Le Philomane

Visite d'Alexandre à Diogène


[ La Grèce antique | Les présocratiques | Les philosophes d'Athènes | Les quatre écoles | Le néo-platonisme | Propédeutique | Liens | Philodido ]

S'attaquer à la philo quand on n'y connaît rien, c'est pas facile facile. Ben justement, c'est ça qui me plaît : entreprendre quelque chose de pas facile facile. Faire partager avec enthousiasme ce que l'on découvre, ce que l'on vient juste d'apprendre, a une saveur particulière. Si un peu de cet enthousiasme pouvait filtrer au travers de cette page, elle aurait justifié sa raison d'être.

Tout a commencé en octobre 1995 à Chalon-sur-Saône, en plein championnat de France d'échecs des entreprises. Un sympathique joueur d'Air France qui plaisantait avec nous, lança : « Vous connaissez Le monde de Sophie ? C'est génial ! » Il en parlait bien, trop bien, si bien qu'on l'a tous lu. Pour moi, ce fut le déclic. Peu de temps après, je recevais en cadeau l'abécédaire de Gilles Deleuze. Il n'y a pas de hasard. L'affaire était entendue : je me mettrais à la philosophie.

Voici mon projet : dans un premier temps, expliquer succintement ce que je crois avoir compris de la contribution de chaque philosophe ; dans un second (c'est-à-dire dans un certain temps, voire un temps certain), ajouter éventuellement mon grain de sel (et là, ça va chier ! ;-).

N.B.
« Personnellement, je préfère toujours étudier un philosophe en analysant ses oeuvres, plutôt que de chercher à dégager un système en extrayant de ses oeuvres des propositions théoriques, séparées de leur contexte. » [Pierre Hadot, La philosophie comme manière de vivre, Éd. Albin Michel, p. 149]. Ben voilà, les ennuis commencent déjà : je fais ici tout le contraire...

Les philosophes de la Grèce antique

Cette page présente les principaux philosophes de l'Antiquité, de Thalès à Plotin, et les grands traits de leur philosophie.

Le berceau de la philosophie occidentale

Début

Les présocratiques ou philosophes de la nature

La question qui turlupinait les premiers philosophes grecs (appelés plus tard « présocratiques » car ils précédèrent Socrate) était de trouver une explication rationnelle du monde. Avant eux, seuls les récits mythologiques expliquaient la naissance du monde et les phénomènes naturels. Ces récits, une fois écrits, ont pu être discutés, décortiqués, critiqués... la philosophie était née !

Les trois philosophes de Milet

Thalès (625 à 545 environ avant J.-C.) est généralement considéré comme le premier philosophe grec. Il vivait à Milet (aujourd'hui en Turquie). Il fonda vers 600 avant J.-C. la première école de philosophie appelée école ionienne ou école milésienne. Astronome et ingénieur, il aurait prédit l'éclipse de 585 avant J.-C. et parvint à détourner les eaux du fleuve Hylas pour permettre à Crésus d'en franchir le lit. On raconte également qu'il calcula la hauteur d'une pyramide en mesurant l'ombre de celle-ci au moment où l'ombre de son corps coïncida avec sa taille réelle (cf. Le théorème du perroquet). Ses recherches l'amenèrent à penser que le monde matériel se réduisait à un seul élément : l'eau. Selon lui, la Terre était un disque plat qui flottait sur l'océan. Cette flottaison instable lui permettait d'expliquer les tremblements de terre.

Anaximandre (611 à 547 environ avant J.-C.), son disciple, est natif lui aussi de Milet. Il fut le premier à dresser une carte du monde. Considérant la transformation réciproque des quatre éléments (l'eau, l'air, la terre et le feu), il a choisi de prendre comme substrat, non pas l'un d'eux, mais l'indéfini (apeiron) ou « infini » (les deux notions se confondent à cette époque), d'où l'univers tirerait son principe. C'est d'ailleurs lui qui nous aurait légué le terme de « principe » [Simplicius, Physique, 24, 13]. Il pensait que la Terre était en suspens dans l'espace, soutenue par rien, qu'elle avait la forme d'un cylindre et que nous marchions sur l'une des deux surfaces planes.

Anaximène (570 à 526 environ avant J.-C.) aurait été l'élève d'Anaximandre. Comme Thalès, il pensait qu'une substance unique était à la base de toutes les autres : l'air. Pour lui, la Terre avait la forme d'un plateau, d'une table -- ronde ou rectangulaire ? (les écrits diverges) -- mince soutenue par l'air.

