Nouvelle adresse : a http://www.liberation-de-paris.gilles-primout.fr/
Georges Bailly était le fils du propriétaire de la pharmacie Bailly, gare Saint Lazare. Nous étions en même année de faculté de pharmacie et dans le même laboratoire. C'était un garçon calme, gentil et très sympathique. Je l'ai rencontré pour la dernière fois le 12 ou le 13 août 1944. C'était les vacances et nous nous étions rendus au bois de Boulogne pour une partie de canotage. J'ai conservé l'image de son grand sourire lors de cette rencontre. |
page de garde de la plaquette éditée par ses parents en 1945 |
Georges a rejoint une équipe de secouristes. Equipés de brassards, ils patrouillaient en camionnettes partout où l'on entendait des coups de feu. Ils ramassaient les morts et les blessés pour les amener à l'hôpital de service du secteur. | |
Secouriste, Georges Bailly n'aurait pas dû être tué ! Que s'est-il donc passé ? Voici les explications qui me furent données à l'époque. |
la fiche d'identification de son corps par la Croix Rouge |
première plaque commémorative
|
La camionnette de la Croix Rouge
où il avait pris place ce 25 août 1944 circulait rue Cambon quand un FFI
fut abattu devant elle. Une équipe descendit aussitôt pour le ramasser.
Georges, habituellement si calme, perdit tout contrôle et sous l'emprise
de la colère arracha son brassard pour se saisir de l'arme du blessé. Se dirigeant vers l'endroit d'où était partie la rafale il fut abattu à son tour. C'est ainsi que disparut tragiquement et stupidement un jeune homme que la vie avait jusqu'alors comblé. C'est toujours pour moi une grande émotion quand je passe par là et je ne peux m'empêcher de me recueillir quelques instants devant sa plaque commémorative.
plaque commémorative actuelle |
Il existe
plusieurs versions de la mort de Georges Bailly le 25 août 1944. Mais tout
d'abord je vous invite à parcourir la page consacrée aux combats de la
Place de la Concorde.
|
|
Dans la plaquette éditée par les parents de Georges Bailly en septembre 1945 on peut lire sous la plume du docteur Laurian qu'il a été atteint d'une balle au coeur. Le commissaire de police, chef des services de la Défense passive de la Préfecture de police atteste le 13 septembre 1944 que Georges a été tué en service le 25 août. |
|
Le journal "La libre pharmacie" dans son numéro du 10 février 1945 essaie de suivre Georges Bailly dans ses derniers instants à l'aide d'une quinzaine de témoins oculaires ... "Rue Duphot, en pleine fusillade, vers 14h30, le 25 août 1944, Georges Bailly se dirige d'un pas décidé vers la place Maurice Barrès. Quelques instants plus tard quelqu'un l'aperçoit de jetant sur le blockhaus à l'intersection des rues Duphot, Cambon et Saint Honoré. Aidé par plusieurs camarades il capture cinq Allemands puis plante un drapeau français sur l'édifice....
Un autre article de cette plaquette précise : Muni d'un fusil récupéré dans le blockhaus allemand, Georges Bailly croise sa mère et sa soeur rue Cambon alors qu'il court vers la rue de Rivoli pour rejoindre un groupe de FFI et d'agents de police. Sous les rafales partant des Jardins des Tuileries il se porte vers le Ministère de la Marine tout en tirant sur un char allemand quand il est mortellement atteint. Son corps, immédiatement relevé, est transporté au petit poste de secours où officient sa mère et sa soeur. Son père, quant à lui, suivait le combat de sa fenêtre ... Georges et son frère Roland avaient été arrêtés le 5 décembre 1942 pour activités gaullistes. Roland fut déporté en Allemagne.
plaques commémoratives à l'entrée de la Place de la Concorde |
Armé d'un fusil ou d'une mitraillette il passe devant chez lui et échange son casque de sanitaire contre un casque de combattant. C'est sa soeur Christiane, elle même étudiante en pharmacie, qui a ouvert un petit poste de secours dans l'entrée du 4 rue Cambon, qui lui fournit le casque. Georges, déchaîné, repart vers les Tuileries. Il saute sur une sentinelle postée au coin de la rue de Rivoli puis traverse quand une rafale le fauche entre le métro Concorde et l'angle de la terrasse des Jardins. Un brancardier qui se porte à son secours est abattu. Il est fort possible que ce secouriste soit Jean Claude Touche, pianiste de concert et volontaire de la Croix Rouge du 8ème arrondissement ...
Bertrand de Chézal dans son livre "A travers les batailles pour Paris, août 1944" donne cette version de l'épisode (l'auteur est arrivé à Paris dans les rangs de la 2ème Division blindée": " A peine descendu, je me rends compte qu'on a été bien optimiste ! Les chars partis, la fusillade continue de crépiter sur la Place. Impossible de la traverser. Des balles expédiées des Tuileries, claquent tout autour de moi. Je dois me garer derrière un socle. C'est le moment des FFI. Je les admire. Il en paraît un premier groupe sous les Arcades. Des petits gars, avec des sten guns. Pas même ! Certains avec des revolvers seulement. Je crois revivre l'assaut du "petit château". Les derniers Allemands, bien abrités, ajustent de ces innocents. Il en tombe. Un grand blond de chez nous, à lunettes, dans un imperméable beige, fait le geste d'entraîner les camarades. Il s'affaisse, la main au coeur. J'apprendrai, quelques jours plus tard, que c'est le fils Bailly qui venait de prendre un blockhaus place Maurice Barrès...." |