Définir le "sujet" d'un énoncé imposant une problématique.

(page mise à jour le 29/12/2005)

 

 

 

 


Lorsque l'énoncé du sujet est, en lui-même, une problématique, la définition précise du sujet s'avère plus délicate qu'en temps ordinaire. En témoigne les difficultés que rencontrent les élèves.

 


 

 

Trois exemples d'énoncés  pour illustrer le problème et tenter de trouver des solutions pratiques :

1- Les Français et la colonisation : partageaient-ils tous la même ambition ? (Synthèse avec documents)

2- Comment vit la bourgeoisie au 19ème siècle ? (Synthèse avec documents)

3- Dans quelle mesure le bilan politique, militaire et moral de la guerre annonce-t-il un monde nouveau ? (dissertation).

 

 

Cas n° 1 - L'énoncé se décompose en deux parties : d'un côté l'énoncé proprement dit : "Les Français et la colonisation", de l'autre la problématique imposée par l'examinateur. Ce type d'énoncé est assez facile à repérer puisqu'il comporte deux propositions, nettement séparées par la ponctuation (ici, les deux points ; il peut s'agir d'un point virgule ou d'un point).

Quand on l'identifie, il faut procéder de la manière suivante : 

a) isoler le sujet de l'énoncé thématique (sujet grammatical de la première partie de l'énoncé) : ici, c'est le "les Français" par référence au fait colonisation. 

b) le relier au mot clé de l'énoncé problématique : ici, c'et "ambitions"

c) comprendre qu'il faut traiter le sujet pour répondre par "(plutôt) oui" ou par "(plutôt) non" à la problématique.

Questions : Mais comment reconnaître le mot clé de l'énoncé problématique ?

Et, avant tout, pourquoi le sujet thématique est-il "Français" plutôt que "colonisation" ?

 

1°) Confrontés à l'énoncé les Français et la colonisation, beaucoup d'élèves considèrent que le sujet est les Français et la colonisation, réponse qui n'aide pas vraiment à cerner ce dont il faut parler. Entre l'énoncé et la réponse des élèves, on n'a pas progressé !

De fait, le sujet réel d'un tel énoncé, n'est ni "les Français" ni "la colonisation" ; il est dans le "et". En d'autres termes, la"relation" qui existe entre les deux termes de l'énoncé. 

La formulation de la problématique dans la deuxième partie de l'énoncé que nous prenons pour exemple confirme cette réponse. Ce qu'il faut étudier c'est la manière dont les Français définissent leur "ambition" par référence à la colonisation. Cette "ambition" qu'il faut distinguer pour voir si les Français partagent la même renvoie bien à l'analyse d'une relation entre "Français" et "colonisation".

D'autre part, si dans la première partie de l'énoncé, le "et" invite à retenir pareillement "Français" et "colonisation" comme sujets, la seconde, en revanche, fait disparaître le mot "colonisation" quand elle préserve, sous la forme du pronom "ils", le mot "Français". Qui plus est, ce "ils" est sujet du verbe "partager". Toutes ces particularités cumulées désignent bien "Français" comme sujet du devoir ; mais les Français dans leur seul rapport à la colonisation (nous avons là, une limite du sujet).

 

2°) Il faut savoir qu'une problématique est avant tout une mise en relation entre deux éléments de réflexion : un sujet, d'une part, une caractéristique ou qualification d'autre part. 

Autrement dit, si vous cherchez dans un énoncé problématique le mot clé et que vous connaissez déjà le "sujet", il y a de fortes chances pour que le mot clé recherché soit le mot relié au sujet par le verbe de l'énoncé.

 

Grammaticalement, le mot clé est donc soit "attribut" du sujet, soit "COD".

 

Dans notre exemple, le "sujet" de l'énoncé thématique est donc "les Français" dans leur rapport à "la colonisation" (limite du sujet).

Ce sujet réapparaît dans l'énoncé problématique sous la forme du "ils" (une réapparition qui prouve que ce sont bien "les Français" qui importent). Le seul mot clé restant est donc "ambitions", le COD du verbe partager.

