Martin Boonwerk

1977-1979
A Amsterdam, dès son arrivée, elle sort beaucoup et n’arrive pas, malgré les nombreux conseils de Martin, à arrêter l’héroïne. Sa peinture évolue : elle est moins violente, plus posée. Elle tisse des toiles sur ses tableaux simplifiant les tâches de ses débuts en des aplats plus structurés (Rue Santa-Monica). Parallèlement, ses textes évoluent aussi : le contraste froid-chaud de cette ville l’instabilise et elle s’enferme dans une poésie glauque (Le petit scarabée, Au fond de mon lit).
La relation qu’elle entretient avec les hommes se dégrade là encore. Martin, qui tient beaucoup à elle la programme dans sa galerie (Galerie Martin Boowerk, Amsterdam) en mars 1978. Elle ne s’en étonne pas ni ne s’en orgueillit.
Cette exposition est un véritable succès : elle vendra beaucoup de tableaux à des prix parfois importants (30.000$ pour Héroïne qui sera revendu en 1990 au Guggenheim pour 900.000$). Martin en est très fier et commence déjà à " traîner " Maria dans des cocktails mondains en la montrant un peu comme " un chien savant ". Maria se sent de plus en plus mal à l’aise et préfère quitter Martin en avril 1979 pour mener sa vie comme elle l’entend, maintenant qu’elle en a les moyens. Elle lui laisse le tableau Rue Santa-Monica qu’il revendra en juillet au Musée d’Art Moderne de Tokyo pour 1.300.000$, permettant à son insu de faire reconnaître Maria Santarès dans le monde entier.
Héroïne (1977),
Huile, 150x90 cm
The Solomon R . Guggenheim Musem, New York
Rue Santa-Monica (1977),
Huile, 150x90 cm
National Museum of Modern Art, Tokyo
Le petit scarabée (1977)
Dans sa boîte noire, il est enfermé.
Il ne respire plus, il est asphyxié.
Il ne vit plus, il est mort.
Sa tête bouge, ses réflexes lui survivent.
Recroquevillé sur lui-même, il rejoint la position du foetus.
Il se cache dans un coin de sa toute petite boîte.
Il se désagrège.
Plus tard.
Un petit tas de poussière ne lui ressemble plus.
Une fourmi, puis une autre, puis une colonie
Viennent s’abreuver de cette substance tristement organique.
Au fond de mon lit (1977)
Je l'attends encore tout au fond de mon lit.
Les couvertures noires m’ensevelissent.
Je suis catapultée dans les catacombes,
Je ne vois plus que les reflets de l’univers : les trous des draps.
Je suis sourde maintenant, presque aveugle.
Les tâches blanches virevoltent sous mes paupières :
des éclairs rougeoyants transpercent ma peau.
J’ai chaud, très chaud...
Je vois au fond une dose toute blanche :
je la prends et me l’insère dans mes veines brûlantes.
Un doux liquide blanchâtre vient heurter mon cerveau :
Je sors des couvertures : il fait nuit.
Il n’est pas là : je m’évanouis.
Mon Bled (1978),
Huile, 150x90 cm
Palais des Beaux-Arts, Pékin 
L’Oasis (1978),
Huile, 150x90 cm
Centre Georges Pompidou, Paris
Mes amis les vers de terre (1978)
Sous la terre,
Un ver de terre glisse sur mon épaule,
Un autre me transperce l’œil,
Un autre me prend par derrière : je jouis.
J’avale une gorgée d’engrais.
J’avale une gorgée de petites fourmis,
Les pousses d'un poireau m’étouffent :
Je sors la tête.
Un chien qui passe par là me chie dessus.
Je pue et replonge sous terre parmi mes amis les vers de terre.
La Charbonnière (1978),
Acrylique, 150x90 cm
Stedelijk Museum, Amsterdam
Homicide Involontaire (1978),
Acrylique, 150x90 cm
Stedelijk Museum, Amsterdam