Le lendemain, j’ai acheté une robe pour ma Reine, une robe de souveraine avec des fils d’or, avec de menus fragments de miroir pareils à des fleurs froides dans la serre chaude du soleil. Derrière nous, les enfants du village couraient, zonzonnaient, faisaient des bruits de mouches, de loups, de dragons : l’un d’eux, entre ses bras bruns, il portait un lézard vert, dont la queue lui lacérait le ventre. Ma Reine froissait l’étoffe entre ses seins, elle y laissait courir ses mains, ses mains s’écorcher aux miroirs, aux dorures, elle me regardait avec des yeux brillants et avec des yeux qui étaient peut-être riants.
Plus tard, durant la sieste, j’ai voulu me souvenir : mais je ne savais ce que j’avais oublié et, plus tard encore, dans la cour où chante l’eau, j’ai entendu un oiseau chanter.
Mais peut-être me suis-je trompé.
Puis je suis allé trouvé le chef du village, je me suis incliné devant lui. Je me suis incliné devant lui et j’ai dit : quand mon service militaire sera fini, vous garderez cette femme pour moi.
Je lui ai dit : vous la garderez et vous aurez des égards à son endroit et elle sera comme la fille d’entre vos filles en mémoire de moi.
Je lui ai dit : car je vais épouser cette femme : quand mon service militaire sera fini, je me rendrai dans la capitale, je réglerai mes affaires, et j’épouserai cette femme.
Je lui ai dit : il y aura fête alors dans le village, pour mes noces.
J’ai dit : fête comme jamais, fête plus vive que jamais.
J’ai dit : j’habiterai une demeure entre les vôtres, avec un bassin comme les vôtres et des chambres, comme les vôtres, accroupies au bord du bassin. J’apprendrai à parler à cette femme. J’apprendrai à lire et à écrire aux enfants du village.
J’ai dit : plus tard, je mourrai ici, et ma femme mourra ici, et les enfants de mes enfants parmi les vôtres.

Trois brèves légendes: troisième brève légende - 32