L’après-guerre

(1945-1952)
Ces années de guerre ont changé le Félan dynamique d’avant en sceptique convaincu. Il se repose chez ses parents à Paris durant deux ans dans un isolement profond. Il fait des rêves cauchemardesques et refuse " toutes ces manoeuvres psychologiques, machines à oublier".
Il attend donc 1947 pour publier Hiérarchies, l’ensemble des poèmes qu’il a écrit en 1940. Ce n’est qu’en 1948 qu’il se remet à écrire avec Le Captif, un poème qu’il publie en 1949, aux N.R.F. Ce texte est encensé par la critique. " Jamais, l’écriture n’a côtoyé de si près la mort. ", " Félan est étonnant de noirceur et de réalité. ", " Le génocide est écrit entre chaque blanc de ses mots. ".
En même temps qu’il écrit Le Captif, il recommence à dessiner et exposer. Ses oeuvres atteignent vite des prix très élevés. Il a arrêté les séries : " Elles présument sur le futur, sur la suite. Moi je ne peux plus ! ".
Durant l’année 1951, il expose au Musée d’Art Moderne de Paris, au M.O.M.A. à New York.
En 1952, on lui propose de regagner le gouvernement pour la reconstruction culturelle de la France. Il refuse catégoriquement déclarant : " la reconstruction culturelle, c’est l’affaire de chacun. Si l’état ou quelque forme de pouvoir que ce soit s’en charge, on reviendra dix ans plus tôt, mille kilomètres à l’Est. "
En 1953, il décide d’aller s’installer en Touraine à La Chapelle-sur-Loire près de Tours pour écrire et dessiner en toute tranquillité.
Noir de Fer, (1948)
Fusain (50x50 cm)
Musée de l’Ermitage, Saint-Pétersbourg
Le serpent pris au piège, (1949)
Fusain (50x50 cm)
National Gallery of Art, Washington

Le Captif
Extraits du texte le Captif (60 pages)
Je suis mort ce matin.
J’étais déjà mort hier.
[...]
Dans une casserole,
Un pauvre cafard nous fait un repas.
Maintenant, les rats s’enfuient, à notre vue.
[...]
Je ne supporte plus,
Les cris acides de la pluie sur les toits.
Je ne supporte plus,
Ce corps qui pourrit devant notre baraque.
[...]
Dix jours sans parler,
Dix jours sans manger,
Dix jours de fièvre.
Un mois est passé.
[...]
L’homme en noir est passé ce matin,
J’ai perdu toutes mes dents,
Ce soir, je ferai fondre ma glace.
[...]
Mardimanche :
On nous a offert pour le dîner d’après-hier,
L’enfant mort-né de ma sœur.
Vivement demain que l’on respire.
[...]
Les soldats nous ont redonné notre langue.
Ils n’ont pas pu l’avaler.
J’ai réussi à la recoller.
Mais je ne sais plus l’utiliser.
Main, (1950)
Fusain (60x60 cm)
Nationalgallerie, Berlin
Femme à l’écharpe rouge, (1951)
Fusain (60x60 cm)
Nationalgallerie, Berlin