CHAPITRE XXII

DEUX IMPERIEUX RAPPELLES

1975



                Avec cette année s’ouvre le second volet du diptyque que nous avions annoncé. Pourquoi un pareil

Titre ? Parce que le départ en retraite de notre Doctoresse Faine annoncé pour la fin  de 1975, viendra nous

donner – à mon avis – l’invitation à changer activement nos plans de séjour. Faute de quoi, loin de tout secours

un accroc de santé, même bénin, tournerait peut-être à l’aventure la plus folle.

 

   Le troisième zona.

 

        1975 commença mal. Un troisième zona s’installa, - aux alentours de l’œil droit. Il inquiéia ma Mère. Une

conversation trop brutale en fut peut-être la cause.

 

  Voici comment la chose se passa. Depuis la nationalisation du Canal de Suez par Nasser,- en été 1956-

nous avions neutralisé la cheminée qui chauffait les deux grandes pièces carrelées, et nous pourvu cette

cheminé d’un poêle à bois. Il fallait naturellement le charger, et en assurer la réserve en rentrant du bois.

Chacun des membres de notre entourage s’était plié à cette discipline d’hiver.

Après le tumultueux départ des Marocains, Tuhault avait repris le flambeau. En fin janvier 75, au hasard

d’un entretient, il avait déclaré, devant mes Parents, qu’avant de partir, il surchargerait l’âtre afin que nous

puissions résister le plus longtemps possible sans demander une aide extérieur.      

 

-« Pourquoi avant de partir, Tuhault, s’étonna ma Mère ? »

 

-« Mais Madame, je vous l’ai dit au mois de septembre, Ghislaine et moi on voudrait quitter La Glazière

le 1er avril ».

 

  Un Ah quelque peu déçu sortit de la bouche de ma Mère. En fait, le silence qui avait suivi la première

déclaration du Garde, avait sûrement endormi sa perception de l’échéance qui approchait. Et j’ignore encore

aujourd’hui ce qui a bien provoquer cet engourdissement intellectuel chez une personne habituellement si

prévoyante et nerveusement inquiète.1

 

  Nous étions trois habitants de la Grande Maison, à nous poser des questions sur les raisons qui  conduisaient

Tuhault à nous quitter. Il l’a toujours entouré d’un grand mystère. Et je crois pouvoir dire aujourd’hui, qu’une

situation de famille nouvellement apparue l’obligea à ce brusque éloignement dont il ne nous avait jamais

parlé lors de notre installations en octobre 72 et moins encore au moment des grandes décisions qui suivirent

la mort de Grand ‘ Mère en 1969. J’ajouterai à tout ce qui vient d’être dit que l’état de mes parents et particulièrement, celui de mon Père, effrayât ce ménage de gens calme. Il préféra se dégager d’une

situation aux signes précurseurs aventureux, auxquels rien ne l’avait préparé.

  

   Quoi qu’il en soit, le tourment bien vif, lâcha la bonde. Ce qui se traduisit par ce zona si près de l’œil…Il fut

moins douloureux que prévu et plus rapidement circonscrit. Ce mal survenu pour la troisième fois, tombait cette

fois-ci sur un terrains déjà accoutumé par 30 ans d’immunisation, et devenu sans doute rebelle. Grâce aux acquisitions nouvelles de l’art médical, la Doctoresse conclut à une manifestation nerveuse. La convalescence

fut rapide et ma Mère en profita pour faire avec moi l’analyse de ce nouvel ennui :

 

-« Dans le fond ses trois zonas correspondent  chez moi à des périodes de plus grande nervosité, qui allait jusqu’à l’effroi. Il y eut d’abord l’examen du Conservatoire en 1918. Le second survint en 1956 quand je me

suis aperçue de la fatigue de la ferme, pour votre Papa. Peut-être avait-je fait une erreur en le jetant dans

une voie qui n’était pas la sienne. Pourtant, il nous fallait bien vivre, nous aussi, et toute autre situation nous

étant fermé…Et maintenant, il y a Tuhault, et la solitude dans laquelle il nous laisse… »

(Et pourtant ma Mère finit par s’y adapter).

Elle termina l’entretien en exprimant une quasi-certitude :

 

…  « Ne vous en faite pas bonhomme, étant donné l’âge que j’ai, ce zona est probablement le dernier que

j’aurai. »

 

   Le Garde avait observé le nouvel accroc de Madame de Maindreville, mais sans en comprendre

tout à fait les raisons.  Cependant, il devait toucher du doigt les conséquences de sa décision. Elles

le rendirent de plus en plus soucieux.

