Proposition
d'une constitution
de
l'Eglise catholique
Association for the rights of Catholics in the Church
Réseau
européen Eglise de liberté
Janvier
1999
Vers
une constitution de l'Eglise catholique
"Faites une Constitution pour
l'Eglise catholique", ordonnait le Pape Paul VI
pendant le second Concile du Vatican (1962-65). En fait, il y a eu
d'innombrables éléments d'une Constitution dans beaucoup de documents de
l'Eglise au cours des siècles. Le Code de droit canonique de 1983 contient même
des pans importants d'une constitution écrite. Néanmoins, cette constitution partielle est très
incomplète et elle est muette au sujet d'un partage démocratique des
responsabilités tel que maintes structures de gouvernement de l'Eglise catholique
l'ont pratiqué dans le passé.
Jaillie de la
vision proclamée et des énergies libérées par le second Concile du Vatican, une
dynamique d'élaboration et de discussion d'une Constitution renouvelant le mode
de gouvernement de l'Eglise catholique est aujourd'hui à l'oeuvre. Cette
Constitution serait imprégnée de l'esprit de l'Evangile de libération de Jésus
et de son amour. Elle s'inspirerait des principes de gouvernement les plus
éprouvés à l'orée du 3ème millénaire.
La présente Proposition d'une constitution de l'Eglise
catholique s'appuie sur les valeurs évangéliques, l'histoire et la
théologie de l'Eglise, le droit canonique, les documents de Vatican II, la Loi fondamentale de l'Eglise (Lex ecclesiae fundamentalis) commandée
en 1965 par le Pape Paul VI, le Code de droit canonique de 1983 et sur
l'expérience du droit constitutionnel des deux cents dernières années.
La liste des
droits et responsabilités énoncées dans la Proposition de constitution est
tirée de la Charte des droits des
catholiques dans l'Eglise rédigée à la lumière de larges consultations
internationales par l'Association for the
rights of catholics in the Church (ARCC) et de la Déclaration des droits et libertés dans l'Eglise catholique adoptée
par le Réseau européen Eglise de liberté
(RE). Ces textes eux-mêmes s'inspirent largement de la Déclaration universelle des droits de l'Homme des Nations-Unies.
La Proposition
de constitution a été élaborée par l'Association
for the rights of Catholics in the Church. Elle a été examinée par de
nombreux groupes et personnes et en particulier au Réseau européen Eglise de liberté et en conséquence maintes fois
amendée. Le Mouvement international Nous
sommes Eglise en est saisi.
La Proposition
de constitution ne se veut toutefois qu'un projet ne pouvant devenir un
instrument adéquat pour organiser le gouvernement de l'Eglise catholique qu'au
terme d'une discussion longue et approfondie. Dans cette discussion, doivent
entrer l'expérience et la compétence de constitutionnalistes, politologues,
canonistes, théologiens, historiens de l'Eglise, pasteurs, évêques, papes,
sociologues, psychologues, pédagogues, gestionnaires,sans oublier les parents,
les jeunes et les vieux, les femmes et les hommes: en un mot, toutes les
composantes du peuple de l'Eglise. Nous entendons aussi apprendre de
l'expérience d'autres Eglises qui ont développé diverses formes de
coresponsabilité et de structures démocratiques.
Peut-être
est-ce dans la conscience et dans la mentalité des catholiques que le
changement décisif doit s'opérer pour qu'une Constitution catholique entre dans
les faits. La tradition et la communauté catholiques doivent être vues et
vécues comme source vive de sens, de santé, de sainteté et de libération, dont
les chrétiens mûrs se sentent ensemble responsables. Cela signifie un partage
adulte et démocratique de la revendication des droits et de l'acceptation des
responsabilités dans le cadre d'une constitution.
En
conséquence, l'Association for the rights
of Catholics in the Church et le
Réseau européen Eglise de liberté appellent à ce que:
a) les
catholiques s'engagent dans une réflexion et une discussion en profondeur qui
puisse déboucher sur une action, concernant l'idée, les principes et les
pratiques d'un partage de la responsabilité dans l'Eglise, c'est à dire d'un
catholicisme ancré dans la culture démocratique, et qu'ils en cherchent une
traduction constitutionnelle.
b) les
propositions visant à amender la présente Proposition de constitution soient
communiquées par écrit (adresses indiquées plus loin), étant rappelé qu'il
s'agit de faire, non un condensé de la théologie ou des lois souhaitables mais
une Constitution -nécessairement brève et limitée à l'essentiel des principes,
procédures et structures.
c) les
catholiques mobilisent leur créativité pour répandre l'idée, les principes et
les formes concrètes, constitutionnelles en particulier, d'un catholicisme
ancré dans la culture démocratique
(articles de presse, lettres de lecteurs, conférences, manuels, cours,
homélies, émissions de radio et de télévision, Internet).
d) les
catholiques pressent leurs curés de donner, sans attendre des actions d'en-haut
ou d'en-bas, le départ d'un processus mettant ensemble toutes les composantes
de leur paroisse pour élaborer une Constitution
paroissiale selon laquelle la paroisse se gouvernera. Le Code de droit
canonique de 1983 n'y met pas obstacle. Le Curé d'une paroisse n'a besoin
d'aucune permission pour prendre l'initiative et aller de l'avant.