 

Quelles erreurs ont été commises ?

1/ Une première faute consiste à remplacer "Français" par "France", ce qui conduit à traiter de la politique coloniale du pays et à ignorer au moins un des documents accompagnant le sujet (discours de Clemenceau) lequel dénonçait la colonisation.

2/ Autre erreur, celle consistant à prendre la "colonisation" comme sujet. Non seulement, elle n'est pas le sujet, mais elle empêche de donner une réponse à la problématique. En effet, le candidat s'en trouve réduit à juger des avantages et inconvénients de la colonisation, ce qui ne revient pas à dire si les Français retenaient les uns ou les autres ou seulement l'un au dépens de l'autre !

 

Avec un peu de rigueur et de patience "avant de foncer", de telles fautes peuvent être évitées. 

 

 

Cas n° 2 - L'exercice est ici plus délicat dans la mesure où l'énoncé ne formule (de manière seulement implicite) que la problématique. Le sujet (thème du devoir) n'en est que plus difficile à trouver.

Pour y parvenir : 

a) commencer par reformuler de manière explicite la problématique : la bourgeoisie vit-elle bien ? 

b) définir la réponse à atteindre : Malgré..., elle vit bien.

c) retrouver le sujet thème du devoir : en l'occurrence, le mode de vie.

 

Question : Mais comment retrouver le sujet thème du devoir ? Pourquoi est-ce "la vie" plutôt que "la bourgeoisie" ?

 

A première vue, en effet, l'idée que le sujet soit "la bourgeoisie" s'impose (il est le sujet grammatical de l'énoncé). Plusieurs éléments, cependant, vont permettre d'écarter cette hypothèse.

1°) La problématique impose-t-elle de parler de "la bourgeoisie" dans tous ses aspects (ses valeurs, son rôle (économique, politique, social...), ses stratégiques, son mode de vie ? En confrontant le sujet thème pressenti à la problématique, on s'aperçoit que le premier est trop large, il ne convient pas. C'est une première alerte !

2°) Les documents correspondent-ils au sujet thème "la bourgeoisie" ? Dans le devoir proposé, ceux-ci n'évoquaient que des modes de vie. Seconde alerte !

3°) Tenter de reprendre les termes de l'énoncé et de les reformuler de toutes les manières possibles en faisant disparaître le questionnement (et le pronom interrogatif). Si je prends "bourgeoisie" comme sujet, cela donne : "la bourgeoisie vit". On le perçoit d'emblée, cette formule n'a pas de sens. Il me faut donc prendre "vivre" comme sujet, ce qui oblige à substantiver le verbe. Cela donne, cette fois : la vie de la bourgeoisie, énoncé qui a un sens et qui peut se conjuguer avec le comment puisque celui-ci renvoie à une "manière de...", une "façon". Il n'existe pas de 3ème formulation possible. Dès lors, il apparaît bien que le sujet est "la vie", nullement " la bourgeoisie".

 

 

Facile à dire mais moins facile à faire en situation ! Alors, quel truc ? En existe-t-il un ?

A l'expérience, on s'aperçoit que cette difficulté n'apparaît qu'avec l'interrogation "comment". L'astuce revient alors à considérer que dans les énoncés introduits par ce "comment", le sujet thème est contenu dans le verbe et que le sujet de celui-ci devient complément du nom d'une notion du genre "méthodes", "manière", "façon de...", "causes....".

Testez donc ce truc avec les énoncés suivants :

- Comment gouverne Staline ?                                              sujet = les méthodes de Staline...

- Comment les USA ont-ils gagné la guerre ?                             = les origines de la victoire US 

- Comment la France surmonte-t-elle la crise ?                         = la politique (les manières) de la France

Dans tous ces cas, le sujet du verbe de l'énoncé devient complément du nom du sujet thème.

 

 

Que chacun se rassure, toutefois, de tels énoncés sont rarissimes. Ils n'existent pratiquement pas sous cette forme au baccalauréat.

 

 

 

Cas n°3 - Cette fois, nous sommes en présence d'un sujet de type bac. Attention !

