BASSE-TERRE Premier centre administratif de l'île, Basse-terre est aussi une des deux capitales "historiques et artistiques" de la Guadeloupe. II faut chercher l'origine de son nom dans le langage de la marine à voile où l'on distinguait la côte offerte aux alizés : caput terrrae - " Capesterre' de l'autre "versant" abrité : Basse-terre. La topographie des lieux : une petit: plaine au pied des montagnes (dont les Monts Caraïbes, rempart naturel contre les vents du Sud-est) et la présence de trois rivières : la rivière des Pères, le Galion et la rivière du Gommier, expliquent le choix des colons puis des Dominicains de s'installer en 1639 en ce site qui devient ensuite une place militaire dès 1643
Depuis ces temps lointains l'histoire de Basse-terre pourrait se résumer par la "lutte contre la malchance". Après l'extermination quasi totale des Caraïbes, Charles Houël gouverneur de l'île fit bâtir sa maison fortifiée sur une hauteur au-dessus de la rivière du Galion Mais, ni le "château de la Basse-Terre", ni les batteries installées le long des côtes ne dissuadèrent les Anglais de mener des expéditions meurtrières. "Le château de Basse-terre" connut de multiples avatars architecturaux et changea plusieurs fois de nom au cours du temps. C'est aujourd'hui le fort Delgrès après avoir été successivement la maison fortifiée de Charles Houël, le Fort Royal, le Fort Richepance et le Fort Saint-Charles. Aujourd'hui, on ne peut manquer de remarquer la puissante construction à la partie Sud-est de la ville. C'est un bastion très important construit en étoile selon les principes de Vauban et dont l'efficacité laissa longtemps à désirer ; ce qui conduisit à de multiples rectifications. Commencé vers 1650, il ne trouva tout son aspect actuel qu'après 1780. Cet ensemble qui fut la première place forte de la Guadeloupe mérite une visite attentive : c'est un site d'un intérêt historique majeur : les douves, les ponts-levis, les chemins de ronde, les meurtrières et les bouches à feu restent encore imprégnés du fracas des luttes sauvages d'antan. De grandes figures passent alors, nimbées dans le souvenir : celle de Louis Delgrès surtout, hardi défenseur de la dignité humaine et qui préféra le suicide à la reddition . Son ennemi, le Général Richepance dort à jamais au Fort. Sa tombe voisine celle de l'Amiral Gourbeyre et d'autres où gisent d'obscurs officiers.Des salles voûtées, près de l'entrée face à la mer accueillent un petit musée qui raconte l'histoire du fort et de Basse-terre.
Pour rester dans le registre militaire nous conseillerons, sous réserve, la visite de l'arsenal (ou du moins de la propriété privée qu'il est devenu maintenant). C'est un univers à l'abri de la rumeur citadine et qui dégage une certaine mélancolie. II se situe rue Lethière. Voyez aussi la caserne d'Angoulême construite en 1824 et qui accueillait les premiers immigrants indiens destinés aux plantations. Mais Basse-terre subit à plusieurs reprises la dureté des éléments et l'exigence de l'évolution économique.
- La Soufrière toute proche manifeste parfois sa colère. En 1843 un séisme d'origine éruptive ravagea la ville. En 1976 le volcan gronda ; on exagéra beaucoup les risques et on exila, 5 mois durant, 73 000 habitants dans la région de Pointe-à-pitre ce qui donna un regrettable coup de frein à l'essor de la ville.
Elle n'a pas toujours servi les intérêts de l'agglomération. Pointe-à-pitre dont le site portuaire est beaucoup plus intéressant se développa dès le milieu du XVllle siècle et condamna fortement le destin portuaire de sa rivale. De surcroît une grande partie de la production bananière de la Basse-terre, sur laquelle reposa longtemps l'essentiel de l'économie locale (déjà fortement concurrencée par la production étrangère), est désormais exportée dans des conteneurs frigorifiques. Or, seule Pointe-à-pitre dispose des installations portuaires adéquates. Aussi le port de Basse-terre et la ville offrent-ils cet aspect de gentille"lascivité" provinciale qui lui confère "un certain charme" certes, mais qui alourdit aussi la problématique sociale et économique de la région. Plusieurs autres secteurs de la ville méritent que le visiteur s'y attarde.
