CHAPITRE XXI


L’AVENIR EST A DIEU


1974


                                                                                                                                                                                                                                                                

             Ce titre est exactement celui du bandeau du numéro de «  Valeurs Actuelles » qui relatait les derniers et

la mort du Président Pompidou.

 

 

   Cet hebdomadaire, de 1963 à 1987, nous tint au courant de la Vie du Pays. Il présenta dans la semaine en

couverture, un visage en profil droit sur un fond de coucher de soleil,-évoquant probablement le pays étranger

dont revenait tout juste le Président1. Quant au titre, il s’étalait sur une bande jaune, en haut et à droite de la

première page. Naturellement, « Valeurs Actuelles » s’interrogeaient sur les perspectives ouvertes par la

disparition de cet « Homme au courage tranquille ».

 

   On le disait malade depuis longtemps. Des rumeurs bizarres venaient de l’Elysée2. Mes Parents pourtant

habitués aux exagérations des journalistes, se montrait eux-mêmes intrigués par cette atmosphère…Pour le

moins mystérieuse. La présence quasi quotidienne du Président dans les reportages donnait lieu à de multiples

questions.

 

Pourtant,  le mardi 2 avril, on interrompit les « Dossiers de l’Ecran » consacré à l’Aventure de l’Or, pour annoncer 
cette nouvelle de portée national. Parler de la Pompe républicaine et des chicanes qui suivirent ce deuil importe peu.

 La semaine suivante nous recevions le fameux « Valeur Actuelle ».  Ses évidentes conclusions me plurent ; elles

allaient dans le sens de l’éducation que j’ai reçue. Me remérorant ce Numéro historique et sa philosophique manchette,
je la prends comme un rappel à ma patience personnelle .

   Monsieur Giscard d’Estaing fut l’heureux élu à la succession de Georges Pompidou. Afin de mieux se présenter

le nouveau Président choisit de remonter à pied une partie des Champs-Élysées, pour finir par l’hommage habituel au Soldat Inconnu.

 

    Mon Père et moi, nous regardions à la Télévision ce spectacle dénué de faste. Mon Père, trop heureux du

résultat obtenu, se doutait-il qu’il voyait passer là le dernier Président de la République qu’il  connaîtrait…… ?

Il était loin d’imaginer que l’illustre promeneur pour lequel il s’était fait tant de soucis jusqu’à son élection

serait celui  qui, peu à peu introduirait le Régime et leader de l’époque, qui l’avait tant effrayé en 1974.  

 

 

   Si  1973 avait été terne et morose, ce fut à cause de l’éternelle précarité de notre installation ; et aussi

du changement de vitesse, plutôt au ralentissement de notre régime de vie. Il faut y ajouter la fatigue

passagère de mes Parents qui renoncèrent, pour l’instant, à la recherche d’une habitation citadine.

 

 

   Désormais, pour moi tout espoir était fermé. Le pas était franchi. L’année 1974 sera  plus nerveuse, sinon

plus dynamique. L’annonce du départ de Tuhault  mettra un peu de vent dans les voiles du « bateau ». Mais

chacun espérera le mener à sa guise ; et si j’ai bien compris, vers trois ports différents.

 

   Un déjeuner fumant.

 

   Au fur et à mesure que mes espoirs de vie parisienne s’envolaient, je m’étais persuadé de la difficulté (lire

:l’impossibilité) d’une installation durable à La Glazière. Il fallait recueillir l’avis du plus grand nombre d’amis

possible.

   Dès novembre, j’avais demandé à Chantal de Pange si une rencontre avec l’Abbé Jeantet aiderait le ménage

à trouver une solution acceptable pour tous. Malgré son état de santé bizarrement alarment ma Mère organisa

un déjeuner de rencontre. La Philosophie et la Théologie étaient bien présentes. Elles précédèrent de peu un

rendez-vous d’entretient plus « technique », pris entre nos trois  amis, pour qu’ils puissent discuter à l’aise du

problème qui avait été l’occasion de prise de contact.

 

   Chacun son tour. 

 

                   Les ennuis familiaux et domestiques avaient eu raison de la résistance de ma Mère. J’ai évoquer

plus haut, dès novembre, une baisse de son activité, et son désir de repos. L’aggravation de son état s’accompagna
à partir du 1er janvier d’une importante et régulière montée de fièvre. Elle commerçait

 vers 17 heures et retombait vers minuit..