Philosophie, mythologie et science

Philosophie et science ont des points communs. Tout comme le philosophe, l'homme de science cherche la vérité. Les questions qui peuvent être soumises à l'expérimentation et à l'observation relèvent de la science, les autres incombent à la philosophie. Rien d'étonnant alors à ce que les philosophes de la nature - ainsi nommés parce qu'ils cherchaient à percer les secrets de la nature - fussent principalement des hommes de science.

Xénophane (570 environ avant J.-C.) est né à Colophon. Il fut le premier philosophe à jeter un regard critique sur les mythes, et disait que chacun façonne ses dieux à son image. Il soutenait que nul ne peut posséder le savoir certain, car tout n'est que conjecture. Pour lui, le principe de toute chose est la terre.

Pythagore (570 à 497 environ avant J.-C.) est né dans l'île de Samos. Il fut le premier à rapprocher les mathématiques de la philosophie. Ces idées ont été reprises et amplifiées par Platon. On lui attribue généralement la paternité du mot « philosophie », mais Pierre Hadot conteste cette origine et considère que la notion d'« activité philosophique » est peut-être apparue pour la première fois sous la plume d'Hérodote (cf. « Qu'est-ce que la philosophie antique ? », Folio essais, p. 35). Il semble que ce soit les pythagoriciens qui soutinrent les premiers que la Terre était ronde et possèdait deux mouvements : la rotation et la translation. Mais il faudra attendre Ératosthène (276 à 195 environ avant J.-C.) pour en avoir la preuve, lorsqu'il évalua scientifiquement la circonférence du globe à 250 000 stades, ce qui correspond à 3 ou 4 % près à la mesure exacte (40 041 km) !

Tout s'écoule ou tout est un ?

Rendre compte de la réalité n'est pas chose aisée : multiplicité, unicité, mouvement, immobilité, temporalité, éternité... Comment expliquer le caractère paradoxal de notre monde ?

Héraclite (540 à 480 environ avant J.-C.) est né à Éphèse. Ses apophtegmes abscons lui valurent le surnom d'Obscur. Il mit en avant deux grandes idées, l'union des contraires et le changement perpétuel :

  • « Dieu [logos] est le jour et la nuit, l'hiver et l'été, la guerre et la paix, la faim et la satiété ». Le combat des contraires est ainsi régulé par le logos ou le feu originel.
  • « On n'entre jamais deux fois dans le même fleuve » car quand je me baigne la seconde fois, le fleuve comme moi avons changé.

Parménide (540 à 450 environ avant J.-C.), né à Élée, aurait été le disciple de Xénophane. Il est le premier à avoir opposé la pensée logique à la pensée empirique. L'école d'Élée s'oppose à la théorie du multiple et du changement perpétuel d'Héraclite. On rattache généralement à cette école Parménide, Zénon et Mélissos de Samos. Selon Diogène Laërce, il y aurait pour Parménide deux éléments : le feu (créateur) et la terre (matière). Il proclamait que tout ce qui est a nécessairement toujours existé. L'univers est une entité unique et immuable : tout est un. Pour lui, il n'existe rien d'autre que l'-tre ; celui-ci est inengendré, éternellement présent, de nature parfaitement homogène, sans vide ni discontinuité. Il est fini et parfait, exclut tout mouvement et tout devenir et ressemble à la masse d'une sphère indivisible.

Zénon d'Élée (né vers 490 environ avant J.-C.) fut élève de Parménide. Il excellait à inventer des paradoxes, et montrait ainsi qu'il était possible, à partir de prémisses indiscutables, d'aboutir à une conclusion erronée. Selon Aristote, il serait l'inventeur de la dialectique.

C'est Empédocle (490 à 430 environ avant J.-C.), né à Agrigente, qui mit fin à la divergence de vue entre Héraclite et Parménide. Comme Héraclite, il convenait de la perpétuelle mutation des éléments. Comme Parménide, il estimait que la matière n'était pas née de rien et ne disparaissait pas dans le néant. Mais, pour lui, tout n'était pas un. Il avança que l'univers se composait de quatre éléments, le feu (Zeus), la terre (Héra), l'air (Aidôneus) et l'eau (Nestis), et deux forces primitives (ou principes) mises en oeuvre par la nécessité : l'Amour et la Haine, l'une qui unit, l'autre qui sépare. Cette théorie sera reprise par Aristote et jouera un rôle important jusqu'à la Renaissance. Il serait mort en se jetant dans le cratère de l'Etna.