S'il est vrai
qu'un curé ne serait pas lié par la Constitution mise en vigueur par son
prédécesseur, la balle aurait commencé à rouler et il serait difficile d'en
inverser la trajectoire. Ce serait encore plus vrai si des constitutions
devaient être mises en place avec succès dans plusieurs paroisses. Nul doute
qu'une Constitution paroissiale appliquée avec succès aurait un effet
d'entraînement sur d'autres paroisses
du diocèse.
e) les
catholiques pressent leurs évêques de donner, sans attendre une action
d'en-haut ou d'en-bas, le départ d'un processus mettant ensemble toutes les
composantes de leur diocèse pour élaborer une Constitution diocésaine selon laquelle le diocèse se gouvernera. Le
Code de droit canonique de 1983 n'y met pas obstacle. L'Evêque n'a besoin
d'aucune permission pour prendre l'initiative et aller de l'avant. Citons
l'exemple éclatant de la Constitution
diocésaine de John England, évêque de Charleston, Caroline du Nord
(1820-1842), qu'on peut considérer comme l'évêque le plus remarquable de
l'histoire catholique des Etats-Unis.
S'il est vrai
qu'un évêque ne serait pas lié par la Constitution de son prédécesseur, la
balle aurait commencé à rouler et il serait difficile d'en inverser la
trajectoire. Ce serait particulièrement vrai si plusieurs évêques américains
devaient mettre en application avec succès une Constitution diocésaine. Une
constitution appliquée avec succès aurait un effet d'entraînement sur les
paroisses du diocèse et sur le diocèse.
Le chemin qui
conduit à l'adoption d'une Constitution écrite de l'Eglise catholique sera, à
n'en pas douter, malaisé et sinueux. Mais les catholiques sont de plus en plus
nombreux à avoir le sentiment qu'il faut prendre le départ. Ceux et celles
d'entre nous qui en ont dès à présent la conviction ont la responsabilité
d'être moteurs même sans avoir l'assurance d'arriver personnellement à
destination.
Contacts
Etats-Unis:
Leonard
Swidler, Religion Department, Temple University, Philadelphie, PA, Etats-Unis
tél: 1.215 204 7251; téléc: 1.215
204 4569
dialogue@vm.temple.edu;
http://astro.temple.edu/~arcc
Europe:
Oswald
Stein, Lerchenweg 2a, D-61462; tél: 49 6174 21369
France:
Hubert Tournès, Droits et libertés dans les Eglises
téléc: 33 4 67 43 81 95,
hubertournes@wanadoo.fr http://www.synodeparvis.com
PROPOSITION
D'UNE CONSTITUTION
DE
L'EGLISE CATHOLIQUE
La présente
Constitution définit le cadre dans lequel l'Eglise catholique se gouverne. Elle
énonce les droits fondamentaux et les responsabilités corrélatives des membres
ainsi que les structures fondamentales de la prise de décision et de l'action dans
l'Eglise catholique. Les lois, réglements et coutumes de l'Eglise catholique
s'appliquent dans le cadre et selon l'esprit de cette Constitution.
I. PREAMBULE
1. Nous,
peuple de l'Eglise catholique, exprimons la conviction que, tous les hommes et
toutes les femmes étant créés à l'image et ressemblance de Dieu et la même
parole divine sur la manière dont ils devraient vivre étant écrite dans tout
coeur humain, toutes les personnes doivent être traitées dignement et
également, chacune d'elles ayant les mêmes droits et responsabilités
fondamentales.
2. Nous
exprimons la conviction que, par la foi en Dieu à travers Jésus et par le
baptême dans l'eau et dans l'Esprit saint, toutes les chrétiennes et tous les
chrétiens deviennent membres du corps du Christ, c'est à dire de l'Eglise
universelle et s'engagent à vivre l'Evangile annoncé et vécu par Jésus. Nous
exprimons en outre la conviction que toutes les chrétiennes et tous les
chrétiens qui reconnaissent le ministère d'unité qui a été historiquement
exercé par l'évêque de Rome, sont membres de l'Eglise catholique romaine
(ci-après dénommée l'Eglise).
