Vladivostok, en solitaire

1954-1959
A Vladivostok, il loge dans la cité universitaire. Il ne participe plus à la vie politique. Ces dernières expériences avec elle lui ont appris à s’en méfier. La bourse ne suffisant pas et l’aide financière de sa mère n’arrivant que par intermittence, Taroff est obligé de travailler en dehors de ses études. Comme nombre d’étudiants, il trouve un travail de docker le matin. Il débarque ainsi des caisses quatre heures par jours avant de se rendre à l’université.
Les bateaux qui accostent à Vladivostok, proviennent de tous les pays. Il peut ainsi discuter avec des marins venant d’Europe, des Etats-Unis, du Japon... Il leur demande comment la vie se passe là-bas. Il n’est pas convaincu par la description idyllique qu’on lui donne sur un ton méprisant. Cependant, il est friand des magazines qu’on peut lui donner. Il découvre dans ceux-ci, le travail de l’artiste italien Minari. Il est très intéressé par sa série Negativi-Positivi. Isolé du monde artistique étranger et moscovite, il décide alors de se mettre lui aussi à la peinture dès 1955. Ses tableaux sont d’emblée abstraits. Très vite, il s’installe dans un coin d’une usine désaffectée. Il peint sur des bouts de tissus avec de la peinture industrielle qu’il dérobe sur les chantiers. Il travaille le soir très tard, et il lui arrive très souvent de ne dormir qu’une demi-heure par jour. Taroff dira plus tard que " le sommeil est incompatible avec la vie de l’artiste libre ". Il peint ainsi des centaines de mètres de tissus qu’il garde jalousement.
En 1956, il termine ses études d’histoire de l’art. Il devient professeur d’histoire dans un collège de Vladivostok. Cela lui permet d’abandonner son travail de docker, bien qu’il retourne souvent dans le port pour s’approvisionner en peinture et en pinceaux. En 1958, il est décidé à quitter l’URSS pour une " fausse démocratie " comme il aimera à le dire. L’année 1958, il la passe ainsi à préparer sa fuite sur un bateau. Il prend contact avec de nombreux marins puis bientôt des commandants. Mais, tous se refusent à l’emmener clandestinement. Ce n’est qu’en 1959, qu’il se décide finalement à embarquer en cachette sur un cargo japonais. Il s’en va emportant 100 mètres de tissus qu’il a peint et une petite valise. A l’arrivée à Kyoto, il demande tout de suite l’asile politique. Le Japon le lui refuse. Il demande alors à l’ambassade des Etats-Unis qui l’accepte. Taroff devient alors citoyen américain. Il migre tout de suite vers New York.
Carte géographique (1958),Composition XII (1956),
Peinture industrielle/tissu, 100x200 cm Peinture industrielle/tissu, 100x200 cm
CBWA,VarsovieCity Art Gallery, Leeds