Saisie par la
chambre de commerce et
d'industrie du Var (CCIV)
qui s'inquiétait notamment
1
des projets d'extension possible de la délégation
de
service public (DSP) aux liaisons Toulon-Corse par les élus
Corses, l'
Autorité
de la concurrence a rendu, le 17 février
2012, un avis concernant la desserte maritime de la Corse.
Elle recommande que "la
Collectivité
territoriale de Corse (CTC) évalue
avec précision les besoins en termes de desserte afin de
limiter
le champ du service public à ce qui est
nécessaire".
Plus précisément et "préalablement
à toute décision, l'
Autorité de la
concurrence
préconise d'évaluer, ligne par ligne, les besoins
réels en service public en termes de capacité de
transport (voyageurs et fret), de fréquence des
traversées, de ports d'origine et de destination, de types
de
bateaux".
Dans son rapport détaillé, l'
Autorité de la
concurrence
relève en particulier le coût
élevé de la
DSP actuelle assurée au départ de Marseille par
la
SNCM et
La Méridionale
au regard du nombre de traversées effectué, la
subvention
par traversée apparaissant dix fois supérieure
à
celle accordée au titre de l'aide sociale au passager
à
la
Corsica Ferries
et à la
SNCM
au départ de Toulon et de Nice (
cf. tableau
ci-dessous, dont les chiffres sont repris du rapport).
Montant des
financements publics par régime d'aide |
Année
2010,
source : Office des
transports de la Corse |
Régime de DSP
(Port de Marseille) |
Régime d’OSP avec aide
sociale
(Ports de Nice et Toulon) |
Nombre
de traversées |
2
641
|
4
028 |
Compensations
financières |
113,22
M€
|
17,24
M€ |
Subvention
publique par traversée |
42
870,67 €
|
4
280,69 € |
|
Source : Avis
n°12-A-05 du 17 février 2012 de l'Autorité de la
concurrence relatif au transport maritime entre la Corse
et le continent
L'Autorité de
la concurrence
reconnaît toutefois que ces écarts ne doivent pas
être interprétés sans un certain recul
car "cette
comparaison ne tient pas compte de la différence des charges
portuaires (par exemple, les coûts de manutention et de
passage
portuaire) entre Marseille, Toulon et Nice et mériterait
d’être affinée" et que "les niveaux de
services
demandés aux délégataires et aux
transporteurs
sous OSP ne sont certes pas strictement identiques et les contraintes
plus fortes imposées aux délégataires
justifient
un besoin de financement public plus important."
Pour autant, elle conclut que "les écarts
considérables
entre ces deux types d’intervention devraient conduire
à
s’interroger sur la nécessité de
maintenir une DSP
ou, à tout le moins, à dimensionner au plus juste
son
périmètre. En particulier, il y a lieu de bien
documenter
l’éventuel constat d’insuffisance
d’un
régime d’OSP
généralisées de nature
à justifier une intervention plus importante. Ceci
étant
précisé, l’Autorité
estime que le régime d’OSP
généralisées est celui qui porte le
moins atteinte
à la concurrence et qui est le moins onéreux pour
la
collectivité."
En conséquence et "compte tenu du faible taux de remplissage
des bateaux assurant la liaison Marseille/Corse, l'
Autorité
recommande à l'
Office
des transports de la Corse (OTC) d'étudier la
possibilité d'abandonner, au moins provisoirement, le
régime de la DSP à compter du 1
er
septembre 2012 (date à laquelle la
Cour administrative d'appel de
Marseille a ordonné la rupture des conventions
actuelles), et de mettre
en place un régime « d'OSP
généralisées »,
c'est-à-dire d'obligations
de service public (nombre de dessertes hebdomadaires,
capacités, ports
de départ et d'arrivée,
etc.) s'imposant
à tous les armateurs au départ de chacun des
ports, y compris celui de Marseille."
Elle souligne toutefois que les conséquences d'une telle
généralisation des OSP ne seraient pas les
mêmes
selon que le dispositif d'aide sociale serait, ou non, maintenu :
"Dans le cas où le régime d’OSP serait
généralisé
sans maintien du dispositif
d’aide sociale,
il est probable que certains services ne seraient plus fournis ou, tout
du moins, que les prix des billets augmenteraient, de sorte que le
trafic pourrait être réduit.
Dans l’hypothèse où le
régime d’OSP
serait généralisé à tous
les ports (y
compris celui de Marseille),
avec
maintien d’un dispositif d’aide sociale et
suppression de la DSP, le même niveau de financement public
par
traversée que le montant accordé au titre de
l’aide
sociale devrait permettre aux compagnies de proposer des prestations
comparables à celles fournies actuellement."
En tout état de cause, une extension des OSP provoquerait
selon l'
Autorité
de la concurrence
"une baisse importante des besoins de financement public.
L’expérience de la concurrence sur le
marché de
Toulon révèle à cet égard
que le coût
du dispositif d’OSP avec aide sociale est nettement plus
faible
que le coût associé au financement du
déficit
d’exploitation du délégataire
exploitant les
liaisons entre Marseille et la Corse."
Elle rappelle par ailleurs "qu'avant d'envisager de recourir
à
une DSP, la CTC doit s'assurer qu'un régime de type
« OSP
généralisées » ne suffit pas
et que le
marché n'est pas à même de satisfaire
seul les
besoins de l'île" et que cette évaluation des
besoins
"permettra à la collectivité territoriale de
Corse de
choisir le mode
d'organisation du service public le plus adapté à
la
desserte de l'île".
Enfin, si, après examen, une DSP s'avèrait
nécessaire, l'
Autorité
de la concurrence "recommande à la
CTC
d'en délimiter le périmètre
à ce qui est
indispensable. En effet, s'agissant du service
complémentaire
(lors des vacances solaires et estivales), il ne semble pas exister
à ce jour de carence de l'initiative privée pour
le
transport de passagers depuis Toulon, Marseille ou Nice. Enfin,
s'agissant du service de base (période creuse) au
départ
de Toulon, Marseille ou Nice, seul un recensement précis et
une
analyse circonstanciée des besoins réels de la
population
et des entreprises permettront à la collectivité
de se
prononcer sur le recours ou non à la DSP et de
sécuriser
ainsi son intervention sur un plan juridique."