Les atomistes

Anaxagore de Clazomènes (500 à 428 environ avant J.-C.) fut l'auditeur d'Anaximène. Selon lui, l'univers était composé de minuscules éléments, les homéoméries (que nous apparenterions aux molécules), invisibles à l'oeil, chacun contenant une fraction du tout. Ces particules étaient unies par une force appelée noûs (l'Esprit). Passionné d'astronomie, il remarqua que la Lune était éclairée par la Terre et expliqua le phénomène des éclipses solaires. Il fut chassé d'Athènes pour avoir prétendu que le soleil n'était pas un dieu, mais une gigantesque pierre chauffée à blanc. Comme Pythagore, il pensait que l'âme est immortelle. Contrairement à Démocrite, il affirmait que le vide n'existait pas, et que les homéoméries étaient divisibles à l'infini (contrairement aux atomes). Selon lui, la Terre était plate.

C'est à Anaxagore, et non à Lavoisier, que l'on devrait la célèbre maxime : « Rien ne se perd, rien ne se crée, mais tout se transforme. » La citation exacte serait la suivante : « Rien ne naît ni ne périt, mais des choses déjà existantes se combinent, puis se séparent de nouveau. Pour parler juste, il faudrait donc appeler le commencement des choses une composition et leur fin une décomposition » (cf. « Les penseurs grecs avant Socrate », De Thalès de Milet à Prodicos, de Jean Voilquin, Éd. GF-Flammarion, 1964, p. 150, fragment 17).

Leucippe (460 à 370 environ avant J.-C.), disciple de Zénon d'Élée, serait né à Milet. Selon lui, tout était constitué d'atomes, ce qui est, qui se déplacent dans le vide, ce qui n'est pas (mais qui serait aussi réel que ce qui est).

Démocrite (460 à 370 environ avant J.-C.), disciple de Leucippe, est né à Abdère. Il reprit et développa l'idée de son maître sur les atomes, insécables et éternels, et le vide. L'âme elle-même est constituée d'atomes ronds et lisses et est périssable. À la mort d'une personne, ces atomes se séparent et se rassemblent -- grâce à leur crochet, d'où l'expression « atomes crochus » que nous devons à Démocrite -- pour former une nouvelle âme. Cette idée sera reprise par Épicure. Pour lui, l'univers, formé d'atomes illimités, avait toujours existé ; il développe ainsi la première physique matérialiste qui exclut l'intervention des dieux dans l'explication de l'univers. Il a été le premier à observer que le volume d'un cône est le tiers de celui d'un cylindre de même base et de même hauteur et que le volume d'une pyramide est le tiers de celui d'un prisme de même base et de même hauteur. Le souverain bien est pour lui le bonheur ou euthymie, attitude proche de l'ataraxie qu'il appelle « bonne humeur ». On lui attribue cette citation : « Je préfère découvrir une cause plutôt que d'obtenir le royaume de Perse ». Aétius rapporte que Démocrite aurait dit que la Terre est en forme de disque dans sa largeur, mais concave au milieu.

Début

Les philosophes d'Athènes

Athènes devint à partir de 450 avant Jésus-Christ la capitale culturelle de la Grèce. Si les philosophes présocratiques se donnèrent pour but l'explication de l'univers et des phénomènes naturels, les socratiques s'intéressèrent à l'homme et à la société.

Socrate

Socrate (470 à 399 environ avant J.-C.) est né à Athènes et y vécut jusqu'à sa mort. On dit de lui que c'est le plus énigmatique des philosophes. Il n'a laissé aucun écrit. Ce que nous savons à son sujet provient essentiellement des écrits d'autres auteurs, et notamment de Platon. Contrairement aux sophistes qui enseignaient la philosophie -- l'art de la rhétorique en fait --, Socrate, lui, n'enseignait rien ; il ne cherchait pas à inculquer un quelconque (c'est rigolo à prononcer) savoir, mais à éveiller chez ses interlocuteurs un esprit critique.