 

   L’annonce de son départ lui avait fait perdre une grande partie de sa popularité aux Ecrennes. On

y connaissait nos problèmes ; et on avait conçu une vive animosité pour ce « lâcheur » qui abandonnait

son ancien maire et sa famille dans un pareil embarras. Depuis que sa décision était connue, il arrivait

à Tuhault de se faire dire ironiquement :

 

     -« Alors, Tuhault ! on abandonne deux vieillards et un paralysé ! Compliments Tuhault ! jolie mentalité » !

 

  Le malheureux avait beau dire qu’il était fatigué,- qu’il reviendrait nous voir. Rien n’y fit. – A tel point qu’il fut

obligé de faire son déménagement, - qui demanda plusieurs voyage, - entre chien et loup, dans la pré-soirée,

ou même après le dîner, pour sûr de rencontrer le moins de gens possible.

    L’accompagnateur.

 

     Cette fois, c’était bien clair : le 1er avril nous serions seuls à La Glazière. Ma Mère, tout à fait remise

de son zona, ne se berçait plus d’illusions.

         

  Tuhault, peut-être un peu contrit d’avoir avivé une plaie, apporta une solution. Tout le monde la pensait

momentanée, et permettant de « tenir »quelque temps.

  

   L’idée du vieux serviteur était la suivante : il fallait retirer la chasse à ses locataires actuels et la relouer

à un des ses amis, Daniel Hardieiller, un nostalgique du grand air et fanatique du fusil. Il serait susceptible

de créer une petite Société de Chasse avec quelques collègues de la « Coopérative Pharmaceutique de

Melun.

 

   Effectivement, Tuhault nous présentait quelques jours après Daniel Hardieiller. Celui-ci devait accompagner

chacun de nous de 1975 jusque que bien loin après les limites de ce récit.1 Il eut la gentillesse de m’entourer

jusqu’en 2002, date de notre dernière rencontre.

    L’annonce faite à Jeannine. 

 

       J’avais de plus en plus hâte de voir trouver une solution à notre problème de logement, satisfaisante, confortable et surtout définitive. Les témoins de l’époque pourront le dire. Mes parents (et ma Mère) en

particulier avaient l’habitude de suivre la Presse de Monsieur Hersant,- à travers Le Figaro. Naturellement

elle interrompait cette occupation pour donner les directives au bon déroulement de la journée.

 

 

      Ce jour-là, elle jeta les yeux sur la page des Petites Annonces, et en releva une qui indiquait un terrain

prêt à bâtir, situé entre la Rue Royale et le Boulevard Maginot à Fontainebleau. Peut-être y avait-il là une

solution à nos rêves d’installation qu’il fallait bien résoudre de quelque façon que ce soit. Et cela, avant le

départ de Tuhault, qui allait nous exposer sans défense à toutes les visites, et peut-être aux « emprunts »

les moins autorisés. Par ailleurs Fontainebleau était en tout temps plein de gens charmants à rencontrer.

Ma Mère se laissa prendre au piège des nombreuses relations que nous y avions à cette époque.

 

 Elle découpa donc l’annonce et l’envoya au Cabinet  Cochelin de nous faire conclure l’affaire. Cette heureuse

fin nous avait amener au mois de juillet. Pendant la période d’incertitude tous les amis se transportèrent

Boulevard Maginot. Ma Mère profita elle-même de l’un de ses aller-retours pour jeter un regard sur l’objet

de notre convoitise. Je fus le seul à ne pas l’apercevoir. Les initiés aux suites de l’affaire goûterons l’ironie

de la situation.       

 

Pour  « prendre congé de La Glazière ».                                                                                                                                      

 

   Laissons ce terrain entrer dans notre Histoire et s’y fixer pour un temps imprévisible. Pour l’heure, il

fallait pour les habitants de La Glazière assurer le presque immédiat mois de mai.

 

   A notre tour nous lançâmes des annonces afin de trouver des gardiens. Un seul ménage mérita qu’on

présenta les lieux. La jeune femme, brune, en manteau vert foncé, à la jupe élégamment coupée à hauteur

de genoux, posa des conditions qui méritaient réflexion de la part de son éventuel employeur.