         La Doctoresse Faine était perplexe. Mentalement elle avait posé son diagnostic ou tout au moins

ébauché un plan. Mais elle n’ignorait pas les difficultés qu’engendrerait la réalisation de l’ordonnance

donnée. Il ne s’agissait de rien de moins que d’envoyer ma Mère à Cochin afin d’y subir un examen

général et de savoir ainsi quelle était l’évolution de sa maladie.

 

   Mais ce faisant on laisserait mon Père pratiquement seul ;-privé de la présence de sa femme qui

était pour lui une présence aussi déterminante que déterminatrice dans ses décisions et quotidienne.

 

D’où ce dialogue plein d’humour :

 

-« Monsieur, avez-vous déjà vu un Médecin embarrassé ? »

-Non Docteur.

-Eh bien regardez-moi, Vous ne pouvez de vous occuper Martial et de la maison. Il faudrait pourtant que

Madame de  Maindreville aille faire un séjour de contrôle à Cochin. Il faut savoir d’où vient cette fièvre et comment la combattre…

   Ma Mère plaida pour je ne sais qu’elle solution d’attente,- dans l’attente d’un hypothétique miracle de la

chimie…

   Mon Père, lui, assura ces Dames que,  se sentent mieux, il pouvait se charger des tâches de Maîtresse de

maison et d’infirmier…..

     Or, à quelques jours de cela, une fausse manœuvre de mon fauteuil me fit  toucher terre, presque sur

la malle arrière de la voiture de Françoise Ahrenchiagues qui sortait d’une de ses bonnes visites. La craquelure

infligés au « vernis » de mon front nous fit nous retrouver dans le salon même de l’amie Faine1

 

 

Françoise, sa fille Aude, mon Père et moi. Au cours de ses travaux de surjet, Faine insista auprès de mon

Père pour qu’ait lieu le fameux contrôle médical.

 

 La solitude à deux était une expérience à tenter. Nous étions en fin janvier.

 


Premier séjour de ma Mère à Cochin
. (loin de ses hommes).

 

   De ce premier séjour de ma Mère à Cochin, peu de souvenirs me restent. Se déroulant en février, il fut certainement
éclairé pour nous par les passages de Chantal de Pange. Elle intensifia généreusement ses
visites.
Tant pour nous visiter que pour soutenir notre moral mais aussi servir de scribe à notre service ancillaire.

 

A ce sujet, je dois un grand merci posthume à Ghislaine Tuhault, - qui, malgré un sentiment violemment xénophobe,
accepta de donner le coup de main nécessaire pour que ces Messieurs ne meurent pas de faim..

Sans elle également, la « pharmacie » de Monsieur aurait été prise avec une fantaisie désastreuse..

C’est cette fantaisie qui régnera trois ou quatre ans plus tard. Ni Jeanne ni moi n’auront la douce autorité

qu’avait cette brave femme. Et grâce à cette régularité celui- ci fut assez bien pour m’emmener une fois à

Jouy et deux fois à Paris

 

   Les premières justifications fiscales de l’année commençant à peupler notre courrier, mon Père en prit

prétexte pour aller à Paris. Il voulait les soumettre à ma Mère sur son lit d’hôpital. Le hasard voulut qu’une

infirmière, probablement  chef de service entre pendant notre visite :

 

-« Alors nous avons des problèmes ?

Croyant qu’elle s’adressait à moi, je répondit

-« Nous en avons tous !

-C’est bien vrai, reprit-elle, sans doute un peu étonnée par la simplicité joyeuse de ma réponse…

 

  Huit jours plus tard, ce fut plus technique. La malade donna à ses hommes les premiers résultats des recherches
faites par un assistant du Professeur Menkès, qui répondait au nom printemps de Monsieur
l’Hirondelle.

 

    Bref la température avait fini par céder devant la « Dépénicilamine » et l’Hôpital pensait pouvoir nous rendre

sa locataire, moyennant une dose appropriée de ce nouveau médicament. Le seul inconvénient de cet

anti-inflammatoire était le filtrage des reins qu’il fallait surveiller de très près.

