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- - Tout ce qui est.
- - Tout ce qui se poursuit.
- - Tout ce qui se confirme et continue et n'a de cesse.
- - Tout ce qui se ferme et se referme.
- - Le cercle entier.
- - L'anneau entier.
- - L'anneau au doigt; aux poignets: le bracelet; au cou: le collier;
sur l'animal: le joug - et le ciel pour la terre entière...
- - La patience, insupportable, et la patience encore cependant,
insoutenable, et la patience toujours.
- - Nos mères, leurs mères, les mères d'avant - et nos filles, et
les filles qui en naîtront...
- - Une chaîne, un anneau, un lien, un fil sur lequel sèche le
linge: un cercle sans fin s'accroissant entre la terre et le ciel...
- - Il n'y a rien.
- - Il n'y a que cet instant et lui seul - lui et rien d'autre, pour
nous dans la succession nécessaire, et cet autre ensuite - et soudain
sa tristesse nous saute violemment au visage comme le chat de la
maison avant de fuir à jamais: nous ne le reverrons plus.
- - Mais ce roucoulement, pourtant, à l'intérieur, dans le cœur, très
doucement enfoui et affleurant et éternel avec fragilité...
- - Sous le cul de la marmite, je contemple souvent le feu, tellement
que j'en ai vertige: j'y veux porter la main, - pour comme le feu
devenir? Courte et brûlante et sans regret ni durée et toute à mon
affaire orange, sans cette pitié à cuire, attentive et dédaigneuse
et fade, qui emplit le pétrin de mon cœur - comme pour le feu
devenir? Après lui, il ne reste rien à utiliser et réutiliser ni
préserver. Mais bientôt, ce qui était à chauffer fume, et il
s'éteint, ou je le couvre de cendres et l'endors et je prends soin de
ne pas le toucher et de ne pas m'y brûler et de ne pas devenir.
- - Mon époux dort sur le flanc: sur le flanc gauche, du côté
gauche de la couche. Il croise ses bras, il décroise ses bras et
croise ses jambes et voici que déjà il dort. Moi, je demeure les
yeux ouverts, et mon âme demeure ouverte, et je respire sans bruit:
entre les lattis du toit, et entre mes doigts comme une palme devant
mes yeux balancée qui jouent, je vois un pan de ciel, je vois une
étoile et cent autres avec leurs dessins et leurs désordres, un
nuage, une lune, un bruyant papillon de papyrus pelucheux, je vois mon
souffle hivernal en tourbillons chassé par mon souffle et la nuit se
fait à moi comme à son nouveau ciel, elle est mienne comme mon
rêve: alors, mon âme je la berce entre mes bras ouverts comme
naguère et bientôt je berce mon nouveau-né, j'en écoute le bruire
et le souffle et la salive aux lèvres et la gorge bavarde, je passe
ma main dans son cheveu rare et nous sommes unies dans la nuit.
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