   Peut-être cette jeune femme était-elle un peu trop « Parisienne » aux yeux de ma Mère…2

   D’autre part nous ne pûmes lui cacher nos projets futurs. Comme on l’a compris, cette piste ne donna rien.

Devant cette unique déception, ma Mère n’insista pas et s’en remit au sort. (Ce qui devint chez elle un habitude

dont elle usa par la suite trop fréquemment hélas ) !

 

                Se rappelant la curiosité de mon Père pour tous les matériels moderne, elle se résolut à acheter une

machine à laver la vaisselle. Son époux l’aurait fait fonctionner. On demanda donc conseil à Claude Boussicot

plombier agréé,- au moins chez nous. Il conseilla la marque «  Miehle », dont il était sans doute le dépositaire…

Hélas ! mon Père n’intégra jamais,-je dis bien jamais les mystères du fonctionnement de cette machine.

Les jeunes cuisinières forcées qui nous entouraient, s’ingénièrent (et même s’amusèrent) à lui inculquer les

notions élémentaires d’électro mécanique. Deux ingénieurs même s’en mêlèrent ;-chacun maître en son art

(Agro et Ponts). Rien n’y fit ! Avec la plus exquise courtoisie et manifestant sa joie d’avoir percé le mystère

mal éclairci par le prédécesseur, mon Père resta dans l’obscurité et l’incertitude…. ( Il faut dire, en toute justice

qu’il était dur d’oreille et le cachait par de bons sourires)….

  Toujours est-il que très conscient de ses inaptitudes devant les inventions modernes mon Père prit le parti

de faire faire notre vaisselle courante par les personnes dont ma Mère s’entoura immédiatement après le

départ des Tuhault. Ce premier échec mental ne nous fit pas rire, ni ma Mère ni moi. Peut-être était-ce un

simple signe de lassitude ? Peut-être la preuve que pour certaines choses, le cher Oncle François laisserait

partir de plus jeunes vers les autres aventures de la vie,-restant quand à lui sur la rive de son âge et de son

époque.

 

    Le fatal 1er avril était bien arrivé et les Tuhault partis. Je me rappelle avoir réagi aux premiers jours de

solitude par une réaction négative ;-quasi mécanique. Chantal de Pange se souviendra sans doute de nos

entretiens de Mimouche durant l’hiver. Ils n’avaient que deux sujets : l’état de mon Père et cette bizarre défection

que personne n’expliquait.

 

   Par le système du bouche à oreille, ma Mère réussit à avoir des remplaçantes. Parmi elle, il y eut une Hortense

elle mesurait 1 m 70 et quelques bons autres en circonférence ; elle était Guadeloupéenne. Puis se succédèrent

pendant l’été deux Marie puis ce fut une Olga, dont le ménage trouvait les bouteilles bien lisses à  caresser et bien difficiles à reposer.

       

   Ces passagères permirent quand même à ma Mère de lancer des invitations pour un pique-nique prévu à

la mi septembre. Il devait à la fois fêter l’achat du terrain et célébrer nos adieux à la propriété. La maîtresse de

maison et ses deux hommes croyaient au déroulement sans problème des évènements qui devaient suivre notre

acquisition.    

On escomptait une construction rapide, suivie d’une installation dans des délais pas trop éloignés…………

 

  Quel fut la suite de ces rêves… Cette avant dernière réunion de l’année reste pour moi un centre, sinon le centre de ces  trois années dont j’ai dit la relative légèreté.

 

    Cela était dû sans doute aux dernières forces morales que mes deux Parents réunis pouvaient jeter dans

la bataille. L’optimisme nous entouraient, ainsi que les projet.s. Pourtant l’un et l’autre avaient 74 ans. J’ai

mes photos un instant de cette journée ; Oncle Jacques de Dreuzy,(ou plutôt son crane), le propriétaire servent

l’apéritif devant cette maison dont il devait régler quelques années plus tard1.. en mon nom.. quand je serai seul.         

  

La Glazière sans Faine ! Etait-ce possible ? J’ose répondre, Non !

 

       J’ai évoqué l’optimisme et l’euphorie dans lesquelles nous baignons au cours de cette réunion. Un point

noir pourtant l’assombrissait. Quelques mois avant c’est à dire au printemps 75, la Doctoresse nous avait avertis

que pour de terribles raisons familiales elle quitterait son beau métier à la fin de l’année. Mes deux compagnons

avaient dû sourire, en pensant que l’amitié qu’elle nous avait toujours manifestée lui ferait prolonger sa présence

à nos côtés, le temps voulu, avant le déménagement qui était maintenant en vue.

