totalement disparaître
dès le printemps 2015, faute de rentabilité, celle-ci devrait pérennisée dans les prochains mois. Une desserte de service public devrait en effet être lancée pour cette liaison (financée par la Collectivité de Corse, la région sarde finançant quant à elle une nouvelle délégation de service public plus dense entre Bonifacio et Santa Teresa di Gallura, attribuée à la Moby). Plus précisément, en lien avec son homologue sarde, l'Office des transports de la Corse (OTC) établirait un groupement européen de coopération territoriale (ou GECT) afin de pérenniser cette liaison, déficitaire de plusieurs centaines de milliers d'euros par an selon les déclarations des dirigeants de La Méridionale

Enfin, lors des précédentes DSP, l'
Office des transports de la Corse de l'époque n'avait pas obtenu
des compagnies délégataires - SNCM, puis Corsica Linea et La Méridionale - qu'elles alternent un jour sur deux les traversées vers les ports de Porto Vecchio et Propriano. Déjà identifié comme l'un des points faibles de la précédente convention de service public, cette concentration de la desserte fret de l'extrême Sud sur trois jours de la semaine serait un frein pour l'économie du sud de l'île. Au vu du programme communiqué par les compagnies, la DSP Marseille-Corse dite transitoire en vigueur jusqu'à l'automne 2019 n'a rien changé de ce point de vue-là. Les compagnies délégataires - La Méridionale et Corsica Linea - n'ont jusqu'ici pas cédé sur ce point : la programmation commercialisée à ce jour pour la période allant jusqu'à septembre 2019 atteste que les départs de Marseille pour Propriano et Porto Vecchio - et vice-versa - continuent de s'effectuer généralement les mêmes soirs... Cela risque de ne pas changer à l'avenir, cette alternance des jours entres les ports secondaires du sud de la Corse ne restant qu'au stade des préconisations dans le cadre du cahier des charges de la DSP courte courant jusqu'à fin 2020 ! 



La Moby Lines renforce ses liaisons Bastia-Livorno et rouvre Bastia-Piombino en saison, mais se retire de Nice !

Ici, les Moby Kiss et Moby Zazà à Bastia en août 2018 (photo : Romain Roussel), affecté aux lignes corses de la Moby en 2018 pour desservir Genova-Bastia avec le Moby Corse. 
 
 


Les horaires 2019 pour la Corse la Moby Lines ont été commercialisés le 29 octobre 2018. La programmation commercialisée par la compagnie diffère ce celle, provisoire, précédemment indiquée sur le site de la Chambre de commerce de Bastia et de la Haute Corse pour l'été 2019, qui laissait apparaître un net renforcement des liaisons bastiaises de la compagnie. Si les liaisons entre Bastia et la Toscane seraient effectivement renforcées au départ de Livorno et de Piombino, ligne historique de la Moby qu'elle rouvrirait en 2019, la compagnie a confirmer abandonner la ligne Nice-Bastia. Inaugurée de nuit avec le Moby Zazà en 2016 puis reprise de nuit toujours avec le Moby Dada en 2017, la liaison n'avait pas rencontré son public avec environ 60 000 passagers transportés en 2017 par la compagnie à la baleine bleue, contre près de 150 000 à 200 000 initialement espérés. En 2018, la Moby avait donc changé son fusil d'épaule en y affectant deux navires qui se relayaient cette fois de jour sur Nice-Bastia-Livorno et retour dans une programmation low cost en remplacement du Moby Dada. Il s'agissait de deux navires ne disposant pas ou que de peu de cabines, jusqu'ici affectés principalement à la desserte de l'île d'Elbe et à celle de Livorno-Bastia, les Moby Kiss (sauvé in extremis de la démolition par la Moby il y a trois ans) et Moby Vincent. Toutefois, cette nouvelle formule n'a pas non plus connu un grand succès - surtout au regard du développement de la ligne Genova-Bastia - et n'est donc pas reconduite en 2019. Ce retrait de la Moby de Nice peut aussi être à rapprocher du durcissement des obligations de service public (de une à deux rotations par semaine minimum en toutes saisons, sans aucune compensation financière pour la Moby et pour la Corsica Ferries sur les lignes entre Nice, Toulon et la Corse) récemment voté par l'Assemblée de Corse à l'automne 2018 et qui fait aussi l'objet d'une contestation en justice par la Corsica Ferries... De fait, cette obligation de desserte renforcée des lignes Nice-Corse en hiver sans compensation financière aux compagnies se traduit donc in fine par l'effet inverse : une moindre desserte de ces lignes, été comme hiver !

Le Moby Niki, dont le retour sur les lignes de Corse était initialement envisagé dans les projets de programmation des saisons 2018 et 2019, pourrait donc rester de nouveau sur celles entre l'Italie et l'ïle d'Elbe, en instance de programmation ! Construit en 1974 et racheté en 2017 par la Moby, il n'est autre que l'ex-Corsica Serena Seconda, que la Corsica Ferries avait vendu à une compagnie albanaise début 2011.