3. Nous
exprimons la conviction que la mission de l'Eglise, fondée dans l'Evangile, est
d'annoncer la Bonne nouvelle relative à la manière de vivre en tant qu'images
de Dieu, une vie pleinement humaine, personnellement et collectivement dans la
justice et dans l'amour et de témoigner de cette Bonne nouvelle.
Nous exprimons
la conviction que l'Eglise accomplit cette mission selon les lois qu'elle
établit pour promouvoir et observer l'esprit de l'Evangile et pour soutenir ses
membres dans leurs efforts pour vivre dans l'amour de Dieu et du prochain.
Sont
fondamentaux pour la mission de l'Eglise certains droits et responsabilités qui
appartiennent à tous ses membres.
II. DROITS ET RESPONSABILITES
Les droits
fondamentaux des membres de l'Eglise découlent des droits de l'Homme d'une
part, de leur baptême d'autre part.
Chacun de ces
droits entraîne une responsabilité, généralement assez évidente pour ne pas
requérir une formulation spécifique.
Ces droits et
responsabilités valent sans considération d'appartenance ethnique, de
nationalité, de sexe, d'orientation sexuelle, d'état de vie, d'âge, de
situation sociale ou économique.
A. Droits fondamentaux de l'être humain
1. Sont
garantis à tous les membres de l'Eglise en particulier les droits de l'Homme
suivants:
a) liberté
d'action, b) liberté de conscience, c) liberté d'opinion et d'expression, d)
droit de recevoir et de diffuser l'information, e) liberté d'association, f)
droit à une procédure légale, g) droit de participer au gouvernement, h) droit
à ce que les responsables choisis rendent compte, i) droit à la sauvegarde de
leur réputation et de leur vie privée, j) droit de se marier, k) droit à
l'éducation.
Tous les
membres de l'Eglise ont le devoir d'exercer ces droits de façon responsable.
2. Comme
conséquence du droit à la liberté d'action, tous les membres de l'Eglise ont le
droit de s'engager dans toute activité qui ne cause aucun tort ni ne porte
atteinte aux droits d'autrui.
3. Comme
conséquence du droit à la liberté de conscience, tous les membres de l'Eglise
ont le droit et la responsabilité de suivre en toutes matières leur conscience
informée.
4. Comme
conséquence du droit à recevoir et à diffuser l'information, tous les membres
de l'Eglise ont le droit d'accéder à toute information en possession des
autorités ecclésiales intéressant leur bien spirituel ou temporel, pour autant
que cet accès ne porte pas atteinte aux droits d'autrui.
5. Comme
conséquence du droit à la liberté d'opinion et d'expression, tous les membres
de l'Eglise ont le droit d'exprimer publiquement d'une manière responsable leur
accord ou leur désaccord concernant les décisions des autorités ecclésiales.
a) Tous les
membres de l'Eglise ont le droit et la responsabilité de faire connaître leur
opinion, particulièrement lorsqu'ils ont une expérience de première main de la
matière.
b) Les
enseignants et les chercheurs en théologie ont le droit à la liberté
académique. La recevabilité de leur enseignement doit être appréciée dans le
dialogue avec leurs pairs et, si nécessaire avec les autorités de l'Eglise. Ces
enseignants et chercheurs auront présent à l'esprit que la quête de la vérité
et son expression impliquent de poursuivre où que mène l'évidence, d'où la
légitimité d'un dissentiment responsable ainsi que d'un pluralisme de la pensée
et de son expression.
6. Comme
conséquence du droit à la liberté d'association, tous les membres de l'Eglise
ont le droit de former des associations pour poursuivre des buts d'Eglise; ces
associations ont le droit de décider de leurs règles de gouvernement.
7. Comme
conséquence du droit à une procédure légale, tous les membres de l'Eglise ont
le droit à ce que leur cause soit traitée sans délais indus, selon les normes
communément reconnues comme équitables des procédures administratives et
judiciaires, ainsi qu'à la réparation selon des voies de droit des préjudices
subis.
8. Comme
conséquence du droit de participer au gouvernement, tous les membres de l'Eglise
ont le droit de faire entendre leur voix dans les décisions qui les concernent,
ce qui inclut le choix des personnes ayant autorité sur eux.
9. Comme
conséquence du droit de mettre en jeu la responsabilité des personnes ayant
autorité sur eux, tous les membres de l'Eglise ont droit à ce que ces
responsables leur rendent compte.
