Empereur Jean

Extraits du roman de Grigori TOMSKI, Les amis d’Attila, Editions du JIPTO, 2005, 360 p.
ISBN : 2–35175–003–9

L’année 423. Oreste a vingt quatre ans. L’empereur Honorius est mort le 27 août après trente ans de règne. Les dernières années de la vie de l’empereur d’Occident furent marquées par ses querelles avec sa sœur, la princesse Galla Placidia. Ce conflit a renforcé les intrigues du palais suivies par des assassinats et des rixes meurtriers. Les sottes nominations désorganisent le gouvernement et l’état-major de l’armée. Finalement, la princesse est obligée avec ses enfants, Valentinien et Honoria, de quitter Ravenne et de se réfugier à Constantinople. Dans ces conditions, Oreste, malgré ses ambitions de s’élever dans la carrière des honneurs et d’assumer les charges du service impérial, a préféré rester dans sa ville natale.
La mort de l’empereur fait se déchaîner les passions des courtisans. Les partisans de Galla Placidia ne doutent pas que le successeur légitime d’Honorius, qui n’avait pas d’enfants, est Valentinien. En effet, ce garçon est le neveu de l’empereur défunt et le fils de Constance III, deuxième mari de la princesse, associé par Honorius à son pouvoir avec le titre d’Auguste. D’ailleurs, après la mort de Constance, en 421, Galla Placidia, elle-même a obtenu d’Honorius, en accord avec l’empereur d’Orient Thèodose II, le titre d’Augusta.
Les adversaires de Galla Placidia profitent de l’absence de la princesse en Italie et s’organisent autour de Jean, tribun des notaires, et son ami Aetius. Mais Romulus, le beau-père d’Oreste, et beaucoup des autres courtisans, sous différents prétextes, prennent congé du palais et attendent les résultats de cette lutte sans merci.
Jean déclare :
- A quoi bon une origine noble si elle ne s’accompagne pas de vertus et d’humanité ? Les dons de la Fortune échoient souvent aux gens qui ne les méritent pas, tandis que la vertu confère à chacun une gloire qui lui est propre. La noblesse d’origine suscitent les félicitations, mais non les éloges, parce qu’on l’obtient d’autrui, alors que la compétence procure non seulement l’admiration d’autrui, mais c’est une qualité qui est indispensable au futur empereur d’Occident à cette époque de crise et de dangers sans précédents. A quoi a donc servi la noble origine de Commode, de Caligula, de Néron et même d’Honorius ? Ceux qui reçoivent leur héritage comme un dû, en abusent comme s’il était depuis longtemps leur propriété personnelle. Il vaut mieux, en effet, être le premier à illustrer sa famille et sa descendance que de déshonorer par la médiocrité de son caractère la gloire que l’on a reçue de ses ancêtres. 
Au mois de décembre le Sénat romain, après avoir discuté de la situation de l’Empire et le programme des actions de Jean, élaboré avec la participation des meilleurs juristes et autres experts, le proclame empereur d’Occident. Oreste veut commencer sa carrière pour participer à la renaissance de l’Empire mais Tatulle et Romulus lui conseillent d’attendre prudemment les réactions des provinces, de Galla Placidia et de l’empereur d’Orient.

***

Les ateliers de Rome, de Milan, de Ravenne et d’Arles commencent à frapper des pièces de monnaie en or avec le buste diadémé, drapé et cuirassé de Jean et l’inscription « Notre seigneur Jean pieux heureux auguste » et avec la Victoire sur leur revers, marchant à droite, tenant un globe crucigère de la main gauche et brandissant une couronne de la main droite. Mais Boniface, comte d’Afrique, ne reconnaît pas le pouvoir de l’empereur Jean et soutient les revendications de Galla Placidia tandis que l’Espagne est sous la domination des Barbares : Vandales, Suèves et Alains. Théodose II, l’empereur d’Orient, refuse de négocier avec Jean, le déclare usurpateur et élève son neveu Valentinien à la dignité de César.
La guerre civile commence. La cavalerie de Théodose, commandé par Aspar, jeune général d’origine alaine, conduit Placidia et ses enfants le long des côtes de la mer Adriatique et prend par surprise la ville d’Aquilée. Il est très pressé car il sait qu’Aetius a demandé à son ami Attila de l’aider afin de soutenir l’empereur Jean.
Théodose essaie d’empêcher par la voie diplomatique le recrutement de l’armée hune pour Aetius mais Oros, le grand khan des Huns, et son neveu Attila considèrent l’élection de Jean par le Sénat romain parfaitement légitime et déclinent la démarche de Théodose. Aspar apprend que la flotte avec les troupes, commandées par son père Ardaburius, a été dispersée par une tempête. Ardaburius avec les deux galères restantes a été pris et conduit dans le port de Ravenne. La situation pour Galla Placidia devient critique et elle prie tous les nobles des provinces proches avec leurs « buccellarii » et autres milices privées de venir à Aquilée.
Les évènements s’accélèrent. Ardaburius abuse de la liberté, généreusement accordée par Jean, pour organiser une conspiration à Ravenne. Un des conjurés conduit la cavalerie d’Aspar par une route secrète à travers les marais vers la capitale impériale. Les portes de Ravenne s’ouvrent après une courte résistance.

***

Oreste, lui-aussi, arrive avec la milice privée de sa famille à Aquilée car l’ordre de mobilisation de Placidia contenait des menaces terribles pour les désobéissants. La cavalerie d’Aspar rentre de Ravenne avec l’empereur capturé. On apprend qu’Aetius s’approche avec une armée de 60 000 cavaliers huns. Placidia et Aspar rassemblent dans le cirque d’Aquilée les habitants, les milices mobilisées et une partie des troupes. Oreste n’oubliera jamais ce jour. Jean, mutilé, sans la main droite qui brandissait une couronne sur ses pièces de monnaie, subit des insultes et des tortures avec courage et indignation. « Jean était sûr de sa victoire sinon il ne pouvait pas laisser Ardaburius libre » pense Oreste en regardant rire Aspar et son père des souffrances de l’empereur déchu. – « Victime de sa générosité ! » Enfin, on tranche la tête du malheureux empereur qui gouverna pendant dix huit mois.

***

Trois jours plus tard, Aetius arrive avec son armée et organise, sous les regards alarmés des Romains, les parades de ses cavaliers huns cuirassés qui défilent en ordre impeccable. Leur nombre, leur discipline et leur armement impressionnent beaucoup Oreste qui ne peut pas s’empêcher de penser à la mort. Heureusement pour lui les négociations ne sont pas longues et se terminent par une réconciliation. Galla Placidia ne peut pas se permettre de traiter Aetius en coupable car ses alliés huns sont trop puissants. Il est nommé maître général de la Gaule, ses mercenaires sont bien payés et rentrent en Hunnie après une grande parade solennelle. Valentinien III, a six ans seulement, est proclamé Auguste par le patrice Hélion au nom de Théodose II en présence des sénateurs romains. Sa mère, Galla Placidia, devient naturellement la régente de l’Occident.

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