Bagaudes

Extraits du roman de Grigori TOMSKI, Les amis d’Attila, Editions du JIPTO, 2005, 360 p.
ISBN : 2–35175–003–9

Les Alains suivent longtemps le bord de la Loire, ensuite ils traversent le fleuve près de Tours, se dirigent vers le nord et passent en chemin par le Mans. Ce n’est pas la route la plus courte, mais Sangiban discute de la situation avec les commandants des garnisons de ces villes aux citadelles puissantes et analyse l’information sur les Bagaudes. Puis le détachement suit la route du Mans à Alençon. Les Alains s’arrêtent sur le bord de la Sarthe et installent leur camp près d’une grande villa. Riboul, le propriétaire de cette villa, invite Sangiban avec quelques officiers et les percepteurs d’impôts du Mans à dîner et raconte ses problèmes :
- Notre famille vit au voisinage des insurgés des Alpes Mancelles depuis des générations. Dieu merci, ce ne sont pas des brigands comme dans certains autres endroits. Pourtant au début, il y a deux siècles c’était violent. Notre garde familiale repoussait difficilement les attaques des insurgés. Beaucoup d’esclaves ont fui. Puis a commencé l’époque de Ceneri. C’était le nouveau druide, qui interprétait Dispatere gaulois comme le Dieu tout puissant. Ceneri a trouvé un compromis avec les autorités romaines, a distribué la terre aux paysans, encouragé les jeunes à la création de foyers familiaux. Un jour, il s’est converti chrétien avec tous ses fidèles.

Le chef des percepteurs d’impôts dit d’une voix fatiguée :

- Cette année les habitants des Alpes Mancelles refusent à nouveau catégoriquement de payer des impôts.

Riboul est plus rassurant :

- J’espère qu’ils vont vous payer après les négociations. Bien sûr, ils tentent, encore une fois, de diminuer leurs impositions et seront assez fermes.

Sangiban regarde Salvien et propose :

- Peut-être, devons-nous brûler quelques hameaux afin de les terroriser ? Nous devons percevoir les impôts par tous les moyens. Nous avons nos commissions sur les impôts perçus et sommes donc motivés.

***

Après trois jours de repos dans la villa, les Alains partent pour les montagnes. Salvien ne voit aucun village. Les hameaux sont construits sur les hauteurs et les habitants, prévenus certainement de l’opération, sont vigilants. Ainsi, pendant quelques jours, le détachement ne trouve que des maisons vides. Soudain, une petite armée d’un millier de guerriers leur barre la route sur un col. C’est un mur de boucliers hérissé de lances. Les Alains font quelques assauts avec des cris guerriers mais ne peuvent pas déloger ces paysans. Les pourparlers commencent. D’abord, c’est Sangiban qui menace :

- La résistance est inutile. Je viendrai avec toute mon armée et nous attaquerons votre territoire de tous les côtés. Tout sera détruit et brûlé, même vos bois qui vous cachent aujourd’hui.

On savait que les Alains ne jettent pas de paroles en l’air et peuvent être très féroces. Le chef des Bagaudes, après avoir prononcé lui aussi quelques menaces, finit par accepter les négociations avec les percepteurs :

- La population de nos montagnes est très pauvre et diminue. Nous ne pouvons payer que deux tiers des sommes que nous avons payées la dernière fois et ne pouvons absolument pas rembourser les dettes revendiquées par le fisc.

Le percepteur en chef objecte :

- Vous n’avez rien payé ces trois dernières années. C’est beaucoup !

On décide finalement que les Alains restent campés dans la vallée et que les paysans leur fournissent de la viande et du fromage pendant les négociations. Sangiban reste avec ses guerriers. Les percepteurs d’impôts, accompagnés par deux officiers alains, et Salvien continuent les négociations dans le premier hameau derrière le col.

***

Salvien explique à Léonard, un évêque bagaude, sa mission d’étudier les relations entre les Barbares et la population. L’évêque lui répond :

- Nous n’avons pas de Barbares dans les montagnes, mais ils sont nombreux dans tous les détachements romains qui accompagnent les percepteurs d’impôts. Les lètes germaniques, paysans et guerrier suèves, sont installés près du Mans. Depuis Dioclétien et la tétrarchie, les dépenses pour l’entretien des cours impériales à Rome, Ravenne, Constantinople, Milan, Trèves et Nicomédie, ainsi que le traitement du nombre sans cesse croissant des fonctionnaires, entraînent nécessairement une augmentation des taxes et l’oppression du peuple. Rome a perdu un tiers de la Gaule à cause des impôts excessifs. Maintenant les autorités comptent sur les Alains. Si l’établissement de la cavalerie alaine sur la Loire était accompagnée par la diminution des impôts, Rome pourrait éventuellement rétablir le contrôle sur la presque totalité du territoire gaulois. Mais comme ce n’est pas le cas, nos jeunes fuient dans des endroits encore moins accessibles. Les Alains ne sont pas assez nombreux pour pouvoir contrôler toute la Gaule..

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