 

   Un autre froncement de sourcils du sort devait terminer ce Pique-nique. Un des invités avait donné à ma Mère

un avis défavorable sur l’architecte avec lequel nous avions déjà pris contact. Cela avait jeter une pierre dans l’eau tranquille de notre joie.

 

   Ma Mère n’était pas femme à s’embarrasser de scrupules, puisqu’un lui avait présenter l’envers de la

médaille, elle se déferait tout bonnement de l’endroit. Et ceci d’autant plus facilement qu’elle ne se sentait

pas une affinité très grande avec Monsieur l’architecte. Peut-être fut-ce dommage, car de tous les avant-projets

qui nous furent soumis, c’est le sien qui me parut le plus clair et le plus réalisable.

   Deux concepteurs remplacèrent l’éliminé. Leurs dessins tenaient plus du Prix de Rome (section dessein) ;                                                  

  que du plan scientifiquement pensé. Là non plus on ne donna pas suite.

 

Pendant ce temps, des impossibilités matérielles ou des erreurs de rédaction dans l’acte d’achat nous étaient

signalés. Tout semblait pourtant normal à la lecture dans l’acte d’entrée en possession. Nous connaissions bien

la rapidité en affaire de Cochelin. Peut-être y était-elle pour quelque chose.

    

Toujours est-il qu’ayant un entretiens avec ma Mère,(justement le 30 juin )1975, il avait décrété :

 

-« Madame, je veux vous voir installés à Fontainebleau d’ici un an… »

 

Mais il avait à prendre cet engagement trois ou quatre bonnes raisons.    

 

1° Il se savait – ou se croyait – atteint d’un mal qui pouvaient restreindre son activité.

 

2° Comme tout notre entourage, il ne pouvait qu’être effrayé de la précarité de notre installation, et surtout

de notre isolement.

 

3° Il avait peut-être une revanche à prendre. La dernière affaire qu’il nous avait proposée, rue du Docteur

     Lancereau, s’était terminée par la revente de l’appartement qu’il nous avait conseillé et que nous avions

     acheté par son entremise. Pour lui c’était un échec.

 

4° Enfin, pour être plus sûr d’emporter l’affaire de Fontainebleau, n’avait-il pas, dans les deux heures qui

     avait précédé, promis aux Allemands, ( déjà propriétaire de la ferme ), une préemption sur le Pavillon1                

      si nos voisins Germaniques voulaient bien se charger des plus gros travaux de cette chimérique villa…

 

   C’est sans doute pour cet ensemble de raisons qu’il n’accorda qu’un léger et superficiel regard sur l’acte

de vente passé à Milly la Foret devant le Notaire de Madame Rainaud la venderesse.

 

 Il est possible que malgré son grand sens des affaires il ait été battu sur son propre terrain ;- tant il était

 soucieux de réussir sa dernière affaire avec les Maindreville.

Nul ne saura jamais où avait gîté le Lièvre.

   On demande architecte.

 

    Il fallut bien se mettre en chasse pour trouver un, ou des remplaçants à ceux que nous avions

écarté ! Les recherches commencèrent donc.

    Nos relations avec le milieux des architectes modernes et officiels n’étaient pas infinies. Elles

s’épuisèrent vite. Un ménage ami, Pierre et Madeleine de Chvront-Vilette relevèrent le flambeau.

Pierre ébaucha donc des plans, d’après les directives de ma Mère, - encore mieux adaptés à ses

désirs puisqu’elle y présida.

    Les valses de l’automne.

      

       Afin de nous sortir de nos plans, de leurs droites et de leurs courbes Melles Astrid de Pange et

Aliette de Fromantel décidèrent de griser Martial, - sur un air de valse. (Cette idée leur était venue

pendant le fameux pique-nique de septembre). Ces valses tourbillonnèrent durant la nuit du 15 au

16 novembre.

 

D’Espagne, nous parvenait déjà les échos encore feutrés d’une marche Funèbre autrement sinistre.

Celle qu’entreprenait Fransisco Franco, pour aboutir à la mort. Cela devait durer quatre semaine et

conduire l’Europe, renseignée par les médias, jusqu’au dégoût et peut-être à la pitié.