10. Comme
conséquence du droit à la sauvegarde de leur réputation et de leur vie privée,
tous les membres de l'Eglise ont droit à ce qu'il ne soit pas porté atteinte à
leur réputation et que leur vie privée
ne soit pas violée.
11. Comme
conséquence du droit de se marier, tous les membres de l'Eglise, y compris les ministres ordonnés, ont le droit de
choisir leur état de vie. Ceci inclut le droit de se marier, de vivre seul ou
de faire voeu de célibat.
12. Comme
conséquence du droit de se marier, chaque conjoint conservant pendant le
mariage tous ses droits et l'égalité, tous les membres de l'Eglise ont le droit
de mettre fin à un mariage irrémédiablement brisé.
a) Les membres
de l'Eglise qui font usage de ce droit conservent le droit de se remarier.
b) Les membres
de l'Eglise divorcés et remariés qui sont en conscience réconciliés avec
l'Eglise conservent leur droit à tous les services d'Eglise et en particulier à
tous les sacrements.
13.Comme
conséquence du droit au mariage et à l'éducation, les parents ont le droit et
la responsabilité de:
a) déterminer
en conscience la taille de leur famille,
b) choisir les
méthodes appropriées de régulation des naissances,
c) pourvoir à
l'éducation de leurs enfants.
B. Droits fondamentaux du/de la
baptisé/e
Comme
conséquence de leur baptême, tous les membres de l'Eglise ont les droits
fondamentaux suivants.
1. Tous les
membres de l'Eglise ont droit à tous les services d'Eglise nécessaires pour
mener une vie pleinement chrétienne et en particulier:
a) une
liturgie qui exprime les joies et les préoccupations de la communauté
rassemblée, qui contribue à son éducation et à son animation,
b) une
initiation spirituelle et morale, selon la tradition chrétienne, mettant en
lumière le caractère salutaire et la pertinence des valeurs chrétiennes dans la
vie d'aujourd'hui,
c) un service
pastoral offrant l'héritage chrétien et ayant pleinement égard à la situation
particulière des personnes.
2. Tous les
membres de l'Eglise ont le droit:
a) de recevoir
tous les sacrements auxquels ils ont été adéquatement préparés,
b) d'assurer,
selon les besoins et avec l'accord ou selon un mandat de la Communauté, tous
les services d'Eglise auxquels ils ont été adéquatement préparés.
3. Tous les
membres de l'Eglise ont le droit de bénéficier de façon équitable des
ressources de l'Eglise. Ceci implique entre autres que:
a) les femmes
ont, à égalité avec les hommes, le droit de bénéficier des ressources
matérielles et d'exercer tous les pouvoirs dans l'Eglise,
b) les parents
ont le droit à un équitable soutien matériel et autre de la part des ministres
de l'Eglise dans l'éducation religieuse de leurs enfants,
c) les
personnes vivant seules ont le droit de bénéficier de façon équitable des
ressources de l'Eglise.
4. Comme
conséquence de leur baptême ainsi que de la nature sociale de l'être humain,
tous les membres de l'Eglise ont la responsabilité de soutenir l'Eglise selon
leurs possibilités par le don de leur temps, de leurs capacités et de leurs
moyens financiers.
III. STRUCTURES DE GOUVERNEMENT
A. Considérations fondamentales
1. Au cours
des siècles, l'Eglise a affronté la pratique du pouvoir et du droit, l'un et
l'autre nécessaires à toute société pour se développer de manière humaine et
simplement pour durer. Elle a bénéficié et pâti à la fois de nombreuses
expériences en la matière dans une grande variété de cultures. En mettant en
oeuvre dans son sein ces expériences, elle a acquis un grand discernement de ce
qui marche bien et ce qui ne marche pas.
2. Deux
enseignements tirés de ces expériences sont fondamentaux pour le gouvernement
de l'Eglise dans le 3° millénaire. Le premier est que le partage de la
responsabilité et la liberté correspondante sont au coeur de l'humain, pour la
personne comme pour la communauté. Le second est que la voie la plus sûre pour
arriver à une compréhension toujours plus pleine de la réalité est de
dialoguer, à la fois dans l'Eglise et avec ceux qui n'y sont pas. C'est sur une
longue expérience, source de sagesse, et en particulier sur ces deux
enseignements-clé que la présente Constitution construit les structures de
gouvernement de l'Eglise.
B. Principes
1. L'Eglise
est par nature communauté. L'unité qui forme la base de cette communauté
ecclésiale est là où les membres vivent quotidiennement leur vie, à commencer
par la famille et autres liens personnels. Dès lors, la communauté locale, le
plus souvent mais non exclusivement la paroisse géographique est l'unité
fondamentale de l'Eglise.
