Réaction aux
propos de Nicolas Sarkozy sur la récidive
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Egalité Jeunes
Socialistes s’inquiète du nouveau dérapage verbal du
ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy. Après avoir parlé
de « nettoyer » un quartier de banlieue, il clame désormais
son intention de « faire payer » un juge pour avoir mis en
liberté conditionnelle un condamné qui a ensuite récidivé.
Les affaires judiciaires mettent en jeu de la souffrance
humaine. Il est normal qu’elles émeuvent, qu’elles choquent
ou qu’elles scandalisent. En revanche, il est tout à fait
irresponsable qu’un homme politique les instrumentalise à
des fins de communication. Tout comme il est intolérable
qu’un homme qui cumule déjà les fonctions de chef du parti
majoritaire et de ministre de l’Intérieur s’immisce ainsi
dans les affaires de la justice.
Populistes,
les propos de Nicolas Sarkozy démontrent également sa totale
ignorance en matière judiciaire. Son attaque à l’égard d’un
seul et unique magistrat le prouve : la libération
conditionnelle n’est pas le fait d’un seul juge, mais de
deux voire trois magistrats. Seulement voilà, jeter
l’opprobre sur un responsable unique est plus payant en
termes de publicité personnelle et de propagande.
En outre, il
est aberrant de parler de « faute » et de « sanction ». Non
seulement les éventuelles sanctions ne relèveraient en aucun
cas du gouvernement, en vertu du principe d’indépendance de
l’autorité judiciaire, mais on voit mal, en plus, ce qui
pourrait les justifier. Dans le cadre de leur fonction, les
juges appliquent la loi : sur la base d’expertises, ils
vérifient que les conditions légales sont bien remplies
avant de procéder à une libération conditionnelle. Si l’on
considère que ces conditions ne sont pas suffisantes, ce
sont les textes qu’il faut modifier.
Alors, faut-il
changer la loi ? Nous ne le pensons pas. La récidive
concerne au premier chef les délits. Elle est rarissime en
matière criminelle. Selon une étude de Pierre Tournier,
chercheur au CNRS, sur 1000 personnes condamnées dans des
affaires criminelles, seules 5 récidivent. Les statistiques
du Ministère de la Justice confirment cet ordre de grandeur
(4,7% des condamnées pour crime seraient des récidivistes).
La libération conditionnelle en diminue même les risques :
le taux de réincarcération est deux fois moindre pour ceux
qui sont sortis en libération conditionnelle (9%) que pour
ceux qui sont sortis en fin de peine (17%).
En effet,
refuser la libération conditionnelle à un détenu qui
remplirait pourtant toutes les conditions pour en bénéficier
ne fait que repousser le risque de récidive tout en
l’aggravant puisque les conditions d’emprisonnement sont
telles que plus un condamné est détenu longtemps, plus ses
chances de réinsertion à la sortie sont faibles.
Si M.Sarkozy
souhaite atteindre le risque zéro en matière de récidive,
qu’il aille au bout de sa réflexion et qu’il dévoile ses
véritables intentions. A moins d’enfermer les gens à vie ou
de revenir à la peine de mort, il est inatteignable.
Egalité Jeunes
Socialistes refuse donc les solutions simplistes esquissées
par le ministre de l’Intérieur et se prononce :
- pour
la réaffirmation du principe d’indépendance de la Justice.
Le chef de l’Etat doit réagir fermement aux propos de
Nicolas Sarkozy.
- pour
la hausse des moyens accordés à la Justice, afin d’améliorer
le suivi médico-social des condamnés, seul instrument
susceptible de faire baisser le risque de récidive. La
prison restera une école de la récidive tant qu’elle ne
garantira pas des conditions de vie décentes pour les
prisonniers et leur accompagnement global sur la voie de la
réinsertion.