La litière progresse lentement.
Lentement la litière avance et le vieillard parfois est dans son ombre et parfois dans le soleil avance le vieil homme.
Voici l’Heptastade : cette chaussée sur la mer tracée de moellons et de ciment entre la ville et le Phare, l’Heptastade.
Et le vent, celui qui vient de mer et celui qui vient de ville – et la mer, qui est ici la mêlée de la mer du port et de la mer libre : un double bouillonnement dans la même lumière brillante.
Sur l’Heptastade, les tabliers de cuir de la litière gonflent dans le vent, ils claquent, ils fouettent comme une bouche qui va rire.
Et le vieillard, dans leur claquement, seul le vent et la mer peut-être et peut-être cet oiseau très blanc là-haut saisissent ses paroles : je ne survivrai pas.
La bouche pleine de sable : je ne survivrai pas au sang des Rois malheur sur toi Alexandrie.
Pleine de sable et de sanglots.
Mais ce vent.
Là-bas sont les lourds navires marchands, dans le rebondi de leur panse de bois, ils digèrent leurs cargaisons, ils attendent la paix.
Et non loin d’eux les navires inachevés encore, comme des lyres, le vent y chante ses chansons.
Il chante, il se lamente, il pleure, il rage et il crie – le vent crie et les mâts sous ses coups.
Et les voilures sous ses coups, blanches dans la lumière brillante emplie de sable, comme le manteau du vieil homme, blanc, dans la lumière intense, avec le rouge aussi du sang où pique le sable.
Je ne survivrai pas : il avait mis sa tête sous son aile et il était mort.
Je mettrai ma tête sur mon bras et je mourrai.
Mais ce vent.
Ce vent.

Trois brèves légendes: première brève légende - 9