2. L'Eglise
est aussi par nature communion de communautés, de sorte que les communautés
locales sont unies dans des communions intermédiaires, le plus souvent mais non
exclusivement le diocèse géographique, unies elles-mêmes dans des communions nationales,
unies à leur tour dans la communion mondiale de l'Eglise catholique. D'autres
communions, régionales ou multinationales notamment, peuvent se constituer pour
des raisons géographiques ou linguistiques ou autres.
3. Inspirés de
l'Evangile, de l'expérience humaine, de la tradition chrétienne vivante et en
particulier des deux enseignements-clé -responsabilité partagée et liberté
d'une part, dialogue d'autre part, les principes suivants façonnent les
structures de gouvernement et les règles de l'Eglise:
a) le principe
de subsidiarité s'applique dans toute l'Eglise, c'est à dire que la décision et
les responsabilités corrélatives appartiennent aux petites communautés, pour
autant que le bien de la communauté plus large n'exige pas que la décision
appartienne à cette dernière,
b) dans toute
l'Eglise, la formulation et l'application de la tradition procèdent d'un
dialogue conduit dans l'amour et le respect mutuels,
c) dans toute
l'Eglise, chaque communauté établit son corps de règles de gouvernement.
d) les
responsables sont élu-e-s selon des procédures donnant voix à toutes les
personnes concernées,
e) les
responsables exercent leur charge pour une durée limitée et déterminéee,
f) une
séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, accompagnée d'un
système de contrôles et de contrepoids, est observée, ce qui inclut des
conciles et des responsables représentativement élus ainsi que des systèmes
judiciaires organisés à tous les niveaux; ces trois branches partagent la
responsabilité selon l'esprit de l'Evangile et de la présente Constitution,
g) tous les responsables
rendent compte de leur activité aux instances qui les ont choisis; les rapports
financiers sont vérifiés en tant que de besoin par un auditeur extérieur,
h) toutes les
composantes du peuple de l'Eglise, notamment les femmes et les minorités, sont
équitablement représentés dans toutes les instances de direction et
de décision.
C. Conciles
1. Dans chaque
cercle de la communion ecclésiale -local, diocésain, national, multinational,
universel ou autre niveau où cela se justifie- il est institué des conciles
représentatifs formant l'instance principale de décision. Chaque concile
observe les principes suivants:
. les
délibérations et décisions obéissent aux principes de subsidiarité et de
dialogue,
. les membres
des conciles sont élus d'une manière aussi représentative que possible; ils
comptent notamment des représentants d'organisations d'Eglise,
. les membres
des conciles sont élus pour une durée déterminée,
. chaque
concile arrête son statut et son réglement intérieur, prenant en compte les
règles établies par les communautés plus larges,
. le statut et
le réglement intérieur de chaque concile déterminent le nombre, le mode
d'élection et la durée du mandat des membres, le mode de désignation de la
présidence, la répartition des responsabilités de décision, ainsi que les
autres procédures ecclésiales, en conformité avec les principes fondamentaux
énoncés dans la présente Constitution,
. la règle
"une personne une voix" prévaut dans tous les conciles,
. nul n'a un
droit de veto,
. les conciles
nationaux, multinationaux et universel sont composés d'au moins 30% de
ministres et d'au moins 30% d'autres membres de l'Eglise.
a) L'Eglise locale
2. Les membres
de la Paroisse (ou autre communauté locale) élisent un Concile paroissial qui
constitue l'instance principale de décision de la Communauté. Le/la Pasteur/e
est membre de droit du Concile.
3. Si la
Paroisse n'a pas encore de constitution ou de statut, le Concile paroissial lui
en soumettra pour approbation, prenant en compte les règles applicables des
communions plus larges.
4. Le Concile
paroissial porte, directement ou à travers des commissions, la responsabilité
ultime de la politique en matière de liturgie, de formation, de travail social,
d'administration, de finances et autres activités menées au nom de la Paroisse.
b) L'Eglise diocésaine
5. Chaque
Diocèse élit un Concile diocésain qui constitue l'instance principale de
décision. Le concile diocésain est composé d'au moins 30% de ministres et d'au
moins 30% d'autres fidèles. L'évêque diocésain en est membre de droit.
6. Si le
diocèse n'a pas encore de constitution ou de statut, le Concile diocésain en
élabore, prenant en compte les règles nationales et internationales
applicables. L'adoption de ces textes requiert l'approbation des 2/3 des
Conciles paroissiaux du diocèse.