Il avait coutume d'interpeller les Athéniens pour l'aider à définir ce qu'est véritablement la justice, la beauté ou le bien. Le grand mérite de Socrate est d'avoir mis en évidence que, par un travail en commun basé sur le dialogue, on peut parvenir à un discours juste. Son art s'appellait la maïeutique ; il consistait à faire accoucher les esprits de pensées justes, d'où sa maxime « Connais-toi toi-même ». Il disait être guidé par une voix intérieure qu'il appelait son démon (sa conscience ?).

L'oracle de Delphes déclara que Socrate était l'homme le plus sage de la cité, parce qu'il savait... qu'il ne savait rien. Il fut accusé d'introduire de nouveaux dieux à Athènes et de corrompre la jeunesse et fut condamné à mort. Désintéressé, remettant sans cesse en cause nos certitudes, Socrate est le philosophe par excellence.

Platon

Platon (427 à 347 avant J.-C.) rencontra Socrate, de 43 ans son aîné, à 20 ans et fut son élève pendant 8 ans. Selon lui, la réalité abritait deux mondes : le monde sensible, que nous percevons, matériel et visible, où tout est soumis au changement (les apparences), et le monde des « Idées » (ou « Formes » idéales, eidos), uniquement accessible par l'intellect, où se trouvent les essences des choses. Au-delà du monde éternel et immuable des Idées, il y a le Bien, unique fondement de toutes choses -- perceptibles et intelligibles -- qui est la quête ultime du philosophe. En gros, ce qui est perçu par nos sens (le corps) peut être différent d'un individu à l'autre, mais ce qui est dicté par la raison (l'esprit) est immuable et fiable. C'est pour cela qu'il pensait qu'un État idéal devait être gouverné par des philosophes.

Soit, mais à quoi peut bien servir ce concept d'Idée ? Selon Gilles Deleuze, Platon avance ainsi une réponse au problème des prétendants, problème crucial dans la Grèce antique. Comment sélectionner les prétendants au pouvoir politique ? Comment distinguer le digne représentant du peuple de l'arriviste ? le philosophe du sophiste ? la bonne conduite de la mauvaise ? Le concept d'Idée -- la chose en tant que pure --, en proposant en quelque sorte un référentiel idéal, devait aider les Grecs anciens dans leurs choix, les guider dans leurs décisions pour sélectionner les prétendants.

Platon fonda la première Académie où l'on enseignait la philosophie, les mathématiques et la gymnastique. L'Académie sera active pendant plus de neuf siècles (de 387 avant J.-C. à 529). Ce que nous appelons aujourd'hui sciences faisait alors partie de la philosophie. Il est le premier philosophe occidental dont la plupart des oeuvres complètes sont parvenues jusqu'à nous. Ces écrits ont dominé la philosophie européenne pendant sept siècles, jusqu'à l'émergence du christianisme. Parmi la trentaine de dialogues que Platon nous a laissé et qui mettent en scène Socrate, citons L'apologie de Socrate, le Phédon (sur l'âme), le Ménon (sur la vertu) et le Phèdre (sur l'amour, l'âme, l'écriture, la rhétorique). La République -- où l'on trouve l'allégorie de la caverne -- nous donne un aperçu général de sa philosophie tandis que Le Banquet nous livre ses idées sur l'amour. La théorie des Idées est notamment abordée dans le Timée (51 c), La République (X), le Phédon (103 c) et le Parménide (130 c). On doit également à Platon la célèbre légende de l'Atlantide (dans le Timée et le Critias). C'est aussi dans le Timée que Platon nous explique sa cosmogonie, et notamment ses cinq solides parfaits : le tétraèdre (le feu), le cube (la terre), l'octaèdre (l'air), l'icosaèdre (l'eau), le dodécaèdre (le cosmos).

Aristote

Aristote (384 à 322 avant J.-C.) est né à Stagire en Macédoine. Il fut l'élève de Platon (de 43 ans son aîné ; eh oui, la même différence d'âge qu'entre Platon et Socrate !) durant 20 ans, puis le précepteur du jeune Alexandre le Grand. En 335, il fonda sa propre école, le Lycée. Comme il a l’habitude de dispenser ses cours en marchant dans les allées des jardins du gymnase, ses élèves prennent le nom de péripatéticiens (promeneurs). Aristote a donné leur nom aux disciplines auxquelles il s'est consacré : physique, éthique, météorologie, rhétorique, entre autres. Il a porté au rang de science la logique (qu'il nommait analytique), qui allait être enseignée pendant plus de 2000 ans sur ses seuls concepts. Il s'efforça de fonder ses théories sur les faits.

