Mare Nostrum Corsica

Idée fausse n°4la délégation de service public (DSP) de la continuité territoriale corse ne finance que les lignes maritimes Marseille-Corse en période creuse.

Le Danielle Casanova de la SNCM contournant la jetée du port de Bastia
Si le principe du subventionnement à l'année des cargos mixtes de la SNCM et de la Méridionale est bien accepté, certains observateurs contestent l'octroi d'importants financements publics pour l'utilisation des car-ferries Danielle Casanova (photo) et Napoléon Bonaparte en périodes de pointe touristique.

L'idée reçue d'un financement réservé au trafic maritime hors saison est fausse, la mission du service public de continuité territoriale - et les subventions associées - ne se limitent pas aux seules lignes maritimes, ni même aux seules périodes creuses :

- tout d'abord, le trafic aérien est aussi subventionné, que ce soit pour le "bord à bord" - c'est-à-dire les vols de la Compagnie Corse Méditerranée (CCM Airlines) au départ des quatre aéroports insulaires d'Ajaccio, Bastia, Calvi et Figari vers Marseille et Nice - ou pour les liaisons de la Corse vers Paris-Orly assurées en partenariat par les compagnies Air France et CCM-Airlines. Les trois destinations que sont Paris, Marseille et Nice concentrent, en 2008, près de 2,2 millions de voyageurs, sont environ 85% du trafic aérien total de la Corse.

- d'autre part, le trafic maritime entre la Corse et Marseille est assuré et subventionné toute l'année, que ce soit pour le transport des passagers (résidents et touristes) ou pour celui des marchandises. En effet, en plus de la flotte de 7 cargos-mixtes de la SNCM et de La Méridionale qui desservent à l'année l'ensemble des ports corses, deux car-ferries de la SNCM, les Napoléon Bonaparte et Danielle Casanova, viennent également en renfort pendant les périodes de pointe. Tous types de navires confondus, les trafics Marseille-Corse représentent, en 2008, près de 900 000 passagers et 1,5 million de mètres linéaires de roll d'après l'Observatoire régional des transports de la Corse.

Par ailleurs, comme le rappelle l'Office des transports de la Corse sur son site internet, "la situation de concurrence sur Nice ainsi que le fait que sur Toulon n’existait pas de véritable service public ont conduit, lors de l’examen du dispositif à mettre en place, à partir de 2002, à sortir ces lignes de l’appel d’offres et d’instituer un système d’aide sociale aux passagers transportés (Note de Mare Nostrum Corsica : voir idées fausses n°5 et n°6) déjà pratiqué en aérien, les catégories visées représentant près des deux-tiers du trafic total (jeunes, vieux, familles et résidants dans l’île)."

Et l'Office des transports ajoute que "ce système, qui permet la concurrence, est en fait mieux adapté pour la résolution du trafic de pointes car plus incitatif pour les compagnies payées en fonction du trafic réalisé, alors que dans la procédure d’appel d’offres, elles peuvent se contenter de respecter les mesures de capacités prévues au cahier des charges même si celles-ci s’avèrent insuffisantes devant la demande. Ces lignes sont astreintes à des obligations de service public en termes de capacités, fréquences, tarifs. Elles font donc partie du service public." Pour mémoire, les lignes maritimes entre Toulon, Nice et la Corse représentent 1,9 million de passagers et 350 000 mètres linéaires de fret en 2008 d'après l'Observatoire régional des transports de la Corse.

L'Office des transports de la Corse publie également sur son site internet la répartition des dépenses de continuité territoriale allouées chaque année : 186,26 millions d'euros ont ainsi été dépensés par la Collectivité territoriale de Corse au titre de la seule année 2008, dont 117,57 millions pour le mode maritime et 68,69 millions pour l'aérien. Cette répartition par mode de transport (63% pour le maritime, 37% pour l'aérien) n'est pas figée dans le temps, mais susceptible d'évoluer. Si elle correspond à peu près à l'importance respective de ces deux modes de transport sur la Corse (voir idée fausse n°1), on remarque que le secteur aérien tend plutôt, sur moyenne période, à voir sa part de subvention progresser au détriment du maritime. Plus précisément, les subventions se répartissent comme suit en 2008, par type de desserte :

En 2008, 98 M€, soit 52,9% de l'enveloppe de continuité territoriale vont aux lignes maritimes Marseille-Corse tandis que 19 M€, soit 10,3%, bénéficient aux lignes maritimes Toulon et Nice-Corse

Le principal poste de dépenses demeure la délégation de service public maritime pour les lignes Marseille-Corse : plus de la moitié de l'enveloppe totale de continuité territoriale, soit 98,55 millions en 2008, sont répartis chaque année entre CMN (14,2%, soit 26,42 millions en 2008, pour 3 cargos mixtes naviguant toute l'année) et, surtout, SNCM (38,7%, soit 72,14 millions, pour 4 cargos mixtes naviguant toute l'année et 2 ferries armés pendant les périodes de pointe), qui se taille la part du lion. L'ensemble des autres modes de transport, aérien (Air France et CCM Airlines) et maritime depuis Toulon et Nice (Corsica Ferries et SNCM), qui représentent 4,1 millions de passagers en 2008 et 350 000 mètres linéaires de fret, se partagent le reste de l'enveloppe (respectivement 68,69 M€ pour l'aérien et 19,02 M€ pour le maritime). Par compagnie maritime, la répartition des subventions de continuité territoriale est donc la suivante en 2008 d'après l'Office des transports de la Corse (aide sociale et délégation de service public confondues) :

La SNCM est de loin la première compagnie maritime bénéficiaire des subventions de continuité territoriale, avec 74 M€ en 2008 sur un total de 117 M€

Comme le souligne l'Office des transports de la Corse sur son site internet, le bilan de l'introduction des navires mixtes sur les lignes Marseille-Corse a été très positif, tant en termes de qualité de service que de développement du trafic maritime en période creuse ou encore sur le plan économique, en permettant "une diminution très significative des subventions destinées aux cargos".
L'Office des transports de la Corse rappelle en effet "qu'il suffit de constater que la subvention de la CMN qui représentait, en 1986, environ deux fois la recette commerciale, n’en représente actuellement que la moitié". De fait, la subvention accordée à la CMN apparaît substantiellement inférieure à celle dont dispose la SNCM : certes, la SNCM dispose d'un cargo-mixte en plus (4 au lieu de 3), mais surtout, une partie importante des subventions de cette compagnie est dévolue aux car-ferries qui ne naviguent sur la Corse qu'en périodes de pointe (vacances scolaires et période estivale principalement). Il s'agit là sans doute de l'une des raisons pour lesquelles la direction de la SNCM a affirmé début 2009 vouloir progressivment remplacer les différents navires de sa flotte par des cargos mixtes, dont certains de plus grande capacité passagers, comme le nouveau Jean Nicoli (1 500 personnes, contre environ 500 passagers en moyenne pour les navires mixtes naviguant jusqu'ici sur la Corse).

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