 

   C’est au cours de ces visites que ma Mère nous apprit la disparitions de tante Alice Germain-dite tante

Gudule-Sœur cadette de Grand ‘ Mère. Avec elle disparaissait la dernière personne que j’ai connue, de

La famille directe des Thiébaut.

C’était à la mi-février 1974.

 


Le Retour doublement  joyeux de ma Mère.

 

        L’ordonnance s’accompagnait d’une obligation de contrôle régulier, tous les six mois, de courte durée

et sans hospitalisation forcée. Tous les habitants de La Glazière allaient vivre pendant 12 ans, au rythme de

3 ou 4 visites par an à Cochin.

 

     Ce premier retour de ma Mère fut curieux. A peine les gens de l’ambulance Ferry – qui allaient au fil des

ans devenir des amis, avaient-ils déposé la malade dans son lit, que jaillit de la cuisine une furie,- réclamant

de la voix et du geste des vacances.

 

   Pour légitime qu’elle soit, après un an de présence et de travaille, cette revendication tombait mal. Mon Père

avait toujours mal accepté l’attelage bizarre que nous formions avec ces gens.  Il saisit au bond les mots fatidiques : 
vacances…   partir…L’homme pour une fois suivait la femme…Il  congédia les contestataires dans

lange non seulement  bien français, mais y ajoutant un geste de la jambe et du pied qui ne pouvait laisser aucune

illusions:

 

« -Vous voulez partir ? Eh bien foutez le camp » !

          

         Les rebelles refoulés dans leur domaine, Chantal de Pange fut mandée d’urgence. En bonne amie, elle

passa la fin de l’après-midi à tenter de raccommoder les choses. Mais elle se heurta à l’attitude évidemment

froissée des « injuriés ». Elle convint que leur manque de ressources les rendaient impropres à toutes espérance

d’amélioration. Ils alourdissaient même une vie qui n’avait pas besoin de cela.

 

           Elle passa le reste de la soirée, la tête dans les mains, à étudier les moyens légaux de rompre le contrat

de travaille sous lequel les Marocains se trouvaient encore. La joie de mon Père était telle que dès le début de ce

bachotage, la 2 CV tournait déjà au ralenti dans la cour.

               

           Somme toute c’est un homme heureux qui embarqua Minach et  Mohamed  Hablis dans sa voiture pour

les conduire à la gare de Melun. Pourquoi ne pas le dire ? Mon Père déjà âgé, avait eu peur1 de ce couple dont

la nationalité, la mentalité et surtout des Siècles-Lumière le séparaient..1

 

     En conclusion du sujet, on peut dire que cette déception fut l’une des premières fausses manœuvres qui

s’échelonneront tout au long de notre séjour, jusqu’à devenir des erreurs graves en 1980.

 

       Et je m’aperçois en écrivant2 d’un fait surprenant. De 1939, année de ma naissance à 1980 année de

sa mort, mon Père n’a jamais quitté la France, ni par conséquent franchi aucune frontière. Ce qui en cette

fin du Xxe siècle, limitait singulièrement expériences et contacts. Il est vrai qu’il ne parlait aucune langue

étrangère ;- mais excellemment le latin.

           .

  Une nouvelle fois, notre avenir était à Dieu ! Ce fut une nouvelle fois qu’il nous envoya Gislaine. Elle  prit

avec un certain dégoût la suite de « ces étrangers qui viennent prendre le pain des Français et qui finalement

ne savaient rien faire ».   

 

Les effets de la Dépénicillamine.

 

                La femme du Garde reprenant la queue des casseroles, nous pourrions sans influence étrangère

juger de l’effet produit sur ma Mère par la Dépénicillamine. Il faut bien en convenir, hélas, ce médicament

sans être catastrophique pour la malade, eut sur elle un effet médiocre,- l’affaiblissent au point d’en faire

une grabataire à peu près définitive.

 

     Ce palier franchi, 1974, me laisse un souvenir profitable à cause des entretiens qu’il permirent entre

Mère et Fils.