L'ancienne Église des Jésuite construite à la fin du XVIIème siècle et rebâtie au XIXe siècle abrite "un petit Lourdes" dans le jardin, l'arrière. Une reconstitution en miniature de la grotte miraculeuse est l'objet d'une constante dévotion. II y coule une petite source: aux nombreuses vertus avérées ou prétendues. Des ex-votos en portent le témoignage. Le lycée Gerville-Reache voisin, ancien hôpital militaire Saint Louis, possède un remarquable escalier et une grille de fer forgée du début du XIXe siècle classés par les Monuments Historiques. Le Palais du Conseil Général et le Palais de Justice : ces deux bâtiments séparés par la rue Félix Eboué et regardant la mer, sont à la limite du quartier de Carmel. Ils expriment avec une grande efficacité tous les principes architecturaux de ALI TUR : sobriété de lignes, jeux des formes géométriques :rectangles, carrés, voire octogones, protection des façade, à l'ensoleillement, savante utilisation de l'eau dans les patios intérieurs. (Ali Tur est né en terra d'Islam à Tunis en 1889). |
"J'eus soin d'orienter mes bâtiments de manière à ce qu'ils puissent être traversés par la brise... Je construisis des galeries couvertes qui abritent les façades des rayons directs du soleil" Ali Tur Un peu plus à l'intérieur de la ville dans son cadre de verdure, se dresse la résidence du Commissaire de la République. C'est encore une réalisation de l'architecte Ali Georges Tur à qui l'on doit une centaine de bâtiments en Guadeloupe. Son œuvre s'inscrit dans une politique de reconstruction après les ravages causés par le cyclone de 1928 ; l'urgence se fait grande d'autant que le tricentenaire du rattachement à la France doit être célébré en 1935. Le pays doit "offrir un autre visage". "l'architecte des colonies' entreprend de reconstruire ou de créer des bâtiments publics selon "une expression architecturale officielle originale... en complète rupture plastique avec le cadre bâti traditionnel... Il fait appel à la technique nouvelle du béton armé avec le vocabulaire esthétique qui lui correspond" Christian Galpin Itinéraire d'une reconstruction Le bâtiment de la Préfecture (ancien Palais du Gouverneur) s'intègre élégamment dans le décor environnant en dépit de l'impression de lourdeur inhérente au matériau. Les verticales de la colonnade répondent assez heureusement au mouvement élancé des palmiers royaux du parc.
Au Nord de la rue Félix Eboué, c'est la place du Champ d'Arbaud, vaste esplanade bordée de maisons "coloniales" où se dresse le Monument aux Morts, et le Jardin Pichon où se concentre l'animation de la ville surtout, en fin de semaine. Passé la Rivière aux Herbes on découvre la très belle cathédrale de Basse-terre au clocher séparé du corps ; le bâtiment de pierre de taille fut construit par les Capucins en 1736. L'intérieur est particulièrement riche. "Le cœur de la ville" bat dans ce secteur et il faut prendre le temps de flâner rue Baudot (belles demeures), rue Christophe Colomb (très pittoresque), rue Peybier et rue Perrinon (vieilles demeures en bois), rue Père Labat (pour la vieille maison des Corsaires) et enfin la rue du Cours Nolivos (pour la maison Chapp classée) et l'adorable bâtiment de l'hôtel de Ville avec ses volets rouges tranchant sur la façade blanche, son clocheton octogonal en bois, son fronton et ses colonnes délicates. II s'en dégage le charme indéfinissable des choses "d'avant et d'ailleurs". On pense à la Louisiane ou à Scarlett... Le Marché : Il fait face à la mer des Caraïbes. Même si le cadre construit manque un peu d'élégance, bien que l'horloge, oeuvre d'Ali Tur, soit classée; c'est une véritable explosion de mouvements, de cris, de couleurs et de senteurs et c'est encore un de ces lieux attachants où s'exprime d'une manière authentique la particularité de l'identité Antillaise. |
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