Dans quelle mesure le bilan politique, militaire et moral de la guerre annonce-t-il un monde nouveau ?

Dès qu'ils ont lu cet énoncé, les élèves, ravis, se précipitent et s'ingénient à composer des devoirs (souvent très satisfaisants) sur le "bilan de la guerre". Malheureusement, si le bilan doit bien être évoqué, il n'est pas, en soi, le sujet ! Le sujet est le "monde nouveau" ! Pour s'en convaincre, il suffit d'admettre que faire un bilan n'oblige pas une quelconque nouveauté ! 

Question : Mais comment savoir que le sujet est dans le "nouveau" plutôt que "bilan"?

 

Reprenons les techniques proposées dans les cas exposés ci-dessus : 

a) reformuler  la problématique de manière explicite : Bilan fait, le monde est-il nouveau ?

b) définir la réponse à atteindre : Malgré..., le monde est méconnaissable.

c) définir ce qu'il faut mettre en évidence pour justifier cette conclusion : la nouveauté.

 

Mais alors, que fait-on du bilan ? 

Il faut l'exposer, bien sûr ; mais pas pour lui-même ; uniquement pour dire ce qui, issu de lui, est nouveau et/ou ce qui ne l'est pas (possibilité d'une démarche antithétique qui risque cependant d'être déséquilibré dans ce cas précis). Toute la construction du devoir en dépend. Faire le bilan thème par thème et décréter en fin de chaque partie ou en conclusion que tout a changé ne démontrera rien. En d'autres termes, il faut partir de ce qui change pour montrer que c'est un résultat de la guerre, et non du résultat pour certifier abruptement que c'est un changement.

 

 

"Moralité" de la leçon

Face à un énoncé de type problématique, retenez l’idée que le sujet n’est pas celui grammatical de l’énoncé ; il est dans la relation faite entre celui-ci et ce à quoi il est relié. Traiter de cette relation oblige alors à décrire l’attribut du sujet en s'appuyant seulement sur le sujet proprement dit. 

 


 

Un cas particulier

 

Énoncé : L'organisation de l'espace américain et ses dynamiques

 

Cet énoncé ne formule pas de problématique explicite et, qui plus est, comporte un véritable piège ! Il ne doit pas être confondu avec l'énoncé suivant :

 

               Organisation de l'espace américain et dynamiques.

 

Quelle différence entre les deux énoncés ? A la lecture, elle est infime (présence du "l'" devant "organisation" et le possessif "ses" devant "dynamique") mais essentielle.

 

Le 2ème énoncé, selon un procédé assez classique, met en relation deux termes qui sont tous deux sujets grammaticaux de l'énoncé. Il ne s'agit pas de traiter de l'organisation de l'espace puis des dynamiques qui l'animent mais des deux en même temps. Le sujet est dans la relation qui unit les deux termes, il est dans le "et".

La problématique relève alors, elle aussi, du "et" : dans quelle mesure la relation entre l'organisation de l'espace et les dynamiques qui l'animent font des USA une puissance hégémonique ? La problématique est ainsi soulevée sur la base de la relation.

 

Dans le 1er énoncé, en revanche, le sujet porte sur la seule "organisation". Pourquoi ? La réponse est principalement contenue dans le "ses" lequel renvoie à "l'organisation" et place le mot "dynamiques" en position de complément du sujet. De fait, il faut lire : L'organisation de l'espace américain et les dynamiques de cette organisation. Un tel énoncé invite donc à centrer le devoir sur le 1er terme de l'énoncé et à étudier les dynamiques dans une partie distincte qui découle de "l'organisation" décrite dans un premier temps. L'article qui précède ce 1er terme confirme cette interprétation : il distingue celui-ci en ne le plaçant pas sur le même plan que le second terme.

La problématique sera dès lors centrée sur la notion d'organisation. Par exemple : Dans quelle mesure l'organisation de l'espace américain témoigne d'un pays ouvert sur l'extérieur ? Toutefois, le candidat trouvera avantage à utiliser la notion de "dynamique" pour proposer quelque chose du genre : Dans quelle mesure l'organisation de l'espace américain est-elle dynamique ?