7. Le Concile
diocésain porte, directement ou à travers des commissions ou des organismes, la
responsabilité ultime de la politique et de la réglementation en matière de
liturgie, de formation, de travail social, d'administration, de finances et de
toutes autres activités menées au nom de l'Eglise diocésaine.
c) L'Eglise nationale
8. Les
Conciles diocésains d'une nation instituent en principe un Concile national.
Si, eu égard à leur taille ou pour d'autres raisons, certains Conciles
diocésains décident qu'un Concile national ne constitue pas la représentation
appropriée, ils demandent au Concile général l'autorisation de rejoindre ou
d'instituer un autre concile de niveau équivalent. Le Concile national ou un
autre en tenant lieu constitue l'instance principale de décision de l'Eglise
nationale.Il est composé d'au moins 30% de ministres et d'au moins 30% d'autres
fidèles. Un évêque et une personne non ordonnée élus par le Concile national en
exercent la coprésidence.
9. Si l'Eglise
nationale n'a pas encore de constitution ou de statut, le Concile national en
élabore, prenant en compte les règles applicables de l'Eglise universelle et la
présente constitution. L'adoption de ces textes requiert l'approbation les 2/3
des conciles diocésains.
10. Le Concile
national porte, directement ou à travers des commissions ou des organismes, la
responsabilité ultime de la politique et de la réglementation en matière de
liturgie, de formation, de travail social, d'administration, de finances et de
toutes autres activités menées au nom de l'Eglise nationale.
d) L'Eglise multinationale
11. Si
plusieurs Conciles nationaux d'un continent ou d'une zone géographique
déterminée décident de former une communion multinationale, ils élaborent le
statut d'une instance commune de décision, prenant en compte les règles
applicables de l'Eglise universelle et de la présente Constitution. L'adoption
du texte requiert l'approbation des 2/3
des conciles concernés.
e) L'Eglise universelle
12. Les
Conciles nationaux élisent tous les 10 ans un Concile général qui forme
l'instance principale de décision de l'Eglise universelle. Le Concile général
porte la responsabilité ultime d'édicter les lois et réglementations régissant
l'Eglise universelle ainsi que de déterminer les politiques et la discipline
concernant la doctrine, la morale, la liturgie, la formation, l'engagement
social, l'administration et toutes autres activités menées au nom de l'Eglise
universelle, avec une attention spéciale au principe de subsidiarité. Le Pape
et une personne non ordonnée élue par le Concile général en exercent la
coprésidence. Le Concile général est composé d'au moins 30% de ministres et
d'au moins 30% d'autres fidèles.
13. Les
membres du Concile général sont élus de façon échelonnée pour dix ans. Le
Concile général se réunit au moins une fois par an.
14. Le Concile
général se compose de 500 délégués choisis par les Conciles nationaux en
proportion du nombre des catholiques recensés dans les pays concernés. Les pays
comptant un nombre de catholiques inférieur au minimum requis pour avoir droit
à un délégué se joignent à une unité plus large.
15. S'il n'a
pas encore de statut ou de réglement intérieur, le Concile général en élabore.
L'adoption de ces textes requiert l'approbation des 2/3 des Conciles nationaux,
étant saufs les principes fondamentaux de gouvernement énoncés dans la présente
Constitution.
16. Les
statuts et le réglement intérieur du Concile général, ainsi que ceux de tous
les organismes qu'il instituera, ont la même valeur juridique que la présente
Constitution. Ces textes ne peuvent être amendés que selon les dispositions du
chapitre V Procédure d'amendement de la présente Constitution.
17. Au cours de
sa première année, le Concile général met en place la Commission des élections
papales et en établit le statut et le réglement intérieur. Le statut et le
réglement intérieur de la Commission ne peuvent être amendés que selon les
dispositions du chapitre V Procédure d'amendement de la présente Constitution.
La Commission est indépendante du Concile général.
18. Le Concile
général porte, à travers des commissions ou organismes, la responsabilité
ultime d'appliquer les lois, réglements et politiques de l'Eglise universelle.
D. Ministres
a) Généralités
1. Les
ministres[1] et
autres responsables d'un service d'Eglise doivent avoir une formation et une
expérience appropriées.
2. Les
ministres sont au service de l'Eglise de façon permanente et sont habilité/e/s
à agir au nom de la communauté.
3. Les
ministres sont choisi/e/s selon une procédure donnant voix à tous ceux et à
toutes celles sur qui ils auront autorité. Cela vaut en particulier pour le/la
Pasteur/e, pour l'Evêque diocésain/e et pour le/la Pape/sse.
4. Les
ministres exercent leur charge pendant une durée déterminée. La constitution
diocésaine détermine la durée et les conditions de renouvellement du mandat
du/de la Pasteur/e. La Constitution nationale détermine la durée et les
conditions de renouvellement du mandat de l'Evêque diocésain/e.