À la théorie platonicienne (existence de deux mondes : l'un sensible et l'autre intelligible), il oppose l'idée qu'il n'existe qu'un monde, celui dans lequel nous vivons. Notre monde est la seule base solide pour l'expérimentation et la recherche du savoir. À la différence de Platon, Aristote garde les pieds sur terre, comme l'illustre le fameux tableau de Raphaël. Ces deux approches philosophiques continuent encore de nos jours à inspirer les penseurs.

Aristote essaya de répondre à la question : « Qu'est-ce que l'être ? » Selon lui, toute chose comporte deux aspects : la matière (ce qui constitue l'objet ou l'être) et la forme (ou eidos, ce qui détermine l'objet ou l'être). La matière est essentiellement indéterminée (elle peut changer d'aspect) : un bloc de marbre (matière) peut devenir (est en puissance) une statue d'animal, de personnage, etc. ou est (en acte) la statue de Zeus (forme). Aristote, dont la pensée est profondément finaliste, avance que quatre causes permettent d'expliquer l'existence des choses ou des êtres : la cause matérielle (le marbre), la cause formelle (celle qui donne sa forme à la sculpture), la cause efficiente (le marteau et le ciseau) et la cause finale (l'intention, le but du sculpteur). [Physique, livre II, chap. 3 et 7]

Dans L'Éthique à Nicomaque, Aristote prône la théorie de la juste mesure pour atteindre le bonheur : la vertu se situe à égale distance de deux extrêmes que sont les vices. Dans La Politique, il indique que « L'homme est par nature un animal politique » et que le bonheur de l'homme est indissociable de sa capacité à vivre en société. Le rôle de l'État consiste alors à rendre possible cette harmonie.

Aristote ne fut pas seulement philosophe, mais le premier grand biologiste en Europe ; ses travaux conservèrent leur valeur jusqu'au XIXe siècle. Penseur encyclopédique, père de la logique et de la métaphysique, il a totalisé le savoir de son temps et a érigé en un système les connaissances de son époque.

Début

Les quatre écoles

À la mort d'Alexandre le Grand (323 av. J.-C.), plusieurs écoles se réclamèrent de Socrate. Pendant la période hellénistique, qui s'étend de la chute des cités grecques jusqu'à la conquête romaine, quatre écoles s'épanouirent : celles des cyniques, des sceptiques, des stoïciens et des épicuriens. D'autres courants moins connus furent appelés socratiques mineurs. La principale question à laquelle ces écoles tentaient d'apporter une réponse était : comment doit-on vivre en ce bas monde ?

Les cyniques

Antisthène (444 à 371 environ avant J.-C.), élève de Socrate, jeta les bases de cette philosophie. Les cyniques (du mot chien) prônaient une vie détachée des choses matérielles, méprisant honneurs et richesses. Ils pensaient qu'il ne fallait se préoccuper ni de sa santé, ni de la souffrance, ni de la mort.

Diogène (413 à 327 environ avant J.-C.). Né à Sinope, élève d'Antisthène, il fut le plus célèbre des cyniques et vivait dans un tonneau (une jarre en fait). On dit qu'il se promenait dans les rues, une lanterne allumée à la main en plein jour, en répétant : « Je cherche un homme ». Il disait également : « Je suis un citoyen du monde ». Apparemment, il n'avait pas sa langue dans sa poche : lorsque Alexandre le Grand lui rendit visite et lui demanda si lui, le maître du monde, pouvait faire quelque chose en sa faveur, il répondit : « Ôte-toi de mon soleil ! » Alexandre aurait dit plus tard : « Si je n'étais Alexandre, je voudrais être Diogène. »

Les sceptiques

Le recherche de la certitude a été un objectif majeur de la philosophie. Les sceptiques auront joué un rôle important dans cette quête.

Pyrrhon (365 à 270 avant J.-C.) fut le fondateur du scepticisme. Comme il avait beaucoup voyagé, il s'est rendu compte que ce qui était considéré comme vrai dans un pays ne l'était pas forcément dans un autre, et que chacun avait de bons arguments. Dés lors, refuser de croire en quoi que ce soit est devenu son credo. Cette suspension du jugement (ou épochê en grec) devait permettre d'atteindre la paix de l'âme (ou ataraxie).

Timon de Phlionte (320 à 230 avant J.-C.), son disciple, repris cette thèse et prétendait que toute argumentation s'appuie sur des prémisses non établies.