S’y ajouta aussi la petite activité qui m’était permise grâce à mon Père, car lui aussi il reprenait.
Dès janvier, avant l’absence de ma Mère, nous avions été Chantal, mon Père et moi, visiter un appartement bellifontain

place de Camp. Ce fut décisif ! La vue qu’on avait des fenêtres était à coup sûr très acceptable. Mais il y avait

l’odeur ! une odeur Sui generis qui vous prenait peut-être à la gorge, mais surtout au nez ! Cet appartement

avait le grand avantage d’être de plain-pied, mais ne possédait ni vide sanitaire ni moyen d’aération de la….

« salle du trône » ;-ce qui nous fit fuir, la main en pince à linge sur le nez et le petit doigt dressé. Cela mit un

point d’orgue à nos recherches.

 

   On nous signala alors une Résidence, du genre Hespérides.. Le même  trio y jeta effectivement un

regard poli, puis septique, puis enfin négatif. Et  La Glazière nous revit ce  soir-là revenir la tête vide

ou trop remplie de trop de choses.

 

   

Les Elections.

 

     La mort du Président Pompidou qui ouvre avant l’heure ce chapitre, vint interrompre nos recherches ;

aux alentours du 15 mars. Si mon Père avait philosophiquement enregistrer cet événement   national, il

s’alarma fort en observant la course au poteau dont l’élection était l’occasion.

De tous les outsiders que la Télévision nous fit connaître, nous ne garderons en mémoire que trois ou

quatre. 

 

    Jacques Chaban-Delmas, évident continuateur du Gaullisme le plus pur et chef d’un des deux  Ministères

qui se succédèrent  sous le règne défunt.. C’est d’ailleurs à ce titre qu’il briguait les suffrages, en héritier d’un

passé récent.

    Les Electeurs virent aussi avec stupeur paraître une grande fille, forte en Geule, sans fard ni maquillage,

une vraie plante sauvage, Arlette Laguiller, du Mouvement  Lutte Ouvrière.

     Puis ce fut un Monsieur X, leader des Verts à cette époque, qui termina sa prestation en buvant un grand

verre d’eau à la santé des caméras.

    Messieurs Giscard d’Estaing et Mitterrand émergèrent seuls de ce tourbillon du premier tour des élections.

Et comment oublier parmi les heures de cette quinzaine, le pudique et austère Jean Royer, Maire de Tours.

Il fit rire plutôt qu’il n’intéressa. Une électrice donna un peu de piquant à l’une de ses réunions électorales en

jaillissant devant lui les seins nus….  

Ce fut une récréation. Ce défilé nous fit sourire. Mais ce fut une autre paire de manches lorsque restèrent en

tête à tête Giscard d’Estaing et Mitterrand ! De crainte, mon Père en perdit le sommeil. Il savait notre cousin

Jean Arhenchiagues fort averti, étant haut fonctionnaire dans les Ponts et Chaussées. Aussi demandait-il

sans cesse à sa femme Françoise :

 

-« Que dit Jean ? Que va faire Jean ? en cas de victoire de la Gauche ?… » 

 

Elle lui répondait paisiblement, mais un peu embarrassée tout de même :

                               

-« Eh bien mon Oncle, Jean dit ceci.. Il votera comme cela.. Comme la plupart des gens de nos milieux… »

Nous nous y mimes tous, pour apaiser ce vieux Monsieur dans ses angoisses.

La veille même du scrutin, il confia à Sonia venu lui présenter son premier bébé :

 

--« J’ai confiance dans le peuple français. Je ne crois pas les français assez bêtes pour se laisser gouverner

par un homme comme Mitterrand ».

Et cette conviction purement théorique l’apaisa. Le lendemain lui donna raison en politique ;- pour la

dernière fois de sa vie. Si le Bon Dieu n’y avait mis ordre, je crois bien que mon cher Père serait mort

de chagrin 6 mois après les Elections de 1981.

 

 
Donnez-nous notre vie quotidienne.  

 

            Rien d’étonnant à ce que dans le brouhaha, National et International1, l’écho de la mort de

Jean Daté ne nous soit que faiblement parvenu. Frappé en juillet 1970 par une congestion cérébrale

il survivait depuis cette date ; à peine intéressé par les exploits des cosmonautes américains dont l’odyssée

faisaient les choux gras des Télévisions universelles. Il fallait éviter à mon Père toute émotion. Il fit pourtant

l’effort d’assister à l’enterrement.. Mais il ne parla plus – ou alors très peu – de l’ami disparu.(Avril 1974)2.