 

    Cependant, l’horloge du Temps tournait…

 

    La fracture « irréductible. »

 

       Un matin de décembre, le 15, exactement, le téléphone retentit. C’était le Docteur Faine qui

appelait . Ce n’était pas coutumier de sa part. Elle voulait nous faire ses adieux et nous remettre

des papiers qu’elle détenait encore. Elle arriva vers 11 heures. Encore allongé, je me fit lever pour

être présent aux côtés de mes Parents à moments importants. Après une conversation générale, la

question qui nous brûlait les lèvres à tous trois sortit de la bouche de ma Mère :

 

-« Mais, Docteur, qu’allons-nous devenir sans Vous » ?

 

-« J’espère que vous y survivrez, Madame, répondit-elle il faut laisser la place aux jeunes n’est-ce pas.

Il vient paraît-il, de s’installer au Châtelet un jeune Médecin, mais je ne connais pas ».  

 

 Puis elle enchaîna en se levant :

 

 -« Bien ! pour parler plus sérieusement, il faut absolument que vous vous installiez au plus vite à Fontainebleau…

vous ne pouvez pas rester ici indéfiniment. Il fait trop froid, ce n’est pas bon pour votre Polyarthrite, ni pour

vos hommes d’ailleurs »  

 

Sur quoi, elle nous embrassa tous les trois. Elle nous avait si souvent tirer d’affaire ! Et passa une dernière

fois la porte, accompagnée par mon Père.     

   C’est je crois, du départ de la Doctoresse, que datent les accompagnements très prolongés aux

voitures. Je sais maintenant, que mon Père s’y laissait aller à un abîme d’effroi devant l’avenir qu’il

redoutait pour moi. Oui, les sept dernières années (de sa vie ) qu’il passa à La Glazière, peuvent

mérité le nom de :Temps de l’Epouvante.

 

  Françoise Arhanchiagues de passage ce même après-midi, eut devant moi seul, la même interrogation

que ma Mère :

 

-« qu’allez-vous devenir sans Madame Faine » ? 

 

Je répondis que c’était là une raison supplémentaire de presser le mouvement . Il fallait à nos habitués une

affectueuse patience pour donner à mon Père une vue optimiste des choses. Quand à Faine j’ai dit que célibataire elle avait adopté deux frères sinistrés du bombardement de Nantes, puis une petite fille que

ses visites lui avait fait rencontrer. C’est un accident survenu à la femme d’un des deux garçons qui lui

fit abandonner la Médecine en 1975.

 

     Je vis dans cette séparation, comme un second et impérieux rappel de la Providence, nous invitant à

régler notre situation tant qu’il en était temps encore. Les échos d’un troisième rappel nous  parviendront

peut-être en 1980…Mais il sera trop tard. L’attention de ma Mère se sera émoussée elle n’entendit pas.

                 On dit que l’Histoire repasse rarement les plats ;-elle le fit pourtant pour nous. Mais nous les

négligeâmes. Nous le payâmes chèrement.

 

    Dès l’année suivante, et malgré une atmosphère allègre, nous verrons apparaître ça et là quelques buissons

  Moins vert et plus hostiles plus fournis en épines. Autant de signes annonciateurs d’une foret.  La foret des               soins lourds et de plus en plus importants. Ils seront donc de plus en plus absorbants moralement. 

 


1 A presque 30 ans de distance j’en distingue pourtant deux :l’effet secondaire des médicaments très

puissant qui lui était ordonné pour combattre sa Polyarthrite . Deuxièmement sa solitude, éloignée de tout

secours ou conseilles familiales commençait peut-être, sans qu’elle se l’avoue, à lui peser ? 

                                                                                                  

1 A la date de ce 1er rendez-vous, fin Février 75, nous étions sept dans la chambre-salon de ma Mère :Trois

Maindreville, Trois Tuhault, car la Belle-Mère du Garde s’était joint au ménage. Dès 1990,(1ere rédaction

de ces Souvenirs), nous n’étions plus que deux, Hardieiller et moi à pouvoir évoquer ce mois de Février-là..

 

2 Qui prit bien garde de ne pas « affoler » le « Dauphin ».

1 Très exactement 12 ans plus tard.

1 Préemption proposé à Monsieur Bédossa, représentant général pour la France, de cette firme Allemande.


On demade Architecte..d'Urgence !!