Alors: une table de bois brut - une, grossière, d'arbre grossièrement équarri non loin d'un mur grossier encore, gros mur de grosses pierres badigeonnées de blanc très cru avec, en son centre inexact, la découpure aux bords inexacts d'une fenêtre par vive lumière exorbitée. Une table épaisse et sur ses pieds épaissement posant dans sa carrure et sa rectangularité, au centre d'une pièce épaisse où la lumière de l'été extérieur, entre ces murs éclatants et épais éclaboussée et contenue dans son éclat, prend teinte de fraîcheur et de recueillement et de splendeur, prend de fontaine et de bassin et de vasque, prend d'instillation et de distillation, prend d'un vin frais dans une fraîchissante cave, l'allure - et paraît, dans la contention et l'épais des murs d'ici, forme pure de feu frais creusée dans la masse des murs blancs. Ombres encore, et vives aussi: celle de la table encore, sur le sol, et de la femme, à la table accoudée assise sur un tabouret, et des femmes autour d'elles babillantes et mobiles par formes blanches sous leurs tresses noires et formes vives également dans cette immobile splendeur vibrante, qui s'empressent, l'une avec une brosse, l'autre un peigne, la troisième avec quelque épingle d'or, celle-ci avec une aiguière et cette autre avec un flacon de nard ou d'essence de myrrhe obturé d'une pierre de couleur - et c'est un ballet d'ombres, sur le sol, vives et mobiles, que forment ces femmes dans la pièce autour de l'assise empressées. Ombres également, et vives toujours, mais immobiles, des objets qui sur la table reposent en surplomb de leur ombre: y reposent une coupe emplie de fruits divers - pommes, et pommes de pin, et figues vertes entrebâillées sur leur offrande de grains jaunes à la chair pourpre agglomérés, et raisins - d'où suinte le parfum emblématique d'une parfaite journée d'été; une brassée de fleurs champêtres et d'herbes des champs (certaines fines, et de clochettes ornées, et d'autres plumeuses, ou tourmentées de découpures, et d'autres simples encore, en palettes et feuilles sans prétention, et d'autres encore comme retorses et torsadées, et d'odeur plus âcre, et de plus poisseuse sève, et d'aucunes aromatiques entre lesquelles surtout est exaltée la senteur intransigeante de la feuille aux angles de silex du laurier, mais celle encore, touffue et étroite, du thym, et celle, sèche dans la douceur et le doux de la nausée et comme: de douces choses mortes et sèches et nauséeuses, du romarin, et d'autres encore, et des brassées encore, en litière odorante et friable et tiède où vient le jour d'été paître et s'assoupir dans sa propre senteur, avec un brin de menthe à son mufle collé qui le porte à rêver d'un monde obombré d'arbres en nombres parfumés); un miroir d'argent poli; une cruche d'eau froide baisée de buée; une fibule en forme de lézard, ou de serpent peut-être, ou d'autre bête fuyarde et furtive et de langue bifide. Objets de peu, objets de rien: signes de rien qu'eux-mêmes et dans leur signification sans épaisseur posés et placés et pesants: signes, pourtant, et comme résumé, dans la pièce nue et claire, du monde autour dont la fenêtre donne à seulement voir le ciel, ébloui et ébahi de sa variété, de ses façons et tours et usages d'être monde et le seul, de ses formes et de ses fumées, de ses tissus et textures à quoi s'adjoint encore, en conclusion ou commentaire et exégèse volubile: une mouche, ici, là, ici encore, là-bas soudain!, qui vole et divague au-dedans de sa goutte sonore et mobile et de mouvements trop fluides pour avoir ombre sur le sol épais, un insecte vert, irisé, moiré, semblable, dans son atour, à quelque roi barbare exhibant, dans la paix, et l'ennui en lui qui monte à l'idée de paix, avant la mort, son armure de parade funéraire.)

Trois sentinelles: première sentinelle - 2