Pour la saison 2019, les lignes Italie-Corse sont renforcées avec la mobilisation du Moby Kiss qui viendrait s'ajouter de jour sur la ligne Livorno-Bastia (départ de Bastia le matin à 8h, retour de Livorno pour Bastia à 13h15). En outre, ce navire assure aussi en complément plusieurs rotations par semaine en saison sur Piombino-Bastia, jusqu'ici desservie par la seule Corsica Ferries. Bien qu'il ne dispose pas de cabine, les départs de Piombino pour Bastia s'effectuerait de nuit, à 23h (en 7h30 de traversée), et les retours de jour à 18h30, en 3h30 de traversée. Sur Genova-Bastia, on retrouve une programmation similaire à celle de 2018, avec à nouveau en 2019 les Moby Zazà et Moby Corse, dont les capacités sont très proches (environ 450 voitures chacun et de 1 200 à 1 400 passagers). Ces navires garantissent à eux deux deux allers-retours quotidiens en saison. Comme en 2018, les départs de jour s'effectuent à 8h depuis Genova pour Bastia et à 11h en sens inverse, la traversée durant de 6h30 à 7h15 selon le sens de traversée et le navire emprunté (le Moby Zazà naviguant de manière ralentie comparé au Moby Corse) ; en nuit, les traversées sont toujours programmées à 21h dans les deux sens. La seule différence porte sur le sens d'affectation des navires : en 2019, c'est le Moby Corse qui effectue les liaisons de nuit dans le sens Bastia-Italie (et le Moby Zazà dans l'autre sens), soit l'inverse du choix retenu par la compagnie en 2018.

Par ailleurs, la Moby a constitué un groupe de premier plan, Onorato Armatori, avec les deux compagnies italiennes rachetées depuis 2010 (la Toremar, qui dessert l'île d'Elbe et la Tirrenia, qui dessert notamment la Sardaigne et la Sicile) dont il doit assurer le développement dans un contexte de concurrence accrue avec Grimaldi Lines, notamment sur les lignes sardes où Onorato Armatori est en position fortement dominante (70% du marché passagers et 71% du fret en 2016, selon l'armateur). Pour réduire ses coûts (le groupe aurait connu un déficit de plus de 60 millions d'euros au premier semestre 2018, d'après les comptes qu'elle a publiés), la Moby devait fusionner avec la Tirrenia avant la fin 2018, mais cette décision a été retardée : elle est contestée par les administrateurs de la Tirrenia qui la jugent contraire aux intérêts de l'ex-compagnie publique. Les différentes marques du groupes pourraient toutefois perdurer à terme, même si formellement la Moby devait être intégrée à la Tirrenia, qui perçoit d'importantes subventions (72 millions d'euros par an pour la desserte de la Sardaigne et de la Sicile, montant faisant l'objet de contestations en Italie et même d'une pétition demandant l'annulation de l'actuelle convention de service public...).


Sur les lignes corso-sardes enfin, un bras de fer se joue depuis plusieurs années entre la Moby et la BluNavy (ces deux compagnies sont déjà en concurrence sur l'île d'Elbe depuis plusieurs années). En effet, sur la ligne Bonifacio-Santa Teresa di Gallura, la BluNavy avait pris le relai de la Saremar en avril 2016 (en reprenant son navire, l'Ichnusa), suite à sa liquidation judiciaire, mais avait dû renoncer à son lien hivernal, faute de moyens suffisants. Jusqu'alors la Saremar était la seule compagnie à desservir cette liaison toute l'année, la Moby ne l'effectuant qu'en saison avec le ferry Giraglia. La Moby avait pour la première fois prolongé son activité toute l'année en 2016 et s'est vu attribuée depuis par la région sarde la DSP sur Bonifacio-Santa Teresa di Gallura jusqu'en 2020...



Les Mega Smeralda et Pascal Paoli à Bastia en août 2018 ; photo : Romain Roussel.



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Notes

[1] Pierre-Antoine Villanova avait pourtant déclaré à l'été 2017 que, plutôt que de le moderniser (ce qui serait très coûteux, plus de 20 millions d'euros), la Corsica Linea envisageait de se séparer du ferry Méditerranée (principalement affecté à la ligne Marseille-Alger) et de le remplacer sur les lignes du Maghreb par un navire mixte à plus forte capacité fret. Or, le Vizzavona est depuis venu en renfort du Méditerranée sur ces lignes et non en substitution. La Corsica Linea n'a pour l'heure pas non plus ouvert certaines lignes en Méditerranée occidentale au départ de Marseille évoquées initialement par ses dirigeants : Baléares, Barcelone, Sardaigne, Sicile... 


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