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Chevaux, bac, bombe et autres voitures en bois...

Qui aurait cru au début de ce siècle que le parc automobile de la Martinique en serait arrivé un jour à saturation ? Dans les années 1910, la Martinique en est surtout aux voitures à... chevaux.

En ce début de siècle, l'importance des transports maritimes démontre l'insuffisance des voies terrestres. Jusqu'à la Seconde Guerre mondiale au moins, l'essentiel des déplacements se fait par mer. (Là aussi, on en est ,bien loin aujourd'hui). C'est même la seule solution pour gagner Saint-Pierre depuis Fort de France, la route n'étant pas carrossable de Case-Pilote au Carbet. L'intérieur est toujours resté d'accès difficile dans la première moitié du XXe siècle, à moins d'être relié à la mer par un canal navigable. On remonte le cours d'eau en "bac". Les "yack" ou vedettes de l'époque permettent quant à eux de rallier les communes. Quelques ponts ont été érigés sur les principales rivières. Mais le cheval reste. Le moyen de locomotion le plus efficace. D'aucuns, se rappellent pourtant des embarcations emmenant des marchandes vendent leurs produits à Fort-de France en partant de Petit-Bourg.

   Jeanne une nonagénaire encore bien fraîche, évoque ses péripéties pour se rendre dans la capitale: "J'avais peut être 14 ans, je partais du Marin pour me rendre à pieds à Ducos chez mon père. Après y avoir passé la nuit, je reprenais la route de nouveau à pied pour aller au Lamentin. Cette fois, je prenais le "yack" pour Fort-de-France. Il y en avait deux, "Bô-fé-a" et " la belle créole". D'autres noms reviennent également, comme"Gouverneur Mouthet, "et "Pioné"...Côté voitures, les fameuses"Bomb", dont la carrosserie était réalisé majoritairement en bois, ont marqué la conscience collective, et encore davantage avec l'arrivée de la "Tuma", premier service de transport urbain organisé à Fort-de-France, un système qui a été repris à plus grande échelle via le GET à Fort-de-France et plus tard les taxis collectifs.

" Le bac pour le plaisir " Bien qu'elle n'avait qu'une décennie d'existence, une Trinitéenne se souvient de cette époque où les moyens de transport étaient pour le moins rudimentaires. Les faits remontent à un demi siècle. "Je me rappelle, il y avait une savane juste derrière l'usine du Galion. Les pêcheurs y venaient écouler leur poisson. De même que les marchandes venaient du Robert. C'était un espace de vente et d'échanges. Par exemple, on pouvait échanger des légumes contre du poisson. Un monsieur faisait un travail de Saint-Christophe (NDLR : Chauffeur de taxi). c'est-à-dire que, payé par la commune, il faisait traverser les gens pour aller de l'autre côté du canal avec le Bac, espèce de canot fait d'une grande planche et de flotteurs en dessous. C'est d'ailleurs pour cette raison que le quartier a pris le nom de Bac. Il faut savoir qu'il n'y avait de pont à cette période. Ma mère était marchande et comme nous venions avec elle les mardis et les vendredis, nous faisions des allers et retours pour notre bon plaisir. Ces traversées qui emmenaient vers Bois Poteau ou Pointe Fort ne duraient pas plus de cinq minutes. C'est ma sœur qui m'entraînait, car je n'était pas très rassurée lors de ces furtifs voyages.

