Le festival de la bande dessinée d’Angoulême a attribué à son dernier ouvrage Poulet aux prunes le prix du meilleur album de l'année 2004.

J'ai lu "Poulet aux prunes" après avoir lu Persepolis du même auteur. C'est un livre qui m'a énormément touché, de par la véracité qu'il y a dans ses propos, l'humour parfois, les superbes dessins en noir et blanc, les nombreuses anecdotes et j'en passe! Plus un beau roman qu'une simple BD, où les dessins d'un beau noir et blanc très contrasté deviennent presque secondaires après les textes, qui retrace la vie d'un musicien, de son enfance et sa vie amoureuse, à la vie de ses enfants et petits enfants!

Je l'ai lu d'une traite et n'ai pu en détacher mes yeux. L'histoire d'un musicien dont la guitare ("le tar") est cassé et qui n'arrive pas à en retrouver un ayant la bonne sonorité. Il tombe dans une grande quête pour retrouver LA bonne guitare qui aurait LE bon son. Tout cela explique très bien la relation entre l'artiste et son instrument, et l'importance de l'instrument pour l'artiste.
Une manière très vraie de définir un artiste, sur ce côté là.

Très émouvant, drôle parfois et très bien raconté, où Marjane Satrapi fait une petite apparition d'ailleurs. Avec toute une philosophie derrière (sur le désir de perfection de l'artiste, l'exigence, l'égocentrisme parfois, etc). Superbe, sur une toile de fond historique.

Il est à la fois à mille lieux de Persepolis, et à la fois si proche car a conservé les mêmes éléments de sa réussite (la beauté des dessins, l'humour toujours, l'enfance, la sincérité, la tristesse, les rappels à certains faits historiques). Très différent mais à la fois aussi efficace que Persepolis. Je suis conquise.

Source: chronique de Océane

Un livre sensible qui raconte la touchante agonie d’un homme qui a perdu le goût de vivre et dont Marjane n’exclut pas qu’il soit un jour un film. Dans cet album, Marjane Satrapi y dessine une femme nue : Sophia Loren.
Le magazine Studio ne manque pas de le lui faire remarquer : « Pour moi, c’est la plus belle femme du monde, répond la dessinatrice, Elle a un truc « pas vrai »... Des traits exagérés ; des yeux, un nez, une bouche, des dents , des seins, des jambes pas possibles ; une taille, un bassin incroyables ! Si Dieu a fait les hommes avec de la glaise, eh bien, il a passé plus de temps sur Sophia Loren ».

Source: magazine Studio

Marjane Satrapi: "Pour moi ce livre correspond plutôt au portrait de l’artiste, sans parler du fait que ce personnage est un membre de ma famille et que j’aime beaucoup écrire sur les gens dont je connais l’histoire. On fait tout un flan autour de l’Artiste. Mais l’artiste est avant tout un être égocentrique et narcissique qui se voit comme le centre du monde, convaincu non seulement qu’il écrit des choses extraordinaires mais aussi que les gens doivent payer pour les apprécier, et il faut qu’ils l’adorent et l’applaudissent. Nous sommes tous comme ça. De façon générale c’est l’expression même de nos névroses. Si vous êtes content vous n’arriverez pas à écrire des poèmes magnifiques. Il faut que vous soyez un peu dans un état mélancolique. C’était ce que je voulais montrer de l’artiste. Parce que je connais bien tout ça, je suis moi-même égocentrique et narcissique, ben voilà, c’est comme ça.

Je pense qu’on écrit toujours pour quelqu’un, pour une ou deux personnes. Je sais toujours pour qui j’écris mon histoire. Je veux toujours épater quelqu’un en particulier.

Il y a un personnage inquiétant dans votre livre qui intervient sur la fin d’une façon un peu cachée, c’est l’ange de la mort. Vous pourriez nous parler de ce personnage ?
Marjane Satrapi : "Ma grand-mère, la reine du chantage affectif, avait vu l’ange de la mort cent milliards de fois. A chaque fois elle disait qu’elle allait mourir le lendemain. A tel point que la dernière fois que je lui ai parlé au téléphone et qu’elle m’a annoncé qu’elle ne tiendrait même pas une semaine, je lui ai dit "arrête, ça fait douze milliards de fois que tu es en train de mourir", Elle m’a répondu : "je te jure cette fois c’est sérieux", et 5 jours après elle était morte. Bon, elle l’avait vu ou prétendait l’avoir vu. C’est quelque chose qui est propre à ma culture. Contrairement à ici où on fait complètement abstraction de la vieillesse et de la mort. La mort est un élément très présent dans ma culture. Vous allez au cimetière régulièrement, vous y faites des piques nique, vous parlez avec vos morts etc. Les cimetières sont tout le temps peuplés de gens. Quand je retournais en Iran, la première chose à faire au lendemain de mon arrivée était de me rendre au cimetière sur les tombes de mon grand père, de ma grand-mère, de ma tante, de toute ma famille. C’est un rapport très différent."

Source: interview de cuverville.com, juillet 2005



Informations techniques :

Editeur : L'Association
Date de parution : février 2005
Collection : Ciboulette
Nombre de pages : 88 pages
Format : 17 cm x 24 cm
Illustration : Illustrations noir et blanc
ISBN 2844141595


Interview de Marjane sur Poulet aux Prunes :

"Love is a desert" En 2006, Sarah Sundberg a interviewé Marjane Satrapi sur "Poulet aux Prunes". Très intéressant, avec des extraits de la BD. A lire ici.

Dans le cadre du Festival de la BD à Bastia, le 2 avril 2005, découvrez cet interview dans laquelle Marjane Satrapi nous parle de Poulet aux prunes, d’artistes névrosés, de critiques injurieuses, d’Européens nombrilistes et d’une grand-mère très méchante, tout ceci avec beaucoup d'humanité. A découvrir ici!




Quelques couvertures étrangères :

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Extraits illustrés :