Carnéade (214 à 129 avant J.-C.), qui prit la direction de l'Académie de Platon, fit une visite mémorable à Rome où il donna deux conférences. Dans la première, il exposa les théories de Platon et d'Aristote sur la justice, et dans la seconde il réfuta tout ce qu'il avait dit précédemment.

Trois textes de Sextus Empiricus sont les plus représentatives du scepticisme : Esquisses pyrrhoniennes, Contre les dogmatiques et Contre les professeurs.

Les stoïciens

Le stoïcisme fut la philosophie dominante sous l'empire romain et dura environ cinq siècles.

Zénon de Kition (ou Citium - 334 à 262 environ avant J.-C.), disciple de Cratès le Cynique. Fondateur du stoïcisme, il avait l'habitude de réunir ses disciples sous un portique (stoa en grec). Aucun de ses écrits ne nous est parvenu. Le stoïcisme repose sur l'idée qu'il n'y a rien au-dessus de la raison (logos) et que nous ne faisons qu'un avec la nature. La nature étant régie par des principes rationnels, tout est écrit à l'avance ; l'attitude du stoïcien doit donc être l'impassibilité face aux événements.

Épictète (50 à 130) est né en Phrygie (Asie Mineure) et fut esclave (épiktétos signifie esclave en grec). Affranchi, il enseigna la doctrine stoïcienne à Rome, puis à Nicopolis (Épire) où il attira de très nombreux disciples en enseignant un véritable art de vivre : « Ne demande point que les choses arrivent comme tu le désires, mais désire qu'elles arrivent comme elles arrivent, et tu prospéreras toujours ». « Entre toutes les choses du monde, les unes dépendent de nous, et les autres ne dépendent point de nous. Celles qui dépendent de nous sont nos opinions, nos mouvements, nos désirs, nos inclinations, nos aversions ; en un mot, toutes nos actions. Celles qui ne dépendent point de nous sont le corps, les biens, la réputation, les dignités ; en un mot, toutes les choses qui ne sont pas du nombre de nos actions. » De son enseignement, seuls nous restent un Manuel et quatre recueils (sur huit) intitulés Entretiens.

Les Lettres à Lucilius et les Entretiens de Sénèque (2 avant J.-C., 65 après J.-C.) et les Pensées de Marc-Aurèle (empereur romain de 121 à 180 après J.-C.) sont les principaux ouvrages sur le stoïcisme.

Les épicuriens

Contrairement au cyniques et aux stoïciens qui acceptaient l'idée de souffrir, les épicuriens prônaient un art de vivre bannissant toute forme de souffrance.

Épicure (341 à 270 environ avant J.-C.) voulait libérer les hommes de la peur de la mort et de celle des dieux. Vers 300 avant Jésus-Christ, il fonda sa propre école à Athènes, ouverte à tous, y compris aux femmes et aux esclaves. Comme les épicuriens se réunissaient dans un jardin, on les appelaient « les philosophes du jardin ». Épicure se servit de la théorie atomiste de Démocrite pour expliquer qu'il n'y avait pas lieu de craindre la mort car « elle n'est rien pour nous » : l'entité formée par nos atomes cesse simplement d'exister. Pour combattre les principaux maux qui troublent l'âme et le corps, Épicure préconise le « quadruple remède » suivant : il n'y a rien à craindre des dieux (car il ne s'intéressent pas aux affaires humaines), la mort n'est pas à craindre (car une fois morts nous ne sentirons plus rien), on peut atteindre le bonheur facilement (en cherchant simplement à satisfaire nos besoins essentiels avec modération : manger, boire, dormir, se protéger), la douleur est supportable (car temporaire et affermissant l'âme). Se tenant à l'écart de la vie publique et de la politique, les épicuriens auraient pu faire leur la devise : « Pour vivre heureux, vivons cachés ».

La doctrine d'Épicure est exposée par Lucrèce dans son poème De natura rerum.

Début

Le néo-platonisme

Plotin (205 à 270 après J.-C.), né en Égypte, est considéré comme le dernier grand philosophe grec de l'Antiquité. Sa philosophie s'inspire de celle de Platon (les Idées ou Formes idéales), mais Plotin ne sépare pas le corps de l'esprit et affirme que tout est un, car Dieu (ou l'Un, ou le Bien) est tout. On parle de mysticisme. Cette approche présente des similitudes avec le christianisme. Plotin pronaît que ce qui existe véritablement est ce qui appartient au domaine mental. Ainsi, pour qu'une chose existe, il faut qu'elle ait été pensée.