" Une voiture avec 16 passagers"

Robert Magdeleine est transporteur depuis 1953. Artisan-taxi aujourd'hui, il a donc vu l'évolution d'un secteur qui devient de plus en plus difficile. Flasback. "J'ai commencé avec ce qu'on appelait couramment les "bombes" de marque Renault qui contenaient de 17 à 18 passagers. Mais il existait aussi des petites voitures avec leurs carrosseries en bois de 12, 14 passagers comme celles qu'avait M. Loric. Avant même les petites bombes, il y en avait de plus grandes, elles étaient nombreuses. Je me souviens encore de M. Guinel qui emmenait les jeunes au lycée Schoelcher M. Lefroy qui assurait la ligne de Redoute et autres Guioubly, Tanic, Toussaint... Mais devant le nombre d'accidents meurtriers. Les transporteurs ont décidé de s'en séparer. J'ai vécu ainsi l'accident de M. Palméo, à Rivière-Blanche L'autobus était tombé dans un ravin, le bilan était de sept morts". "Les petites bombes sont restées longtemps sur nos routes. Noces emmenions les gens au stade Louis Achille. Avec une voiture de seize passagers, il fallait faire beaucoup de voyages". < C'est nous qui assurions aussi les déplacements des équipes, de même que nous véhiculions les cyclistes lors des courses, car les moyens de transport n'étaient pas légion". < J'ai arrêté au moment où la Turna est arrivée, ils s'agissaient là d'une organisation en coopérative. Celle-ci a continué avec les bombes. Ils ont ajouté ensuite des voitures plus performantes. J'ai commencé à faire le taxi avec M. bazin, je faisais la route de Coridon. Ce quartier était bien différend de celui que l'on connaît maintenant. Nous traversions un petit pont en bois. Nous partions de la Rotonde. Une clientèle constituée de personnes à la Transat. La banane était emballée dans du papier. Nous les ramenions tard le soir, jusqu'à dix heures du soir. Il fallait commencer tôt pour être tête de file, dès quatre heures du matin. J'ai eu par la suite plusieurs véhicules. Le taximan avait du travail à l'époque, il était même demandé pour les mariages ou les enterrements. Les enterrements et on avait pour lui une grande considération. Souvent, celui-ci pouvait acheter un véhicule de transport pour son fils". Tout cela a changé depuis avec l'arrivée des agences de location. Le transport étant de surcroît mal organisé, les gens ont acheté leur voiture. Aujourd'hui, pour rentrer dans la profession, il faut se former".

 

" Michelle Michanol : " A l'époque du yack de Petit-Bourg"

Marcelle Vautor-La Placelière, épouse Michanol, 80 ans, est née à Fort de France. Cela ne l'a pas empêché de connaître les bacs ou les yacks, moyens de transport très en vogue à l'époque de l'Amiral Robert. La méthode de fonctionnement du bac prête à sourire tant elle semble archaïque aujourd'hui. Sa progression était assurée grâce à une corde reliant les deux rives des canaux. Ils étaient utilisés pour traverser des cours d'eau à l'instar de celui de Levassor. Les images de l'ambiance telles qu'elles étaient à l'époque reviennent à l'esprit de Marcelle : "Le dimanche, il y avait foule. De nombreuses personnes devaient prendre le bac pour aller sur l'autre rive acheter de la laitue chez un homme possédant un jardin. Nos parents nous envoyaient et nous ne demandions pas mieux. Il faut dire qu'il n'y avait aucun problème de sécurité dans ces années-là, donc aucun danger pour les enfants. Aujourd'hui, on a tout bouleversé. Les enfants ne savent pas ce qu'on a vécu,. Nous avons perdu tout ce qui était positif". Le yack restait plus perfectionné que le bac, avec son moteur. C'est lui qui permettait d'aller dans les communes du sud. "Quant! nous voulions nous rendre à Rivière-salée, nous prenions le yack de Petit-bourg. C'était le premier moyen de locomotion, il n'y avait pas encore de voitures. Des chemins de fer existaient pour les transport de bananes". Et de faire remarquer qu'il y avait moins de morts sur les routes". Mme Michanol estime qu'il y a trop de voitures à l'aube de l'an 2 000. "Où va-t-on ?", s'interroge-t-elle, "où est le bateau qui devait faire la ligne du Sud ? Je remarque qu'on n'en parle plus et c'est dommage "…

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