5. Les
ministres ne peuvent être démis/es de leur charge que selon une procédure
régulière conforme aux principes généraux de la présente Constitution.
6. Les
responsabilités et les droits corrélatifs des ministres sont définis par les
constitutions des Eglises particulières. Les responsabilités et droits du/de la
Pasteur/e, de l'Evêque et du/de la Pape/sse sont précisés ci-après.
b) Le/la Pasteur/e
7. Le/la
Pasteur/e est choisi/e par la Paroisse ou autre communauté locale avec l'accord
de l'Evêque et du Concile diocésains, conformément aux procédures prévues dans
la Constitution diocésaine.
8. Le/la
Pasteur/e conduit l'Equipe pastorale paroissiale. Celle-ci porte, dans le cadre
des politiques définies par le Concile paroissial, la responsabilité principale
de la liturgie, de la formation spirituelle et morale et de tout ce qui relève
du service pastoral. Cette responsabilité comprend:
a) une
liturgie qui reflète les joies et soucis de la communauté rassemblée, contribue
à son éducation et à son animation.
b) un
enseignement de la tradition chrétienne et une initiation spirituelle et morale
mettant en lumière la caractère salutaire et la pertinence des valeurs
chrétiennes dans la vie d'aujourd'hui.
c) un service
pastoral qui offre l'héritage chrétien de manière effective, dans l'amour et
dans l'attention à la situation particulière des personnes.
9. Les
pasteur/e/s ont le droit et la responsabilité d'acquérir la formation
appropriée et de poursuivre leur formation pendant toute la durée de leur
mission.
10. Les
pasteur/e/s ont droit à un soutien financier convenable et à la liberté
nécessaire pour l'exercice de leur mission.
c) L'Evêque
11. L'Evêque
est choisi/e par le Concile diocésain conformément à la Constitution diocésaine
et en prenant en compte les règles de l'Eglise nationale et internationale, ce
qui inclut la consultation des commissions compétentes du Concile national et
du Concile général.
12. L'Evêque
conduit Equipe pastorale diocésaine. Celle-ci porte, dans le cadre des
politiques définies par le Concile diocésain et dans le respect du principe de
subsidiarité, la responsabilité principale de la liturgie, de la formation
spirituelle et morale et du service pastoral.
d) Le/la Pape/sse
13. Le/la
Pape/sse de l'Eglise universelle est élu/e, pour une période de dix ans non
renouvelable, par le Congrès pour l'élection papale composé de délégué/e/s élus
par les Conciles nationaux.
a) Le nombre
de délégué/e/s des Conciles nationaux est fixé par la Commission des élections
papales. Il est proportionnel à celui des catholiques indiqué par les
recensements nationaux.
b) Les
délégué/e/s sont choisi/e/s sur une base aussi représentative que possible, un
tiers d'entre eux/elles sont des évêques.
14. Le/la
Pape/sse porte, avec le Concile général, les commissions et les organismes de
celui-ci, la responsabilité principale de la mise en oeuvre, dans le respect du
principe de subsidiarité, des politiques définies par le Concile général, en
particulier dans les domaines de la liturgie, de la foi, de la morale, de
l'initiation spirituelle et du service pastoral de l'Eglise universelle.
IV. Système judiciaire
A. Principes
1. L'Eglise
catholique est une Eglise en marche, ayant
toujours besoin de se réformer et de progresser. Des divergences voire des
différends et des violations des droits parmi ses membres sont inévitables. Ces
affaires doivent être réglées par des voies de conciliation et d'arbitrage. Si
cela s'avère impossible, les catholiques peuvent les porter devant les
tribunaux de l'Eglise pour jugement.Tous les membres de l'Eglise ont droit à un
procès équitable et correct selon la loi ecclésiale. Le personnel judiciaire
doit être convenablement formé et compétent.
2. Il est
institué un système de tribunaux diocésains, provinciaux, nationaux et
internationaux de première instance, chacun d'eux étant associé à un tribunal
d'appel. Ces tribunaux sont régis par la présente Constitution et par les lois
édictées en conformité de ses dispositions.
B. Tribunaux
a) Tribunaux locaux et régionaux
1. Chaque
diocèse établit un tribunal ou prend d'autres dispositions pour le traitement
judiciaire des conflits et des affaires pénales dont il est saisi par ses
membres.
a) Les
Tribunaux diocésains ont compétence pour toutes matières relevant de l'ordre
interne de l'Eglise locale et régionale. Ces matières comprennent tous les
actes que la loi de l'Eglise qualifie d'actes administratifs, de délits, les
conflits de juridiction et les affaires relevant de l'équité ou de la restitution[2]
b) Les
Tribunaux diocésains appliquent le droit processuel établi par l'Eglise
universelle.
c) Les appels
formés contre les jugements du Tribunal diocésain sont entendus par le Tribunal
de la province ecclésiastique compétent.