Début

Propédeutique

Une question qui revient souvent lorsqu'on débute en philosophie est : « Mais par où commencer ? » Voici donc quelques avis sur la question :

Parallèlement, je recommande aux débutants la lecture des cinq ouvrages suivants, qui leur seront d'une aide précisieuse :

  • L'Étonnement philosophique - Une histoire de la philosophie
    - de Jeanne Hersch
    - Éd. Gallimard, Folio Essais, Paris, 1981 et 1993 (460 p. - 8 €)
    Une mention spéciale pour cet ouvrage qui est en lui-même un grand moment de philosophie, vécu et écrit de l'intérieur même de la pensée des philosophes. Cette aventure de l'étonnement tout au long de l'histoire de la philosophie est aussi fascinante que facile à lire. Un seul reproche : il manque un index ; aussi en ai-je créé un téléchargeable ici, si ça intéresse quelqu'un. Jeanne Hersch est à mon sens le seul auteur qui explique bien Kant (son philosophe préféré) !

  • Initiation à la philosophie
    - de Roger Caratini
    - Éd. l'Archipel (718 p. - 22,95 €)
    Complet, clair et passionnant. Ne pas se laisser impressionner par le côté imposant de l'ouvrage. Il se lit comme un roman. J'ai le souvenir d'un avant-propos authentique et accrocheur, qui donne tout de suite envie de plonger dans le vif du sujet. Ce que je fis, pour mon plus grand plaisir...

  • La pratique de la philosophie de A à Z
    - de Élisabeth Clément, Chantal Demonique, Laurence Hansen-Love et Pierre Kahn
    - Éd. Hatier (480 p.)
    À la fois lexique, dictionnaire, index de philo, manuel... À toujours avoir à portée de main !

  • Panorama des idées philosophiques - De Platon aux contemporains
    - de Jacqueline Russ
    - Éd. Armand Colin (231 p. - 12,20 €)
    Cet ouvrage, qui s'adresse aux étudiants en philosophie, retrace les évolutions de la raison à travers les siècles.

  • Introduction à la philosophie
    - de Françoise Raffin
    - Éd. Armand Colin, Synthèse nÝ55 (95 p.)
    Quinze dossiers très clairs sur des thèmes philosophiques clés, étayés par un résumé et des questions en fin de chapitres.
Je remarque que ce sont majoritairement des femmes qui expliquent le mieux la philo ! ;-)
Début

Liens

D'autres en parlent (je sais, c'est dingue...), et mieux que moi... Alors, n'hésitez pas à visiter ces sites sélectionnés avec amour !

  • New! Le site du café-philo des Phares, un endroit que j'affectionne particulièrement parce que la philosophie ne s'y prend pas au sérieux.
  • Lancement le 01.01.05 de Philodido, un site d'aide dédié à la philosophie.
  • Diogène Laërce - Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres, la plus célèbre doxographie sur les philosophes de l'Antiquité (traduction de 1933) mise à notre disposition grâce à Ugo Bratelli.
  • Cyberphilo - Les plus beaux textes de la philosophie.
  • SOS Philosophie de Colette Kouadio, professeur de philosophie.
  • L'anti-somnambulique de Pierre-Jean Dessertine, professeur de philosophie.
  • Butinage en philosophie de l'académie de Lyon.
  • Philagora et sa rubrique philosophie.
  • Pratiques philosophiques. Ce site a pour but d'informer sur nos échanges et discussions sur l'enseignement, la formation et la recherche concernant toutes les pratiques philosophiques nouvelles qui se développent dans les systèmes de formation : écoles primaires et maternelles, collèges, enseignement spécialisé, lycées professionnels, Instituts Universitaires de Formation des Maîtres, formation pour adultes, animation socio-culturelle, etc.

  • Le Collège international de philosophie, créé en 1983, est au carrefour de l'enseignement et de la recherche. Fidèle à la tradition philosophique, l'accès au Collège est entièrement libre et gratuit. Les conférences et séminaires se déroulent dans l'ancienne École Polytechnique, au coeur du quartier de la Contre Escarpe, un lieu magique.

Début

Home Courriel : marc.goldstein@noos.fr
Signez le Livre d'Or de Marc Page
Maison