  

    Au calendrier de cette fin de juin, il faut noter la visite presque surprise, de l’Oncle Henri de Dreuzy ;- parent

des Maindreville et des cousins- germain de mon Père. Il était brancardier à Lourdes depuis 1945. il y était, je

crois, le père de beaucoup d’innovations dans l’accueil et le confort des malades.

 

Ma Mère parlant avec lui de l’état précaire de mon Père, il lui répondit :

-Oui, la dépression évidemment ça existe. Mais voyez-vous, Jeannine, l’important c’est d’en sortir à  chaque

fois un peu plus haut.

Oncle Henri était un grand chrétien….

La conversation fut interrompue par l’arrivée de Chantal de Pange que nous avions priée à dîner.
Elle était enchantée de le partager avec ce Colonel de Dreuzy dont elle avait tant entendu parler par sa famille, à cause

des Pèlerinages à Lourdes qu’il facilitait

 

Après une nuit et une matinée passés à la Glazière, le Colonel de Dreuzy nous quitta pour rejoindre la Sarthe.

Il devait y assister au mariage d’un de ses jeunes officiers pendant la guerre. En le voyant s’éloigner, je ne me

doutais pas qu’il nous avait fait là ses adieux. Il mourut en effet en juillet 1975, dans son château de Louvrinière,

près d’Angers ;-non sans être allé une fois encore à Lourdes,  mais du côté des malades car il souffrait d’une

tumeur au cerveau, qui fut assez rapide. Il était passé à La Glazière entre les 27 et  28 juin 1974.

 

 

     Mon Père reste le dernier homme Maindreville.    

 

          

   La mort allait de nouveau frapper à notre porte, nous blessant  dans plus vive affection. Le mardi 2  juillet, le téléphone sonna.
La nouvelle qu’il nous apporta valait la peine que mon Père se
leva de son fauteuil. Son frère aîné André, venait de mourir,
dans son sommeil, dans la nuit du 1er au 2
juillet.  La date choisie, hélas, par les Pompes Funèbres, huit jours plus tard,
exactement , laissa  tout le
temps à  mon Père pour se vêtir de sombre.

  Il était impensable, pour ma Mère et pour moi, de nous joindre à l’enterrement. Il fallait donc organiser

cette triste journée pour ceux qui restaient. Mon Père  m’habilla et m’assit vers les Sept heures,
dans le vieux fauteuil roulant vert que l’on devait pousser. Puis il m’installa devant la cheminé du salon, à l’endroit même où

l’Abbé Jeantet nous disait le plus souvent la messe, - à gauche du lit de ma Mère.

Et, il n’y eut plus pour moi qu’à attendre l’heure du déjeuner. La chaleur  saisonnière était vive. Je n’eus,

heureusement pas besoin de soins autres que ceux du repas.

 

   Le soir venu, nous retrouvions le dernier des frères Maindreville ; heureux d’avoir pu soutenir sa Belle-Sœur

Gisèle et d’avoir participé à ce qui me semble avoir été sa dernière grande réunion de la Famille Maindreville.

Une autre manifestation aura lieu ; elle sera pour ses propres obsèques, et celle-ci servira pour ma Mère à son

Adieux final à sa Belle-Famille.

 

   Vous ne savez ni le jour ni l’heure.

 

              Une petite histoire qui fait penser.

 

Un de mes cousins Maindreville avait demandé à Oncle André de rédiger quelques souvenirs de famille, et

de la jeunesse que mes Oncles et mon Père avaient passée à Antilly, dans l’Oise. L’affaire traîna, et le dernier

point fut posé quelques heures avant la fin de juin.

 

   Mon Oncle en réserva un exemplaire pour mon Père. Il le plaça dans un certain endroit, tout emballé et timbré

comme il se devait. Mais l’heure étant tardive, il remit à une promenade ultérieure le moment de le poster et il

s’endormit, sûr de faire plaisir.. On sait ce qui advint….Mon Père trouva donc l’exemplaire qui lui était destiné

en raccompagnant Tante Gisèle, sa Belle-Sœur, jusque chez elle, exactement à l’endroit où mon Oncle l’avait

déposé quelques jours avant.