2. Les
affaires mettant en cause l'Evêque diocésain/e sont de la compétence du
Tribunal national.
b) Tribunaux nationaux
1. Le Concile
national institue des Tribunaux d'appel provinciaux selon les besoins et un
Tribunal national d'appel, compétent pour statuer sur les recours formés contre
les décisions des Tribunaux provinciaux.
2. Les recours
formés contre les décisions du Tribunal national sont entendus par le Tribunal
suprême.
c) Tribunaux multinationaux
1. Pour les
pays où il n'existe pas de Tribunal national, le Concile général institue un
Tribunal d'appel multinational.
2. Le Concile
général institue un Tribunal suprême compétent pour statuer en dernier ressort
sur les recours dont il est saisi contre les décisions des tribunaux inférieurs
ou sur les affaires portées devant lui par le Concile général.
3. Le Tribunal
suprême a compétence pour des affaires dans lesquelles le/la Pape/sse est
accusé/e d'actes illégaux ou inconstitutionnels.
4. Il n'y a
pas d'appel des décisions du Tribunal suprême.
C. Aptitude des responsables à
poursuivre leurs fonctions
Les
responsables restent en fonctions jusqu'à la fin de leur mandat, à moins que
leur compétence ou leur aptitude à remplir leur charge ne soit mise en cause
selon des normes établies en conformité avec la Constitution. La décision
appartient au supérieur ecclésiastique de l'intéressé ou au Concile compétent,
une procédure légale étant observée. Dans le cas du/de la Pape/sse, elle
appartient au Concile général réuni en session ordinaire ou extraordinaire.
V. AMENDEMENTS
La présente
Constitution peut être amendée par un vote à la majorité des trois quarts du
Concile général suivi de ratification par les trois quarts des Conciles
nationaux dans les cinq ans de l'adoption des amendements par le Concile
général.
VI. ENTREE EN VIGUEUR
La présente
Constitution entrera en vigueur à son adoption par une Assemblée constituante
duement habilitée.
Traduit de la version anglaise
du 19 septembre 1998
par Hubert Tournès
DES CATHOLIQUES
PROPOSENT UNE CONSTITUTION POUR L'EGLISE
L'Eglise
catholique a une constitution. Le Code de droit canonique de 1983 en contient
des éléments écrits.
Fait sans
précédent, des associations catholiques en proposent une autre. Leur initiative
s'inscrit dans la préparation d'un concile de tout le peuple chrétien, auquel
appelle le Conseil oecuménique des
Eglises et, à ses côtés, le Mouvement
international Nous sommes Eglise, issu du référendum d'initiative populaire
pour les réformes dans l'Eglise catholique parti d'Autriche en 1995.
Le texte proposé
veut mettre en forme constitutionnelle la vision d'une Eglise communion
proclamée par le deuxième concile du Vatican (1962-65). Le mode de gouvernement
actuel, tout à la fois patriarcal, monarchique, féodal, centraliste, reste très
éloigné de cette vision partagée par une une fraction grandissante des
catholiques et qui s'enracine dans une tradition chrétienne des plus anciennes
et, en même temps, rencontre
l'expérience des sociétés démocratiques.
Le
chantier constitutionnel catholique est ouvert
La Proposition de constitution présentée
dans ce fascicule est le résultat de débats qui vont s'élargissant, notamment
sur les espaces d'Internet où peut débattre la plus ouverte des assemblées
constituantes. Cette proposition est à prendre comme un texte de discussion
destiné à tous les catholiques et particulièrement à ceux qui veulent
travailler à l'avènement d'un ordre ecclésial renouvelé pour répondre aux
appels du troisième millénaire. Elle fera l'objet de versions ultérieures à la
lumière du débat mondial qu'elle vise à ouvrir. La préparation d'un Concile
constituant est une entreprise de
longue haleine.
www.we-are-church.org
Editions
Droits et libertés dans les Eglises
68 rue de Babylone, F-75007 Paris
temps.present.1@wanadoo.fr
2 €
port compris
[1] La section III D concerne -sauf son § 1- les responsables dont la charge est essentiellement pastorale: les ministres. Les dispositions applicables à tous les responsables font l'objet des sections III B et IV C. Les dispositions particulières aux membres des assemblées figurent à la section III C
[2] Restitutio in integrum (canons 1645-1648): droit accordé en cas de sentence manifestement injuste