 

    Comme quoi, il ne faut jamais remettre au lendemain,  Car « Vous ne savez ni le jour ni l’heure que le Père

a fixés dans sa liberté souveraine ».  


  
Août –subreptice veillée d’armes

. 

                Laissons passer l’interminable et traditionnel mois d’août ; et les Aoûtiens s’écouler sur les routes

comme un long fleuve régulier. Il nous faudra attendre septembre pour enregistrer une arrivée nouvelle, celle

de Nicole Arnouat, (spécialiste départementale de l’A.P F.) et craindre un départ, celui du ménage Tuhault.

Il était encore lointain dans le temps, croyons nous, mais il était certain et inéluctable.

 Par des voisins1  malheureusement éloignés, nous avions pu entrer en relation avec Maria von Weichs      

 Jeune et charmante Allemande qui avait promis de passer quelques jours auprès de nous.

                              

   Tout le monde voulut connaître la jeune étrangère que Martial avait auprès de lui. A cet effet un

pic-nick  fut organisé à La Glazière. Ne pouvant se rendre libre ce jour-là ; Madame Roux,( à peu

près contemporaine de ma Mère,) et charmante voisine donna, un certain vendredi un goûter très

B.C.B.G. qui manquait peut-être un peu de jeunesse, mais offert avec tant de cœur à notre Maria !

Les « jeunes gens » y étaient presque octogénaire….L’âge de la maîtresse de maison.

 

    Or, pendant que nous avions la bouche en « chemin d’œuf », ma Mère qui comme d’habitude, hélas,

était restée à la maison rempotait des fleurs avec le Garde, eut une intéressante conversation.

Elle s’enquerrait de la santé de Ghislaine dont le cancer (osseux), s’était semble-t-il endormi. Tuhault

lui dit :

 

-En parlant de ça, Madame, j’ai quelque chose à vous demander. Je vais avoir 65 ans1. J’aimerais quitter

La Glazière et prendre ma retraite à partir du 1er avril prochain. N’en dites rien à Monsieur de Maindreville

pour ne pas l’affoler, mais je le dis à vous. Ghislaine et moi, on ne s’ennuie pas avec vous, mais on aimeras

se reposer.

 

     Tout en admettant le bien-fondé de cette demande, ma Mère dut avoir  des regrets ou répéter des vœux
de bonne chance qu’elle avait exprimés peu avant… Pour elle, ce départ était la première lézarde dans l’édifice de

tranquillité qu’elle s’était bâti.

Or, le lendemain, avait lieu notre réception. Ma Mère en assuma silencieusement les devoirs, elle le fit sans rien

laisser paraître. Le seul indice qui aurait pu attirer l’attention ; ce fut une crise de foie, dont elle prit prétexte pour

ne pas se lever de la journée.

 

  Dans mon souvenir, ce samedi de septembre reste gris et venté. Le vent rageait de partout et rabattait vers le

salon-chambre de ma Mère tous ceux qui auraient pu avoir quelque velléité de promenade. En tout cas,
quoi qu’elle ait été, cette journée fut un excellent galop d’essai pour les éventuelles réunions à venir.

 

   Deux jours plus tard, Chantal de Pange, vint tirer les  conclusions de cette heureuse journée. Pendant la

conversation l’attention de ma Mère, visiblement s’éclipsa à tel point que mon Père, habitué aux malaises

de sa femme demanda :                                                                                                                                         

 

-« Mais enfin Jeannine, qui a-t’il vous ne semblez pas bien. Voulez-vous que Madame de Pange et Martial sortent avez-vous besoin de moi » ?

Ma Mère commença par répondre qu’il n’y avait rien d’urgent.

Puis,  profitant de ce que nous étions tous quatre, elle se défit par bribe du secret dont elle était chargée depuis

le dernier week-end. 

En fait, si mes souvenirs sont bons, son attitude et ses réponses étaient si bizarres  que nous dûmes la

questionner longuement. Enfin voyant que ses altermoiments agaçaient mon Père plus qu’ils ne le rassuraient

 elle finit par avouer :

 

-« Eh bien oui ! Tuhault m’a demandé l’autre jour à prendre sa retraite à partir du 1er avril… »

 

Personnellement, je me tournai d’un bloc vers Chantal et ne pu retenir le mot d’un général d’Empire

à la toute dernière minute de celui-ci. Je n’avait jamais imaginer La Glazière, sans Tuhault.

De même que la vie à La Glazière me paraissait inenvisageable. C’est la raison de ma réaction

Injurieuse et vulgaire.

 

   Tout de suite mon Père se catastropha !

 

-« Qu’est qu’on va faire ? Qu’allons-nous devenir » ?

 

    Chantal de Pange, convint que c’était là un tournant important dans notre vie et dans celle de La Glazière.

Il n’y avait donc plus de temps à perdre pour prendre la décision à laquelle nous nous préparions depuis un an.1

 

  L’automne, sur ce point n’apporta pas grande nouveauté.

 

     Il y eut pourtant une récréation. Astrid de Pange,(Fille aînée de Charles et Chantal de Pange).
Se fit organisatrice d’un Rallye-Valse dont l’organisation,  la mise en train – et plus tard le  souvenir occuperont

ce dernier trimestre. Ce fut une réunion élégante d’amis. Je pus y remarquer quelques figures familiales

venues voir ce que devenaient les « prisonniers » de la Brie. Je fus ainsi mêlés à la jeunesse qui entre

les années 70 et 80, déambulaient sur les trottoirs de Paris.

 

      Conclusion de 1974. 

 

         Ainsi s’achevait, ou presque, 1974 : la première des deux années qui forment, dans mon souvenir

le diptyque relativement le plus heureux de cette période.

 

Si politiquement et historiquement l’année fut troublée, sur le plan du trio elle ne me laisse qu’un souvenir

neutre. (Pourtant la nuit même où le Chef de l’Etat nous quittait un enfant naissait dans notre famille :

Chantal de Saint Remy, donnait le jour à son fils aîné, Théodore qui se trouve être à notre époque

un très brillants joueur de « Ruby ». Ainsi qu’un charmant neveu et un aide précieux.).

 

   Il y eut le demi succès de la Dépénicilamine, qui fut interrompue dès le contrôle qui suivit l’ouverture

du traitement. Et même je vis dans le départ de Tuhault, un éléments positif à nos malheurs. Il mettra

un terme à nos incertitudes dans le choix à faire entre deux solutions un moment envisagées : Ou

l’installation d’un nouveau gardien ou une solution citadine.(Que j’espérais toujours…).

 


 

1 Pinsounda. (Crimée).

2 Il était courant maintenant de voir le Conseille des Ministres, reporté à une date non précisée.

1 Son cabinet de consultation étant placé en haut d’un escalier, difficile à grimper pour mon Père chargé de son fils.

 

1 Je crois me souvenir que mon Père l’avoua à ma Mère au cour d’un entretien général sur ces deux mois (janvier et février).Entretient qu’il eurent à mi-voix après le dîné de ce même soir.

 

2 Les premières lignes de ces « mémoires » furent rédigés entre 1990 et 1994.

1 L’Europe en effet enregistrait des de nouveaux craquements :En Allemagne, Willy Brandt, se voyait trahie par son un membre de sa Garde rapproché. Ce qui l’obligea à quitter ses fonctions de Chancelier de l’Allemagne fédérale. Au Portugal, le Pays connaissait la (révolution des œillets plus centré à gauche que précédemment

. 

2 Mon Père ne me fit jamais ses confidences la dessus. Le souvenir de Jean Daté devait évoquer pour mes Parents les tristes années agricoles. Il y eut peut-être une consigne de silence. Ma Mère elle-même « noya

le poisson ».

.

1 Une chose est sûr il était de 1909. Il avait entre 59, et 60 ans quand Grand’Mère est morte. Je ne l’ai pas vu

vieillir .

1 A mon avis ce fut là l’Erreur de nos conseillés d’octobre 1972.Eux, comme nous, nous nous sommes endormis

« sur l’épaule » du Garde. Nous abandonnant certainement trop à sa rassurante présence. Le réveille fut brutal.

Ce départ, bien que correctement annoncer, hâta nos recherches d’une manière excessive. Cette véritable panique

Nous conduisis à une solution qui s’averra longue, coûteuse et finalement totalement inefficace.  

 

Mes Avertissements Tu retiendras....